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mardi, 18 avril 2023

Bach, immortel antidote

Poème autodaté du 18.04.2023 :

Bach
aux notes dilatées dans l'oeuvre de Nystedt.
-
Immortal Bach, emportez-moi
plus loin,
-
plus loin que mes chagrins.

lundi, 17 avril 2023

un vieux chien désoeuvré

Un dimanche qui s'étire comme un vieux chien désœuvré. Les cris des enfants, les chants des oiseaux. Le ciel alternativement gai ou triste. Les jeux qui traînent, le papier alu des œufs de pâques en mauvais chocolat. Les ombres sur les murs, les poubelles des voisins, le grondement d'une moto de temps en temps. Des odeurs qui se succèdent, les fleurs blanches des arbres. Le téléphone qu'on triture presque dix fois par quart d'heure. Des tentatives d'écrire sur un cahier, de déchiffrer au piano. Les plantes se taisent. Les croquettes oubliées dans la gamelle du chien. L'enfant qui s'exerce à siffler. Les piles usés des drones et des jeux vidéos. Le linge dans les machines. La terre séchée sur les chaussures. Le silence de l'intelligence. La présence absurde du néant. Un dimanche banal, ponctué par la cloche qui sonne les heures et les demi-heures. Le malheur n'est pas là (ouf). Alors pourquoi se plaindre ? On s'ennuie : tout va bien.

samedi, 08 avril 2023

Quatrième méditation de Lamartine : A Laurence

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La quatrième méditation de Lamartine, "à Laurence",

Es-tu d’Europe ? es-tu d’Asie ?
Es-tu songe ? es-tu poésie ?
Es-tu nature, ou fantaisie,
Ou fantôme, ou réalité ?
Dans tes yeux l’Inde se décèle,
Sur tes cheveux le Nord ruisselle ;
Tout climat a son étincelle
Dans le disque de ta beauté !

 

Ne croyez pas que Lamartine s'est arrêté à une seule strophe. On peut plonger dans cette méditation à Laurence par ici...

dimanche, 02 avril 2023

La messe des oiseaux

Un chef d'oeuvre au purgatoire ? Mon Dieu pourquoi n'avais-je jamais entendu parler de la messe des oiseaux pour chœur de femmes de Dynam-Victor Fumet ? 

jeudi, 30 mars 2023

Aux filles du Calvaire

(Tu disais des poèmes aux quatre saisons. Tu n'es plus. Il faut bien que quelqu'un te succède à cette valse de mots.)

Voici Aux filles du Calvaire, poème du printemps 2023

 

Timide soleil, miel  pur dans la gorge ;

silhouettes en contrejour dans les chambrées des Quinze-Vingt.

Un ouvrier sifflote sur un chantier du quartier ;

pensées en demi-teinte, souvenirs d'un quatrain.

 

Cet homme m'aurait aimé, nous aurions eu un fils ;

le hautbois raisonnerait chaque dimanche matin.

Mais j'ai descendu l'escalier boulevard des Filles du Calvaire,

renonçant aux lueurs invitantes du destin.

 

Francis Lai et Beethoven accompagnent mes chagrins,

mon fils est un fantôme, une ombre de regret.

C'est quand le café fume, dans la tasse de Gien,

que j'offre à Jésus-Christ cet angélus amer.

 

Timide Carême, reflet sur le mur ;

pansements sur les yeux des chambrées des Quinze-Vingt.

De l'ordinateur en veille s'écoule un chant grégorien,

comme aux Filles-du-Calvaire, chez l'amant incertain.

 

voici, Le vieux majordome, le poème de l'hiver 2016-17 ;
voici Fazil, le poème du printemps 2017 ; 
voici Dans la chambrée, le poème de l'été 2017 ; 
voici Silentium, le poème de l'automne 2017, ; 
voici Héroïne, le poème de l'hiver 2017-18 ; 
voici Tbilissi, le poème du printemps 2018 ; 
voici Portrait d'été, le poème de l'été 2018
voici Pluie d'étoiles, le poème de l'automne 2018 ;
voici Spectre, le poème de l'hiver 2018-19 ;
voici Les champs de persil, poème du printemps 2019 ;
voici Antigua, poème de l'été 2019,
Voici Humus, poème de l'automne 2019.
Voici Je descends l'escalier du temps, poème de l'hiver 2019-20
Voicقسنطينة, le poème du printemps 2020
Voici Plombières-les-bains et Port-Saint-Rêve des Morts, les poèmes de l'été et de l'automne 2020
Voici Sils, le poème de l'hiver 2020-21
Voici Stance, le poème du printemps 2021
Voici Rompre, le poème de l'été 2021
Voici Renouer, poème de l'automne 2021
Voici Aprnée vosgienne, poème de l'hiver 2021-22
Voici Odessa, poème du printemps 2022
Voici La verveine du soir, poème de l'été 2022
Voici La nuit transpercée, poème de l'automne 2022
Voici infty , poème de l'hiver 2022-23

mercredi, 29 mars 2023

Genèse et littérature

Puisque un mari bien sous tous rapports l'a égorgée (après préméditation), écoutons tout ce qu'elle pouvait nous apprendre...

mardi, 28 mars 2023

Franz von Suppé du temps des Profondeurs

mardi, 14 mars 2023

Osip Klozowsky des profondeurs du Temps

vendredi, 03 mars 2023

Quatrain involontaire

« Puis vint cette voix,
Environ l’heure de midi,
Au temps de l’été,
Dans le jardin de mon père. »
 
Sainte Jeanne d'Arc, lors de son procès

mercredi, 22 février 2023

ces grands corps d’État en déshérence snob

Toujours passionnante Revue Conflits, qui propose un article sur la chute des ports français : 

Dans un récit vivant et cinglant, Paul-Antoine Martin transmet son expérience de douze années de travail au sein des grands ports français. Mais alors que le commerce international n’a cessé de croître au cours des vingt dernières années, les ports français stagnent. La responsabilité en incombe notamment au « Corps », une caste vaniteuse et imbue d’elle-même, qui peut accumuler les échecs sans jamais être sanctionnée. Une peine capitale pour la puissance française. 

Paul-Antoine Martin, Le Clan des seigneurs. Immersion dans la caste d’état, Max Milo, 2022.

Propos recueillis par Jean-Baptiste Noé.

Dans votre ouvrage, vous mettez en scène, de façon romancée, les pratiques et les modes d’action des hauts fonctionnaires, notamment ceux qui dirigent la gestion des ports (que vous regroupez sous l’appellation du Corps). On voit ainsi le héros principal, Coulanges, découvrir un univers et des méthodes qu’il ignorait à travers les agissements de son patron, Ursy. Ce roman est-il fondé sur votre propre expérience et ce que vous avez pu connaitre au cours de votre carrière professionnelle ?

Plus qu’un roman, il s’agit d’un récit. Certains aspects peuvent être fictionnels, mais tous les faits racontés ont réellement eu lieu. Il est vrai que de nombreuses anecdotes semblent avoir été inventées tellement elles paraissent incroyables ou grotesques, mais elles ne sont que stricte vérité. C’est d’ailleurs ce que j’ai tenu à souligner dès l’avant-propos du livre, conscient que l’on pourrait penser que je les ai tirées de mon imagination. Pendant une douzaine d’années, j’ai noté ce que je voyais du comportement de ces hauts fonctionnaires que je côtoyais quotidiennement, stupéfait par l’aberration dont j’étais témoin. Ces hommes dont je brosse le portrait appartiennent à l’élite administrative de notre pays. Ils font principalement partie d’un des trois corps d’État les plus prestigieux de la République, le corps des Ponts. Ils dirigent les plus grands ports de France, mais aussi toute l’administration qui est chargée d’en contrôler la gestion jusqu’au cabinet ministériel. Ils occupent donc tous les postes décisionnels de l’activité portuaire française, et cela depuis des décennies.

J’ai pu observer des comportements à la fois stupéfiants et révoltants. L’anecdote suivante que je relate dans mon livre dit beaucoup de choses. Coulanges découvre que les directeurs des sept plus grands ports français, appartenant tous au corps des Ponts, se sont fait tirer le portrait au studio Harcourt, lequel est le légendaire studio photo des plus grandes stars de cinéma. Le symbole est très puissant. Malgré des résultats désastreux, entre 2000 et 2019, les ports français n’ont bénéficié d’aucune croissance alors que le commerce maritime mondial a bondi de 100 % en volume, ces hommes s’estiment être des légendes vivantes du fait de leur seule appartenance au corps des Ponts. Ils forment une caste. Ultra bienveillants entre eux, fraternels mêmes, tout en étant méprisants, arrogants et sans aucune considération pour tous ceux qui ne font pas partie de leur caste. 

La position de ces hommes dans la haute administration, mais aussi dans les grandes entreprises du CAC40, fait que cette caste dispose du pouvoir. Ils se sont arrogé des privilèges considérables dont deux sont absolument exorbitants. À l’heure de la réforme des retraites, ces personnes bénéficient des avantages de la carrière longue, car ils sont rémunérés pendant leurs études ! Le second est le privilège ultime. Il s’agit de l’impunité. Ils ne risquent rien, absolument rien. Même s’ils prennent les pires décisions, pénalisant des milliers, voire des millions de Français, ils ne risquent rien et poursuivront leur carrière qui les mènera, quoi qu’il arrive, au plus haut niveau de ce que notre pays peut offrir. 

(...)

Paul-Antoine Martin/ Jean-Baptiste Noé, Revue Conflits

samedi, 04 février 2023

L'œuvre au noir brillera la dernière et pour toujours

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dimanche, 29 janvier 2023

Ballade en moi même, balade en lieux saints

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vendredi, 27 janvier 2023

paragraphe 3/ GAUDIUM ET SPES / Concile Vatican II

§ 3. De plus, tout ce qui s'oppose à la vie elle-même, comme toute espèce d'homicide, le génocide, l'avortement, l'euthanasie et même le suicide délibéré: tout ce qui constitue une violation de l'intégrité de, la personne humaine, comme les mutilations, la torture physique ou morale, les contraintes psychologiques; tout ce qui est offense à la dignité de l'homme, comme les conditions de vie sous-humaines, les emprisonnements arbitraires, les déportations, l'esclavage, la prostitution, le commerce des femmes et des jeunes; ou encore les conditions de travail dégradantes qui réduisent les travailleurs au rang de pur, instruments de rapport, sans égard pour leur personnalité libre et responsable : toutes ces pratiques et d'autres analogues sont, en vérité, infâmes. Tandis qu'elles corrompent la civilisation, elles déshonorent ceux qui s'y livrent plus encore que ceux qui les subissent et insultent gravement à l'honneur du Créateur.

Gaudium et spes, PARAGRAPHE 3, Concile Vatican II

mardi, 24 janvier 2023

(Tu disais des poèmes aux quatre saisons. Tu n'es plus. Il faut bien que quelqu'un te succède à cette valse de mots.)

Voici infty , poème de l'hiver 2022-23

 

infty

La vie clandestine

dans le froid urbain,

les jours blancs ou gris,

le café du destin ;

une silhouette mutine,

un enfant lointain,

zéro à l'infini

et la gare sans trains.

 

voici, Le vieux majordome, le poème de l'hiver 2016-17 ;
voici Fazil, le poème du printemps 2017 ; 
voici Dans la chambrée, le poème de l'été 2017 ; 
voici Silentium, le poème de l'automne 2017, ; 
voici Héroïne, le poème de l'hiver 2017-18 ; 
voici Tbilissi, le poème du printemps 2018 ; 
voici Portrait d'été, le poème de l'été 2018
voici Pluie d'étoiles, le poème de l'automne 2018 ;
voici Spectre, le poème de l'hiver 2018-19 ;
voici Les champs de persil, poème du printemps 2019 ;
voici Antigua, poème de l'été 2019,
Voici Humus, poème de l'automne 2019.
Voici Je descends l'escalier du temps, poème de l'hiver 2019-20
Voicقسنطينة, le poème du printemps 2020
Voici Plombières-les-bains et Port-Saint-Rêve des Morts, les poèmes de l'été et de l'automne 2020
Voici Sils, le poème de l'hiver 2020-21
Voici Stance, le poème du printemps 2021
Voici Rompre, le poème de l'été 2021
Voici Renouer, poème de l'automne 2021
Voici Aprnée vosgienne, poème de l'hiver 2021-22
Voici Odessa, poème du printemps 2022
Voici La verveine du soir, poème de l'été 2022
Voici La nuit transpercée, poème de l'automne 2022

 

lundi, 23 janvier 2023

Comment visiter la basilique de Paray

Par Raymond Dursel, IN BOURGOGNE ROMANE, 1968

raymond dursel,bourgogne romane

La basilique de Paray-le-Monial développe le plan, généreusement épanoui, d'une nef de trois travées, accostée de collatéraux et précédée d'un narthex long lui-même de deux travées ; d'un transept largement saillant sur chaque croisillon duquel étaient à l'origine greffées deux absidioles semi-circulaires (la jolie chapelle flamboyante à chevet polygonal et voûtes en étoiles, édifiée vers 1470 par la famille de Damas-Digoine, a remplacé celle du croisillon méridional) ; d'un vaste chevet, enfin, comprenant une travée droite flanquée de collatéraux de même largeur que ceux de la nef, et une abside semi-circulaire investie par un déambulatoire sur lequel s'ouvrent trois absidioles rayonnantes, précédées chacune d'une courte travée droite.

Sur ce schéma, les architectes clunisiens ont conçu un édifice d'une audace toujours contrôlée, servie par une maîtrise technique et par cette organisation rationnelle des volumes et des espaces qui était un de leurs secrets. La silhouette extérieure offre les plus beaux aperçus : qu'il s'agisse de l'élévation septentrionale, telle qu'on l'admire en tout son développement depuis les coteaux qui bordent la ville au Nord ; de la façade occidentale, resplendissante sous le soleil de l'après-midi ; du grand chevet enfin, dont l'étagement rappelle eux d'Auvergne, mais avec une toute autre cadence.

Le Narthex

La basilique s'ouvre à l'Ouest par un narthex qui, en dépit d'une restauration un peu excessive, n'est pas un monument négligeable. Il s'élève sur deux étages, sans autre communication qu'un escalier ménagé  dans l'épaisseur du mur de façade de la nef. Le rez-de-chaussée est entièrement voûté d'arêtes, qui reposent sur deux piles habilement reconstituées et renforcées par l'architecte Millet ; chacune d'elle se compose en fait de quatre colonnes moulurées ou torsadées, pourvues de bases ouvragées à la mode brionnaise traditionnelle, et surmontées de chapiteaux qu'unit un seul tailloir carré. Ce dispositif parait beaucoup trop ingénieux pour remonter à une époque aussi reculée que celle de la consécration de 1004 ; on le daterait avec plus de vraisemblance des années 1050 à 1080. 

La salle de l'étage, qui prend vue sur la nef par une large baie en plein cintre, accueille depuis plusieurs années d'intéressantes expositions d'été ; deux fortes piles cruciformes la divisent elle-même en deux travées ; le vaisseau principal, voûté en berceau, est contre-buté par les arêtes des collatéraux. Deux hautes tours carrées cantonnent et enserrent solidement la bâtisse. Celle du Sud, d'aspect nu et rustique, est ajourée à son sommet de deux étages de baies jumelles en plein cintres à colonnettes médianes ; celle du Nord, de construction plus complexe, s'apparente aux belles tours brionnaises et charollaises de Saint-Laurent, Vareilles, Perrecy-les-Forges, Saint-Julien-de-Jonzy, Rigny-sur-Arroux, toutes érigées vers 1120.

La nef

Une simple porte à tympan nu donne accès à la nef. Surprenant contraste ! L'élévation clunisienne fuse littéralement de la nef au chevet, dont le quadruple rang de baies superposées papillote comme les bouquets d'un feu d'artifice. Le triple étagement règne à la nef, au transept, à) la travée droite du chœur, fermement découpé par des bandeaux et pilastres qui se recoupent à angles droits : grandes arcades dont le rouleau extérieur s'orne d'un galon d'oves enrubannés ; placage de trois arcatures aveugles, réduites volontairement à la pureté du schéma et encadrées, en bas par un simple cordon mouluré, en haut par une corniche qui sert d'appui aux fenêtres supérieures et que soutiennent des modillons nus ; séparant les arcatures, des pilastres cannelés ; baies du troisième étage enveloppées par des archivoltes en plein cintre, portées sur des colonnettes rondes , dernière corniche soulignant la naissance des berceaux brisés, scandés par des arcs-doubleaux. 

Une élévation à relais

La rigueur de ce parti sait éviter toute sécheresse grâce à d'éblouissantes performances techniques, qui résument à elles seules la sagacité romane. La première consiste dans un système d'élévations à relais, par lequel les supports de l'architecture, loin d'être conçus comme des membres vides et inertes, semblent éliminer au contraire toute pesanteur. Les piles cruciformes, sont cantonnées de demi-colonnes sur trois de leurs faces ; mais, du côté de la nef, c'est un pilastre cannelé à l'antique qui s'appuie au dosseret ; au niveau des sommiers et des grandes arcades, un chapiteau le couronne, dont le tailloir sert d'appui à un second pilastre de même type, qui montre jusqu'au niveau inférieur du triforium, et que flanquent deux minces colonnes insérées dans les redents. Le bandeau qui souligne la base du triforium interrompt ce dispositif, que relaie désormais, jusqu'à la redoublée de l'arc-doubleau, une forte demi-colonne engagée dans un pilastre nu, et coupée seulement, à mi-course, par la corniche supérieure de triforium. La cohérence de cette armature est si parfaite qu'aucun dévers n'est constaté dans une élévation pourtant hardie ; les constructeurs n'ont pas même jugé nécessaire de renforcer les piles du transept qui avaient à supporter le poids de la coupe et du clocher : aucune rupture n'entame donc la continuité de la perspective depuis le fond de la nef jusqu'à la superbe conque absidale. 

L'encorbellement

La deuxième clé de l'architecture parodienne réside dans la science technique du procédé de l'encorbellement qui, renversant quant à lui les lois logiques de la pesanteur, fait reposer l'élévation sur des surfaces de plus en plus amincies du faîte au sol. Ainsi l'arc qui circonscrit le mur de façade de la nef retombe-t-il, de chaque côté, sur un pilastre d'angle qui, au niveau inférieur du triforium, le cède à une colonne, elle-même en porte-à-faux sur le bandeau soulignant le sommier de la grande arcade. Porte-à-faux semblable aux retombées des arcs qui divisent les voûtains d'arêtes du déambulatoire : les colonnettes jumelées qui les reçoivent s'insèrent exactement dans les écoinçons des belles arcades, à archivoltes décorées de damiers de billettes, qui soulagent le pourtour intérieur. 

L'exemple le plus significatif s'observe cependant à l'abside. Un premier effet d'allégement y est obtenu par la différence de niveau entre le berceau brisé de la travée droite du chœur et le cul-de-four absidal, monté sensiblement plus bas et selon un profil moins aigu. Mais, sous cette haute calotte, les archivoltes entourant la rangée des fenêtres hautes introduisent un premier décrochement ; sous les baies, un délicat feston de petits cintres détermine le deuxième surplomb, au-dessus d'un reposant espace de mur appareillé ; enfin, les arcades du sanctuaire, modèle de finesse et d'élégance, reposent par l'intermédiaire de corbeilles évasées sur des colonnettes dont le diamètre a été réduit au minium compatible avec la solidité.

L'éclairement

Enfin, la lumière mystique, tant vantée, de Paray-le-Monial découle d'un agencement des sources d'éclairage tellement habile qu'il se fait presque oublier, au profit de l'incomparable ambiance qu'il diffuse. Les rythmes ternaires des fenêtres hautes forment autour de la nef, des croisillons du transept et de la travée de chœur une guirlande continue. Quant à l'éclairement du chevet, auquel la lumière du matin donne toute sa valeur, comme une illustration des messages ardents livrés par le Christ à sainte Marguerite-Marie, il superpose quatre zones de percements admirablement réparties. 

Du milieu de la nef, on voit de bas en haut s'étager les baies inférieures du déambulatoire et celle de l'absidiole d'axe, puis les petites fenêtres percées au-dessus des premières, et qu'encadrent en un effet strictement contrôlé les arcades du sanctuaire ; puis les fenêtre hautes de l'abside ; et, enfin, les deux oculus et la petite baie médiane du mur de raccord entre l'abside et la travée de chœur. Ainsi, à l'élévation graduelle des volumes pleins du chevet extérieur, répond intérieurement cette pyramide à degrés de lumière changeante. 

Le décor sculpté

En un pareil édifice, le décor sculpté ne pouvait être qu'accessoire. Il semble d'ailleurs avoir été exécuté avec une certaine hâte : l'un des rares chapiteaux à thèmes humains, sur lequel apparaissent quatre corps à peine dégrossis de la gangue de pierre (la Luxure ?), n'a pas été achevé. Mais cette décoration, par sa discrétion même, souligne avec finesse et à-propos l'ossature. Oves des grandes arcades, damiers du déambulatoire, corbeilles de feuillages, dont certaines sont de bons modèles d'école, quelques chapiteaux zoo et anthropomorphes : à ces rehauts de la structure intérieure doivent être ajoutés les deux portails du transept, visibles de l'extérieur seulement. Ils sont à la fois très différents et complémentaires l'un de l'autre en leur recherche puissamment ornementale. A l'imitation de l'art arabe, une frise court le long des piédroits, s'incurve en accroche-cœur sur la tranche des corbeaux et soutache le linteau. La voussure est richement ornée : damier de billettes au Sud, motif typique de sachets repliés au Nord ; la surface des colonnes qui la reçoivent est elle-même entièrement ciselée. 

Au portail méridional, une seconde voussure, sans chapiteaux, enveloppe la première ; sur le linteau se développe, au-dessus de la frise, une suite de huit rosaces sculptées, soit d'une fleur épanouie, soit d'animaux fabuleux, soit encore de deux visages humains renversés et tirant la langue. Un cadre rectangulaire, aujourd'hui masqué en partie, délimitait le tout. Le même subsiste au portail Nord, avec ses piédroits cannelés et sa corniche horizontales de petits cintres analogues à ceux de l'abside ; soulignant ce périmètre, court à l'intérieur une frise de rosaces ; le tympan appareillé est nu. L'absence de toute figuration humaine, la gravure en méplat et très refouillée, le cadre en équerre ont fait comparer cette œuvre délicate à "l'entrée d'un palais oriental". On songe, à son propos, aux deux séjours qu'en 1072 et 1090, saint Hugues effectua en Espagne, où resplendissaient devant ses yeux les magies de l'art de l'Islam. L'imagination de l'abbé, tout habitée de rêves bâtisseurs, ne pouvait être insensible à ces prodigieuses élaborations de la forme pure, et son éclectisme dut discerner assez vite quelle part majeure elles auraient à prendre dans l'organisation de la synthèse architecturale que son génie était précisément en train de concevoir. 

Par Raymond Dursel, IN BOURGOGNE ROMANE, 1968

raymond dursel,bourgogne romane