samedi, 01 juillet 2017
Sapristi !
Toi, flagorneuse éprise d'un garçon maussade, aux yeux lugubres, au coeur pentu comme un glacis, tu fourbis tes charmes pingres, par les soirs vétustes, quand les heures tombent en ruines dans la démangeaison du temps gercé.
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vendredi, 30 juin 2017
Dans la chambrée
(Tu disais des poèmes aux quatre saisons. J'ai pris ta suite. Il y eut le poème de l'hiver 2017. Il y eut le poème du printemps 2017. Voici celui de l'été 2017).
Un salve regina coule dans la chambrée.
Le soleil catapulte la pierre blanche.
Dans les embrasures, les pigeons bâtissent des nids de brindilles.
La civilisation brûle sa dernière bougie.
Passe un homme au visage familier ;
Sa petite dame nomme une maladie.
Leurs silhouettes errent à travers les champs de gliales.
La crainte étend son ombre sur le mur de leur vie.
J’aurais voulu aimer cet homme qui me ressemble,
Sourire à ce sourire vieilli.
Nos enfances sont des peaux dont la brûlure craquelle,
Quand vient midi.
Une femme s'endort, nue sur un transat blanc ;
L’eau ne pétille plus dans la carafe ;
Je cherche un fils et une fille pour terminer ma route ;
Et ma sœur reviendra panser mon oreille droite.
Le salve regina de Porpora s’éteint.
Il faut attendre encore, dans la maison du vide,
Assise, de longues heures, sur la chaise de solitude
Jusqu’au jaillissement du crépuscule.
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jeudi, 29 juin 2017
Paul et Anne
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Sara invitée par Elodie Bouygues à Besançon
Ma chère collaboratrice Sara conversait avec Elodie Bouygues à l'université de Besançon, le 9 juin 2017.
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mercredi, 28 juin 2017
À l'horizon
Que signifie la vie pour toi ?
Je ne sais pas bien ce que la vie signifie pour moi, hormis ces faits simples : je suis née, j'existe et il faut que je vive, un jour il faudra mourir.
Si la vie ne signifie rien, peux-tu lui donner un sens ?
Encore une question difficile, floue. Un sens, qu'est-ce ? Une signification ? Une direction ?
Les significations m'apparaissent des échafaudages mentaux sans fondation concrète.
Je peux prendre des directions :
Chercher une structure de vie qui épouse les aspérités de ma personnalité et en même temps me permette de me déployer dans cette société, d’y tenir un rôle estimable à mes yeux.
Réussir à me sentir, à la fois entourée par des êtres aimants et solidaires, libre de mener les aventures qui m’attirent.
Accomplir quelque chose d’important pour moi.
Préserver mon cœur des trop grosses peines.
Ressentir l’enivrement d’exister, que ce soit face aux étoiles, à un regard, à un poème…
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mardi, 27 juin 2017
Violence
Sacrifice !
Ton Sacrifice, seigneur, comme tous les sacrifices, ne fut qu’un préjudice accepté. Celui, sans doute, de n’être pas le fils de ton père. Ou un autre fait, un détail douloureux que les évangiles ne nous ont pas transmis.
Marécage !
Taper, cogner sur quelque chose, en s’interrogeant sur l’étymologie du « marécage », taper sur quelque chose en rêvant de taper sur quelqu’un, non pas quelqu’un qu’on hait ; non pas un vulgaire inconnu qui a brûlé un feu rouge, non pas l’horrible femme dont le sourire faux nous exècre dans cette grande maison de Niort, non !
Sacrilège !
Taper sur quelqu’un qu’on aime, parce qu’en passer par le sacrilège est la porte, non pas du salut, hélas, mais de la respiration, parfois.
Salut !
Or, pardon, le salut terrestre passe par la respiration. Qui ne respire plus meurt.
Marchands !
As-tu déjà tapé quelqu’un, Jésus ? Tu as fouetté les marchands du temple.
Sanctuaire !
Tes coreligionnaires, qui t’agaçaient, te parlaient du temple, mais toi tu parlais du sanctuaire de ton corps. Tu parlais de ton corps, seule viande végétarienne, seule chair qui n’est que du pain, seul sang qui n’est que du vin. Tu délirais, ton imagination vive a créé un nouveau monde.
Pire !
Je ne veux pas taper alors je vais communier. C’est pire. Je sais que tu m’aimes, pourquoi ne sais-je pas si je suis sauvée ?
Nid !
Pourquoi ne suis-je pas une colombe ? J’aurais construit un nid, j’aurais marché sur le muret. J’aurais chanté à tue-tête. J’aurais connu la signification merveilleuse d’une vie sans mot.
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lundi, 19 juin 2017
Le vide dominical
C'est dans la douleur dominicale, isolée dans un square du boulevard Richard Lenoir, que j'ai découvert ce poème-miroir. Ecrit au XIXème siècle par Georges Rodenbach, il m'a transmis l'écho de mon propre vide, de ma déréliction de femme du XXIème siècle horrifiée par son propre fantôme, qui peut-être n'était que mon corps.
Dimanche : un pâle ennui d'âme, un désœuvrement
De doigts inoccupés tapotant sourdement
Les vitres, comme pour savoir leur peine occulte ;
- Ah ! Ce gémissement du verre qu'on ausculte ! -
Dimanche : l'air à soi-même dans la maison
D'un veuf qui ne veut pas aider sa guérison
Quand les bruits du dehors se ouatent de silence.
Dimanche : impression d'être en exil ce jour,
Long jour que le chagrin des cloches influence,
Et sans cesse ce long dimanche est de retour !
Ah ! Le triste bouquet des heures du dimanche ;
C'est un triste bouquet de fleurs qui lentement
Meurt dans un verre d'eau sur une nappe blanche...
M'en sauver, le pourrai-je ? Et l'éviter, comment ?
Ce jour de demi-deuil aux couleurs trop calmées
Où mon coeur otieux s'en va dans les fumées.
J'en ai l'obsession, j'en ai peur, j'en ai froid
Du spleen hebdomadaire où ce jour me ramène :
Tandis que je me leurre au long de la semaine,
Flux et reflux de jours qui s'accroît et décroît,
Dont l'écume est un peu de vanité qui chante,
Voici que le repos dominical me hante
Et déjà m'apparaît comme un repos amer,
Repos nu d'une grève au départ de la mer,
Grève morte du long dimanche infinissable
Qui coagule au loin ses silences de sable...
Georges Rodenbach
(1855-1898)
Georges Rodenbach détestait tellement les dimanches qu'il a pondu un autre poème, dominical encore, intitulé Dimanches.
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samedi, 10 juin 2017
Nos papas les états-uniens
On comprend que des gens écrasés sous le joug du colonisateur n’aient pas apprécié de devoir réciter à l’école : « nos ancêtres les Gaulois » lorsque leurs ancêtres étaient peuls ou mandingues. Mais au moins n’était-ce pas servile de leur part : ils n'avaient pas beaucoup de choix pour tenter d'améliorer leur condition.
En apparence maîtres chez nous, nous prouvons notre soumission totale lorsque nous baptisons à Paris un parc « Martin Luther King », comme nous avons baptisé une station Rosa Parks. Deux états-uniens qui ont combattu des oppressions typiquement états-uniennes et qui sont à bon droit honorés à grands cris dans leur pays.
Mais pourquoi importer cette histoire, qui n’est pas la nôtre ? Pour bien faire croire à la jeunesse d’ici que tout, le passé, le présent et l’avenir, nous vient des Etats-Unis ?
Nous avons notre propre histoire, et s’il faut honorer des personnalités africaines d'origine, un grand jardin Toussaint Louverture, une gare Abd-el Kader ou Léopold Sédar Senghor, seraient plus appropriés à Paris.
Mais il semble que la colonisation intellectuelle soit bien réussie et que les élus du peuple, très mystifiés, soient devenus les domestiques de l'Oncle Sam. Quand oncle Sam nous engage à bombarder une ville, oui ! oui ! oui ! Vite, envoyons des soldats, tuons des civils ! Quand oncle Sam nous apprend à ne pas être raciste et à honorer la diversité des couleurs de peau, oui ! oui ! oui ! Honorons les héros des grandes villes américaines ! Tout nous botte, tout nous enchante, tout nous ravit, pourvu que cela vienne des Etats-Unis !
Ailleurs sur la toile, cet article, pourquoi pas ?
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vendredi, 09 juin 2017
Sur le seuil
Chants orthodoxes russes ? Oui. Pain d'épices ? Non. Si, avec du thé. Paroles latines de psaumes juifs ? Oui et non. Voix de basse ? Certainement, toujours, dans ce palais à demi-détruit. Existe-t-il une beauté de notre temps ? Non et oui. Quelle heure est-il ? Oublie l'heure, nous vivons au rythme des saisons. Le printemps n'en finit pas d'éclater vers l'été. La nuit de la Saint-Jean s'approche sur son chariot d'étoiles. Mais toi ? Moi ? Toi ! Moi je danse avec les enfants du village. Je prie des vieilles antiennes dont tu ne connais pas le premier mot. Je ris de plus en plus, c'est la vieillesse qui s'installe. Je meurs très lentement, très doucement, dans la joie et la bonne humeur. Et ta sœur ? Regarde comme elle est belle ! Son visage aujourd'hui reflète l'éternelle bonté. Cela fait longtemps qu'elle ressemble à l'amour, qu'elle a oublié les latences jalouses et rageuses des douleurs inqualifiées. Alors tu ris, alors tu chantes, avec ou sans ta sœur, alors tu pries dans les calendes des saisons ? Oui. Le Pérou ? Non, la France. Ils se ressemblent tous les deux, parfois. Parfois seulement. Décris-moi ce qui se trouve autour de toi ! Un mur de briques, les carreaux des fenêtres, une tasse à moitié bue, la lumière qui descend, le chien berger qui s'éloigne. Et tout cela, à toi ? Tout cela, à moi et aux autres, à toi si tu veux, si tu restes avec nous, si tu partages la table et le toit. Je le voudrais, oui. Alors ôte tes sandales, assis-toi sous la pergola, oublie tes volontés et tes rêves et laisse-toi traverser par la vie qui vibre ici-bas.
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jeudi, 01 juin 2017
Solstice dans les veines
Mon hiver intérieur, voilà que ton solstice nous glace et nous illumine. Dans mon âme transie le désir d'amour se répand comme un liquide sacré. Qu'il reste confiné en moi et ce venin m'arrachera perfidement la vie. Qu'il se tourne vers les êtres connus et inconnus et ce feu réchauffera une étendue du monde. Surcharge d'hiver charriant des passions lourdes comme des remords. Vivification du carbone.
(Merci à mes sœurs aux chevelures vertes de ne pas me laisser seule quand tout se décompose).
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mardi, 30 mai 2017
Ô Nuit !
La musique du requiem for a friend de Zbignew Preisner embellit la soirée. Contrairement à tant de maisons où les lumières très intensives ne laissent pas de zones d'ombre, ici, nous n'avons que trois petites lampes allumées, avec des abats-jours beige, rouge et vert, qui diffusent des halos de lumière tendre et laissent des pans d'ombre et permettent la rêverie et le mystère.
Depuis combien de temps n'ai-je pas vu la nuit, la vraie nuit, la nuit noire, ou la nuit éclairée uniquement par les astres ? Les lumières artificielles sont partout. Oh, nuit ! Nuit ! Nuit ! Je voudrais te contempler telle que tu es, dans ta splendeur noire, dans ta réalité brute, sans que t'atténuent les éclairages des humains.
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dimanche, 28 mai 2017
De Pierre à Anne-Elisabeth
J'en parle à Anne-Elisabeth par mail. Je lui écris : « Je repense à la famille de Margelain-Bouvent, à Rupt sur Othain... à ce rêve illusoire, dont je voudrais me rapprocher sans en sentir les entailles meurtrières ». Elle répond : « Quel est le rêve Margelain-Bouvent et que sont les entailles meurtrières ? »
Je m'explique alors : « le rêve ? Celui d'une famille élégante, excentrique, cultivée, proche des bêtes, loufoque, avec beaucoup de tenue, pleine de châteaux anciens, une immense beauté et aucun confort.
Les entailles : le narcissisme familial, la cruauté des relations, la noyade de l'individu dans le clan, le crash de la noblesse dans le platane de la modernité ».
Anne-Elisabeth m'écrit aussi : « Le rêve se fait réalité pour certains. Probablement une question de disposition d'esprit. Eh bien, Pierre, pourquoi ne pas entrer dans la bonne disposition d'esprit ? »
Sur AlmaSoror :
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jeudi, 25 mai 2017
Nostalgie
Nostalgie de ce que l'on va perdre... mélancolie qui flotte au fond d'une petite joie. Amour de toi, amour du monde, malgré parfois le manque de foi.
La mort me fait à moitié peur ce soir, d'autres soirs, elle me terrifie. Je prie l'angélus, trois fois par jour, mais je suis seule : les cloches ne sonnent plus, les paysans, les commerçants ne s'arrêtent plus s'agenouillant dans le champ, dans la boutique...
Je mène une vie déconsidérée par vous, mes frères, une vie de péché, une vie en discordance, et pourtant le Rosaire m'accompagne, je l'effeuille au fil des jours. Il est écrit : Désordre, sur la porte de ma maison. Mais il est écrit : Amour, sur la porte de mon cœur. Il est écrit Péché sur ma carte d'identité, mais il est écrit : Pardon sur la partie cachée de mon front.
Certains matins, la vie me fait si peur que je voudrais me blottir à nouveau au fond du ventre de ma mère, dont j'ai je crois des souvenirs. M'y blottir à neuf mois, puis à huit, puis à sept, et remonter le temps jusqu'à la petite graine, qui rapetisse, devient goutte de néant dans le Néant.
Hélas, la vie ne se donne pas à l'envers. Elle se déroule et se dévide dans le sens des aiguilles d'une montre. Je suis le fil du temps, comme un cheval dans un manège, je cours sans savoir pourquoi, ou bien je m'arrête et personne n'est content de moi.
Nostalgie de ce que l'on va perdre. Car la nuit recouvre ce qui a été. Mélancolie qui flotte au fond d'une petite joie. Car la paix n'est jamais complète ici-bas. Amour de toi, amour du monde, malgré tes défauts qui m’obsèdent, malgré les combats perdus et les chemins renoncés. Au fond de moi encore un peu de foi.
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mercredi, 24 mai 2017
Ce que je sais
Je sais que tu ne dors pas. Je fais semblant d'y croire. De croire à ton long souffle, de croire à ton silence.
Je sais que tu ne m'aimes pas. Je fais semblant d'y croire. De croire à l'avenir, de croire à ta présence.
Je sais que tu ne pleures pas. Je fais semblant d'y croire. De croire à tes sourires et à tes sentiments.
Il est tard, vraiment tard et par la baie vitrée, les tours de la banlieue s'éteignent lentement.
Je sais que j'ai eu tort, je voudrais réparer la peur de prendre un risque et mes médicaments.
Je t'attendrai pourtant, je t'attendrai toujours, que veux-tu, j'ai trop mal à la séparation.
J'attendrais doucement que tu perdes raison dans le studio bruyant place de la Nation.
Nous avons des remords, tous autant que nous sommes. Dans la nuit qui commence, les miens me revisitent.
Nous avons des douleurs qui guident nos chemins, vers les impossibles délices de face à face trop composites.
Nous avons des ardeurs qui calment nos matins et creusent nos arthrites.
Je sais que tu ne mords pas, je fais semblant d'y croire. De croire à ta violence, de croire à autre chose qu'à ton indifférence.
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mercredi, 10 mai 2017
Le silence du lointain
Dans le jardin, entre l'épicéa et le chêne, les deux chiens, Tolstoï et Yourcenar, paressent sur la marche de pierre.
Il n'y a pas de bruit dans la ruelle, ruelle ouverte par trouées sur la vallée.
Des oiseaux de proie de temps en temps traversent le ciel. Un engoulevent se tait.
Le temps coule lentement. C'est la fin de l'hiver.
Le potager recouvre peu à peu ses parures comestibles.
Tu as quitté la ville, depuis deux ans, jour pour jour.
Tu n'es plus qu'un souvenir (ton visage, ton rire), pour beaucoup de gens.
Peu viennent te voir.
Tu ne t'y rends presque plus.
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