mercredi, 19 mai 2021
Passe passe le temps...
Londres, avril 1971. Venexiana rentrait de trois années au Venezuela. Elle n'était pas encore enceinte de Barth. Elle avait arrêté l'héroïne et repris la guitare. Nous écoutions George Moustaki à Londres et Cats Stevens à Paris ; la musique nous berçait et nous pensions que nous tenions l'avenir dans nos mains, alors qu'il coulait entre nos doigts comme le sable. Vous nous enviez notre jeunesse, cette jeunesse, vous nos enfants enfermés dans des vies au passé morne, au présent cadré, sans avenir. Mais peut-être que vos enfants à vous seront joyeux à vingt ans.
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lundi, 17 mai 2021
La ville argentée
C'était sa névrose, sa douleur, son martyre, il entendait sans cesse la Symphonie No 2 de Rachmaninov. Il avait peur de la mort car il croyait possible qu'au-delà de ce monde, au-delà de cette vie, il continue à subir l'audition involontaire et permanente de cet opus beau mais angoissant. C'était venu un soir, il avait souri en se rendant compte que cette symphonie, qu'il venait d'écouter, se rejouait intégralement et de manière très réaliste en son esprit, mais cela avait duré toute la nuit, puis le lendemain, le surlendemain, des semaines, des mois, des années. Dix ans plus tard, il disait qu'il aurait préféré n'importe quel autre acouphène, ce dont je doutais. La symphonie No 2 de Rachmaninov est intelligente et il était donc baigné d'intelligence à chaque instant, et même si c'était toujours la même intelligence sonore, la même universelle angoisse, la même douceur déchirante, la même grinçante plainte, l'intelligence l'emportera toujours à mes yeux et à mes oreilles sur la bêtise.
Pourtant je ne nie pas sa souffrance, son calvaire incompris, son crâne hanté.
C'est la précision même de ce mirage auditif qui l'effrayait, le fait qu'il n'y avait jamais d'improvisation, de variation ni même d'erreur.
Oui, bien sûr, il avait essayé d'écouter des versions enregistrées, en décalé avec sa version intérieure, mais alors c'était pire : les deux versions cohabitaient et il voulait se tuer. Il s'était rendu à des concerts, pour obtenir ce même résultat tragique. Rien, rien, rien ne pouvait plus empêcher ces notes complexes, pures, cette recette musicale parfaite, de détruire toute forme de vie, d'absence, de silence et de ce vide dont nous avons tous besoin et qu'il ne connaissait plus depuis tant de décennies.
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dimanche, 16 mai 2021
Lettre à l'Homme
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samedi, 15 mai 2021
Le cours du cardano
Le cours du cardano suit son cours sans se soucier des vaguelettes qui le traversent. Cryptomonnaie plus élégante que toutes, le cardano décline ses références sans se soucier des ignorances ou des snobismes. Ada Lovelace, un prénom de femme pour l'unité de la monnaie. Jérôme Cardan en figure tutélaire inconsciente et immuable. Père et fille de fortune, Cardano et Ada, suivent leur cours sans livre blanc, leurs ères errant comme des crypto-hères numériques sous la guidance d'Atala, avatar du héros romantique de François-René. Oui, c'est une chaîne, une chaîne de nœuds, de nœuds gordiens en source libre.
Et mon frère, tes yeux rivés sur la monnaie que d'autres décrient, tu pilotes nos vies en t'en rendant à moitié compte.
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vendredi, 14 mai 2021
La reddition n'aura pas lieu
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dimanche, 02 mai 2021
En embuscade
Il a fallu lire à voix haute Palme, de Paul Valéry.
Il a fallu prendre le violon alto et rejouer la sonate pour alto seul, de Hindesmith.
Il a fallu chanter le psaume du jour : psaume 130, psaume de la paix.
Il a fallu charger la carabine.
Il a fallu viser la bonne fenêtre.
Il a fallu imposer le silence.
Il a fallu descendre l'escalier.
Il a fallu sourire à la gardienne.
Il a fallu saluer le cafetier.
Il a fallu passer devant les les gardiens du ministère.
Il a fallu traverser la ville.
Il a fallu embrasser les enfants.
Il a fallu relire La ballade de la mer salée.
Il a fallu mixer un pisco sour.
Il a fallu éteindre la lumière.
Il a fallu oublier.
Il a fallu recommencer.
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samedi, 01 mai 2021
Stance (poème du printemps 2021)
Une cigarette d'enfance, stance ;
(et ta peau sur mes os).
Un jardin d'hiver au printemps, un taon ;
(Je ris, je perds mes eaux).
Les deux dalmatiens de la rue de Bellechasse, bonne chasse ;
(Et les chiens du passé).
L'allegretto de la septième symphonie de Beethoven, sonore mangrove ;
(Et les sons trépassés).
Une fenêtre à bouton de crémone, senteur d'acétone
(Le bois racle la pierre).
Un frère de trente-six ans et son fils de quatre ans, Bertrand ;
(Oui, Bertrand, fils de Pierre).
Un désir trouble qui s'enfuit, tout fuit ;
(J'aurais peur d'éprouver).
La beauté d'un visage inconnu, regard nu ;
(Nos pensées réprouvées).
Le chant de la merlette tout le jour, contrejour ;
(L'aiglonne la jalouse).
La porte d'un immeuble majestueux, songe halitueux.
(Une guitare andalouse).
C'était le poème du printemps 2021 !
Tu disais des poèmes aux quatre saisons. Tu n'es plus. Il faut bien que quelqu'un te succède à cette valse de mots.
voici, Le vieux majordome, le poème de l'hiver 2017 ;
voici Fazil, le poème du printemps 2017 ;
voici Dans la chambrée, le poème de l'été 2017 ;
voici Silentium, le poème de l'automne 2017, ;
voici Héroïne, le poème de l'hiver 2018 ;
voici Tbilissi, le poème du printemps 2018 ;
voici Portrait d'été, le poème de l'été 2018,
voici Pluie d'étoiles, le poème de l'automne 2018 ;
voici Spectre, le poème de l'hiver 2019 ;
voici Les champs de persil, poème du printemps 2019 ;
voici Antigua, poème de l'été 2019,
Voici Humus, poème de l'automne 2019.
Voici Je descends l'escalier du temps, poème de l'hiver 2020
Voici قسنطينة, le poème du printemps 2020
Voici Plombières-les-bains et Port-Saint-Rêve des Morts, les poèmes de l'été et de l'automne 2020
Voici Sils, le poème de l'hiver 2021
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vendredi, 30 avril 2021
"Sur fond de sidération mondiale suscitée par la psychose généralisée"
Désormais, toute la planète, depuis le simple village jusqu’à la grande mégalopole, en passant par toutes les «maisons», sont soumis aux lois d’exception, à l’état de siège, au couvre-feu, à la surveillance technologique. A la dictature du confinement. Au confinement de la démocratie.
Un article efficace du journal Algérie Patriotique, signé Mesloub Khider
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jeudi, 29 avril 2021
Dans les grands appartements
Allbanie, ton grand poème Lahuta e malcis vient d'arriver en langue française ! Et nous, nous avons réussi notre fuite à Varenne. 54, rue de V, vue sur Matignon, la beauté des beaux quartiers, le chic des rues sans publicité, des rencontres avec des grands bourgeois en col roulé, tous les regrets du monde au fond de mon cœur et quand même l'espérance que la grande joie commence aujourd'hui.
Tchaikovsky, ton hymne des chérubins réunit le corps et l'âme. Dans les grands appartements de la rue du Bac, des femmes de 42 ans et demi se demandent pourquoi elles élèvent quatre enfants élégamment habillés en compagnie d'un mari directeur général d'une société côtée en bourse au lieu de vivre avec une femme sociologue dans le onzième arrondissement. Rue Saint-Maur, des femmes de 43 ans se demandent pourquoi elles vivent avec une femme sociologue au lieu d'avoir épousé Yves ou Geoffroy pour vivre rue du Bac en élevant quatre beaux enfants. Tchaikovsky ne peut réconcilier le gouffre des choix mal assumés.
Quand tout le monde était maurrassien, qu'il était courageux de penser autrement ! Quand Maurras est voué aux gémonies, qu'il est téméraire de s'affirmer maurrassien !
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dimanche, 11 avril 2021
Le nom de l'astre et sa chute
Il était un astre nommé désastre. Désastre produisait une lumière verte qui rendait beaux les cheveux blonds des filles et des fils du Nord-Est de la planète Saryana. Saryana reflétait les lueurs de cette brûlante et gigantesque boule de gaz nommée Désastre. L'astre et sa chute furent nomenclaturés dans le grand dictionnaire de la vie des hommes carbone. "Le nom de l'astre est sa chute", dirent les Sages, mais les Sages ne savent rien du réel. Ils l'inventent et le transforment parce qu'ils ne le touchent pas. J'ai voyagé antérieurement sur Saryana, à l'époque où la planète aux vastes portiques accueillait les vaisseaux étrangers. Désastre brillait encore. En ce temps là, je m'appelais Édithéa.
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samedi, 10 avril 2021
Le nom de l'astre et le désastre
Un jour, nous connaîtrons le nom de l'étoile inaccessible du lendemain. Alors commencera le travail de deuil, le deuil du rêve.
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lundi, 05 avril 2021
Singularité de pacotille
Il y a la honte et la culpabilité de porter un nom noble dans un État qui a détruit, aboli, évincé la noblesse. Honte parce que cela dit des choses que je n'assume pas, moi qui ai grandi en jeune fille de gauche dans une jeunesse de gauche, culpabilité parce que pour beaucoup de gens, la difficulté est contraire : il faut assumer la banalité, l'innombrable, l'indéfini, le lambda. Chacun son handicap, le mien est élégant, donc je me sens coupable, parce qu'il n'y a aucun mérite.
Il y a les remarques sans cesse, les négatives, mais aussi les positives, qui à la fois mettent mal à l'aise et donnent un sentiment de particularisme auquel on s'attache.
Il y a cette absence d'argent et de château alors qu'on attend ça de moi, c'est très irritant, et c'est aussi une chance puisque d'emblée on m'attribue un statut social qui n'est pas le mien. Le contraire du plafond de verre !
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mardi, 30 mars 2021
Journal de Kevin Motz-Loviet, les 30 mars
30 mars 2014, extrait
(Il est tard dans la nuit, je suis dans le lit de ma chambre chez Renaud) : L'océan, le sable, le train, les rails, les cris de la mère et de l'enfant, la gare, le bus, la foule, Bastille, Charonne, le boulevard Voltaire, Emmanuel et la Chine au cinquième étage, le resto-cantine de la rue d'en bas, le métro, la ligne 9, station Robespierre, la rue Barbès, la rue Raspail, la rue Marceau, l'hôte et sa belle voix grave, l'heure qui s'étire, les yeux qui s'écarquillent, le lit m'appelle - le lendemain est déjà là).
30 mars 2017, extrait
quel est l’intérêt du journal de Baude Fastoul ? Je pense malheureusement qu’il n’est pas littéraire : je m’y répète, je n’écris pas si bien, avec des lourdeurs. Ce n’est pas construit puisque j’écris ce qui me vient à certains moments. Ce n’est pas stylisé puisque je m’interdis de le retoucher, hors pour corriger des fautes de frappe ou d’orthographe. Même lorsque j’ai honte de ce qui est écrit, lorsque j’ai changé d’avis, je laisse tel quel les entrées des jours passés. J’y suis toujours sincère, profondément sincère, mais pas exhaustif, je préfère me taire que travestir et je n’ai pas envie de tout dire, de tout montrer. Ce n’est donc pas l’histoire complète d’une âme, ni celle d’une vie. C’est un journal imparfait à tous les égards. Quel est, donc, son intérêt ? Pour moi, celui de me souvenir d’événements et d’états d’esprit de ma vie passée. Pour d’hypothétiques lecteurs ? Mystère !
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vendredi, 19 mars 2021
Sils (poème de l'hiver 2020)
Sils Maria, 1999 : naissance d'un amour au bar de l'hôtel, écriture du dernier roman du siècle.
Sils 1999, point sur une droite, convergence des lignes.
Ta neige innombrable.
Europe, suite d'alternance entre la renaissance classique et la mystique médiévale. Homme et femme, l'homosexualité n'est qu'un répit dans votre guerre de cent ans sans cesse recommencée. Une trêve du sexe déguisée en sexe.
Ton sperme glacé.
Et Crécy en Ponthieu, et les Thermopyles, sont nos combats renouvelés. Et perdre des batailles peut faire gagner la guerre ! Les trêves de dieu sont des jachères du sang.
Ton sang séché.
Le stratège Alexandre, l'Afrikakorps, nous ramènent au grand frère copte, le fils du pharaon, le frère du prêtre Jean.
L'eau de leur Nil.
Ni Sodome, ni Lesbos ; Nuremberg est l'Allemagne et l'erreur est comprise dans les calculs centraux. Nos corps à nouveau nus, notre vie revêtue de sens.
Ta peau très claire.
Déserts créés par les brûlis, maintenant vous avez soif et jalousez les champs gras, les sous-bois, les averses de France. L'histoire du monde est aiguillon de jalousie.
Ton désir inassouvi.
Dans douze années précises, 2033, un 20 mars encore, à Sils Maria, quelle heure ? Un rayon de soleil indompté, dans lequel danseront des éclats de poussière, un troupeau impalpable sous tes yeux fatigués.
Physique de la lumière, chimie des cendres, géométrie des particules.
Ta force latente.
Infatigable quête du nombre d'or de nos vies. Mes cheveux seront d'argent, tes cernes fanées. 34 ans se seront écoulés au service d'une discipline inutile, la seule qui vaille, l'équation des limons, la logique des pruines, l'arithmétique de la poussière.
Ta carotide fêlée.
Aujourd'hui, en toute sincérité, les montagnes paraissent dormir dans le canton des Grisons. Une pandémie de peur encombre les hôpitaux du monde, des couvre-feux dévalent les métropoles. Loin d'ici. Dans nos vallées, rien ne se ressent, rien ne se dit.
Ta voix oubliée.
Sils Maria, 2021, mort d'un amour au dernier matin de l'hiver, entre la fête de Joseph et le cinquième dimanche de carême.
Sils 2021, un salon d'hôtel silencieux, un programme informatique pour une sonde orbitale.
Nos neiges lumineuses.
Nota bene :
C'était le poème de l'hiver 2021
Tu disais des poèmes aux quatre saisons. Tu n'es plus. Il faut bien que quelqu'un te succède à cette valse de mots.
voici, Le vieux majordome, le poème de l'hiver 2017 ;
voici Fazil, le poème du printemps 2017 ;
voici Dans la chambrée, le poème de l'été 2017 ;
voici Silentium, le poème de l'automne 2017, ;
voici Héroïne, le poème de l'hiver 2018 ;
voici Tbilissi, le poème du printemps 2018 ;
voici Portrait d'été, le poème de l'été 2018,
voici Pluie d'étoiles, le poème de l'automne 2018 ;
voici Spectre, le poème de l'hiver 2019 ;
voici Les champs de persil, poème du printemps 2019 ;
voici Antigua, poème de l'été 2019,
Voici Humus, poème de l'automne 2019.
Voici Je descends l'escalier du temps, poème de l'hiver 2020
Voici قسنطينة, le poème du printemps 2020
Voici Plombières-les-bains et Port-Saint-Rêve des Morts, les poèmes de l'été et de l'automne 2020
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mercredi, 17 mars 2021
La circulation
Il y a un an, nous perdions notre liberté de circulation, cette insouciance du déplacement qui nous était habituelle, naturelle comme la respiration.
Je parie que nous la retrouverons un jour, malgré deux grandes ombres : la dictature sanitaire et antiterroriste avec ses bras de biotechnosurveillances, l'amour des humains pour le joug avec l’œil de la morale qui le maintient.
Quand je quitterai ce monde, ce soir ou dans quarante ans, je sais qu'il sera plus agréable, plus esthétique et plus calme que ces derniers temps.
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