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dimanche, 23 février 2014

Note sur les pigeons

Les pigeons des villes sont venus des falaises. Ils sont déracinés. Eux qu'on croirait amarrés aux cités humaines depuis toujours, c'est à partir de leur domestication, dans la haute antiquité, qu'ils sont arrivés, par centaines, par milliers, par grandes vagues de migration, peupler Lutèce. Lutèce est devenue Paris ; les pigeons se sont multipliés. L’exode maritime les a abîmés : leurs plumes sont affadies par l’air vicié des faubourgs et des usines. Vers la moitié du vingtième siècle, les pigeons, présents dans la ville depuis des siècles, ont dû faire face à de nouvelles vagues migratoires. Pigeons ramiers, tourterelles, étourneaux d’abord, et dans la foulée, mouettes et corbeaux, sont venus leur disputer la place. Aujourd’hui, le pigeon des villes peut pleurer ses lointaines falaises, assailli par les nouveaux oiseaux qui lui volent sa ville. Il n’est plus le maître chez lui : ses rivaux lui disputent les toits, la pitance et la haine amoureuse des Parisiens

mardi, 11 février 2014

Hypervieux

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à L.B., qui sait le sens des devises latines et comment la nuit pardonne.

 

Sur le parking au bout du remblai des Sables, d'où part la jetée qui mène au phare vert, cinq jeunes garçons de quatorze à dix-neuf ans, vêtus de combinaisons noires de plongeurs, se concertaient passionnément au bord d'une camionnette dans laquelle cinq planches de surf semblaient dormir après l'effort. Je n'osai m'approcher d'eux ; pourtant, je les sentais fébriles, presque angoissés, comme en demande de quelque chose. Je ralentis l'allure et leur lançai des regards que j'espérais sympathiques ; ils me les rendirent avec insistance. Je les saluai d'un : « bonjour ! Vous êtes courageux de surfer un premier janvier ! »

- Merci ! Répondirent-ils en chœur.

Je sentais qu'ils désiraient aller plus loin. Je ralentis fortement mon pas, m'arrêtai presque, les yeux perdus à l'horizon. La pluie tombait doucement. La mer n'était ni calme, ni agitée.

- Un homme est mort, entendis-je.

C'était le plus jeune d'entre eux qui venait de parler. Il était un peu gros et d'un visage à la fois triste et jovial. Sa voix n'avait pas fini de muer.

- Qui est mort, demandai-je ? Et comme pour accompagner ma funèbre question, les cloches de l'église Notre-Dame de Bon Port se mirent à sonner, non le glas, mais neuf coups qui annonçaient l'heure en ce début de jour froid et pluvieux.

- Nous ne savons pas qui il est.

- Il s'appelle Naveborde Liénucorr, dit le plus âgé. Connaissez-vous ce nom ?

- Je ne l'ai jamais entendu prononcer, répondis-je.

- Nous surfions depuis avant l'aube, depuis sept-heures et demie, quand nous avons aperçu un homme qui marchait en titubant sur la plage, dit un troisième garçon, qui portait les cheveux longs ; sa barbe de deux jours se terminait en petit bouc sur le menton. C'est Gaël qui l'a vu le premier, il nous a avertis.

Gaël, garçon métis de dix-sept ans dont l'oreille gauche était percée par un anneau en forme de tête de mort, hocha la tête en signe d'approbation :

- Au début, on a cru qu'il était ivre, dit-il.

- Qu'il avait trop fait la fête, ajouta un autre, faisant allusion à la nuit du Nouvel An.

- Et puis, même ivre, ça n'empêche pas d'avoir besoin d'aide. Il tombait tous les trois mètres alors on est revenus sur la plage.

- Il y a longtemps ? Demandai-je.

Ils restèrent évasifs.

- Il faisait déjà bien jour, dit le garçon au petit bouc, qui s'appelait Baptiste. Le plus jeune à la bouille ronde, joviale et triste s'appelait Dylan. Le plus âgé, qui était aussi le plus posé et le conducteur de la camionnette, répondait au surnom de Guilfou. Le cinquième de la bande, charpenté, souriant et boutonneux, s'appelait François.

Lorsque Gaël, François, Guilfou, Baptiste et Dylan s'étaient approchés de l'homme titubant, la thèse de l'alcool s'était évaporée : d'un âge très avancé, l'homme se tenait le ventre par lequel sortaient des flots de sang.

- Il nous a dit son nom, dit Dylan, et nous a dit de retenir une phrase. Je ne me souviens d'aucun des deux.

- Naveborde Liénucorr, dit Guilfou. Et la phrase... Baptiste ?

- Piscis manducat...

- Stellam ! Interrompit François.

- Piscis stellam manducat... manducat stella...

- Sed ! Interrompit François.

Alors pleins d'énergie, Baptiste et Gaël prononcèrent en chœur la phrase qu'ils venaient de recomposer mentalement :

- Piscis stellam manducat sed stella in piscem luceat.

- Il nous l'a fait répété au moins vingt fois, dit Guilfou.

- Mais on n'y comprend rien, ajouta Dylan. On pense que c'est de l'italien.

- C'est du latin, leur dis-je. Répétez...

Ils répétèrent. Je sortis mon téléphone de ma poche ; mes doigts glacés cherchaient sur Internet tandis que la bruine recouvrait l'écran. Peu à peu, je pus proposer une traduction qui demeurait énigmatique et ne nous apprit rien sur le sens du message de cet homme.

- La police est arrivée, finalement ? Demandai-je.

- La police ? Non, dit Dylan.

- Comment, vous n'avez pas appelé la police ou le Samu ?

- Il ne voulait pas, dit Dylan.

- Il nous l'a interdit, dit François. On sentait qu'il fallait lui obéir. Il ne voulait pas qu'on appelle de l'aide, il ne voulait pas nous dire pourquoi son ventre était troué. Il voulait que l'on retienne cette phrase et qu'on l'emporte, lui, très loin dans la mer.

Le jeune garçon éclata en sanglots en prononçant cette phrase.

- Mais qu'avez-vous fait ? Vous n'avez pas appelé les secours ? Insistai-je.

Aux sanglots de François se mêlèrent ceux de Gaël.

- Guilfou l'a emporté, dit Dylan.

Je levai les yeux vers l'aîné de la bande. Ses yeux embués de larmes se tournèrent vers le large.

- J'aurais aimé que mon daron meurt comme ça, plutôt que de crever comme un rat en cage dans un hôpital, murmura-t-il.

Un troisième garçon joignit ses pleurs maladroits à ceux de Gaël et de François. C'était Baptiste. Guilfou restait droit, le regard fixé vers l'horizon où il avait laissé le vieil homme.

- Moi, j'ai suivi Guilfou, dit Dylan. Le vieux lui a demandé de le déposer le plus loin possible et de le laisser là. Laisse-moi me noyer tout seul, mon garçon, il a dit à Guilfou. Pour que la nuit... Pour que la nuit sonne ?

- « Pour que la nuit me pardonne », dit Guilfou. Il voulait se noyer seul au large pour que la nuit lui pardonne.

- Quel âge avait-il ? Demandai-je.

- Il était hyper vieux ! Dit Dylan. Au moins cinquante ans !

Je me pinçais les lèvres. À peine une petite douzaine d'années avant qu'à mon tour je rejoigne le clan des hypervieux.

- Allez-vous nous dénoncer, madame ? Demandait Gaël.

- Vous dénoncer ?

- De l'avoir aidé à se noyer ?

En ce premier matin de l'an 2014, sur le parking qui surplombait la mer, cinq garçons adolescents me regardaient sans haine et sans reproche. Leurs yeux chargés d'inquiétude et de supplication semblaient, non pas me demander de ne pas les trahir, mais quémander une guidance. Ils voulaient que je les extirpe de leur propre stupéfaction. Ils voulaient que je les emmène quelque part.

-N'oubliez jamais cette phrase qu'il a dite, commençai-je d'une voix autoritaire.

Ils buvaient mes paroles.

- Et, de temps en temps, écrivez là sur le sable, afin que des gens puissent la lire. Peut-être qu'elle était destinée à quelqu'un. Et puisque vous n'avez pas appelé les secours, ne racontez plus jamais cette histoire à personne, avant d'être hypervieux.

- Quel âge, demanda Guilfou, plus conscient peut-être que ses copains que le monde hypervieux ne lui serait pas éternellement hermétique.

- Que chacun d'entre vous ne raconte rien de cette histoire avant d'avoir un enfant de l'âge qu'il a aujourd'hui. D'ici là, vous n'avez rien vu, rien entendu. Vous avez surfé tranquillement le matin du premier janvier 2014, et vous êtes ensuite rentrés chez vous pour vous réchauffer.

- Merci madame.

- Bonne journée.

Ils entrèrent dans la camionnette. Ils parlaient ensemble tout bas, mais déjà je sentais qu'ils m'avaient oubliée. J'avais joué mon rôle et je n'avais plus qu'à disparaître de leur vie. Ils ne se souviendraient que de l'hypervieux, de la phrase latine et de la nuit qui pardonne aux noyés.

Fabrice K m'attendait au Flash, pour y boire un café en croquant dans un croissant. À lui non plus je ne dirais rien : trop rationnel, trop administratif, trop sérieux. Je lui dirais juste que la mer était belle bien que froide, et qu'il aurait du traverser la plage avec moi au lieu de conduire sa sempiternelle voiture. Avant de tourner vers le port, je jetai un dernier regard vers le large, où, sans doute, l'hypervieux avait rendu l'âme. Quel que soit son fait ou son méfait, je souhaite que la nuit lui pardonne.

 

Edith de CL

 

dimanche, 09 février 2014

Maître de Ravenswood : planage

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Ravenswood, un vieux fantôme d'AlmaSoror, n'était pas revenu hanter nos terres virtuelles dans sa poussiéreuse toge blanche comme un linge (n'ayons plus jamais peur des euphémismes : ils sont innocents ; ils sont inoffensifs) depuis sa mémorable Soirée rouge célibat.

Le revoilà. Il a faim de vous, il a faim de nous. Il partage une recette de planage :

Frésoeurs,

Si vous voulez planer un quart d'heure entre deux choses à faire, avant le dîner, pendant qu'il cuit par exemple, je ne peux que vous conseiller de vous servir un verre de blanc (Domaine de Lavialle, blanc sec de l'année) et de le siroter en souriant, tandis que dans la pièce où vous êtes s'écoule Nothing compares 2U, chanté par Sinead l'irlandaise.

Vous marchez à travers la pièce, regardez si quelques livres y trainent, ne lisez pas plus d'une ou deux phrases d'un livre ouvert au hasard, reposez le bouquin, levez les yeux vers la fenêtre ou du moins vers un horizon mental, revoyez un visage oublié depuis longtemps, le laissez s'enfuir très vite, souriez à nouveau au vide.

Le planage se termine avec le verre et n'est pas reconductible avant quelques jours.

jeudi, 30 janvier 2014

délirium très mince

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« Le rire est un diminutif de la danse »

Malcolm de Chazal

 J'ai bu du rhum et je danse au dessus de la ville, je suis seule dans mon petit appartement et je déboite, je déchire, je trashe, je wow ! Ah ah ah ah ! Je ris de me voir si folle en ce miroir qui explose les conventions trop longtemps portées. Je danse, je danse, au milieu des théories du complot et du genre, je danse en écoutant de la grosse musique américaine et jamaïcaine. Ouh, Hou ! Père Labat, père Labat, qu'as-tu fait de ma sagesse ? Hou, ouh ! Le mental s'en va, il ne reste que la danse qui me met en mouvement et je crois que je déboite, je déchire, je transe, je wow ! (shlak, shlak, shlak), je ris en nage et je déménage, je ris, je nage et je déménage, comme c'est drôle de déménager ! Oui, oui oui, la capitale du pays fou est morte sous les sables, et je danse parce que j'en ai marre des diminutifs, caramba !

 

mercredi, 29 janvier 2014

Destinée

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Pourquoi suivre le fil de l'actualité quand on peut rêver aux mille et un voyages d'un vaisseau fantôme ?

Oubliez vos soucis, ami en quête d'un destin ; lâchez la rampe de l'escalator, fermez les yeux. Le songe d'une nuit d'hiver va vous emporter loin des morosités du jour gris.

Fermez les yeux, ouvrez le coeur, partez pour ne plus jamais revenir.

La vie commence. L'enfance revient. Demain est infini.

 

(Photo : port des Sables d'Olonne, par Sara)

mercredi, 22 janvier 2014

Zig-zag

Je zigzague dans la ville sous le crachin d'hiver. Je pense à toi. Le jour où tu vis pour la dernière fois ton père descendre vers le garage où il réparait les motos de ses clients, tu ne le regardas même pas. Tu pensais qu'il reviendrait le soir poser les pieds sous la table de la maison impayée. Le jour où j'ai quitté la petite ville d'île-de-France pour ne plus jamais y revenir, je suis passé te dire adieu mais tu n'as pas ouvert la porte. Il me semble que tu étais sous la douche. Il n'était pas encore neuf heures du matin. Je n'avais pas de temps à perdre, un train m'attendait.

J'ai pris le train du Nord.

J'ai eu du mal à m'adapter à ma nouvelle vie : la mer dont j'avais tant rêvé ne ressemblait pas à mes rêves. Elle était lisse et froide. Elle m'enivrait, mais elle me faisait peur. Il n'y avait pas de sable, seulement des galets. La maison dans laquelle je louais une chambre était vieille et craquelante. Les meubles bringuebalaient ; j'osais à peine les toucher. J'avais grandi dans un carré blanc au douzième étage d'un long rectangle gris, au milieu de meubles carrés et rectangulaires en métal. Comment apprivoiser ce vieux bois aux rainures pleines de pourriture et d'odeurs d'un passé méconnu ? Les gens qui passaient dans les ruelles ne portaient pas les habits de notre jeunesse mégalopolitaine. Ils m'étaient étrangers - et j'étais l'étranger, bien que jamais je n'ai senti un regard de travers. Ils pensaient que j'étais né ici, comme eux.

Je me suis habitué à ma nouvelle vie.

Quinze ans ont passé et je revois en songe la cité malade où nous avons grandi sans beauté et sans amour. Je n'ai pas tout de suite reconnu ton visage ; j'ai cliqué sur le lien que les internautes se renvoyaient. C'est au bas de l'article qu'un regard doux et triste a retenu mon attention. Et sur le cou, la boucle de ton tatouage qui descendait jusqu'à l'épaule.

Oh mon ami d'enfance. Si j'avais su rater un train, peut-être aurais tu connu l'évidence que tu comptais pour quelqu'un. Tes mots, ta voix, je me les remémore en trottant sous le crachin nocturne. Les derniers marins boivent au Zinc du Cobra. Ils ont des rires avinés, des yeux désespérés. Ils ressemblent peut-être un peu à l'homme que tu es devenu. Je vais marcher encore longtemps avant de rentrer dans ma tanière, où je boirai trois ou quatre cafés, exprès pour ne pas dormir. Je ne veux pas dormir. Je sais que tu ne m'as pas oublié. Je connais ton cœur.

Tu étais mon seul ami.

lundi, 20 janvier 2014

Ignis Fatuus

à Jean Bouchenoire

Qu'écrire ? L'inspiration qui nous jette devant un clavier n'est pas toujours là. Pondre de longs articles documentés, argumentés, exige une grande concentration : assez de calme et de patience pour se documenter, pour travailler sans cesse la formulation afin qu'elle se rapproche de l'exactitude.

Parmi les éléments essentiels dans l'écriture d'un billet de blog, d'un roman, d'un article de réflexion, prédominent, d'abord la beauté, parce que l'esthétique est un des fondements de l'éthique, et puis l'intemporalité, qui permet au texte de conserver son pouvoir d'attraction et d'inspiration, des décennies et même des siècles après avoir été écrit.

Démunie face à ces exigences inaccessibles, je t'ai conjuré de me donner des conseils. Tu me l'as d'abord cruellement refusé, au motif que rien ne saurait s'apprendre qui ne monte pas du tréfonds de notre être. Et puis, grâce à mes insistances, tu m'as confié certaines choses. Pour toi, la beauté d'une phrase éclate lorsqu'au lieu d'être purement fonctionnelle - informative -, elle marie la forme et le fond de façon harmonieuse et inventive. Quant à l'inscription de la phrase dans le temps, tu crois pouvoir l'obtenir en élevant ton style au-dessus des modes de langage, au-dessus des pensées à la mode. Tu dis que tu te dépouilles des détails inhérents à l'époque qui abrite ta vie, pour toucher aux aspects universels du sujet. Tu renonces aux ellipses, même élégantes, dès lors que tu n'es pas certain que l'homme de demain comprendra le contexte auquel tu allusionnes. Un texte bardé de références à des choses de l'éphémère présent, ne pourra garder la même force aux yeux des générations de l'avenir, forcément incapables deviner ce que cachent ces évocations. Même les exégètes les plus motivés devront fouiller le passé avec l'opiniâtreté d'une taupe, pour recomposer le contexte dans lequel fut écrit le texte, tandis que le grand nombre des lecteurs qui ne cherchent qu'à goûter une œuvre ou se distraire laissera tomber.

Je t'ai posé deux questions auxquelles tu n'as pas répondu.

Tout a-t-il déjà été écrit ? Relire les Anciens, se rendre compte qu'ils avaient tout pensé, malgré l'ignorance dans laquelle ils étaient de l'évolution du monde après leur disparition, donne un vertige affreux. Qu'écrire, après Homère, Aristote, Thucydide, Épictète, les évangélistes, Sénèque, Sophocle et Virgile ? Qu'écrire qui puisse prendre sa place dans la civilisation écrite universelle, et comment l'écrire ? Autrement dit, l'écriture a-t-elle un avenir ou nous a-t-elle déjà offert tous ses joyaux ?

Comment faire pour se connecter à une source d'inspiration inépuisable ? L'expérience de la lecture amène à trouver que l'élaboration d'un texte puissant, à un moment de la vie d'un écrivain, ne garantit nullement à l'auteur la capacité d'atteindre une nouvelle fois ce niveau de beauté, de pertinence qui rend l’œuvre évidente et universelle.

Voilà à quoi je songe très loin de toi, maintenant que j'ai déménagé, que je vis loin de ta ville et que nous ne discuterons plus le soir au croisement de la rue du Château et du passage des Trois Alouettes, dans ton coin d'Île-de-France encore inviolé où les ruisseaux de boue longent les vieilles fermes.

Et songeant à ceci, j'entends la musique qu'écoute une personne de l'immeuble, de ce nouvel immeuble où j'habite, au bord de l'océan - et je reconnais la Lamentation de la nymphe de Monteverdi. Sublime duo amoureux qui m'émeut et m'invite à prier les muses. Vous qui faites et défaites les esprits créateurs, accordez-moi quelques parcelles de ce feu follet qui frappe sans prévenir l'esprit accablé le long d'un cimetière, au bord d'un marais, et lui donne la force de croire qu'il a quelque chose à nous dire.

Mais toi qui n'as pas répondu à toutes mes questions, tu m'as offert la connaissance d'un poète entre-deux-eaux : Oscar-Venceslas de Lubicz-Milosz :

 

Tous les morts sont ivres de pluie vieille et sale
Au cimetière étrange de Lofoten.
L’horloge du dégel tictaque lointaine
Au cœur des cercueils pauvres de Lofoten.

Et grâce aux trous creusés par le noir printemps
Les corbeaux sont gras de froide chair humaine ;
Et grâce au maigre vent à la voix d’enfant
Le sommeil est doux aux morts de Lofoten.

Je ne verrai très probablement jamais
Ni la mer ni les tombes de Lofoten
Et pourtant c’est en moi comme si j’aimais
Ce lointain coin de terre et toute sa peine.

Vous disparus, vous suicidés, vous lointaines
Au cimetière étranger de Lofoten
-Le nom sonne à mon oreille étrange et doux,
vraiment, dites-moi, dormez-vous, dormez-vous ?

-Tu pourrais me conter des choses plus drôles
Beau claret dont ma coupe d’argent est pleine
Des histoires plus charmantes ou moins folles ;
Laisse-moi tranquille avec ton Lofoten.

Il fait bon. Dans le foyer doucement traîne
La voix du plus mélancolique des mois.
-Ah ! Les morts, y compris ceux de Lofoten -
Les morts, les morts sont au fond moins morts que moi.

OV de Lubicz-Milosz

 

(à l'époque où nous devisions si souvent le jeudi soir, AlmaSoror avait mentionné déjà l'étrange Franco-Lituanien).

lundi, 23 décembre 2013

Toi

Mon amour.jpg

Je ne sais pas qui tu es, toi, l'un des visiteurs d'AlmaSoror, toi qui par tes clics participes à cette statistique actuelle de 450 à 700 visites par jour sur ce blog qui te ressembles peut-être.

Tu ne commentes jamais, ou presque jamais, les billets que tu lis certainement.

Tu viens ; tu reviens.

Aussi est-ce un peu pour toi que je me lève le matin.

Quand l'architecture bancale de mon moral s'effrite, quand l'édifice incertain de mon mental s'effondre, il reste toi dont la trace sur mon tableau de bord participe à la régularité des battements de mon cœur.

Sur le conseil de certains, j'ai tenté, quelque temps, d'ajouter un moyen de paiement paypal dans la colonne de gauche, mais ce bouton me gênait. Parce que j'étais contente d'avoir créé un lieu aussi gratuit, intemporel et étrange que le monde dans lequel je voudrais vivre. Aussi l'ai-je ôté.

Je pense que je t'aime. Je ne suis pas sûre que nous nous aimerions si nous nous rencontrions dans un endroit dit réel. Pourtant il faut bien que l'on s'aime pour que je t'écrive et que tu viennes visiter les terres poussiéreuses d'AlmaSoror (d'une poussière blanche et lumineuse, intangible).

En quelque sorte, je voulais te dire Merci.

 

Edith d'AlmaSoror

dimanche, 24 novembre 2013

Trois splendeurs pour un dimanche soir

Tu entres dans le Panis Angelicus de César Franck. Tu supplies : Ô mon Dieu, que vous existiez ou non, je vous en supplie du plus profond de ce que je connais de mon être, donnez un sens à ma vie !

La musique ne répond jamais rien de verbal aux demandes de l'esprit. Tu ne peux qu'assister aux échanges muets qu'elle et ton âme partagent. Mais quand la musique s'éteint, tu comprends que se donner à un être, à une cause, voilà un vrai sens. Se donner à une patrie, à un art, pourquoi ne le fais-tu pas ? Tu ne renonces jamais vraiment à cet ego qui te fait souffrir. Tu ne plonges jamais sans retour dans le don qui délivre.

Tu t'enfonces dans les Litanies de la Vierge noire de Francis Poulenc. Comme Talleyrand, le Prince boiteux, n'abandonna jamais les régimes politiques qu'il servit avant que ceux-ci ne se fussent abandonnés eux-mêmes, tu ne te trahiras pas afin que les autres puissent toujours te relever quand tu chutes. Celui-là même que tu nommes ton ennemi, te relèvera s'il sait par ta droiture que tu n'as jamais renoncé au noyau dur de ton être.

Tu le laisses t'emporter plus loin que tous les pas de tous les hommes, au fond du Requiem de Duruflé.

Vaincre l'angoisse : celle qui se lève presque en même temps que toi, ou bien, qui s'était déjà levée et que tu reconnais au moment où tu poses ton pied nu sur le parquet rustique de ta chambre. Tant qu'elle est là, elle est le signe et le témoin de ton absence d'espérance, de foi et de charité, car ces trois vertus prendraient autrement toute la place dans ta poitrine.

Le matin éclate de beauté ; pourtant la nuit tombe : splendeur des mystères de la musique qui réconcilie les pôles.

 

(- Qu'entends-je ? Quel est ce bruit ?

- Un chant.

- Le chant du crépuscule ?

- Le chant des druides qui monte du fond du chœur des choristes, à leur insu.

- Les druides ? Dans ces musiques de messe ?

- Jamais les prêtres du gui n'ont abandonné leur peuple celte. Ils se sont dissimulés dans les lieux intérieurs, en attendant que leur gloire éclate à nouveau, folle de joie.)

 

jeudi, 14 novembre 2013

Extrait II du journal de Baude Fastoul de Kevin de M-L

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16 novembre 2012

Je découvre l'histoire de Lizzie van Zyl, qui me fait comprendre à quel point Anglais et Américains ont créé les horreurs dont ils accusent les autres en permanence. Faut-il plonger dans le vertige face à l'horreur des souffrances qu'on inflige aux enfants, aux animaux, aux êtres ? Ou bien fermer les écoutilles et vivre la meilleure vie possible sans se laisser abattre par l'enfer qui nous frôle ? Christ, qu'en dis-tu ? Comment interpréter tes actes ?

La morale est-elle possible ? Ou bien le monde n'est-il qu'une suite de souffrances répétées ? Faut-il « se battre » pour une amélioration du monde ? Ou bien simplement prier et purifier son propre cœur ?

Enfants qui êtes nés pour subir les sévices d'êtres pour lesquels vous n'étiez qu'amour et générosité, bêtes qui ne comprenez pas qu'on vous transforme en chairs souffrantes et affolées, êtres de toutes sortes, abattus dans leur vol, puis mourant lentement au sol, dans l'incompréhension et le mépris... Quel est votre message ? Existez-vous ? Ne sommes-nous, les uns les autres, que les images de notre propre cauchemar ? Quel pouvoir avons-nous sur notre propre vie, sur la vie de celui qui est à côté de nous ? Est-il réellement possible de sauver quelqu'un ? Et si cette question existe, alors est-il réellement possible d'assassiner quelqu'un ? Cet éternel pourquoi devant la misère la plus poignante, a-t-il un sens ?

Quel est ce bouge que nous appelons « réalité » ? Et cette phrase qu'une étrange Édith Morning écrivit un jour : "Si j’avais su que les rêves sont réels et le monde illusion, j’aurais inversé ma vision de la liberté et celle de la prison. Mais les menteurs amers disent décriant les images qu’elles sont illusoires, et nous entraînent dans leur " réel " qui n’existe que dans leurs sombres couloirs".

Vérité, as-tu une consistance quelconque, quelque part ?

 

Kevin de Motz-Loviet

 

En savoir plus sur la Confrérie de Baude Fastoul

AlmaSoror avait déjà publié un premier extrait du journal de Kevin.

 

 

 

lundi, 28 octobre 2013

La grande cohorte des âmes qui attendent

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Ce billet est dédié à la mémoire d'une dame qui s'appelait Anne et que les enfants appelaient Mamé. Lorsqu'elle descendait les escaliers de la vieille maison glacée, les soirs d'hiver, apeurée par la tempête qui faisait claquer les volets, elle entendait des voix lointaines gémir : "priez pour nous... priez pour nous". C'étaient les âmes du Purgatoire, pour lesquelles elle égrenait des chapelets jusque très tard dans la nuit, à la lueur vacillante d'une lampe à pétrole.

Dans cette maison, il reste, poussiéreux sur une bibliothèque mangée par les mulots, un livre qui donne la clef de ce fait mystérieux.

Ce livre s'appelle Le Grand Moyen de la Prière.


Un extrait de l'ouvrage Le grand moyen de la prière,
de Saint Alphonse de Liguori (XVII° siècle) 

Autre sujet de controverse : Y a-t-il lieu de se recommander aux âmes du Purgatoire ?
Certains répondent qu'elles ne peuvent pas prier pour nous. Ils s' appuient sur l'autorité de saint Thomas pour qui ces âmes, se purifiant au milieu des souffrances, nous sont inférieures et, de ce fait, elles ne sont point « intercesseurs, mais bien plutôt des gens pour qui l'on prie ». Cependant beaucoup d'autres docteurs, tels que Bellarmin, Sylvius, le Cardinal Gotti, etc... affirment le contraire comme très probable : on doit pieusement croire que Dieu leur fait connaître nos prières afin que ces saintes âmes prient pour nous, en sorte qu'il se fasse entre elles et nous un bel échange de charité : nous prions pour elles et elles prient pour nous. Ce qu'a écrit le Docteur Angélique, à savoir qu'elles ne sont pas en situation de prier, n'est pas absolument contraire à cette dernière opinion, comme le font remarquer Sylvius et Gotti : autre chose, en effet, est de ne pas être à même de prier par situation et autre chose de ne pas pouvoir prier. Ces saintes âmes ne sont pas habilitées à prier de par leur situation, c'est vrai, parce que, comme dit saint Thomas, elles sont là en train de souffrir, elles sont inférieures à nous et elles ont besoin au plus vite de nos prières. Elles peuvent pourtant fort bien prier pour nous parce que ce sont des âmes amies de Dieu. Si un père qui aime tendrement son fils le tient enfermé pour le punir de quelque faute, ce fils n'est plus alors en situation de prier pour lui-même, mais pourquoi ne pourrait-il pas prier pour les autres et espérer obtenir ce qu'il demande en vertu de l'affection que lui porte son père ? De même les âmes du Purgatoire sont très aimées de Dieu et confirmées en grâce. Rien ne peut leur interdire de prier pour nous. L'Église, c'est vrai, n'a pas coutume de les invoquer et d'implorer leur intercession, parce qu'ordinairement elles ne connaissent pas nos demandes. Mais l'on peut croire pieusement (comme on l'a dit) que le Seigneur leur fait connaître nos prières. Alors, elles qui sont remplies de charité, ne manquent certainement pas de prier pour nous. Quand sainte Catherine de Bologne désirait quelque grâce, elle recourait aux âmes du Purgatoire, et elle se voyait vite exaucée. Elle certifiait que beaucoup de grâces qu'elle n'avait pas obtenues par l'intercession des saints, elle les avait ensuite reçues par l'intercession des âmes du Purgatoire. Que l'on me permette de faire une digression au bénéfice de ces saintes âmes. Si nous voulons obtenir le secours de leurs prières, il est bon que nous-mêmes nous nous efforcions de les secourir par nos prières et nos œuvres. J'ai dit : Il est bon, mais il faut ajouter que c'est là une obligation chrétienne : la charité nous demande, en effet, de secourir le prochain chaque fois qu' il a besoin d' être aidé et que nous pouvons le faire sans que cela nous pèse beaucoup.
Or, il est certain que les âmes du Purgatoire sont aussi notre prochain. Bien qu'elles ne soient plus en ce monde, elles continuent pourtant de faire partie de la communion des Saints. « Car les âmes des justes à la mort, dit saint Augustin, ne sont pas séparées de l'Église ». Saint Thomas le déclare encore plus clairement : la charité qui est due aux défunts passés à l'autre vie en état de grâce est une extension de cette charité que nous devons à notre prochain d'ici-bas : « Le lien de la charité qui unit entre eux les membres de l’Église, n'embrasse pas seulement les vivants, mais aussi les morts qui ont quitté ce monde en état de charité ». Nous devons donc secourir, dans toute la mesure du possible, ces saintes âmes : elles sont aussi notre prochain : et même leurs besoins étant encore plus grands que ceux de notre prochain d'ici-bas, il semble donc que, sous ce rapport, soit encore plus grand notre devoir de leur venir en aide. Or, en quelle nécessité se retrouvent ces saintes prisonnières ? Il est certain que leurs peines sont immenses. Le feu qui les consume, dit saint Augustin, est plus douloureux que toutes les souffrances qui nous puissent affliger en cette vie. « Plus douloureux est ce feu que tout ce que l'on peut avoir à souffrir en cette vie ». Saint Thomas est du même avis et il ajoute que ce feu est identique à celui de l' Enfer. « C' est par le même feu qu' est tourmenté le damné et purifié l'élu ».

 

Ceci concerne la peine du sens, mais beaucoup plus grande encore est la peine du dam, c'est-à-dire la privation de la vue de Dieu pour ses saintes épouses. Non seulement l'amour naturel mais aussi l'amour surnaturel, dont elles brûlent pour Dieu, poussent ces âmes avec une grande force à vouloir s'unir à leur souverain bien. S'en voyant empêchées par leurs fautes, elles en éprouvent une douleur très amère. Si elles pouvaient mourir, elles en mourraient à chaque instant. Selon saint Jean Chrysostome, cette privation de Dieu les fait souffrir infiniment plus que la peine du sens : « Mille feux de l'enfer réunis ne feraient pas autant souffrir que la seule peine du dam ». Ces saintes épouses préféreraient donc endurer tout autre supplice plutôt que d'être privées, un seul instant, de cette union tant désirée avec Dieu. C'est pourquoi , dit le Docteur Angélique, la souffrance du Purgatoire surpasse toutes les douleurs de cette vie : « Il faut que la peine du Purgatoire excède toute peine de cette vie ». Denis le Chartreux rapporte qu'un défunt, ressuscité par l'intercession de saint Jérôme, dit à saint Cyrille de Jérusalem que tous les tourments de cette terre ne sont que soulagement et délices à côté de la plus petite peine du Purgatoire : « Si l'on compare tous les tourments du monde à la plus petite peine du Purgatoire, ce sont des consolations ». Et il ajoute : « Si quelqu'un avait éprouvé ces souffrances, il préférerait endurer plutôt toutes les peines du monde, subies ou à subir par les hommes jusqu'au jugement dernier, que d'être soumis un seul jour à la plus petite des peines du Purgatoire. Ce qui fait dire à saint Cyrille que ces peines sont les mêmes que celles de l'Enfer quant à leur intensité, la seule différence étant qu'elles ne sont pas éternelles. Les douleurs de ces âmes sont donc très grandes. D'autre part, elles ne peuvent pas se soulager elles-mêmes. Comme le dit Job : « Il les lie avec des chaînes, ils sont pris dans les liens de l'affliction » (Jb 36, 8). Ces saintes Reines sont déjà destinées à entrer dans le Royaume mais leur prise de possession est différée jusqu'au terme de leur purification. Elles ne peuvent pas réussir par elles-mêmes (au moins pleinement, si l'on veut accorder crédit à certains docteurs, selon qui ces âmes peuvent tout de même par leurs prières obtenir quelque soulagement) à se libérer de leurs chaînes, tant qu'elles n'ont pas pleinement satisfait à la justice divine. Un moine cistercien dit un jour, depuis le Purgatoire, au sacristain de son monastère : « Aidez-moi par vos prières, je vous en supplie, parce que de moi-même je ne peux rien obtenir ». Cela est conforme au mot de saint Bonaventure : « Leur état de mendicité les empêche de se libérer », c'est-à-dire que ces âmes sont si pauvres qu'elles n'ont pas de quoi acquitter leurs dettes. Par contre, il est certain et même de foi que nous pouvons soulager ces saintes âmes par nos suffrages personnels et surtout par les prières recommandées dans l'Eglise.. Je ne sais donc pas comment on peut excuser de péché celui qui néglige de les secourir tout au moins par ses prières. Si nous ne nous y décidons pas par devoir, que ce soit au moins à cause du plaisir que nous procurons à Jésus Christ : c'est avec joie qu'il nous voit nous appliquer à libérer ces chères âmes pour qu' il les ait avec lui en Paradis. Faisons-le aussi à cause des grands mérites que nous pouvons acquérir par notre acte de charité à leur égard ; en retour, elles nous sont très reconnaissantes et apprécient le grand bienfait que nous leur accordons, en les soulageant de leurs peines et en leur obtenant d'anticiper leur entrée dans la Gloire. Lorsqu'elles y seront parvenues, elles ne manqueront pas de prier pour nous. Si le Seigneur promet sa miséricorde à ceux qui se montrent miséricordieux envers leur prochain : « Heureux les miséricordieux car ils obtiendront miséricorde » (Mt 5, 7).Ils ont bonne raison d'espérer leur salut ceux qui s'appliquent à aider ces saintes âmes si affligées et si chères à Dieu. Jonathan, après avoir sauvé les Hébreux par sa victoire sur les ennemis fut condamné à mort par son père Saül pour avoir goûté du miel malgré sa défense, le peuple se présenta devant le roi et cria : « Est-ce que Jonathan va mourir, lui qui a opéré cette grande victoire en Israël ? » (1 S 14, 45). Ainsi devons-nous justement espérer que, si l'un d'entre nous obtient par ses prières qu'une âme sorte du Purgatoire et entre au Paradis, cette âme dira à Dieu : Seigneur, ne permettez pas que se perde celui qui m'a délivrée des tourments ! Et si Saül accorda la vie à Jonathan à cause des supplications du peuple, Dieu ne refusera pas le salut éternel à ce fidèle à cause des prières d'une âme, qui est son épouse. Bien plus, selon saint Augustin : Ceux qui auront, en cette vie, le plus secouru ces saintes âmes, Dieu fera en sorte, s'ils vont au Purgatoire, qu'ils soient davantage secourus par d'autres. Observons ici qu'en pratique c'est un puissant suffrage en faveur des âmes du Purgatoire que d'entendre la messe pour elles et de les y recommander à Dieu par les mérites de la passion de Jésus Christ : « Père éternel, je vous offre ce sacrifice du Corps et du Sang de Jésus Christ, avec toutes les souffrances qu'il a endurées durant sa vie et à sa mort ; et par les mérites de sa Passion, je vous recommande les âmes du Purgatoire, particulièrement etc... » Et c'est aussi un acte de grande charité que de recommander aussi en même temps les âmes de tous les agonisants.

 Saint Alphonse de Liguori, IN Le grand moyen de la prière

lundi, 21 octobre 2013

L'absence de valeurs chrétiennes

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Dans les années 1960, le Vatican a fait avec la liturgie ce que beaucoup de pays ont fait avec l'architecture et l'urbanisme : destruction d'une grande partie d'un patrimoine multiséculaire et construction hâtive de nouveautés fonctionnelles qui vieillissent mal.

Je ne parlerai pas de ces changements liturgiques : abandon d'une langue universelle, abrègement du rite de la messe, traduction de cette messe abrégée dans les langues vernaculaires. Je parlerai d'erreurs de langage que les catholiques (et autres chrétiens) font souvent, en montrant par ces erreurs inconscientes, mais pas innocentes, qu'ils commettent de grands écarts par rapport à la foi qui devrait être la leur.

En parlant de valeurs chrétiennes, les chrétiens démontrent qu'ils sont entièrement convertis à la pensée laïque. En effet, une valeur est quelque chose de fondé sur la raison et le concensus. Ainsi, les valeurs républicaines n'ont rien d'une vérité révélée par un Dieu ni d'une vérité scientifique déduite après une étude rigoureuse : c'est un consensus humain, né de la réflexion de la communauté des hommes libres qui forment la République. Contrairement à la révélation divine, aux vertus cardinales et théologales, aux commandements, les valeurs ont vocation à être discutées, remises en question, modifiées en fonction de l'avancée de la raison humaine. Or le christianisme est une religion de la transcendance, et ce que cette religion propose, n'a rien de discutable ou de modifiable. Transformer le dogme de la confession chrétienne catholique en valeurs, revient à le trahir.

En parlant de former des élites chrétiennes, les chrétiens démontrent encore qu'ils se sont éloignés du message christique pour adopter des sentiments laïcs et une vision du monde sans religion. L'élite chrétienne, selon la tradition, se compose des âmes sanctifiées, des saints et de ceux qui leur ressemblent, de ceux qui iront directement au paradis sans passer par le purgatoire. En aucun cas, une gent de hauts diplômés, de dirigeants ou de riches ne peut constituer une quelconque élite chrétienne. Tout au plus forment-ils des élites laïques pratiquant la religion chrétienne.

Des valeurs chrétiennes, portées par une élite chrétienne ? Ce serait une hérésie à l'état pur. Il n'y a pas de valeurs chrétiennes, il n'y a que des vertus inaliénables, que la raison peut comprendre, mais qu'elle n'a pas vocation à modifier. Ainsi la foi, l'espérance, la charité, ou encore la communion des saints, l'obligation de ne pas pêcher contre le saint-esprit. Personne, pas le moindre clerc, ne peut prétendre tirer d'une vertu ou d'un commandement, une valeur. Les vertus et commandements sont à pratiquer tels quels, dans leur essence sacrée et n'ont pas à être traduits en comportements laïcs.

Quant à l'élite chrétienne, elle existe certes, mais n'a strictement rien à voir avec l'élite d'une société. Nous verrons au jour du jugement si nous en avons fait partie ou non, de l'élite chrétienne, et ce, que nous soyons trisomiques ou diplômés de l'école polytechnique.

Si dans une église ou dans une revue estampillée catholique, un évêque, même sincère, vous recommande de suivre les valeurs chrétiennes qui portent l'église, vous pouvez être certain que ce pasteur n'a pas beaucoup de chances de vous entraîner vers les portes du ciel.

 

Edith de CL

 

Le catholicisme sur AlmaSoror :

L'indult "Agatha Christie"

Les litanies de la bonne mort

Salve regina

Si, au jour du jugement

Solstice d'été ou la Saint-Jean

Évangélisation et assimilation

Un dimanche à Avila

Adélaïde

La charité

Je suis solitaire

Ode à Saint Kevin

Et moi j'écoutais, crevant d'ennui

Lettre de loup

L'orgueil

Tous les métiers mènent au ciel

L'abbé Suger, maître de l'an 3000

Pub montréalais

Hildegarde, abbesse d'antan

Une taverne québecoise...

Pleines de grâce : pietas de Rome et du Poiré-sur-Vie

Extase

John Littleton, un Américain à Reims

Le benêt de saint-vivien

Moi, si j'avais commis...

Familles, fières de vos mensonges

Rythmica oratio & Buxtehude

Cœur de pierre, Pierre qui Vire

Rorate Caeli

Toute la poussière du monde

Esclaves français à Alger

Chefs de guerre et de religion

Amour d'un homme pour son petit garçon

Les origines de la liturgie

Attendant la Jérusalem céleste

Mourir au bout du chemin

Depuis le désert

La nouvelle religion

Depuis l'aube

Hymne de Saint Jean

Je vois les chevaliers traverser les mers

Commentaire de Mirimonde sur une vanité

Inspirations prophylactiques

Psaume

Ma rencontre avec Anne-Pierre Lallande, chrétien, anarchiste, antispéciste

Para ti

Lettre d'amour de droite

 

 

lundi, 14 octobre 2013

Occident

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Ma patrie se réveille au matin des amours,
Les jambes brisées par le cerveau ;
Nos luttes sans sommeil nous ont parés d'atours
Aigus comme des ciseaux

Par la vitre du train, les sapins s'émerveillent
De nos cohortes d'animaux ;
L'étranger s'est enfui à force de nos veilles
Et nous retrouvons nos hameaux.

Il a pourri nos villes et sali nos enceintes,
Les couvrant de ses oripeaux ;
Sur les routes du monde, il laisse, ceintes et enceintes,
Ses femmes voguer sans matelot.

A force de nous vaincre, lui-même il s'est vaincu -
Et nous voilà, pauvres héros,
Pleurant sur notre terre à nouveau nue
Nos psychomorts et nos blessés mentaux.

L'âme bardée d'armes blanches au fond des trêves,
La patrie s'est levée comme on sort d'un tombeau ;
Notre sommeil sans lutte avait fécondé trop de rêves
Tranchants comme des couteaux.

Par la vitre du train qui fend la France,
Le coq chanta trois fois comme un godelureau :
Le voilà qui remonte sur les clochers en déshérence,
Pour l'Angélus du Renouveau.

 

Jean Bouchenoire jeudi matin 21 juin 2012

 

De Jean Bouchenoire, sur l'Âme-Soeur :

Vieilles fringues, vieux clodos

A bord de mon écran

Contre-légions signalétiques

Vanité des arts, vides esthétiques, vacuité des audiences

France chérie

Autarchie : au-delà de l'ordre et du désordre

Les marches de Bretagne

Tabous sans totems

Voyages électroniques

Le style immense et plein de pensée de Benoist-Méchin

Un billet sur Mongo Béti ?

 

La poésie sur l'Âme-Soeur :

L'album poétique

samedi, 12 octobre 2013

J'allais plus loin, et je me disais...

«J'allais plus loin, et je me disais qu'il fallait aussi du temps pour la simple charité. Il y a de ces personnes pressées de faire du bien et qui taylorisent même les sourires. On ne peut pas venir tout de suite au bout de ce qu'on voudrait dire, et bien souvent, dans les conversations, je crois qu'il faut un peu imiter ces paysans qui parlent des semailles, du mauvais temps, de la foire, de la politique, puis qui longuement se taisent, puis qui reprennent un cours d'entretien indifférent jusqu'au moment où ils glissent le mot décisif et qui doit germer en silence.

Cela est plus vrai encore quand on se trouve en présence de ceux qui souffrent et qui ont des âmes délicates».

Apostolus,

IN Le fruit des heures perdues

apostolus, le fruit des heures perdues, salve regina, parole, silence, souffrance, charité

vendredi, 04 octobre 2013

Salve, regina

cathédrale de Moulins, prières

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