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Suite répétitive pour hautbois d'octobre

L'écriture minimaliste - ou écriture répétitive, s'est attaquée à nous (Edith de CL et Edith M, miroirs l'une de l'autre), le premier matin du mois d'octobre 2017 aux Sables d'Olonne, dans un second jour de l'appartement du rez-de-chaussée, aussi sombre que la lumière dehors était éclatante - et nous a rendu le repos au dernier matin de ce mois d'octobre, dans le même second jour de l'appartement sablais.

Voici donc les douze morceaux de la Suite de poèmes répétitifs pour hautbois.

I Il était une fois

II Le concerto des pas perdus

III Cromorne

IV Respons

V Essaim

VI Tristeliesse

VII Chaconne

VIII Le concerto vénitien

IX Silences sur l'A7

X La lèpre

XI Le dialogue intercepté

XII Fin d'un conte

 

I Il était une fois.

Il était une fois – sucre, étoile, louve. Il était une fois – sucre, étoile, louve. Il était une fois – sucre, étoile, louve. Il était une fois – sucre, étoile, louve. Il était une fois. Porte de pierre. Il était une fois. Porte de bois. Il était une fois. Porte de pierre. Il était une fois. Porte de bois. Guitare ! Guitare ! Guitare ! Il était une fois – sucre, étoile, louve. Il était une fois. Porte de pierre, porte de bois. Il était une fois – sucre, étoile, louve. Il était une fois. Porte de pierre, porte de bois. Hautbois. Hautbois. Hautbois.

Et si c'était un rien, une idée, une esquisse, une magie dans les vagues idéales de l'oubli...

Il était une fois – sucre, étoile, louve. Il était une fois. Porte de pierre, porte de bois. Il était une fois – sucre, étoile, louve. Il était une fois. Porte de pierre, porte de bois. Clarinette ! Trompette ? Clarinette !

Il était une fois – sucre, étoile, louve. Il était une fois, encore une fois. Il était une fois – sucre, étoile, louve. Il était une fois, une autre fois. Il était une fois – sucre, étoile, louve. Il était une fois, encore une fois. Il était une fois – sucre, étoile, louve. Il était une fois. Guitare, guitares, hautbois.

 

II Le concerto des pas perdus

J’ai perdu un bémol en marchant lentement. Dégage le passage, purée de pois, disperse-toi le vent.

J’ai mangé un fa fade en sortant ce matin de la maison blafarde. Porte grinçante, son émouvant.

J’ai jeté une trille à la brise du temps. Dégage le passage, purée de poix, disperse-toi le vent.

J’ai bu le si des anches en sirotant gaiement. Gorge chuintante, son surprenant.

J’ai vécu trop d’instants sans y penser vraiment. Dégage le passage, purée de pois, disperse-toi le vent.

 

Il n’y a plus d’air à Londres, plus de fête à Paris, plus de danse à Sofia, plus de cloches à Tihany.

Il y a plus d’oubli, dans les villes où le soir s’éternisait jadis.

 

J’ai perdu quelques pas en sifflant tristement. Dégage le passage, purée de pois, disperse-toi le vent.

J’ai vomi un la dièze en entendant mourir un vieil enfant dans l’hôpital du matin. Râle malade, son déchirant.

J’ai lancé la dernière croche à un chien-mendiant. Dégage le passage, purée de pois, disperse-toi le vent.

J’ai pissé le trop-plein d’un concerto baroque. Vidange étrange, cantabile.

J’ai laissé fuir les ans sans vivre ni aimer. Dégage le passage, purée de pois, disperse-toi le vent.

 

Il n’y a plus d’air à Londres, plus de fête à Paris, plus de danse à Sofia, plus de cloches à Tihany.

Il n’y a plus de villes pour chanter les départs des amis.

 

III Cromorne

Corbeaux, corneilles et choucas !

Cromorne au bec, bon pied bon œil, compas dans l’œil, yeux noirs.

Cortège ! Cohorte ! Phalange noire !

Esquive autour de la haute tour.

Croooaaa...

Corneilles, choucas et corbeaux !

Cromorne au bec, feu au cul, cul par dessus tête, tête bêche.

Cortège ! Cohorte ! Horde absolutoire !

Dérive sur l’étang alentour.

Croooaaa.

Choucas, corbeaux et corneilles !

Cromorne au bec, ramage tendre, manteau funèbre, plumes douces.

Cortège ! Cohorte ! Bataillon blasphématoire !

Vol battu sur les marais grouillants.

Croooaaa.

Corbeaux, corneilles et choucas !

Cromorne au bec, pattes robustes, feu freux des chasseurs sachant dresser.

Cortège ! Cohorte ! Peloton comminatoire !

Se brise sur la plus haute tour.

Croooaaa.

 

IV Respons

Mon beau bouleau, blancheur de ton écorce et douceur de ta peau, en l'absence de tes feuilles j'admire ta nudité.

Émouvante et végétale présence, qui appelle peut-être des caresses.

Mes mains humaines te désirent et te guettent, l'étang où tu te mires défie ma sagesse.

 

Hauteur du bois, ouverture des branches sèches, plainte du haubois.

 

Mon blanc bouleau, douceur de ton écorce et pâleur de ta peau, dans l'hiver qui s'effeuille j'adore ta vérité.

Énervante et animale présence des corbeaux qui sans cesse t'agressent.

Mon cœur défaille à l'odeur de la terre, l'eau morte où tu t'admires assoiffe ma jeunesse.

 

Hauteur du bois, ouverture des branches sèches, regret du luthier.

 

Mon beau bouleau, sagesse de ton écorce et douleur de ton âge, dans tes branches maigrelettes je reconnais mes bras.

Effrayante et triviale vieillesse de nos deux corps immobile et mobile.

Tu n'as ni sexe, ni bouche, ni regard, tu réponds à mon désir-tristesse.

 

Hauteur du bois, ouverture des branches sèches, prison hiémale.

 

V Essaim

Essaim des saints vers les sens clandestins.

Essaim des seins vers les seuls sons.

Essaim des Essarts vers le bocage.

Essaim des blancs-seings d'une église sans fidèles.

Essaim, et Saint Spire sait que sans soleil ni suie rien ne se tient.

Essaim des pensées lucides, essaim des suites d'idées vides.

Essaim des vers dans le fruit.

Essaim des boutanches de Sancerre dans l'autre Loire,

Essaim des embouchoirs, essaim des flûtes des régions, essaim des terroirs.

Essaim des vents mêlés un soir, essaim des seins emmêles ce soir, et sainte Nitouche et saint-Glinglin se disputent les âmes arides des faux croyants.

Essaim des guêpes, des bourdons, des mouches et des gendarmes. Essaim des papillons morts.

Armées tombée au son des chalumeaux et tournebouts, armées désarmées par les pique-morts, essaim des figues sèches jetées par les enfants.

Essaim malsains.

Essaims des saints vers les sens clandestins.

Essaims des seins vers les seuls sons.

Essaim de Poitou, de Touraine, essaim de rien.

 

VI Tristeliesse

Mélodie d'une tristesse, épousailles, feuilles d'automne. Émulsion, immersion, univers en expansion.

Mélodie d'une tristesse, maigre mangeaille, terre mouillée. Sédition, sédation, corps en décomposition.

Mélodie d'une tristesse. Mélodie d'une tristesse. Mélodie d'une tristesse.

 

Tristesse de la mélodie, vive mémoire, tronc commun. Inversion, réversion, suspension.

Tristesse de la mélodie, jambon noir, noix fraîche. Brame des bois, bois des cerfs, terre des poussières brunes.

Mélodieuse tristelesse. Tristelesse mélodieuse. Mélodieuse tristelesse

 

Tristesse de la mélodie, détresse des lundis, douceur des vendredis. Semainier, chapelet, grain des jours.

Mélodiale tristeliesse. Mélodiale tristeliesse. Mélodiale tristeliesse.

 

VII Chaconne

D'Ukraine un air de flûte, une danse, un chant, un vent,

D'Ukraine une amourette, la froide protection des arbres et mon amant.

Troïka tu m'emportes au grand pays du rêve,

où Boris en botte et long manteau m'attend muet et souriant.

D'Ukraine une flûte à l'air danse dans le vent un chant,

D'Ukraine une amulette, la froide protection des vagues et mon amant.

Troïka tu m'emportes au grand rêve du pays,

où Boris à cheval et souriant m'attend muet et patient.

D'Ukraine une danse d'air et de vent comme un chant de flûte,

D'Ukraine une allumette, la faible lueur dans la neige et mon amant.

Troïka tu m'emportes au rêve du grand pays,

où Boris enchanté en chantant me ment indifférent.

 

VIII Le concerto vénitien

Albinoni dormait au fond d'un rêve épars, Albinoni dormait.

Et le hautbois chantait l'adagio lancinant, et le hautbois chantait.

Et c'était un soir bleu de Venise enlacé, et c'était un soir bleu

De Venise enlacée par la lagune tiède, Venise enlacé.

Une femme passait écoutant les gondoles, une femme passait

L'homme sans sa perruque entendit les lents pas, l'homme sans sa perruque

Écoutant ce passage imagina la femme, écoutant ce passage

Corrigea dans son rêve une note trop gaie, corrigea dans son rêve

Sa musique se fit ainsi dans son sommeil, sa musique se fit

Et la femme s'en fut par le pont oublié, et la femme s'en fut

Dans Venise éblouie par l'insigne beauté, dans Venise éblouie

Au fond d'un rêve épars de Crépuscule bleu scintillant sur la mer.

 

IX Silences sur l'A7

Remix de Vivaldi. Silence. Autoroute 7.

Traversée de la France, cicatrice grise, fils électriques.

Remix de Vivaldi. Silence. Autoroute 7.

 

Feinte pour cueillir une caresse. Silence. A7.

Feinte pour doubler un camion. Ré mineur et boite à rythme.

Feinte pour cueillir une caresse. Silence. A7.

 

Silence remixé, pause pipi, A7.

Lançon de Provence. Pause déjeuner. Plein d'essence.

Silence remixé, pause pipi, A7.

 

Remix de Vivaldi, bâillements, lumières artificielles.

Bientôt arrivés. Inquiets. Fatigués.

Remix de Vivaldi, bâillements, lumières artificielles.

 

X La lèpre

La lèpre, les fleurs, les séquelles et l'amour.

La lèpre, mon cœur.

Mon air, ton air, nos airs d'avoir l'air de ne pas manquer d'air.

Sans air, tu meurs.

Sur l'air d'une marche d'une autre ère, chantonnée par un pauvre hère,

Je ris, tu pleures.

Désir de peau, désir de nerfs, désir mendiant d'une gâterie.

Sida du cœur.

La lèpre des fleurs, les séquelles de l'amour.

Le jour sans peur.

 

XI Le dialogue intercepté

La voix grave d'une femme se mêle à la plainte du hautbois.

- Avez-vous peur du silence ?

- Oui mon amour.

- Je ressemble au silence.

- Vous semblez lui plaire.

- C'est parce que je suis morte.

- Vous n'êtes pas morte.

- C'est parce que je suis folle.

- Vous n'êtes pas folle.

- C'est parce que je suis celle qui part.

- Vous êtes celle qui revient.

 

La voix grave d'une femme se mêle à la plainte du hautbois.

- Avez-vous peur de l'absence ?

- Oui mon amour.

- Je ressemble à l'absence.

- Vous êtes le jour.

- C'est parce que je suis forte.

- Vous n'êtes pas forte.

- C'est parce que je suis molle.

- Vous n'êtes pas molle.

- C'est parce que je suis celle qui se tait.

- Vous êtes celle qui crie.

 

La voix grave d'une femme se mêle à la plainte du hautbois.

- Avez-vous peur de la rémanence ?

- Oui mon amour.

- Je ressemble à l'évanescence.

- Vous ressemblez à la décence.

- Je suis silhouette dans la cohorte.

- Vous êtes une ombre.

- Je suis l'armure d'une escorte.

- Vous êtes accorte.

- C'est parce que je suis celle disparaît.

- Vous êtes celle qui renaît.

 

XII Fin d'un conte

Ils se marièrent – Et eurent beaucoup d'enfants. Ils se marièrent – Et eurent beaucoup d'enfants. Ils se marièrent – Et eurent beaucoup d'enfants. Ils se marièrent – Et eurent beaucoup d'enfants. Ils se marièrent. Pilier basaltique. Ils se marièrent. Arche blanchie. Ils se marièrent. Pilier basaltique. Ils se marièrent. Arche blanchie. mandoline ! mandoline ! mandoline ! Ils se marièrent – Et eurent beaucoup d'enfants. Ils se marièrent. Pilier basaltique, Arche blanchie. Ils se marièrent – Et eurent beaucoup d'enfants. Ils se marièrent. Pilier basaltique, Arche blanchie. flûtes traditionnelles. flûtes traditionnelles. flûtes traditionnelles.

Ce n'était ni un chien, ni un chemin, ni une hélice, ni un mirage, dans la houle létale de la vie...

Ils se marièrent – Et eurent beaucoup d'enfants. Ils se marièrent. Pilier basaltique, Arche blanchie. Ils se marièrent – Et eurent beaucoup d'enfants. Ils se marièrent. Pilier basaltique, Arche blanchie. Cornemuse ! sistre ? Cornemuse !

Ils se marièrent – Et eurent beaucoup d'enfants. Ils se marièrent, encore une fois. Ils se marièrent – Et eurent beaucoup d'enfants. Ils se marièrent, une autre fois. Ils se marièrent – Et eurent beaucoup d'enfants. Ils se marièrent, encore une fois. Ils se marièrent – Et eurent beaucoup d'enfants. Ils se marièrent. mandoline, mandolines, flûtes traditionnelles.

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Commentaires

Le bois du haubois se ressent dans ces textes...

Écrit par : hautboïste | mercredi, 22 novembre 2017

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Le bois du haubois se ressent dans ces textes...

Écrit par : hautboïste | mercredi, 22 novembre 2017

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