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samedi, 04 décembre 2021

Vies

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Je dois mener plusieurs vies mais qu'elles ne paraissent pas plusieurs, qu'il y ait une unité profonde, malgré les univers si variés et en apparence contradictoires. 

jeudi, 02 décembre 2021

L'infâmie et la lumière

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« J'aime l'infamie » écrit Guibert, mais moi j'aime la lumière qui répare, magnifie, ressuscite.

mardi, 30 novembre 2021

Second crachat de Drakulie Pandor, banale citoyenne d'Echthrapolis #Répulsion

(lire le Premier crachat de Drakulie Pandor)

Je ne dors pas : angoisses démesurées, argent, santé. J'ai beau décider chaque jour de devenir sereine, la harcèlement par l'angoisse s'amplifie. Certains m'aident, c'est un poids lourd d'être un poids mort. Je cherche une solution qui se dérobe sans cesse. Je commets souvent de petits actes inconséquents qui pourraient plomber encore plus mon existence. Honte, impuissance, peur me tuent à petit feu. Mon corps se déglingue. Épuisée physiquement, je n'ai plus accès à ma lumière. L'enfer financier sera accompagné d'un écroulement de la santé. C'est objectif, inéluctable, terrible. Et pour contribuer au pire, je pose des actes manqués et des gestes destructeurs avant même de me rendre compte de leur surgissement. La réalité me rattrape, elle ne sera bientôt plus qu'à quelques mètres de mon corps terrorisé, je serai bientôt au pied du mur. Je ne me contrôle plus, j'avais déjà connu ce sentiment, c'est donc comme si une ancienne maladie terrible se réveillait après trois ans de rémission. La maladie des problèmes d'argent. Mais cette fois je suis plus vieille et la source de l'énergie semble s'être dissoute avec les années. Aucune prière, aucune résolution, aucune action n'enraye le moulin du désespoir, c'est un bug atroce, une impasse noire. Je veux bouger : paralysie. Je veux crier : c'est le baiser de la mort. Je me rétracte, j'enfouis ma tête sous les oreillers et j'espère ne plus rien ressentir pendant quelques secondes. La vie est un enfer intérieur intégral, j'avais des rêves, je n'y crois plus, si j'y croyais de toute façon je n'ai plus l'énergie. Épuisement. Cœur qui s'essouffle, main gauche qui se referme automatiquement la nuit, repliée sur le poignet, comme les gens en état végétatif ou qui subissent des problèmes neurologiques, lexique affaibli par la panique. C'est l'océan de l'horreur psychique qui monte, tsunami inéluctable, je perds pied, je renonce, je suis incapable. Je n'ai plus qu'une supplication envers la vie : qu'on me donne de l'argent, qu'on répare ma personne, qu'on m'indique une solution parce que moi je n'en trouverai pas. Ce n'est pourtant pas faute d'essayer. Mais soudain je sais ce qui me ferait du bien, tout d'un coup, c'est certain. Apprendre, là, maintenant, que quelqu'un que je jalouse s'est pris un cocotier sur la tête. Peut-être qu'alors la fatigue disparaîtrait, la peur de l'avenir s'atténuerait. Il n'y a aucune modestie, aucune générosité dans cette souffrance, n'est-ce pas ? Au contraire. C'est la grande souffrance, dont l'autre face est la grande consommation de ceux qui ont la santé et l'argent. La grandeur d'âme n'atteint ni le grand souffrant, ni le grand consommateur, qui tous deux sont le perdant et le gagnant d'un même jeu, d'une même idée, d'une même compétition à mort déguisée en mode d'emploi civilisé.

 

(Premier crachat de Drakulie Pandor)

dimanche, 28 novembre 2021

L'arbre de l'abbaye de Fontenay

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Routes bourguignonnes, villages. La chanson de Solveig de Grieg, puis le concerto de Hautbois de Marcello, éminemment joli, tandis que nous roulons sur les routes détrempées par la pluie. Pas d'humains, tous enfermés dans des maisons, quelques voitures rares, magasins fermés, la campagne française abandonnée. Nous traversons Étais et je voudrais que ce moment dure éternellement. Me dissoudre au creux des notes du hautbois dans cette campagne triste, avec un sourire.

 

jeudi, 25 novembre 2021

Opération de délestage

Si je décide et parviens à chasser le fiel de ma vie, si désormais je connais la bonne humeur, l'énergie morale et physique, le bien-être et la joie de vivre du matin au soir, que vont devenir ces élans de négativité que j'ai toujours si bien connus ? Rien ne se perd, rien ne se créée, tout se transforme, n'est-ce pas ? Ou alors un grand volet de malheur, de pessimisme et de négativité peut disparaître, s'effacer, se dissoudre dans l'inexistence ? Après tout, pourquoi pas ? Oui, mais tout ce temps libre, toute cette énergie qui va surgir, délivrée, qu'en ferai-je ? Lorsque j'avais arrêté de fumer, en l'an 2004, j'avais gagné deux heures par jour, ces moments passés à fumer mais aussi à penser à fumer, à préparer ma fumerie, à préparer le café ou à accomplir la promenade qui accompagnerait la cigarette. Deux heures de vide dans un jour, la rencontre avec ce rien, ce temps, ces respirations, fut un défi. On ne sort pas d'une cage heureux sans en être préparé. Alors, si d'un coup ce malheur qui m'habite le matin au réveil, à certaines heures du jour, puis le soir avant le coucher, puis la nuit dans mes angoisses, si tout ce malheur s'en va comme un traître, qui vais-je devenir ? Une femme qui sourit dès l'éveil, joyeuse de se lever, trouvant agréables l'action et l'inaction, l'administration de sa vie quotidienne et la marche vers ses rêves, adorant équitablement la banalité des jours et les bonnes surprises occasionnelles ?

Et mes proches, qui souffrent de mon pessimisme et de mon aspect destructeur, qui s'en plaignent, qui le trouvent hardcore à supporter, comment s'accoutumeront-ils à ce bonheur de chaque instant qui les inondera ? Ne chercheront-ils pas à me replonger dans mon bain de plaintes qu'ils détestent, afin de ne pas perdre celle qu'ils connaissaient, de ne pas être troublés dans leur chair par un si grand changement de paradigme ?

lundi, 15 novembre 2021

Puissance

« Si nous le voulons, nous pourrons donc, sans dire un seul mot, en menant simplement une vie parfaite, révéler à tous la puissance qui habite en nous. »

Saint Jean Chrysostome

(Fragment cueilli ici)

dimanche, 14 novembre 2021

Le crachat de Drakulie Pandor, banale citoyenne d'Echthrapolis #Répulsion

Dimanche, j'oublie les cloches des églises pour me concentrer sur la laideur sonore des camions de poubelles verts qui traversent les allées de béton sale de notre ville en phase de tiers-mondisation. Arythmie du cœur, haleine fétide, fluides sortant par les orifices, épaule coincée, peau flasque, cheveux incoiffables, mon corps est de plus en plus difficile à civiliser. Pourtant, sortir dans la rue va être nécessaire, se tenir le moins voûté possible, entrer dans des magasins mal tenus par des gens que je déteste, saluer un voisin,

et croiser ces couples élégants, ces belles familles correctement vêtues qui semblent se diriger quelque part, ces personnes tendues vers un but noble, dans une vie calmement structurée.

Ce fiel est un mélange de rage et de dépit, de colère et d'amertume, de haine et de tristesse qui découle de la comparaison entre les espoirs que j'avais dans la jeunesse et les déceptions que je connais dans mon âge mûr. Heureusement, d'opaques rideaux me séparent des personnes que je fréquentais alors, mais si par hasard je tombe sur quelqu'un d'avant et dont la vie s'est déroulée sous de meilleurs auspices ou du moins avec de meilleurs résultats, le sentiment que j'éprouve s'apparente à une déflagration interne qui fait du paysage pauvret de mon for intérieur un Nagasaki intégral

et recevoir ces sourires, ces voix dynamiques, ces nouvelles positives en pleine face creuse mon rictus aigri, empâte ma voix, annihile le filet d'énergie qui restait pour survivre au fil du jour.

Vous désirez le bien des autres et le soleil sociétal parce que vos organismes fonctionnent correctement et que votre vie ressemble aux images d'une vie bonne, mais moi, constipée et pleine d'acouphènes, j'attends, assise sur le banc de l'échec, que se déversent sur la ville les meurtriers et les fous-furieux pour éventrer tout ce qui éprouve quelque fois de la joie et tout ce qui contient de la beauté

et j'attends ainsi le Mal et l'Horreur et la défaite collective qui fera de chaque individu mon égal !

 

 

samedi, 13 novembre 2021

Le deuxième café

... ou encore l’opérade géométrique formée par l’homologie des espaces de modules de courbes stables code les invariants de Gromov–Witten qui agissent sur la cohomologie quantique d’une variété symplectique.

Propriétés algébriques et homotopiques des opérades.

Une très intéressante thèse de topologie algébrique, celle d'Olivia Bellier, que je conseille de lire le matin, au lit, avec le deuxième café, durant une dizaine de minutes. C'est comme un massage des parties profondes du cerveau.

dimanche, 07 novembre 2021

La musique modulaire du bonheur

Oublie la superstition, cette croyance diabolique que tu seras puni de ce bonheur par un coup de poignard dans le cœur. Non, il n'est pas nécessaire de subir un petit ou un gros malheur par ci par là pour justifier le bonheur. Le bonheur n'est pas puni. Il est ce climat harmonieux, ce soleil délicieux, ce fleuve enthousiasmant dans lequel tu peux te baigner le plus clair de ton temps. Toi. Oui, toi qui lis cela. Un bonheur sans tache, qui perdure, persiste, demeure, s'accroît, est une aventure possible. Le bonheur parfait existe-t-il ? Mystère. Le bonheur profond, lui, oui. Ce bonheur que l'on sent pétiller dès l'éveil et qui rend léger le corps, douces les odeurs, agréable la routine, charmants les imprévus.

Il faudrait savoir se servir de notre synthétiseur intérieur. Programmer des petites bulles de joie qui s'introduiraient dans la mélodie aléatoire des jours. Il faudrait.

La vie peut être belle pendant quatre-vingt dix ans d'affilée. Les lieux, esthétiques ; les sentiments, enivrés ; les émotions, quiètes ; les sensations, agréables et stimulantes. Oui. Une montagne à gravir, une rivière à descendre. Moi, ce que j'aime par dessus tout, c'est la monotonie de la beauté (mais peut-être que toi, tu n'aimes pas). Comme une route cerclée d'épicéas dans un climat hivernal, tout autour, la neige, un frère qui conduit bien et le chauffage dans la voiture. La perfection se poursuit durant des heures et tout va bien. 

À chacun son rêve d'harmonie. Moi je ne m'apaise jamais aussi bien qu'au creux d'une musique ambient nordique ou un chant grégorien de Solesmes. 

Le très grand danger d'un bonheur au long cours, c'est l'ennui. L'homme (ou la femme, sa sombre égale) est-il capable de supporter une vie dans laquelle le lever est agréable, le compte en banque rebondi, les amis chaleureux, la famille en bonne santé et de bonne humeur, les lectures intéressantes, les musiques stimulantes, les paysages variés, les maisons élégantes, la vie professionnelle enthousiasmante, les loisirs revigorants et sereins ?

 

(P.S. : ce qui est bien avec la programmation informatique ou le synthétiseur modulaire, c'est qu'on peut programmer le chaos et l'entendre surgir par faisceaux de beauté).

 

 

SUR NOS TERRES 

L'air nécessaire pour commencer à vivre

samedi, 06 novembre 2021

Renaissance en vue (derrière les noirs nuages)

Désormais le muezzin appelle à la prière dans la très chrétienne ville de Cologne et les gens bien-pensants trouvent cela très bien, que leur importe que les plus pauvres de leur peuple y perdent la seule chose qui leur restait, leur essence même, ainsi va l'élite achetée par les sultans, ces vrais hommes d’État qui ont compris que nos grands hommes n'étaient plus d’État ni même d'entreprise mais des mendiants de Jugurtha. Ainsi va l'élite ouverte sur les mœurs, mais fermée à nos mœurs ancestrales, ouverte sur les peuples du monde mais haineuse du peuple qu'elle doit gouverner, ouverte sur ce qu'elle appelle l'avenir et qui n'est que la somme de ses renoncements présents.

Ceci n'est pas une plainte, mais une constatation.

Cette pauvre élite croit préserver sa progéniture en lui réservant les terres les moins polluées, les écoles les plus structurées, mais cette illusion tombera par un matin d'hiver ou d'été, le jour où le dernier renoncement (baptisé « ouverture » ou « progrès ») aura fait tomber la pierre angulaire du rempart. Alors les murs que nous croyions éternels seront à terre et les gens à qui nous faisions des faveurs et des cadeaux seront impitoyables et vêtiront la parure du Nouveau Maître.

Ceci n'est pas un oracle, mais une déduction.

Ce jour là, le Nouveau Maître croira, durant quelques heures, qu'il possède le monde qui le choyait par lâcheté et qu'il trompait par ruse. Il paradera, instaurera, se dirigera vers la grand'place du pouvoir vide. Mais tous ceux qui se taisent aujourd'hui et ravalent leur rage, leurs larmes, leurs émotions scandalisées, libérés enfin de leur propre élite qui les maintenait sous le double joug de l'argent et de la police, durant ces quelques heures, leurs voix parleront enfin, leurs corps se délieront après des décennies d'engourdissement, leurs chants se déploieront, leurs pensées s'exprimeront, leurs dons prendront forme. Portée par cette immense énergie venue d'elle-même, la foule des individus deviendra le peuple en marche vers la réunification de lui-même. Acceptant d'être lui-même au présent, il retrouvera sa place en équilibre entre son passé et son avenir vrai et juste. Les étoiles de l'Europe délivreront leur beauté mariale et la déesse Europa dansera sur la joie retrouvée.

Ceci n'est pas une utopie, mais une certitude.

dimanche, 31 octobre 2021

Renouer, poème de l'automne 2021

Dans les grands parcs des métropoles, les marronniers singent la rousseur des enfances et des épagneuls bretons.

Les regrets de l’été se dissolvent dans la venue du froid.

Les clochards renouent avec l’haleine de rouge, les bourgeois avec les écharpes de laine.

La buée s’installe sur les fenêtres, sur les lunettes, le monde perd de sa netteté.

La rêverie s’insinue dans les corps engourdis, l’esprit perd de son acuité.

 

Mon remords devient musique, mon écharpe est de soie.

Chaque jour je récris ce message que je ne t’enverrai pas.

Dans la nuit polluée, la lune décroît.

Dans les églises fermées, Jésus a froid.

 

 

Tu disais des poèmes aux quatre saisons. Tu n'es plus. Il faut bien que quelqu'un te succède à cette valse de mots.

voici, Le vieux majordome, le poème de l'hiver 2017 ;
voici Fazil, le poème du printemps 2017 ; 
voici Dans la chambrée, le poème de l'été 2017 ; 
voici Silentium, le poème de l'automne 2017, ; 
voici Héroïne, le poème de l'hiver 2018 ; 
voici Tbilissi, le poème du printemps 2018 ; 
voici Portrait d'été, le poème de l'été 2018
voici Pluie d'étoiles, le poème de l'automne 2018 ;
voici Spectre, le poème de l'hiver 2019 ;
voici Les champs de persil, poème du printemps 2019 ;
voici Antigua, poème de l'été 2019,
Voici Humus, poème de l'automne 2019.
Voici Je descends l'escalier du temps, poème de l'hiver 2020
Voic
قسنطينة, le poème du printemps 2020
Voici Plombières-les-bains et Port-Saint-Rêve des Morts, les poèmes de l'été et de l'automne 2020
Voici Sils, le poème de l'hiver 2021
Voici Stance, le poème du printemps 2021
Voici Rompre, le poème de l'été 2021

samedi, 30 octobre 2021

Le premier autodaté

Nous sommes le 30 octobre 2021 et j'ai composé à l'instant dans ce lit lumineux de l'une des deux chambres des Orteaux ce premier poème autodaté, suivant la construction inventée par Benoît Richter.

30 10 2021, donc :

3
0
1
0
2
0
2
1

éveil des plantes

verdeur


rêve végétal

songe végétal 
immobile

 

(ici une définition du poème par son inventeur)

lundi, 25 octobre 2021

Un conflit, deux points de vue

Haut-Karabagh : la revue Conflits a eu la belle intelligence de réaliser deux entretiens, l'un avec l'ambassadrice d'Arménie en France, l'autre avec l'ambassadeur de l'Azerbaïdjan dans notre pays. 

Une entrevue arménienne

("L’Iran joue un rôle important dans le désamorçage des tensions et l’établissement d’une stabilité dans la région, et la dernière manifestation en est la position récemment exprimée par l’Iran sur l’inviolabilité des frontières de la République d’Arménie.")

Une entrevue azérie

("En ce qui concerne la population arménienne, ce sont aujourd’hui 25 000 personnes arméniennes qui vivent dans les districts de l’ancienne zone de conflit. Pour eux, notre vision est celle de l’intégration de ces personnes dans l’espace juridique, social, culturel et politique de l’Azerbaïdjan.")

 

Rendez-vous dans cinquante ans pour regarder l'évolution du monde, cette vallée de larmes et ce théâtre de guerre.

mardi, 12 octobre 2021

Cime ?

(Paths, de Olan Mill : nutrition en paix contemplative)

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C'est ce matin comme un autre que le tournant a lieu. Marre du moulin des jours, marre de l'accumulation des mini-soucis. Il faut un horizon, une vue, un appel, un sommet à désirer. 

Je dois quitter la vieille femme morte qui vit à la place de l'enfant. Je dois retrouver l'être vivant et l'emmener sur des voies où l'on respire.

Les poèmes, même sublimes, paraissent éculés au corps pourri, au cœur rance. Et si les chants n'avivent pas mieux que les poèmes, c'est le corps qu'il faut rénover, le vieux cœur qu'il faut métamorphoser.

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Est-ce que lorsque, comme Jésus le Christ, on marche debout sur la mer, on parvient jusqu'à l'ouverture des hautes montagnes qui ressuscitent  ?

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Bien plus de trois jours ont passé. Moi aussi je voudrais sortir du tombeau.

samedi, 09 octobre 2021

Le fragmentaire journal du sieur Kevin nous arrive par miettes

(Merci à Kevin de Motz-Loviet pour sa semi-confiance)

9 octobre 2015

Il est 13h20, j'écris du train (Nantes-Paris). Cela me fatigue énormément de penser sans cesse d'une manière critique sur le monde. Il y a quelques années, cela me fatiguait encore plus, car je vivais à fond dans la partie mentale de mon esprit. J'ai, sous l'influence des spiritualités orientales et du développement personnel américain, arrêté de penser autant avec des mots, renoncé à la critique constante de l'hypocrisie et des faiblesses du monde, afin de laisser la vie baigner ma vie. Désormais je ne songe plus à redresser sans cesse des torts trop nombreux pour être redressés, mais à améliorer mon être, mon âme, ma vie, ma santé. De toute façon, je ne sauvais ni l'humanité, ni les animaux, ni les enfants. Je ne les sauve toujours pas, mais en améliorant ma vie et ma personnalité je crois être utile aux personnes qui m'approchent et me côtoient. Tous les discours s'entre-détruisent et le silence avance comme un roi. Stat crux dum volvitur orbis. La parole fuit par les trous percés du temps, le silence se tient et glisse comme un fleuve le long de l'espace et du temps, jamais séparé de lui même par les pierres de mots qui ne peuvent boucher totalement son lit éternel. La Loire par la vitre du train fait écho à mon fleuve de silence...

Ce silence mental augmente et ma douleur intellectuelle diminue. Ma pensée s'en trouve-t-elle amoindrie pour autant ? Je n'en crois rien. Au bout d'un moment les mots répondent aux mots, et ne répondent plus aux besoins de la vie. Pensée qui se mord la queue, pensée en eau de boudin.

À ce nouveau bien-être, qu'il me faut consolider, je devrais en ajouter un autre : la délivrance de cet étau d'angoisse, de souci, qui dessine sur mon front, au dessus du sourcil droit, un petit trait vertical, la ride de mon souci. Un jour, je veux le croire, elle disparaîtra, dissoute par le ciel bleu de ma sérénité. Et mon front redeviendra éclatant d'une jeunesse éternelle, qu'aucune ride n'assombrira. Car certaines rides de la vieillesse ressemblent à des soleils, plus qu'à des nuages.

Nous sommes à Angers, de nouveaux passagers montent, l'une d'entre elle a sa place à côté de moi. Libérée de l'occlusion mentale et du souci accablant, ma vie devrait devenir une belle et douce vague de bonheur sur l'océan lisse – mais, ô combien puissant – de la sérénité.

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