Stances d'existence (jeudi, 24 août 2017)
Dans d'autres siècles, la mort avait sa place au soleil, on la côtoyait souvent d'une manière familière, tandis que le sexe était tabou (caché, atténué, dissimulé, menti). Sexe et mort ont inversé leurs pôles : la mort est exclue (cachée, atténuée, dissimulée, mentie), le sexe a pignon sur rue.
L'humain civilisé est aujourd'hui celui qui pleure, console, aime, palpite en public. Avant-hier, on montrait son humanité par la retenue de ses émotions, réservée à la sphère secrète. La discrétion à propos de la vie privée et des affects n'est de nos jours pas de mise : il faut être vu tel que l'on est affectivement, c'est d'ailleurs devenu une revendication politique, un droit réclamé : être visible ! La forme ultime de pouvoir et d'influence symbolique n'est pas, comme en d'autres temps, dans l'éloignement ; le prestige actuel naît de l'accessibilité. Le visage reconnu, accessible à la connaissance de chacun, est un visage supposé puissant tandis qu'un visage inconnu par le plus grand nombre est relégué à l'inexistence sociale.
Autres temps, autres mœurs. Ce qui ne varie guère, c'est la souffrance sociale engendrée par la compétition. Exister à ses propres yeux, pour ce que l'on est, c'est si difficile...
Je cherche ce visage qui ne ressemble à nul autre, que je n'ai jamais vu et qui parle immédiatement à un endroit inconnu de mon cœur. Je cherche une voix aux intonations inédites. Je cherche un ailleurs si proche qu'il en fait presque peur.
La jeune fille et la Mort, de Niklaus Manuel Deutsch, 1517
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