samedi, 18 avril 2015
Quelques canettes de bière
Aujourd'hui, on ne pourrait pas croire que j'ai frôlé la déconnexion, la désinsertion, la rébellion réelle, radicale, la désadaptation totale. J'ai des failles, de grosses difficultés avec certains égards dus à la société, des défaillances cachées (ou qui se voient peut-être), mais, en gros, je suis « insérée », mesdames et messieurs. Plus qu'insérée. Personne aujourd'hui ne pourrait se douter de ce à quoi je ressemblais à certains moments de ma jeunesse.
J'admire bien sûr la geste punk, sa rébellion, son code de vie exigeant en totale contradiction avec notre société sédentaire et marchande. J'admire l'errance et le vagabondage ; je les ai fuis. Fascinée, lorsque j'étais jeune, par certains de ces groupes plus ou moins côtoyés, j'ai été tentée, mais je suis toujours restée, en quelque sorte, du côté de l'insertion. Sans doute parce que je savais que, de ma part, une désinsertion serait un chemin sans retour. Je savais que la misère était à deux doigts de moi, que je possédais toute la fragilité requise pour finir dans la rue ou dans un hôpital psychiatrique, à jamais perdue pour l'adaptation à la société. Et je ne voulais pas ce choix – pour plusieurs raisons. Par ambition : ma révolte n'a jamais éteint ce désir de reconnaissance que j'éprouve toujours, comme un vice fielleux et persistant, en dépit de tout ce que je pense du monde « officiel », administratif, institutionnel. Par pitié pour ma mère, ma sœur et mon frère : je savais que pour eux, ma chute dans la marginalité serait un drame, un poids, une horreur. Et, peut-être aussi, par raison : je crois que le cœur humain est le même dans une banque ou dans un local à poubelles, et je savais que ce que je voulais fuir pour toujours, je le retrouverais partout où il y avait des humains.
Tout à l'heure, je lisais, par hasard, à mon ordinateur, en vitrine près de la porte-fenêtre, suite à une suite de recherches sérendipiteuses, un article sur le mouvement punk... au moment où j'atteins les dernières phrases, une bande de punks avec leurs chiens s'arrête devant l'immeuble et s'installe sur la banquette en béton pour se taper des bières et discuter de leurs voix pâteuses. Ils sont trois ou quatre mecs, m'ont vue, moi je ne bouge pas, je continue à vaquer à mon ordinateur en espérant qu'ils partiront bientôt. Je ne pense pas qu'ils soient dangereux, mais bien entendu ils sont un peu inquiétants, surtout parce qu'ils sont bourrés et que l'alcool rend violent. Surtout, ils sont dans mon dos et me voient. Ce qui me frappe, c'est qu'il y a une ravissante plage à deux cents mètres de cette rue traversée de voitures. Ils s'installent dans un hall en béton, au bord des voitures, alors qu'ils pourraient se murger en contemplant l'océan, leurs chiens gambadant dans l'écume...
Et puis ils s'en vont. L'un d'eux m'a fait un geste, en criant : « au revoir madame ! ». Politesse et rébellion : c'est magnifique. Le summum de la conformité c'est le cadre mal-élevé. La beauté fatale émane de l'élégance morale des punks.
J'ai répondu d'un signe de la main et j'ai écouté words of love. Bières des errances, mises en bière des destins.
Cet article inutile à pour vocation de réquiémer une errance qui aurait pu avoir lieu à travers les villes. Elle n'a pas eu lieu.
Ici et ailleurs :
Nous demandons aux anges gardiens de se manifester
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vendredi, 17 avril 2015
Noctu
Depuis combien de temps n'ai-je pas vu la nuit, la vraie nuit, la nuit noire, ou la nuit éclairée uniquement par les astres ? Les lumières artificielles sont partout. Oh, nuit ! Je voudrais te contempler telle que tu es, dans ta splendeur noire, dans ta réalité brute, sans que t'atténuent les éclairages des humains.
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Lenteur de vivre
Si je marche une heure le matin, une demi-heure encore à un autre moment de la journée ; si, durant de longs moments, j'écoute le silence ; si je ferme de temps en temps les yeux pour laisser au sang le temps d'affluer jusqu'à mes paupières, je n'aurai plus besoin de prier : l'instant souvent sera prière.
Dans la lenteur de vivre, que ma parole s'appuie sur le silence, mon action sur le calme, mon rire sur l'amour.
Je n'entendrai plus seulement l'arbre qui tombe, mais aussi la forêt qui pousse. Chaque nouveau jour sera, à lui seule, une vie pleine et entière.
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jeudi, 16 avril 2015
Note sur la pulvérisation
« Le hamac est une forme de pulvérisation des non-fantasmes ».
Destiny Man
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mercredi, 15 avril 2015
La vie est un jour
Certains tronçons de rue, certains bouts de quartier ressemblent aux villes d'hier, celles que les vieux de ma jeunesse ne reconnaissaient plus. J'y bois la nostalgie des jours de malheur qui m'apparaissent, rétrospectivement, comme des aires de la jeunesse où le souffle et l'énergie coulaient entre mes doigts et dans mes cheveux.
Certains paysages se fichent des modes humaines et semblent ne changer jamais. Indifférents à tout ce qui croit sentir, à tout ce qui croit penser, à tout ce qui existe égotiquement, ils offrent leur splendeur sans se soucier des jugements d'admiration ou de mépris. Les vagues viennent de loin.
Avant minuit, les lumières électriques des ruelles éclairent encore les patios. Il est l'heure d'oublier les conflits de plomberie, d'administration, de politique et de travail pour se ressouvenir que vivre et mourir sont une seule et même action, un cocktail à la recette délicieuse et pernicieuse qu'il faut savourer sans se laisser distraire par le néant des occupations.
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mardi, 14 avril 2015
Le programmateur-programmeur
Votre rôle sera de répartir les rôles. Votre tâche sera d'assurer la maintenance du code. 24h sur 24, vous ferez en sorte que le code se maintienne afin que les informations circulent librement sur le réseau. Votre rôle de programmateur s’effectuera les jours pairs, tandis que vous assurerez la tâche de programmeur les jours impairs. Vous serez en binôme avec un inconnu que nous nommerons pour l'instant XVH13 et qui, quant à lui, sera programmeur les jours pairs et programmateur les jours impairs. Vous avez bien compris.
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dimanche, 12 avril 2015
Patio
Patio I - 6.4.2015 - vers 17h
Patio II 6.4.2015 - vers 17h
Patio III 6.4.2015 - vers 17h
La trilogie du patio constitue un billet blogal expérimental. Il ne faut donc pas la juger avec une analyse blogale classique. Ceci n'est pas un avertissement, mais une supplication.
Ailleurs sur AlmaSoror :
Ou bien encore :
Le blog d'AlmaSoror est-il un roman en chantier ?
Le groove dans l'écriture, le groove dans le blog
La solitude des champs de blogs
La solitude des champs de blogs II
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vendredi, 10 avril 2015
Les larmes paternelles
Ainsi l'organiste-compositeur Louis Vierne écrivit-il à l'un de ses amis, en 1918 :
« J’édifie en ex-voto un quintette de vastes proportions dans lequel circulera largement le souffle de ma tendresse et la tragique destinée de mon enfant. Je mènerai cette œuvre à bout avec une énergie aussi farouche et furieuse que ma douleur est terrible, et je ferai quelque chose de puissant, de grandiose et de fort, qui remuera au fond du cœur des pères les fibres les plus profondes de l’amour d’un fils mort… Moi, le dernier de mon nom, je l’enterrerai dans un rugissement de tonnerre et non dans un bêlement plaintif de mouton résigné et béat. »
AlmaSoror a déjà joint sa peine à celle de pères ayant perdu leur enfant, tel le musicien britannique Herbert Howells, et le patron de presse Saint-Simonien Louis Jourdan.
Nous avions également mentionné, déjà, Louis Vierne, le désespéré.
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mercredi, 08 avril 2015
Pourquoi écrire ?
« Pourquoi écrire ? Eh bien, parce qu’il faut que l’arbre donne ses fruits, que le soleil luise, que la colombe s’accouple à la colombe, que l’eau se donne à la mer, et que la terre donne ses richesses aux racines de l’arbre.
....
Et j'écris alors non pas comme un Blanc, ni comme quelqu'un asservi à une doctrine, mais comme un individu. Et mon message est valable, puisque je puise de mon propre fonds. Je ne prends rien de personne. Et mon originalité est une nourriture, parce qu'elle suscite en d'autres le désir d'être original, distinct, authentique, personnel sans être individualiste-pur.
....
Pourquoi écrire ? Mais afin de se donner. Et le don enrichit. Cette "richesse" grandit la personnalité. Et l’on monte. Où ? En soi-même. J’ai nommé la délivrance. Il n’y a pas d’autre forme de libération. »
Malcolm de Chazal, Pourquoi écrire ? IN Le Mauricien, 14 octobre 1961
Nous étions déjà devenus fous avec Malcolm de Chazal :
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mardi, 07 avril 2015
La loi sur le renseignement expliquée aux parents, par JB Favre
Tout ce que vous voulez savoir sur le projet de loi sur le renseignement sans oser le demander ? Jean Baptiste Favre vous l'explique avec élégance et clarté dans un article intitulé :
La loi renseignement expliquée à mes parents
Au long de ce texte, Jean Baptiste Favre ne perd jamais les deux points de vue de la loi : la considération juridique et philosophique, et l'aspect technique, à quoi il ajoute un point de vue intéressant sur la question (inter)nationale du renseignement.
En voici le sommaire :
La loi renseignement expliquée à mes parents
Il était une fois la démocratie
Du renseignement dans une démocratie
Le dérapage
La Loi Renseignement
Légaliser l'illégal
Élargir le champ d'action des services
L'auto-contrôle de l'exécutif
Possibilités de recours
Les techniques de renseignement
Sonorisation du domicile et géo-localisation
Identification et interception des téléphones mobiles
Interception de communications Internet
Rétention des données
De l'efficacité de la loi
Pour finir
"Mes parents adorent Internet. Ils trouvent ça génial.
Mais ils ne le comprennent pas. Du tout…
Non parce qu’ils ne veulent pas le comprendre, juste parce que… ça les dépasse, de très loin.
Du coup, pour leur expliquer la Loi Renseignement et notamment son volet Internet, je suis bien embêté. Y a des trucs techniques dedans, très techniques. Pourtant, les enjeux sont tout sauf techniques.
Et tant mieux au final.
Tant mieux parce que cela rend le texte abordable au plus grand nombre, ou presque. Reste qu’il faut l’expliquer, encore et toujours.
Inlassablement.
Pour que les gens comprennent et réfléchissent… ou pas".
La suite se lit et se relit par ici...
On peut suivre l'auteur sur twitter : JB Favre
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Présence
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lundi, 06 avril 2015
La tolérance est répression
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dimanche, 05 avril 2015
Au contre-fil des mois
Aujourd'hui, offrons-nous un petit voyage dans le temps almasororien, en extrayant de la nasse d'articles un billet de chaque mois de son existence.
2015
Mars : Blue note, Ô lumière de la vieillesse
Février : Le fils de Dieu, l'horloge et l'église
Janvier : Clair-obscur à Alma-Ata
2014
Décembre : La sonate du remords
Novembre : La rencontre du car
Octobre : La roseraie d'Aztlan
Septembre : La vie répétitive
Août : Lu dans les toilettes d'un bar à la station Robespierre à Montreuil
Juillet : Le dernier iftar
Juin : Le ménage moderne
Mai : Dolores, terrae incognitae
Avril : Charte du Mandé, discours de Seattle, pièce de la mort d'Athahualpa
Mars : Liberté d'expression et bienséance sociale
Février : Pink n'est pas punk
Janvier :18 juillet 1573 : Véronèse comparaît devant la Sainte Inquisition
2013
Décembre : Du victimat
Novembre : Sans Domicile Fixe
Octobre : Une enfance littéraire française I et une enfance littéraire française II
Septembre : Profession : auteur
Août : Militants radicaux des deux extrémités
Juillet : Qui a peur des hamacs ?
Juin : Le temps, l'ennui, la mort
Mai : Un dimanche à Avila
Avril : Lorenzo
Mars : Ta demeure
Février : Ouverture de l'Histoire de l'Afrique Noire, de Ki-Zerbo
Janvier : Ces bêtes qu'on abat : une coche assoiffée
2012
Décembre : Position délictuelle
Novembre : Peine de coeur
Octobre : Les poussins refusés
Septembre : L'abbé Suger, maître de l'an 3000
Août : Florent Schmitt, l'éclat de votre musique nous fascine
Juillet : Le journal télévisé d'AlmaSoror
Juin : Pleines de grâce
Mai : John-Antoine Nau et Jean de La Ville de Mirmont : écritures dont la révélation viendra
Avril : La matière du rêve
Mars : Musiques de notre monde
Février : Le dernier rêve
Janvier : L'enfance, la civilisation et le monde sauvage
2011
Décembre : Épuration
Novembre : La solitude des champs de blogs II
Octobre : Beauté des affiches politiques
Septembre : Automnal andantino
Août : Un train ; deux mondes
Juillet : La bêtise et le mépris
Mai : Vieilles fringues, vieux clodos
Avril : La traque
Mars : Le désillusionné
Février : L'analyse comptable des rêves
Janvier : Dictionnaire de la délivrance psychique : "autoproclamé"
2010
Décembre : Le ministère de la justice et des libertés
Novembre : À quai, de Sara
Octobre : Dictionnaire de la délivrance psychique : "dérapage"
Septembre : Le catalogue éditorial d'Allia
Août : Soliloques de l'errance
Juillet : L'excommunication des insectes
Juin : La croix du Sud
Mai : Fin d'un amour, rue de Bourgogne à Paris
Avril : Hétérosapiens. Amour, sexe, filiation et liberté
Mars : Lettre d'amour de gauche
Février : Un problème variationnel
Janvier : Jules Vallès, un saisissant portrait par René Lalou
2009
Décembre : Commentaire de Mirimonde sur une vanité
Novembre : L'eau de vie de pomme (et les archives d'AlmaSoror)
Octobre : Rock antispéciste
Septembre : La formation de la société européenne
Août : La ville de perdition
Juillet : Liberté, égalité : au-delà du pride et du phobe
Juin : Le salariat : une aliénation en contradiction avec l'humanisme
Mai : La langue peut-elle être officielle ?
Avril : Libérer l'anima
Mars : SOS virtuel
Février : Sur Lucrèce
Janvier : Une marche humaine
2008
Décembre : 1007-2007 : la fortune d'un mot
Novembre : Mélange de paternités
Octobre : AlmaSoror s'embloguise
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samedi, 04 avril 2015
L'incessant son motorisé
Ce son effrayant des voitures, le connaîtrai-je toute ma vie ? Avec l'apparition d'Internet, des téléphones portables, j'ai connu déjà des révolutions. Vivrai-je un jour dans un monde où toutes ces routes qui défigurent le paysage seront devenues de belles promenades plantées, le long desquelles passe parfois un tramway silencieux ? Nous regretterons alors ces nuits à glisser sur le bitume dans la lumière des phares, nous oublierons à quel point le monde était déchiqueté, à quel point les enfants n'étaient pas libres de leurs mouvements, à quel point « ne pas se faire écraser », trouver « un passage pour piétons » faisaient partie de notre vie quotidienne, et gâchaient la possibilité des balades. J'attends avec impatience ce monde sans voiture. Il y aura beaucoup plus d'arbres, beaucoup plus de vie sur les « routes », qui ne seront plus des couloirs de béton, mais des chemins de fortune.
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vendredi, 03 avril 2015
R.I.P. au fond du couloir
Latitude : la trace photographiée des jours qui passent, dans une vie que j'aurais voulu autre et que je veux même, à mi-chemin entre le songe et la chair, le concret et le virtuel, le temps présent et la fuite.
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