samedi, 14 août 2010
VERANDA
(un billet d'Edith)
Hier soir un ciel orange se vautrait sur la plage,
Et de la véranda tu parlais à l’océan
Les requins dansaient à l’horizon
Tu parlais en tahitien et je comprenais quelques mots
Les mouettes contemplaient la vie
Paresseusement
La chambre était rayée de lignes de soleil et d’ombre,
Et de la chambre,
La main au dessus des yeux,
Par les fentes de la natte qui striait la lumière,
Je te voyais à contrejour.
Comme d’habitude,
J’essayais d’écrire
Et cette fois j’ai compris
Que je n’ai définitivement rien
A dire.
E mea nehenehe teie i’a
E mea i’a teie vahine
Et de la véranda tu lançais dans le ciel
Des nuages de fumée légère
Tu fumais d’une main
Et de l’autre main tu caressais le feuillage épais des plantes
Le refrain tahitien partait dans le vent chaud
Vers l’horizon
Et dans la chaleur lascive de la chambre
La bouteille de mauna loa sur la table
Et la guitare sur les genoux,
Comme d’habitude
J’essayais de composer
Et cette fois j’ai compris
Que je n’ai définitivement rien
A dire.
Ua here ia vau i teie i’a
Teie i’a i roto i te moana nui
Hier soir est fini pour toujours
La mélodie en fa mineur
Et les accords vite égrenés
Sont oubliés.
Dans cette île de pêcheurs
Qui pêchent peu
Le temps passe et je ne bouge pas.
Le temps change et les saisons défilent
Il y a une horloge dans la cuisine
Que je ne regarde jamais.
Des choses se sont passées dans ma vie
Mais je n’en pense rien.
Les souvenirs se mélangent et se noient
Dans le rhum et le mauna loa.
Ici des sorcières tirent des cartes
Et me disent leurs avis
En fronçant les sourcils.
Hier soir après leur visite,
J’essayais de peindre,
Et cette fois j’ai senti
Que je n’ai définitivement rien
A dire.
E mea vahine i teie i’a
I roto i te moana-po
Hier soir un ciel orange se vautrait sur la plage
Et de la véranda tu parlais à l’océan
Tu parlais tahitien et je comprenais quelques mots.
Après quelques cocktails et un cigare cubain
Je suis descendue et j’ai pris
La longue barque.
Ce parfum de la vie que je ne peux décrire
Guidait mes rames sur les vagues.
J’ai toujours observé les poissons
Avec fascination
J’ai toujours observé les poissons
Avec fascination.
L’océan s’ouvre
Et je lui crie des choses
Qu’il emporte.
Quand le soir tombe j’essaie d’exister.
L’océan s’ouvre
Et j’entrevois l’apprentissage
Du silence.
Je pense que je devrais me taire ;
C’est clair, je devrais oublier
Les mots.
Avant que le rouge du ciel ne soit enfui,
Je suis rentrée, ayant compris
Que je n’ai définitivement rien
A dire.
Définitivement rien à dire,
Et j’observe les poissons avec fascination.
Définitivement rien à dire,
Et j’observe les glaçons avec fascination.
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