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vendredi, 02 juillet 2010

Entrevue avec Siobhan Hollow, deltaplaniste

 

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Siobhan, peux-tu te présenter ?

J’habite au bord de la mer, dans une ville pourvue d’un club de vol libre. On peut donc faire du planeur, du deltaplane, du parapente. Je fais presque tous les jours du deltaplane, assez souvent du parapente et chaque dimanche, quand le temps le permet, nous sommes plusieurs à partir en planeur.

 

Comment vis-tu ?

Je vis des économies que j’ai faites en dix ans de travail dans la banlieue parisienne, j’ai été employée dans un magasin de fringues, puis serveuse, puis serveuse-responsable d’un bar. Je tiens comme ça depuis 3 ans, car tout le temps que j’étais au chômage (4 ans), je n’ai pas touché à mes économies, et même j’ai continué d’en faire. Mais un jour, sûrement, il faudra recommencer à travailler.

Tu n’as pas d’ambition professionnelle ?

Non.

 

Tu as des ambitions sur d’autres plans ?

Oui. J’ai des ambitions en vol libre : acquérir un plus grand calme en cas de danger, aller plus loin dans mes recherches d’équilibre, de mouvement, d’esthétique, sentir mieux le vent.

J’ai aussi des ambitions en guitare. Je joue de la guitare, j’avais suivi à plusieurs reprises quelques cours mais je n’arrivais pas à travailler régulièrement. Je préfère faire mon chemin guitaristique toute seule. Avec mon ordinateur je m’enregistre. Je compose, créée des œuvres et continue à me cultiver en lisant beaucoup de choses sur l’histoire de la guitare et en écoutant et réécoutant des œuvres. Une de mes plus grandes influences est Terje Rypdal. Mais il y a aussi Manitas de Platas, et plus récemment, grâce à toi qui m’as offert le disque, j’ai pu découvrir des œuvres contemporaines de guitare classique, jouées par Nadia Gerber.

 

Cherches-tu à te produire dans des lieux ?

Non. Je n’ai pas le courage de chercher, de me prendre des portes dans la figure. D’ailleurs, je ne suis pas sûre que ça m’intéresse vraiment de me produire en public. En revanche, je me voie bien ouvrir un blog sur Internet où je pourrais présenter mes compositions.

 

Comment vois-tu l’histoire de ta vie ?

J’ai renoncé à pas mal d’idées et de prétentions de jeunesse, en trouvant qu’une certaine vie sociale était trop compliquée pour moi. Mais j’ai rencontré quelques amis qui me donnent une certaine affection et qui partagent des moments avec moi, je ne me sens donc pas complètement seule. J’éprouve beaucoup de plaisirs solitaires, en plein ciel, avec ma guitare ou encore lors de longues promenades, et enfin en surfant sur Internet toute la nuit, à travers des sites intéressants qui nourrissent mon esprit. Je passe donc une grande partie de mon temps à être heureuse, tout en sachant que j’ai de grosses blessures au fond de moi, comme tout le monde je pense, et que je me prive de certains bonheurs et de certaines satisfactions. Mais cette privation est quelque chose que j’accepte. J’espère rester en bonne santé et pouvoir continuer à vivre dans cette ville, bien qu’il y fasse un peu trop froid et humide.

 

Comment as-tu découvert le ciel ?

Par hasard. Un copain voulait faire un stage de deltaplane mais il ne voulait pas s’inscrire tout seul et il m’a proposé, assez égoïstement dans son intention, de le faire avec lui. Je ne crois pas qu’il ait continué mais pour moi ça a été une révélation : voler dans le ciel. Peut-être que c’était un rêve d’enfance, d’évoluer dans le ciel comme un oiseau. Ça me rappelait Peter Pan, Niels Holgersson et Dumbo l’éléphant volant.

 

Et comment as-tu découvert la guitare ?

Comme tout le monde : on admirait au collège les guitaristes, on voulait tous devenir guitariste et un jour j’ai reçu une guitare en cadeau d’anniversaire. Mais la guitare est une activité complètement privée pour moi : personne ne sait que j’en joue, c’est mon jardin secret.

 

Siobhan, vas-tu continuer à écrire tes chroniques du ciel pour AlmaSoror ? Nos lecteurs appréciaient…

Cela me fait très plaisir que tu aies reçu autant de belles réactions sur mes textes. Du coup cela me donne envie de continuer, et d’être plus sérieuse, dans mon orthographe et dans la régularité de mes envois.

 

Merci de cette entrevenue et bon vol. A bientôt sur AlmaSoror pour tes descriptions de voyages deltaplaniques !

 

Hollow, Hollow :

Le retour de Siobhan Hollow

Entrevue avec Siobhan Hollow, deltaplaniste

Sur Schütz

Vol de pluie

Nocturne estival I : sous le royaume des étoiles

Notes et bulles bleues

Figures célestes

Vol libre et planantes guitares fordjiennes

La nuit, la guerre

Deltaplane

Lancement de la rubrique "vol libre" : hymnes au deltaplane

jeudi, 01 juillet 2010

Nuée

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un extrait de La nuée sur le sanctuaire, de Karl von Eckartshausen, mystique allemand du XVIIIème siècle.

 

"Aucun siècle n'est plus remarquable pour l'observateur paisible que le nôtre. Partout il y a fermentation dans l'esprit comme dans le coeur de l'homme ; partout il y a combat de la lumière avec les ténèbres, des idées mortes avec les idées vivantes, de la volonté morte et sans puissance avec la force vivante et active ; partout enfin il y a guerre entre l'homme animal et l'homme spirituel naissant.


Homme naturel !... renonce à tes dernières forces, ton combat même annonce la nature supérieure qui sommeille en toi... Tu pressens ta dignité, tu la sens même ; mais tout est encore obscur autour de toi,, et la lampe de ta faible raison n'est pas suffisante pour éclairer les objets auxquels tu devrais tendre.

On dit que nous vivons dans le siècle des lumières, il serait plus juste  de dire que nous vivons dans le siècle du crépuscule : çà et là, le rayon lumineux pénètre à travers la nuée des ténèbres, mais il n'éclaire pas encore, dans toute sa pureté, notre raison et notre cœur. Les hommes ne sont pas d'accord sur leurs conceptions ; les savants se disputent ; et, là où il y a dispute, il n'y a pas encore de vérité.
Les objets  les plus importants pour l'humanité sont encore indéterminés. On n'est  d'accord ni sur le principe de la raison ni sur le principe de la moralité ou du mobile de la volonté. Ceci est une preuve que, malgré  que nous soyons dans le grand temps des lumières, nous ne savons pas encore bien ce qu'il en est de notre tête et  de notre coeur.

Il serait possible que nous sussions tout ceci plus tôt, si nous ne nous imaginions pas que nous avons déjà le flambeau de la connaissance dans nos mains, ou si nous pouvions jeter un regard sur notre faiblesse et reconnaître qu'il nous manque encore une lumière plus élevée.
Nous vivons dans les temps de l'idolâtrie de la raison ; nous posons un flambeau de poix sur l'autel, et nous crions hautement que maintenant c'est l'aurore et que partout le jour apparaît réellement, en ce que le monde s'élève de plus en plus de l'obscurité à  la lumière et à la perfection par les arts, les sciences, un goût cultivé, et même par une pure compréhension de la religion.

Pauvres hommes ! jusqu'où l'avez-vous poussé, le bonheur  des hommes ? Y a-t-il jamais eu un siècle qui ait coûté tant de victimes à l'humanité que le siècle présent? Y a-t-il jamais eu un siècle où l'immoralité ait été plus grande et où l'égoïsme ait été plus dominant que dans celui-ci ? L'arbre se reconnaît à ses fruits.
Gens insensés !... Avec votre raison naturelle imaginaire... d'où avez-vous la lumière avec laquelle vous voulez si bien éclairer les autres? Est-ce que toutes vos idées ne sont pas empruntées des sens, qui ne vous donnent point la vérité, mais seulement des phénomènes ?"

mercredi, 30 juin 2010

Lac de nuit

 

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photo de Sara

 

 

Lac de nuit, sur ta rive herbeuse je dansais

Loin des villes lumière où tout s'éberluait

C'était l'été naissant, mon père était parti

Et la voix des amants m'ensorcelait l'esprit

Entre deux crépuscules il fallait que j'ordonne

Aux bateaux condamnés dans les Sables d'Olonne

De naviguer encore et toujours sur le flot

De l'enfance oubliée où gisent les héros.

Sur twitter, le mardi, l'on peut écrire des alexandrins. Ensuite, on écrit #tat et ça rejoint le grand jardin twitterien des alexandrins du mardi. Il y en a dans beaucoup de langues, mais le français, n'est-ce pas la langue de l'alexandrin ?

mardi, 29 juin 2010

Couple

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De toutes façons, il aurait fallu que tu ne lises pas le journal tous les matins en buvant ton café. Le monde est toujours moderne pour les gens qui y vivent, puisque les autres, ceux du passé, sont morts. Nous sommes donc tous, depuis la nuit des temps, des gens modernes dans un monde moderne et ton coach ne faisait que te répéter des choses rabâchées que tu aurais dû connaître de toi-même. Tu avais grandi en banlieue parisienne, dans un monde de gymnase et de piscine, avec des vacances en mobile home. Nous ne nous comprenions que très peu, et pourtant nous vivions ensemble, parce qu’aujourd’hui on se rencontre et on se sépare comme si on était tous pareils. Tu voulais la télévision et un garage pour deux voitures. Je ne pouvais comprendre la façon dont tu faisais des économies et des dépenses. Tu te sentais à l’aise dans les supermarchés. Et les gens qui nous entouraient trouvaient ça bien qu’on soit différents. Mais nous, nous avions des scènes et cet appartement de la rue Saint-Antoine était vide de sens à nos quatre yeux. Alors tu as repris tes appareils à raclette et j’ai repris mes vieux livres inutiles et nous continuons chacun notre vie toi dans la solitude de ton immeuble moderne et moi dans le néant d’une vieille cour du boulevard Voltaire. Tout cela n’a servi à rien, à rien d’autre qu’à prouver qu’on ne prescrit pas la vie, on ne prescrit pas les amitiés ni les amours, on les subit comme on subit son propre corps, qui est nous et sans lequel nous ne sommes rien, que nous n’avons pas choisi et que, bien souvent, nous n'aimons pas tant que ça.

 

Marin Dupondt

lundi, 28 juin 2010

Les origines de la liturgie

 

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Un cours de Maxime KOVALEVSKY à lire sur ce site

 

Voici très brièvement, un rappel de la méthode appliquée à l'enseignement religieux traditionnel : dès sa tendre enfance, le Juif apprend quotidiennement par cœur et fragment par fragment, les Écritures en hébreu en même temps que leur traduction en araméen. Ainsi se gravent en lui des textes traditionnels qui, organiquement assimilés grâce à un système "formulaire" mnémotechnique, font de lui un livre vivant. Devenu adulte, il participe aux exercices hebdomadaires de remémoration en hébreu des textes sacrés, faite par un Lecteur spécialisé (le mikraïste), suivie immédiatement par sa traduction proclamée en araméen par un Intermédiaire-Interprète (le targoûmiste, ou paraclîta-metourgueman, le "paraclet"), qui ne doit jamais "lire" le texte sur lequel il lui est interdit de jeter le regard afin de garder à ce qu'il dit son caractère d'oralité, de parole "vivante". Puis intervient un Commentateur Inspiré (le midrashiste) généralement un rabbi connu et vénéré grâce auquel s'éclaire la parole de Dieu.

C'est ici qu'il nous est apparu comme une évidence frappante, que les trois étapes soudées de ce mode d'enseignement ont tout naturellement préparé le peuple juif à recevoir la Révélation Trinitaire : le Mikraïste lit le texte hébreu sacré qui remonte à l'origine des temps et que l'on vénère sans le comprendre ; c'est la première étape qui correspond à Dieu le Père, Source de Vie. Puis grâce au Targoûmiste ce texte sacré s'anime, devient "verbe", incarné en langage vivant. C'est la deuxième étape, celle qui correspond à la venue du Fils, Incarnation du Verbe. Et enfin le Midrashiste inspiré commente cette Parole de Dieu devenue vivante, et ouvre les âmes à sa compréhension. C'est ainsi que dans la Trinité apparaît le rôle du Saint-Esprit. Et quand le Christ, le Jeudi Saint, annonce : "Un autre Paraclet viendra", ce mot signifie à la fois traducteur, commentateur et consolateur, et il annonce un enseignement plus avancé.

Ce n'est donc pas dans un monde ignorant que vient le Christ, mais au contraire parmi des gens admirablement préparés à Le recevoir, aussi bien dans la classe soi-disant illettrée qui L'attend tel qu'Il vient, que dans la classe intellectuelle du Temple profondément hostile à la Révélation qu'Il apporte et qui bouleverse les situations établies.

 

Maxime KOVALEVSKY à lire ICI

 

1982

Cours 1966-67 revu et augmenté

samedi, 26 juin 2010

Ostende

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Une chanson de Gribouille... disparue dans les barbituriques et l'alcool en 1968, juste avant la gloire.




Si je savais parler d'Ostende
Moi, je lui donnerais ton nom
Je dirais à qui veut l'entendre
Que tu mérites une chanson.



Ostende, tu me l'as faite si jolie
Personne jamais ne m'a changé Paris.
Et de mémoire de vague
S'il en faut en croire les vagues
Et de mémoire d'algue
Si l'on veut croire les algues.

Il n'y a pas eu avant
D'amants plus beaux que nous
Et même que Tristan
Dormait à nos genoux.

Si je savais parler d'Ostende
Je lui en demanderais pardon
Car je jure à qui veut l'entendre
Qu'elle a toujours porté ton nom.

Ostende qui faisait taire ses navires
Je sais, c'était pour mieux t'entendre rire.
Et nous étions debout
Sans savoir qu'il pleuvait.
En buvant cet orage
Pour Dieu que je t'aimais !

Les mots que tu m'as dits
Ils ne s'écrivent pas
Les plumes et les poètes
Se taisent quelquefois.

Si je savais parler d'Ostende
Je ne dirais rien de la mer
Mais dirais à qui veut l'entendre
Que l'amour te fait les yeux verts.

Je ne sais pas parler d'Ostende
Je ne sais faire qu'une chanson
Il n'y aura que toi pour comprendre
Que tout au long j'ai dit ton nom.

 

Le site de Gribouille

vendredi, 25 juin 2010

Pasión digital

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phot Sara

 

Por Antonio Zamora

 

Algo en él no le perdonaba que la hubiese abandonado. Hacía ya más de dos semanas desde que don José María Peña, vecino de Miranda del Duero, solterón y curtido profesor de Matemáticas en el instituto local, decidiera no volver a encontrarse más con Lucinda, la joven enfermera quince años más joven de la que la primavera anterior creía haberse enamorado.

Entonces, mientras ella le curaba amorosamente aquella inoportuna fístula anal, el maduro profesor había llegado a la conclusión de que no había otra mujer igual. Y tras un mes de asedio y ofrendas de rosas rojas, la chica se había rendido finalmente a sus pretensiones. A una inaugural salida al cine vestido de domingo siguieron varias cenas almibaradas que culminaron en el primero de los encuentros en casa de él. Y estos se acabaron haciendo tan frecuentes e intensos que el profesor no dudó en invitar a su amada a unas cortas vacaciones de verano en Torrevieja.

Hasta que don José María no aguantó más. Sentía que aquella relación le desasosegaba, que le alteraba de manera intolerable sus rutinas. Ya era bastante grave que hubiese empezado a incumplir compromisos hasta entonces sagrados para él, como el paseo matinal de las siete, su siesta de las cuatro y media o el dominó de las seis. Además, Lucinda desordenaba su habitación, le escondía los gemelos, se bebía su vino, reía sin parar. ¡Y toda aquella palabrería sentimental! Pero sobre todo... Sobre todo, resultaba desconcertantemente impúdica en la intimidad.

Y la abandonó. Sin explicaciones. Simplemente dejó de contestar a sus llamadas.

Pero algo en él no podía entenderlo, y mucho menos perdonarle. Era su dedo corazón, el de la mano izquierda. No aceptaba su decisión. Se negaba a renunciar a Lucinda, la única mujer que le había hecho realmente feliz. En su presencia, el dedo sentimental se había sentido renacer. Ella le había permitido conocer la pasión, el juego amoroso, la maravilla de ser deseado. Por primera vez en su vida tenía una misión y un cuerpo en el que cumplirla. Añoraba desesperadamente aquellos encuentros con la alegre muchacha, sus suaves deslizamientos por los tiernos labios, sus incursiones en espiral hasta lo más alto de aquellos generosos senos. Añoraba, sobre todo, la húmeda calidez de su sexo. Se aproximaba siempre muy despacio desde la leve trinchera del ombligo y, una vez en el rizoso bosquecillo, dibujaba un lento círculo de reconocimiento. Entonces se lanzaba alegremente a la exploración de aquellos pliegues, tan salvajes y dóciles a la vez, que recorría primero con marcada curiosidad y a continuación con creciente frenesí. Hasta que acababa emergiendo gloriosamente empapado y exhausto.

Cómo añoraba eso.

Y el dedo se deprimió. Se fue encorvando poco a poco, de forma casi imperceptible. Dejó de responder a su legítimo dueño. Don José María comenzó a advertir la inconveniencia en actos tan cotidianos como rascarse la nariz o como borrar la pizarra en clase. La segunda vez que se le cayó el borrador al suelo, se sonrojó vivamente y tuvo que apoyarse unos segundos en su mesa para no perder el equilibrio. Desde entonces ordenaba limpiar la pizarra al alumno más cercano. El dedo sólo abandonaba su letargo cuando su propietario, ahora tirano, pasaba cerca del hospital. Adivinaba entonces la proximidad de ella y comenzaba a temblar y a dar nerviosos saltitos dentro del bolsillo del pantalón, donde pasaba cada vez más tiempo recluido. Eso desasosegaba muchísimo a don José María, que apresuraba el paso con gesto desencajado. Pero la del dedo era una euforia pasajera, a la que invariablemente seguía un estado depresivo aún más pronunciado que el anterior. Su melancolía era tan extrema que el resto de dedos de la mano empezaba a entristecerse también. Y don José María, avergonzado, empezó a rehuir a sus semejantes y hasta dejó de acudir a la partida de dominó de todas las tardes, temeroso de ser descubierto.

Una mañana, durante el paseo diario, aprovechando un leve resbalón del profesor sobre una hoja otoñal, el dedo deprimido quiso acabar con todo. Se lanzó en picado hacia el suelo, arrastrando al resto del cuerpo en su suicida determinación. Intentó clavarse hasta el fondo, pero la solidez del pavimento se lo impidió con notable dolor para el sobresaltado docente. Maltrecho, se incorporó con dificultad y examinó su mano. Advirtió con los ojos muy abiertos que el dedo kamikaze, dislocado, se obstinaba en señalar no sabía qué punto lateral al que él ni siquiera se atrevió a mirar. Pensó que había que actuar con rapidez, antes de que sus compañeros se contagiasen de su locura de amor y decidiesen abandonar ellos también el orden establecido. Lo aferró con la mano leal y tiró con fuerza de él hasta devolverlo a la rectitud. Según pudo observar, la expeditiva muestra de autoridad hizo comprender a los otros dedos, de pronto más dóciles, las virtudes de la obediencia. Pero muy pronto tuvo que ver también cómo una ira feroz se adueñaba del apéndice sentimental, que crecía y crecía incontenible. A punto de estallar, adquirió un tono azulado que don José María identificó con el de la más descabellada utopía.

Se vio obligado a aprisionarlo de inmediato en una rígida camisa de fuerza, con el propósito de mantenerlo en ella hasta que depusiera su insensata actitud. Ahora, al menos, reflexionaba don José María, su insolencia estaba oculta a las miradas de los demás. Pero no podía evitar sentir, cada vez que contemplaba su mano, que el dedo enamorado se vengaba de él con la más obscena de las burlas.

Antonio Zamora

 

Toi, le limnologue

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Tu es le premier limnologue que je rencontre. Lorsque tu as prononcé ton prénom, puis ton nom, je n'ai rien ressenti. Ils ne voulaient rien dire. Ils ne parlaient pas de toi. Je le pressentais à tes yeux lointains.

Et puis tu as dis :

- Je suis limnologue.

Et la terre s'est entrouverte sous mes pieds. Du fond des âges est monté un chant néanderthal. J'ai compris que tu savais la science des eaux superficielles continentales ou intérieures. Mes eaux intérieures t'étaient révélées avant même que je n'en prenne conscience. Tu lisais au-delà de mon cordon ombilical mais tes yeux restaient lointains, comme deux pierres d'une planète anciennement belle et morte.

Tu as répété, à quelqu'un qui ne comprenait pas :

- Limnologue. Li-mno-logue.

Et je disais en moi-même "limnologue. Limnologue".Quand j'ai rouvert le troisième oeil, tu parlais de François-Alphonse Forel et des lacs suisses. J'ai voulu parler de Thomas Mann et de mon meilleur ami, Hanno Buddenbrook. Mais tes yeux glacés ne m'entendaient pas.

Alors j'ai repris rendez-vous avec le sophrologue aux trois palmiers, celui qui manie le pendule. Je veux comprendre. Je veux savoir. Je veux guérir la blessure des eaux dormantes, celle qui ne t'intéressait pas.

 

Esther Mar et Edith de CL


jeudi, 24 juin 2010

Rompre et parler suédois

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rétroviseur par Sara

 

 

Rompre et parler suédois, par Manuel Gerber

Ami lecteur, amie lectrice,

 

Hier, Nils Bergman a décidé de mettre fin à sa relation amoureuse avec Axel Johansson, jeune écrivain suédois. Il lui écrit aujourd’hui ce court message :

 

 

Hej Axel,

 

 

Det var trevligt att ses i går, trots allt.

 

Hoppas du mår bra. Jag är verkligen ledsen att det blev som det blev, men ibland är livet inte så lätt.

 

Jag har läst och rättat din roman. Det blir ganska många fel om man ska rätta varje detalj, men det är ändå en bra roman.

 

Kram,

 

Nils

 

Hej: bonjour

Det : cela

Var: était

Trevligt: bien

Att : de

Ses: se voir

I går: hier

Trots: malgré

Allt: tout

Hoppas : j’espère

Du : tu

Mår: vas

Bra: bien

Jag : je

Är : suis

Verkligen vraiment

Ledsen: triste

Att : que

Blev: s’est passé

Som : comme

Men: mais

Ibland parfois

Är : est

Livet : la vie :

Inte: pas

Så: si

Latt: facile

Har: ai

Läst : lu

Och et

Rättat : corrigé

Din : ton

Blir : semble

Ganska : assez

Många : beaucoup de

Fel: fautes

Om: si

Man: on

Ska : doit

Rätta : corriger

Varje: chaque

Detalj : détail

Ändå: pourtant

En : un

Bra : bon

Kram : bise

 

Particularités :

 

  • En suédois, le verbe se trouve toujours en deuxième position après un complément. Cette particularité vous rappelle-t-elle une autre langue ? Souvenez-vous de notre dernier cours de néerlandais. Ces deux langues sont extrêmement proches.

 

Ibland är livet inte så lätt (parfois est la vie pas si facile)

 

  • Une autre grande particularité est que le verbe conjugué est toujours le même à chaque personne :

 

Vara (être)

Jag är

Du är

Han (il) är

Hon (elle) är

Det (cela) är

Vi är

Ni är

De är

 

Sachez chers lecteurs que le suédois est également parlé en Finlande et compris, bien que les différences soient nombreuses, par les Danois et les Norvégiens. Ceux-ci peuvent répondre dans leur propre langue. Des échanges en danois, en suédois, et en norvégien ont lieu quotidiennement Quand pourrons- nous, francophones, apprendre à comprendre les autres langues latines ? Aurions-nous besoin d’apprendre à les parler si leurs locuteurs nous comprenaient en retour. Quel dommage de parler l’anglais à un Portugais ou à un Italien, alors que nos langues sont si proches!

 

PS : je vous laisse mon courriel, si vous voulez me faire part de vos commentaires : manuelgerber@gmail.com

 

Manuel Gerber

Bruxelles


 

 

mercredi, 23 juin 2010

Villa Montsouris

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Ours love

 

Vous deviez danser, danser comme des fous, jusqu’à la dernière transe. Vous deviez porter les visions de ceux qui prennent des drogues. Vous deviez raviver les divinités mayas qui pleurent dans les oublis. Vous deviez chanter les invocations aztèques, en nahuatl, et mourir à l’hier comme on naît à demain.

Vous deviez ressusciter le vaudou du brésil et celui de Guyane. Vous deviez réciter le testament de Fidel Castro. Vous deviez faire tout cela et d’autres choses encore, les serpents attendaient dans des grands paniers de sables. Il y avait des plantes exotiques sur votre passage et des fontaines luxuriantes dans le jardin de la fête.

Lorsque je suis arrivée, il n’y avait plus personne. Des traces de la cérémonie gisaient au sol piétiné. Une grenouille croassait, un lézard mort au pied d’un mur me rappelait Jim Morrison. Ce n’était pas mai 68, c’était mai 2008 et ça avait tourné au désastre. Alors j’ai fini les champignons hallucinogènes et dans ma mémoire, remontèrent des scènes des Racines du Ciel, de Romain Gary et John Huston. Et je me suis dit : il y a un temps pour les révolutions de rue et un temps pour les révolutions intérieures. Et j’ai fait ma révolution intérieure.

mardi, 22 juin 2010

Waterloo II

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Durban Durban Durban ! Oh, Durban, morne plaine !

Comme une urne où recuit le maillot de la haine

Dans ton cirque de sueur, de gazon, de ballon

La pâle France hélait son mesquin bataillon

D'un côté c'est l'Afrique et de l'autre, l'absence

Choc navrant! Des blaireaux Dieu cachait l'inconstance

Tu désertais, victoire, et les bleus nous terrassent.

Durban, Durban ! je pleure et je tempête, hélas.

Car ces derniers félons de la dernière ornière

Furent bas ! ils gagnaient tout l'argent de la terre

Et l'amour du pays. Mais au creux de leur âme

Le néant seul régnait loin de la moindre flamme.

 

Lire Waterloo, de Victor Hugo :

 

 

Waterloo ! Waterloo ! Waterloo ! morne plaine !
Comme une onde qui bout dans une urne trop pleine,
Dans ton cirque de bois, de coteaux, de vallons,
La pâle mort mêlait les sombres bataillons.
D'un côté c'est l'Europe et de l'autre la France.
Choc sanglant ! des héros Dieu trompait l'espérance

Tu désertais, victoire, et le sort était las.
Ô Waterloo ! je pleure et je m'arrête, hélas !
Car ces derniers soldats de la dernière guerre
Furent grands ; ils avaient vaincu toute la terre,
Chassé vingt rois, passé les Alpes et le Rhin,
Et leur âme chantait dans les clairons d'airain !

Et cette plaine, hélas, où l'on rêve aujourd'hui,
Vit fuir ceux devant qui l'univers avait fui !
Quarante ans sont passés, et ce coin de la terre,
Waterloo, ce plateau funèbre et solitaire,
Ce champ sinistre où Dieu mêla tant de néants,
Tremble encor d'avoir vu la fuite des géants !

La Rostolane

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In memoriam Elle.

 

J'ai aimé l'astuce de Joël Robuchon : faire cuire chaque légume séparément, avant de les marier en une cuisson finale.

Je vous donne la recette de la Rostolane, inventée au soir du 21 juin de l'an 2010. Nous étions deux, nous la mangeâmes accompagnée d'un vin des Trois Colonnes et nous l'aimâmes.

Il faut d'abord mettre un bout de beurre dans une casserole et y découper un fenouil en lamelles. Un peu de miel aussi, ainsi le fenouil qui doucement dans le beurre et le miel.

Pendant ce temps, dans une poele, on fait revenir les lamelles de deux ou trois courgettes dans l'huile d'olive.

Pendant ce temps, dans une autre poêle, on fait frire, tout doucement et en surveillant, une aubergine coupée en tranche (dans la longueur ou la largeur, comme on préfère), dans de l'huile d'olive.

Pendant ce temps, au fond d'une grande cocotte ou casserole, on fait revenir de l'ail, des échalottes, des oignons (deux ou trois oignons d'espèces différentes, pour un bon bouquet oignonal...), dans beaucoup de beurre. On sale et poivre à volonté.

Et dans la dernière casserole, il faut dans un verre d'eau faire cuire deux ou trois tomates avec une cuillère de moutarde et du piment "langue d'oiseau" pili pili.

Dès que quelque chose est bien revenu, on l'ajoute dans la cocotte où mijotent les petits oignons, ails et échalottes. J'ai ajouté d'abord le fenouil, puis les courgettes, puis les aubergines, puis les tomates. Recouvrir ensuite d'un couvercle et laisser tout ça se mélanger, se fondre, s'embaumer durant de longues minutes.

Servir dans un beau plat et s'il en reste, garder pour le lendemain. Réchauffée après une nuit et un jour d'attente au frigo, la Rostolane sera encore meilleure !

annemarie schwarzenbach-erika mann-1932.jpgAnne-Marie Schwarzenbach & Erika Mann en 1932

lundi, 21 juin 2010

Album de route et de mer

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Même les adultes n’osent plus refermer les arches et les ponts qui laissent l’enfant, les chiens et le poisson passer. Les photos sont très belles et l’une d’elle rappelle le film Arizona dream, qui est une autre histoire de poisson.

Petite brouette de survie

Par Tieri Briet
et Alexandro Martinez
Éditions Où sont les enfants ?

 

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Le rêve du poisson


La nuit, au milieu d’une photo noire et jaune, un poisson du frigo demande au petit garçon de le ramener jusqu’à la mer.
L’enfant écoute la demande. Le jour suivant, à l’école, il rassemble les informations dont il a besoin. Alors, grâce au rêve du poisson, l’enfant vit une aventure magnifique.
Fini, l’école, les obligations. On construit une brouette-cabane et on part.
On va chercher la mer. Les chiens sont d’accord pour venir.
Même les adultes n’osent plus refermer les arches et les ponts qui laissent l’enfant, les chiens et le poisson passer. Les photos sont très belles et l’une d’elle rappelle le film Arizona dream, qui est une autre histoire de poisson.
Le poisson a peur des allumettes, du feu et de la folie des hommes. Mais l’enfant n’a pas peur du ventre de la mer, ni de la très ancienne langue animale difficile à comprendre.
La plus belle page, c’est quand l’écume des petites vagues rafraîchit les jambes du petit garçon, et qu’enfin le poisson va entrer dans la mer.
C’est bien d’avoir les pieds dans la mer, de rendre l’océan aux poissons, et de rendre les poissons à l’océan. Ce livre me rappelle une phrase du chef Indien Nez-Percé Smohalla. "Mes jeunes gens ne travailleront jamais. Les hommes qui travaillent ne peuvent rêver. Et la sagesse nous vient des rêves."

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25 mai 2006


Edith de Cornulier-Lucinière

 

dimanche, 20 juin 2010

Sommaire de la Dernière Messe

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phot Sara

 

"Nous avons, pour beaucoup d’entre nous, réalisé bien plus tard que ces deux êtres nous ressemblaient sans doute beaucoup plus que ce que nous avions imaginé, et, au fond, parce que nous aimons ces fascinations qui nous font rêver, elles nous ressemblaient beaucoup plus que ce que nous avions espéré.

Mais elles vivaient d’être un rêve, une légende, et nous nous repaissions de leur étrangeté".

Hélène Lammermoor, La dernière messe.

Traduit par Edith de CL

La dernière messe,

Sommaire

 

Hélène Lammermoor

traduit du nahuatl par Edith de Cornulier-Lucinière

 

Livre I Ouverture de la nuit opale

 

I Ouverture

II Le vent

III Rêve de bar

IV Oiseaux en partance

V Tango de minuit

 

Livre II Premiers souvenirs de Saint Jean En Ville

 

I Une carmélite

II Dans l’abîme des phares

III Angéla, Angéla

IV Le fauve blessé

V Le temple de Dionysos

VI Hommes amoureux

 

Livre III Le temps des reconversions

 

I Dies Irae

II Tombes dans la brume

III Tous les grains du chapelet

IV L’exaltation aux fenêtres

V Bris

VI Je confesse à Dieu tout puissant…

 

Livre IV La cuisine des vivants

 

I La route de Vanatabi

II Le cercle

III Docteur Philippus
IV La crèche

 

Livre V Résurrection

 

I Les chemins de rédemption

II La mort

III Paillettes et mantras

IV Requiem

V Kristina Carlson-Brousse

VI Dernière escale

VII Le jour, l’éternité

 

Annexe

Lettre de Sam Rey

Chronologie de la diva Tanglot Sango, avec une photographie

Partition de la chanson Tango de nuit

Carte et images de Saint Jean en Ville

La canción del zorro y el cuervo

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photo Sara

 

 

Zorro viejo huele rosa

delicada, dulce, tierna.

Zorro viejo huele rosa

y la busca y la desea.


Cuervo joven tiene rosa

en su rama solitaria.

Cuervo joven tiene rosa

en su pico y en su alma.

 

“Joven cuervo, ¡eres tan bello,

tan perfecto, tan sensible...!

¿No podrías cantarme aquello

que tus dulces ojos dicen?”

 

Cuervo joven se emociona,

va a iniciar ya su graznido.

Cae la rosa de su boca,

cae la rosa en un suspiro.

 

Una espina en el hocico

del zorro viene a clavarse.

Un aullido dolorido,

¡una carrera salvaje!


Cuervo joven, apenado.

Zorro viejo, escaldado.

La rosa yace en el barro...

y este canto se ha acabado.

 

Antonio Zamora