Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

samedi, 07 décembre 2013

J-6 avant l'automne - Mathieu Granier

Mathieu Granier est scénariste. Il a collaboré à VillaBar en 2007, avec le roman-photo Ginna l'empoisonneuse.

En décembre 2013, il répond à l'appel d'AlmaSoror, qui propose d'écrire un texte contenant :

oh mon âme
le plus vieil été du monde
c'était si pur
ta mère absente
coco

Le résultat s'appelle J-6 avant l'automne. (Les éléments obligatoires sont en gras dans le texte).

 

J-6 avant l'automne


 

Aurore aux doigts de rose soulevait lentement le voile de la nuit. Le rossignol finissait son chant adressé à la lune et les arbres lourds de leurs fruits penchaient leurs branches sur la terre humide. Bientôt le soleil allait paraître. Bientôt il serait l’heure aux fleurs de briller, aux bêtes d’étendre leurs corps et à l’homme de se mettre à la tâche… Une nouvelle journée, chargée d’odeurs, d’ombres et de bruissements dans ce qui fut le premier, le plus long, le plus vieil été du monde.

Dans son abri fait de mousses et de feuilles, ADAM caressait l’épaule nue de son EVE endormie. Il fixait au travers des branchages l’étoile du matin dont la lumière se faisait à chaque instant plus faible. Il ne voulait pas la quitter des yeux, il savait qu’il ne pourrait pas en retrouver l’éclat dans ce ciel palissant. Or, il avait besoin de concentrer ses pensées sur la longue journée de la veille… Et rien ne l’aidait mieux à fixer son esprit que de fixer ce point. Il avait discuté tard avec EVE de sa rencontre avec Archange Gabriel. Bien sûr, sa compagne n’était pas en mesure de réaliser tout ce qu’impliquait les propos du messager du ciel. Mais d’avoir dû lui répéter, avec des mots qu’elle pouvait comprendre, les récits grandioses, les enjeux éternels, les mises en garde mortelles de l’archange avait aidé Adam à avancer dans ses réflexions.

Adam avait connu peur et fascination face à l’ineffable. Le récit du combat que DIEU avait dû livrer contre SATAN, de Sa décision de créer la terre et la mécanique parfaite de l’univers avaient modifié pour toujours la vision qu’il porterait sur les choses. Il avait acquis la certitude que son créateur, cet être essentiellement juste et bon, avait ordonné le monde tel qu’il devait être. EVE tourna son doux visage. Un premier rayon de soleil venait de se poser sur ses paupières. Avec le jour, la couche nuptiale se colorait de toutes les teintes de vert que Dieu avait accordé à la nature. Le corps de sa compagne paraissait d’un noir presque éclatant. Le moindre de ses mouvements donnait à sa peau des nuances de cuivre, d’ébène, de limon ou d’obsidienne.

Eve ouvrit les yeux enfin et sourit. C’était un sourire de soulagement : elle avait craint que Satan vienne lui insuffler des songes durant son sommeil, comme il l’avait fait la nuit précédente. Adam lui avait pourtant expliqué que l’Archange déchu avait été surpris et chassé loin de l’Eden, mais cela n’avait pas suffi. Pour la première fois de sa vie, elle avait ressenti cet abandon au sommeil comme une perte de soi, comme si son corps ne devenait qu’un objet de pierre et de poussières… qu’il faudrait reconquérir au moment du réveil. Mais la nuit était passée et comme il fut doux et simple pour elle, d’ouvrir les yeux pour contempler l’homme qu’elle aimait. Bien sûr, six jours plus tard, après une longue errance sur la terre, l’Archange allait revenir et précipiter l’homme dans sa chute, mais ni Eve ni Adam n’en avaient conscience.

Le couple béni se regarda longuement en silence, admirant les corps parfaits l’un de l’autre, se rappelant les heures les plus intimes de leurs étreintes, partageant, dans leurs nudités pures, les mêmes désirs conjugaux, rêvant de leur future descendance… puis Eve demanda une nouvelle fois à Adam de lui parler de sa rencontre avec Gabriel… comptant sur ce récit pour chasser loin d’elle ses dernières terreurs nocturnes.

« C’était si pur, dit Adam. Il me semblait que les mots qu’il prononçait émanaient et brillaient à travers moi, comme s’il se contentait de me révéler des vérités que je connaissais de toute éternité. La nature est impropre, elle nous impose une série infinie d’énigmes qui nous sont étrangères, là où l’on n’attend que des solutions. Gabriel, lui, m’enseignait ce que j’avais toujours voulu savoir. Il me berçait, il me consolait, il savait quels mots employés afin de combler ce vide que je pressens quand j’imagine mon être perdu entre le Chaos et l’ordonnance impénétrable. Le monde brusquement était animé, j’en voyais le sens, j’en déroulais les logiques… et si chacune de ses phrases ouvrait sur un autre mystère, c’était sur un mystère qui se contemple comme une réponse. Il me parlait d’évènements, de causes et de finalités dépassant mon entendement, mais je n’avais pas peur… et Satan non plus, ne me faisait plus peur. Sa beauté glaciale, sa noblesse déchirée, son orgueil impie me rendaient presque triste. S’il faut aimer et honorer son créateur, il faut aussi respecter et estimer son ennemi, car il est dangereux de mépriser ce qui peut entraîner notre perte. »

Eve resta un temps pensive. Son époux semblait tellement apaisé… « Cela est suffisant, alors ? Un ange descendu du ciel vient à notre rencontre et nous parle, il remplit l’esprit d’images et de sens et l’on repart heureux. Pourquoi Dieu nous a-t-il fait naître avec tant d’ignorances, si c’est pour lever une partie de ces mystères insondables dès que Satan foule de ses pieds damnés cette terre bénie ? A-t-il peur que nous succombions aussi facilement à ses charmes ? Lui qui peut porter son regard au-delà de l’horizon des temps, il ne pouvait ignorer la venue de l’Archange rebelle, comme il ne peut ignorer toutes les ruses que l’ennemi va déployer contre nous… Si la connaissance doit nous prévenir de ce mal, pourquoi nous en avoir privée ? Et pourquoi nous interdire les fruits de la science, si même l’innocente ignorance ne peut nous protéger du danger ? A moins que Dieu ne soit un Dieu imparfait, non pas faillible, mais en devenir ?... Un Dieu qui grandit en même temps que Sa création ? Peut-être s’agit-il simplement d’un test de sa part. Mais quelle valeur aurait une épreuve dont il connaît déjà les résultats ? Non, Il ne nous soumet pas à un test… Il nous enseigne. Il nous a fait ignorant et pur afin que nous puissions apprendre… Et cet apprentissage nous pousse à user de ce trésor qu’il nous a confié, le don du libre arbitre, afin de nous positionner dans ce monde. »

« Adam, mon cher Adam, mon tendre époux, tu as pu parler avec l’ange. Il t’a révélé une partie de la vérité et tu en ressors grandi. Face à cette prise de conscience, tu as décidé d’endosser le rôle de celui qui garde le feu. Tu étais une créature vaquant innocemment dans les champs Elyséens, mais de paisseur tu es devenu berger. Or, moi, quel doit être mon rôle ? Comme mon époux me l’a dit, je ne suis pas exercée aux hautes sphères des idées dans lesquelles se meuvent les anges… Alors quelle position je dois prendre ?... »

Ainsi pensait Eve… Adam, de son côté, avait repris la parole. Il parlait d’organiser la table, de tresser des guirlandes de fleurs, de creuser un grand plat dans un bois d’olivier… Eve finit par comprendre : Gabriel allait lui rendre une autre visite le jour même. La première femme sentit que c’était là l’occasion de sortir d’avoir des réponses.

« Oh, mon âme, mon guide, mon soutien, ma lumière, toi à qui je dois obéissance car Dieu m’a créée pour te seconder, je sais que je suis impropre aux pensées abstruses, et loin de moi l’orgueil de me croire capable d’entendre les paroles de l’Archange, mais j’ai toutefois une requête à te faire et nul doute que Gabriel n’y verra aucune offense. J’aurais une question à lui poser, une seule… Il me suffirait d’assister au début de votre rencontre, de l’accueillir en même temps que toi… A peine aura-t-il le temps de s’asseoir que j’aurais déjà ma réponse. Et je suis sûre qu’il saura trouver les mots que j’attends pour se faire comprendre de moi. »

Adam était amusé par la requête de son épouse. « Probablement qu’il accepterait de te répondre car Dieu porte le même intérêt à toutes ses créatures, mais quelle question aurais-tu à lui poser dont je n’aurais pas la réponse ? Tu es née de ma côte, tu es mon prolongement, rien de ce que tu penses ne m’est étranger. Peut-être se peut-il que certaines de tes interrogations ne me soient pas encore venues à l’esprit. Dans ce cas-là, une juste réflexion, mon sens de l’observation ou les connaissances que m’a enseignées Gabriel devraient suffire à trouver une réponse. Si toutefois ce n’était pas le cas, je m’engage à poser la question à l’Archange de ta part… Je m’empresserai de te répéter ses mots, en y mêlant des figures qui te seraient plus accessibles. »

Eve resta silencieuse. Adam avait raison, bien sûr, mais quelque chose l’empêchait de lui confier le fond de sa pensée. Une ombre dans son esprit lui faisait pressentir que son époux n’allait pas comprendre ses questionnements, même qu’il en aurait un peu honte. D’où lui venait ce sentiment ? Il était possible que des restes du rêve de Satan étaient la cause de son trouble. A cette idée, Eve eût encore plus de réserves. Adam a une image d’elle si pure, comment allait-il réagir en découvrant qu’elle n’arrive pas à chasser définitivement les impressions issues de ce malheureux songe ? Peut-être même que ses interrogations sur sa place dans le monde étaient engendrées par cette influence nocturne… Après tout, Adam ne semblait pas souffrir des mêmes doutes. Il avait pris son parti tout naturellement, n’ayant peut-être même pas conscience que les révélations de Gabriel l’avaient changé pour toujours… alors qu’elle-même se sentait comme devait se sentir Thésée partant affronter le Minotaure, fixant la mer d’un œil humide et ignorant quel rôle il allait endosser dans l’histoire… Eve devait réussir à convaincre son époux d’accéder à sa requête. Car si elle redoutait de décevoir Adam en lui confiant ses troubles, elle savait que Dieu, les connaissait déjà. Elle aurait à peine besoin d’en parler pour que Son messager la comprenne…

« Mon doux mari, dit-elle, je ne veux pas t’importuner avec des questions vaines. Il ne s’agit de presque rien, des idées à peine formulables par mon esprit confus. Nous avons tous deux une belle journée qui nous attend. Gabriel me comprendra, par son essence divine, là où il nous faudrait des heures pour préciser ma pensée. Et puis, ma présence à tes côtés devant lui ne pourra que faire resplendir ta grandeur. Il est bon l’homme qui veut protéger sa femme, mais il est grand l’homme qui la porte à ses côtés. Tu seras mon socle, tu me tendras du bout de tes bras vers le ciel… Ne serais-tu pas heureux de voir mon visage baignée dans la lumière divine ? »

« Je serai heureux, bien sûr, répondit Adam. Et je le suis. Car la lumière divine inonde déjà ce jardin. Je la vois sur ton corps à chacun de tes gestes. Je suis déjà ton socle, ton roc, ton cap, car c’est par mon regard que tu resplendis. Mon amour te porte au-dessus de toutes les autres créations de Dieu, alors pourquoi devrais-je t’exhiber devant Lui ? Cela ne me rendrait pas plus heureux, mais plus fier. Or quelle fierté ne serait pas malvenue face au messager de celui qui a tout créé ? Et puis, il y a autre chose : certes, Dieu a fait ton esprit différemment du mien, mais il n’en reste pas moins parfait. Ce n’est pas parce que tes réflexions sont trop élevées qu’elles te paraissent obscures, puisque tu ne peux pas avoir de réflexions plus élevées que celles dont tu es capable. Tu es dans le trouble car tu as laissé ta raison prendre une mauvaise voie. Elle avance droite quand elle est guidée par une pensée sensée, mais elle se perd dans le brouillard si d’autres mouvements la guident. Ce sont de ces mouvements que tu dois te méfier, ils sont motivés par les sentiments, les émotions et les pulsions… ils détournent la raison de la justesse. »

« Mon très cher… J’entends ce que tu dis. Mais il est possible que toi, également, tu aies pris une voie qui ne soit pas guidée par le sens. Je ne remets pas en cause la pureté de tes intentions, seulement, tu as vécu des évènements qui ont profondément impressionnés ton esprit. Une nuit, c’est peu pour consommer tous les bouleversements que tu as connu. Et même si tu es capable de chasser tes pulsions loin de ta conscience, elles peuvent influencer ton jugement. Nous sommes et serons pour toute notre descendance les premiers parents, les êtres sans nombril. Dieu nous a fait de la plus noble matière, mais il ne peut pallier à l’étrangeté de notre origine. Tu es né de la terre même, sans femme qui t’ait porté, et ton créateur t’a façonné à son image. Avec ta mère absente, ton père omniprésent et moi qui suis à la fois ta sœur, puisque nous avons le même créateur, ta fille, puisque je suis issue de ton flanc, et ta femme, puisque nous partageons la même couche, reconnais que ton passif est propice à perturber ta raison. »

« Mon amour, conclue Adam, toi et Gabriel ne parlez définitivement pas la même langue. Je suis triste de réaliser que tu n’as pas compris la nature même de mes rencontres avec lui. Certes, il est possible que mon esprit ait parfois du mal à gérer certains éléments de mon passé, mais Gabriel connaît justement des voies pour m’enseigner à y voir plus clair. Il me fait prendre conscience des profondeurs de mon être et j’y trouve ce qui est le meilleur de moi. Ce sont les désirs inassouvis qui engendrent les pulsions… et ces pulsions ont pour effet de troubler la raison. En présence de Gabriel, l’effet se recule. Il sait combler ces vides et il me montre le vrai chemin. Je peux donc t’assurer en toute clarté que votre rencontre serait vaine. Si Dieu avait fait des anges femmes, les choses seraient différentes. Si par aventure un jour une ange descend sur terre, je serai très heureux de te laisser la rencontrer. Mais ange ne se décline pas au féminin. Maintenant, assez parlé. Je vais aller sculpter le plat sacré qui recevra la nourriture pour l’ange. De ton côté, prépare le foyer et rassemble à ta convenance les fruits les plus doux afin de contenter notre faim. Je les offrirai moi-même à notre hôte et nous les dégusterons en songeant à toi. En cela, tu seras d’une manière présente pendant notre rencontre. »

Adam partit se mettre à l’œuvre, le cœur léger, impatient d’être l’échanson de Gabriel, tel Ganymède aurait été celui de Zeus. Eve regardait pensive son époux creuser la branche d’olivier. Son corps noir se détachait nettement devant le ciel… Elle sentait un sentiment nouveau chez elle : la tristesse.

« Ma confiance dans mon mari est entière, songeait-elle… Cependant, jusqu’à présent, je ne l’avais jamais réalisé. Le fait de prendre conscience de ma confiance en lui n’est-il pas le signe que, pour la première fois, j’ai douté de ses paroles ? Est-ce encore le rêve de Satan qui me trouble ? Je sais que Dieu m’a faîte pour suivre mon époux, mais dans ce cas-là, pourquoi m’autorise-t-Il à avoir des désirs qui ne sont pas les mêmes que les siens ? Si je suis née pour obéir, quelle utilité il y avait à me faire don du libre arbitre ? Preuve m’est faite par ses propos que mon époux est plus grand que moi… Pourquoi Dieu m’a investi des mêmes pouvoirs sans m’investir des mêmes forces ? Ne suis-je au bout de compte qu’une épreuve infligée à mon époux ? Peut-être doit-il apprendre à m’assujettir, à me pousser vers la raison et acquiert-il en y parvenant encore plus de gloire… Si c’est le cas, chacun de mes écarts est une manière de rendre sa droiture plus éclatante en comparaison, ils donnent de la valeur à son épreuve. »

Tout en poursuivant ses réflexions, Eve arpentait l’Eden, cherchant du regard les meilleurs fruits pour Adam et Gabriel…

« C’est un malheur que Dieu me refuse les réponses qu’il accorde à mon époux… Car comment pourrais-je marcher parfaitement dans son ombre alors que mes pensées me poussent parfois à chercher d’autres chemins ? A moins qu’il s’agisse là de mon épreuve à moi : réussir à faire taire mes réflexions. Non… Cruel serait le créateur qui aurait engendré une créature dont les croyances n’auraient pas de valeurs. Dieu est parfait, il ne peut pas être cruel. Alors mon destin doit être de trouver ma place en me heurtant au silence désespérant du monde. Car vu qu’il m’est interdit d’avoir une réponse, je dois la chercher. Cependant, Adam m’a confié une tâche. Comment lui montrer, à lui et au messager de Dieu, que j’ai compris quelle serait ma place ? Comment suivre son avis tout en montrant le mien ? »

Le regard d’Eve se posa sur un grand arbre aux larges feuilles ombrageuses...

En rentrant au foyer, le plat sacré était déjà achevé. Il était posé sur la table, attendant de recevoir les fruits les plus délicats. Dans peu de temps, Adam allait devoir les ouvrir de ses mains nues pour offrir au messager du Dieu leurs chairs généreuses… Eve s’approcha du plat et y mit avec délicatesse et soumission une dizaine de noix de coco.

Ce fut la première pierre posée à l’édifice de la désobéissance.

Mathieu Granier

 

 

 

vendredi, 01 juin 2012

La nuit

Esther Mar, Ernst von Kleist, Charles Baudelaire, Pedro Calderon de la Barca, Alfred de Musset, nuit
Phot.Mavra
Nicolaïevna Novogrochneïeva


Un billet d'Esther Mar-Adentro

La vie est une nuit. Nous attendons tous l'aube, qui nous délivrera du poids des ténèbres, ténèbres de nos entrailles, ténèbres de nos douleurs, de nos tentatives et de nos échecs, de nos tentations et de nos âmes piégées.

"La vie est un songe", disait Pédro Calderon de la Barca.

"La vie n'est qu'une nuit à passer dans une mauvaise auberge", disait Sainte Thérèse d'Avila.

"La vie est un voyage", disait Ernst von Kleist.

"La vie est un sommeil", disait Alfred de Musset.

"Cette vie est un hôpital", disait Charles Baudelaire.

La vie est une nuit, où la lune brille trop faiblement pour guider nos pas. Nous nous cognons les uns contre les autres, et pour nous venger de notre condition, de nos espoirs déçus, nous bridons l'enfance et malmenons les bêtes.

La vie est une nuit et nous attendons la fin du noir, la venue de l'aube, l'avenue du jour qui se déploie sous nos yeux jusqu'à l'horizon. Alors, que ferons-nous ?

Nous verrons. Pour l'instant, nous geignons et nous prions.

 

Esther Mar-Adentro

Boris Bérard, Charles Baudelaire, Ernst von Kleist, William Shakespeare
Phot.VillaBar

mercredi, 21 mars 2012

Le Pommier d'argent

 florian guy,villabar,marie de la roche saint-andré,conte,pommier d'argent,pommiers,conte de fées,sorcières

Nous présentons le Conte du Pommier d'argent, par Marie.

Ce conte est le premier opus d'une nouvelle rubrique d'AlmaSoror intitulée :
"Jeune littérature", dans laquelle nous publierons des oeuvres
de tout jeunes gens de moins de quinze ans.

 

marie de la roche saint-andré,conte,pommier d'argent,pommiers,conte de fées,sorcières

 

Il était une fois,
Un roi, riche, puissant, bon
Aimé de tous…
Il avait une femme magnifique, toutes les tenues lui seyaient si bien, qu’on pouvait passer des heures à l’admirer tellement elle était belle !
Mais de plus, elle était merveilleusement belle,
Grâce à ses cheveux d’argent.

Un jour, le roi s’en alla à la chasse avec ses sujets ;
Il leur déclara : allez chasser, je vais m’en promener au grand air !
Ses sujets ne s’en étonnèrent point car le roi aimait
Se promener dans la forêt (il ne s’inquiétait pas, car il n’y avait rien qui puisse être fâcheux dedans).
Le roi s’en alla donc dans la forêt.

En chemin il entendit des cris,
Il alla voir : des va-nu-pieds  qui frappaient une pauvre femme !
Son sang ne fit qu’un tour, il se fraye un chemin à travers les buissons, et chassa les voyous.
-Merci, oh merci ! Seigneur !
Je ne mériterai pas ça, car…
-Car ? Je vous écoute,
-eh bien, je devrai être dans vôtre château, ou plutôt, dans vos cachots : je suis sorcière...
-Je vous laisse la vie si vous promettez de ne pas user de la magie contre mon royaume.
-Je le promets. En échange, vous avez un souhait.
-Avoir un pommier d’argent.
-vous l’avez. Et la sorcière disparut.

En rentrant au  château, il trouve le pommier mais pas sa femme !
Comprenant soudain son erreur,
Il pleure, encore et encore !
Personne ne peut l’arrêter,
Pourtant son fils le prince Alexandre
Annonce à son père le roi : Père, je pars à la recherche de cette sorcière, là je tenterai de réparer l’irréparable !!

Son père le laisse partir à grand regret,
Là sur son fier cheval blanc à crins noir,
Il chevauche par-delà les forêts, traverse de
Nombreux villages, rencontre bien des gens,
Mais c’est encore plus loin qu’il trouve la sorcière !

-Sorcière, je t’ordonne de transformer le pommier d’argent que tu as offert à mon père en ma chère maman.
-J’accepte très volontiers, mais il faut que tu paye pour cela, enfant !! Ricana- t-elle.
-Que veux-tu en échange ?répondit Alexandre, J’ai traversé tant de danger, tant de forêts, tant de personnes ! Je voudrais une réponse, alors ?
-Voilà, rapporte-moi une de ces merveilleuses branches d’olivier !
-Où donc se trouvent-elles ?
-dans la grotte du dragon vert, mais attention,
C’est le fils de la nature même,
Si tu l’offense, il te mangera, et si tu lui échappe,
Il te poursuivra toute ta vie, alors sois aimable ! Sourit-elle.

Alexandre trotta longtemps sur le chemin, se renseignant au passage sur le chemin à prendre.
Ce ne fut que deux jours plus tard  qu’il arriva  devant la grotte du dragon. Cela faisait bien cinq jours qu’il était parti…
Il rentra et appela : Oh, dragon vert, fils de la nature,
Ma mère a été transformée par un souhait malheureux
Que mon père a fait en demandant un pommier d’argent !
-Je sais cela, prince, mais je suppose que tu ne viens pas que pour cela ? répondit-il d’une voix caverneuse.
-en effet, Sire, la sorcière cause de cela accepte de rendre ma mère si on lui donne une de tes branches d’olivier !
-Et tu me demandes de t’en céder une, ou je me trompe ?
-Non tu ne te trompes pas, alors sire ?
-Cette sorcière te met à l’épreuve, elle veut que je te tue !
Prends une branche d’olivier et jette là dans une rivière, puis rentre chez toi, ta mère sera bien vivante et le pommier mort !

Alexandre s’exécuta, il rentra chez lui et le royaume heureux de retrouver sa reine !

 

 

                           Marie de La Roche Saint-André

 

 

 

lundi, 26 avril 2010

Solstices

320T poussé 2.jpgphot "Ondine Frager" par Sara
320T poussé 2.jpg

"Que nul à la fête de saint Jean ne célèbre les solstices par des danses et des chants diaboliques".


Saint Eloi

VIIème siècle

dimanche, 07 mars 2010

VillaBar, si les visages s'effacent

Le projet photo VillaBar a eu lieu toute l'année "scolaire" 2007-2008.

Voici deux des affiches réalisées par Sara. Notre affichiste avait reçu des critiques méchantes d'une jeune femme très prétentieuse. J'avais demandé à cette femme de nous faire une affiche qui lui semblait meilleure. Le résultat fut laid. C'était un résultat beauf et visuellement nul. Tout au long de VillaBar, certaines critiques ne manquèrent pas de nous ébranler mais elles venaient de gens qui ne faisaient rien, ou qui faisaient des choses que nous n'aimions pas. Aujourd'hui, face au ciel de Biarritz, grande toile de lumière bleue et blanche tendue sur les toits, je songe à toutes les angoisses que je n'aurais pas eues si j'avais eu plus confiance en moi. Et la jeunesse me parait être une histoire bousillée par le manque de confiance et d'acuité, par la honte et la peur de déplaire.

CMJN VILLABAR II.jpgVillaBar.gif

10 fois, nous nous sommes rassemblés dans un bar, le Piston Pélican, dans le vingtième arrondissement de Paris, une fois par mois, et nous y avons fait des photographies. D'après ces photos, un auteur a écrit un texte et nous avons obtenu 10 romans photos parisiens.


Puis, à Berlin, nous avons réalisé un romanphoto au bar Ä

Une dispute a ensuite opposé deux femmes féministes, qui trouvaient le texte allemand mysogine, et les tenantes de la liberté d'expression qui soutenaient qu'un auteur a le droit d'être machiste - si tant est qu'il l'est. C'est moi qui décide en dernière instance et je laisserai toujours libres les auteurs d'écrire ce qu'ils veulent. Du moins, je le crois. Mais on peut se tromper, surtout sur soi-même.


V8-35.jpg

vendredi, 01 janvier 2010

La guerre Civile, Scène VI

 

 

SaraV6_Dia.Roi+Lilas11.jpg
photo Sara pour VillaBar

 

 

Caton, Brutus.

 

Brutus, entrant.

Tu ne dors pas ?

 

Caton

Le malheur de mon pays m'empêche de dormir.

 

Brutus

Dans la nuit, je viens de croiser deux ombres...

 

Caton

Le Meurtre et le Suicide, qui se promènent sans cesse parmi nous, et quelquefois, au passage, nous serrent doucement le bout des doigts.

 

Brutus

Non, Pompée et Lentulus, sur le seuil du prétoire. La nuit et des baraquements les ont empêchés de me reconnaître. Pompée disait : "L'attaque de demain est une absurdité. Nos recrues sont des civils déguisés en militaires". Lentulus lui a demandé : "Alors, pourquoi cette attaque ?" Pompée a répondu, avec son à-propos habituel : "Il faut bien faire quelque chose". LE concert des grenouilles a couvert la suite.

 

Caton

Ne dis cela à personne, et surtout à personne du commandement.

 

Brutus

J'ai voulu t'avertir : il vaut mieux être prévenu.

 

Caton

Mais enfin, que pense-t-il de la situation ? Avec lui on ne sait jamais rien.

 

Brutus

C'est qu'il ne pense rien. Il fait celui qui pense, et ne pense pas. Il attend l'événement, et se décide au hasard. On parle de sa politique. Sa politique est n'importe quoi. Il nous a fallu trente-cinq ans pour découvrir cela, et pour en découvrir la cause : c'est qu'il n'est pas intelligent.

 

Caton

Lent, secret et perfide comme ces lagunes de Dyrrachium, où bouge un imperceptible courant, venu d'une mer immobile.

 

Brutus

À propos de nos lagunes, si la fièvre de Pompée est une blague, la mienne est une réalité. N'attends pas de moi que je me couvre de gloire demain.

 

Caton

Tout t'est permis, nous savons cela. Profites-en, mon cher Brutus. Quant à moi, je n'ai pas la fièvre.

 

Brutus

Tant mieux pour toi. Salut. Bon sommeil, quand même.

 

Caton

Et ton abrégé de l'Histoire de Polybe ?

 

Brutus

J'y ai travaillé toute la journée.

 

Caton

La veille d'une bataille.

 

 

Brutus

Délit caractérisé de liberté d'esprit !

 

 

 

 

Henry de Montherlant

samedi, 28 novembre 2009

John Peshran-Boor

 

 

 

lundi, 16 novembre 2009

Effigies

 

Par Marin Dupondt-M

SaraV6_à table4x.jpg
phot Sara pour VillaBar

 

 

A ma soeur bleue marine

 

Je t’aime, je te quitte, ta guitare m’a trahi en chantant ce sommeil qui nous tint à l’écart, qui nous tint éloignés l’un de l’autre, l’un de l’autre, trop de temps. 
 

Je viens, tu repars, et les drogues qu’on achète n’éssuient plus ce chaos, ce chaos qui oppresse, qui opprime nos poitrines en roulant sur les bords des instants. 
 

Toi, tu regardes dans la brise nos écarts et les chiens te comprennent, et les chiens te soutiennent et je reste, bien trop seul bien trop cuit, bien trop noir pour tes chants. 
 

Rire, dans le ciel, pleurer, dans les vagues, crier dans le drame des corps qui cherchent l’éclaboussure de joie, et c’est toi, ma tendresse qui disais, qui disait il fait froid, il fait faim, prends moi dans tes bras. Et c’est toi, ma tendresse, qui disais, qui disait il fait froid, il fait faim, prends-moi dans tes bras. 

 

Marin Dupondt

 

dimanche, 15 novembre 2009

Du prisme de Sennacherib

La rubrique Exterminator rappelle que certains hommes sont fous de sang et de destruction ; et qu'ils obtiennent souvent un grand succès. 
 

L'extermination d'autrui a toujours été une activité prisée.

AlmaSoror crée aujourd'hui la rubrique EXTERMINATOR en hommage aux exterminés ; nous espérons aussi, par cette série de courtes citations des bourreaux, contribuer à mettre au jour les méandres intérieurs de ce personnage très présent dans l'histoire des hommes : Exterminator. 

Qui est Exterminatator ? Nous commençons avec Sennachérib, l'homme qui se vanta d'avoir rasé Babylone sans laisser de survivants. 

sennacherib,musée de chicago,sara,villabar,babylone,piotr biziuk,daniel david luckenbill,stèle de taylor,prisme de sennacherib

"Dans les rues et sur les places traînaient des corps, que personne n’enterrait. La ville a été prise par la famine. Alors commença la tuerie. Je n' ai pas épargné les habitants, ni vieux, ni jeunes. J’ai couvert de leurs corps tous les quartiers. J' ai tout raflé et tout détruit, les maisons ont été ravagées par le feu des fondations aux toits. J’ai creusé des fossés le long de la ville, j’ai inondé ce lieu, j’ai détruit les bâtiments jusqu'aux fondations. J'ai anéanti (Babylone) plus que le déluge ne l’avait fait"

 

Sennacherib (vers 700 avant Jésus Christ)

Propos extrait du prisme de Sennacherib, conservé au musée de Chicago.

 

( On peut lire, en anglais, les ouvrages de Daniel David Luckenbill ; en polonais, celui de Piotr Biziuk)

lundi, 19 octobre 2009

De la supériorité des bassonistes

 

La ballade de VillaBar, c'est l'histoire des personnages nés au bar du Piston Pélican, en 2007, le dimanche soir quand on se retrouvait, photographes, écrivains, acteurs et piliers de bars, pour inventer ensemble. Les soirées n'ont plus lieu, mais les personnages poursuivent leur vie. Car la réalité s'est fait dépasser par la fiction de VillaBar. Et le monde de VillaBar est devenu plus vrai que nous. 

 

Monologue rageur de Solveig Bassone

ISA FERRIER SOLVEIG.jpg
Phot Isabelle Ferrier

Je hais les trompettistes. Comme tous les bassonistes, j’éprouve un profond mépris pour les gens qui s’imaginent faire de la musique en soufflotant dans des demitubes qu’ils prennent pour des instruments à vent.
Miles Yufitran obtient de grands succès auprès d’une population grande en nombre et petite en intelligence mélomane. Hélas. Mais comment pourrais-je l’envier ? J’ai la chance d’être adepte d’un instrument exceptionnel, qui façonne le caractère, le corps et la mélomanie, année après année, répétition après répétition.
Miles Yufitran et moi sommes invités à jouer ensemble dans le même orchestre au mois de ventôse. J’hésite. Puis-je m’abaisser à cela ?Je crois que oui : c’est ainsi que je mettrai en avant la splendeur du basson et le ridicule des trompettes, saxophones et autres clarinettes. Et puis, cette carrière de soliste tourne en rond.

dimanche, 11 octobre 2009

AlmaFrater

 

La ballade de VillaBar, c'est l'histoire des personnages nés au bar du Piston Pélican, en 2007, le dimanche soir quand on se retrouvait, photographes, écrivains, acteurs et piliers de bars, pour inventer ensemble. Les soirées n'ont plus lieu, mais les personnages poursuivent leur vie. Car la réalité s'est fait dépasser par la fiction de VillaBar. Et le monde de VillaBar est devenu plus vrai que nous. 

 

 

Complainte cynique de Joan Yufitran

_iFerrier_joan Yufitran.jpg
Phot Isabelle Ferrier

Mon cher William, 

 

Comme vous avez gardé votre naïveté depuis Stockholm... Et quel amusement de vous retrouver ici, à Santa Marina. Le monde est petit ou ésotérique... pour permettre de telles retrouvailles. Vous surveillez la petite rousse et son amante Carotte Feliccio. Qu'ont-elles fait pour attirer ainsi votre attention ?
Carotte fait partie de mon écurie, avec Galeswithe Albanel.

 

MC Bordaz Boxe 1.jpg
MC BOrdaz boxe 2.jpg
MC Bordaz boxe 3.jpg
Elles cognent dur. Mais je sais que vous n'aimez pas ce monde des combats interdits. Moi, je le préfère à votre douceur hypocrite. Vous êtes un privé. Vous êtes donc tout aussi vendu que moi. Mais moi, j'en suis consciente.

Et puis j'ai une douleur bien plus grande que celle d'avoir trahi mes frêles idéaux de jeunesse.

J'ai perdu un frère. Oh, bien sûr, il est toujours vivant, et il erre, de ville en ville, de port en port, traînant sa trompette, ses yeux de poète insomniaque et ses souffrances vides. Mon frère était mon seul amour, depuis toujours et à jamais.

Miles, tu me hais. Pour combien de temps encore ? 
SARA Yufitran Miles.jpg
phot Sara

 

 

 

mardi, 29 septembre 2009

Santa Marina de tous les saints

 

La ballade de VillaBar, c'est l'histoire des personnages nés au bar du Piston Pélican, en 2007, le dimanche soir quand on se retrouvait, photographes, écrivains, acteurs et piliers de bars, pour inventer ensemble. Les soirées n'ont plus lieu, mais les personnages poursuivent leur vie. Car la réalité s'est fait dépasser par la fiction de VillaBar. Et le monde de VillaBar est devenu plus vrai que nous. 


 

Soliloque d' Alicia-Pilar « la matadora » Desdemone-Cajas

Phot Edith de CL Alicia Pilar.jpg

J’erre à Santa Marina sans savoir à quels saints me vouer
Je me rappelle des deux filles avec qui j’ai travaillé pendant plus de quinze ans dans un bar de Saint-Jean en Ville, en Louisiane française : Anita F.C. Trosh et Oriane Siette.

Nous savions rire ! Nous savions pleurer ! Deux dons qui ne sont réservées qu’à des âmes d’élite. Le Rire et les Pleurs sont un Art que peu de gens pratiquent avec hauteur.

Quel ennui en ce bas monde si mal peuplé. Riches et pauvres se rejoignent dans cette médiocrité qui les atteint tous. Nous ne sommes que quelques uns à nous élever au-dessus de cette bassesse, par la grâce de Dieu. Il y en a quelques uns par ici, Dieu soit loué. J’ai rencontré une jeune femme amusante, qu’on appelle Yeux Noirs. Elle semble s’élever au dessus des pensées et des actions habituelles.

 

Karim-Pierre Maalej-Yeux Noirs.jpg

Il y a un jeune homme qui passe me voir pour pleurer et parler de musique. Quelle élégance, quelle soledad, quelle dolor étoilée dans ses yeux béants ! Quelle divine musique quand il prend sa trompette ! Un vrai poète, mi irlandais mi berbère, qui s'appelle Miles Yufitran.

 

Karim-Pierre Maalej-Miles Yufitran et Ozanne Sommertag.jpg

J’ai aussi un client qui ne manque pas de piquant, pas seulement dans sa barbe mais au fond de son cœur. Son nom fait trembler les gens d’ici. Il s’appelle Stanislas Tichy.

 

Sancha-Stan Tichy.jpgphot Sancha

Mais quel ennui, à part cela.

Ay, Madre de Dios !
Christo hijo de la Virgen, ayudame.

 

 

 

 

 

dimanche, 27 septembre 2009

Celle qui ne m'a jamais aimée

 

La ballade de VillaBar, c'est l'histoire des personnages nés au bar du Piston Pélican, en 2007, le dimanche soir quand on se retrouvait, photographes, écrivains, acteurs et piliers de bars, pour inventer ensemble. Les soirées n'ont plus lieu, mais les personnages poursuivent leur vie. Car la réalité s'est fait dépasser par la fiction de VillaBar. Et le monde de VillaBar est devenu plus vrai que nous. 
Lamentation de Venexiana Atlantica
Isa.Ferrier.Lilas+Vene.jpg
(Photo d'Isabelle Ferrier)

 

 

De conquêtes musicales en conquêtes musicales, de conquêtes amoureuses en conquêtes amoureuses, je vogue sur la planète Terre, la planète bleue, sans comprendre le sens de la vie des autres. Ils n’ont rien : ni gloire, ni flic, ni art. Quel enfer que leur sort. Je brûle mes ressources vitales pour ne pas manquer de ces trois drogues, qui sont les seules choses valables en ce monde, et quand je n’en n’aurai plus, j’écrirai mon autobiographie (j’ai déjà trouvé le titre, un clin d’œil à John, qui sera alors mort et enterré depuis mathusalem) et je crèverai.

On dit que j’aime les femmes, ce qui est faux. J’aime les hommes.
J’ai aimé John. Bien que je l’ai trahi plusieurs fois.
J’ai aimé Bob. Bien que je lui ai fait de grosses crasses.
J’ai aimé Stan. Bien que je l’ai toujours traité comme une merde.
J’ai aimé Andreï, le petit flic sans peur et sans reproche, bien qu’il m’ait prise pour une maman, ce pauvre gosse, et que je lui ai fait sentir bien salement que si les mères sont des grosses putes qui vous soutirent tout votre bien dans votre dos, alors oui, j’en suis une bonne.
J’ai aimé Nicodème, malgré son odeur pestilente de flic et sa gueule de haut fonctionnaire méprisant. Si je lui ai fait arracher un bout de crâne par un pote véreux, c’était pour son bien. D’ailleurs, il a beaucoup plus de succès depuis, professionnellement et affectivement.
J’ai aimé Mahalaoui, le pauvre gars qui traînait lamentablement dans les bas fonds d’une ville perdue loin derrière Saint-Jean en Ville.

Je n’ai jamais aimé Lilas. Je n’ai jamais aimé Yeux Noirs. Je n’ai jamais aimé Grisélidis. Je n’ai jamais aimé Galswinthe. Je n’ai jamais aimé Solveig. La seule que j’ai peut-être aimé, dans le fond de mon cœur – si ce muscle brasse réellement autre chose que le sang, pétrole du corps -, c’est … Fifi Exaltacion. Mais c’est elle qui ne m’aimait pas.

 

vendredi, 10 juillet 2009

Philosophie d'un grabat d'asile

philosophie,asile,villabar

 

Nous, les psychotiques, nous comprenons que les hommes en blanc, les femmes en blanc, sont des criminels cachés, déguisés. Ils sont venus car c’est ici qu’ils peuvent détruire. Il détruisent des corps, des âmes, des vies, des passés, et surtout des avenirs. Ils détruisent l’essence même de l’être, de l’être autre. Nous sommes enfermés, à leur merci, parce que nos visages diffèrent, nos mots diffèrent, parce que nous avons crié ou frappé, une fois, plusieurs fois, ou simplement une fois de trop. Nous, savons ce que les contours de votre société dissimulent, nous qu’elle a charrié de l’autre côté de sa frontière, dans les zones vagues et blêmes de la folie. Elle nous a nommé les innommables pour mieux justifier ses crimes. Désormais nous observons les gardiens de l'Ordre mental, les hommes et les femmes en blanc, frères d’armes des hommes des abattoirs et des gardiennes de prison. Nous sommes une école, en noir. Un cagibi, en pire. Un miroir que jamais vous ne regarderez.

 

 

édith de cornulier lucinière

jeudi, 28 mai 2009

Jour de Soldes à Pau

 

 

 

Salut la familia!


eh oui nous sommes vivants! nous avons effectivement survécu à la tempête. Ayant le sommeil assez lourd, je prenais un bain de soleil sur une plage antillaise quand les conditions se déchainaient autour de moi! J'ai loupé tout le spectacle!
Enfin du coup, point de randonnée ni de descente à grande vitesse sur les pistes enneigées des Pyrénées, mais je dois vous avouer que, la météo aidant, E a réussi à me traîner dans les magasins, à la recherche de pantalons!!!
Tout avait bien commencé: premier magasin, premier essai: parfait! voila de l'efficacité!
Tant qu'on y est, me dis-je, prenons en d'autres, ainsi n'aurai je pas à y retourner de sitôt!!!
Je n'ai aucun mal à convaincre E en prononçant le mot magique: S O L D E S!
Deuxième essai moins glorieux: mes abdominaux volumineux m'empêchent de fermer le bouton! C'est alors Qu'E a une inspiration que je qualifierai de... désastreuse!!! A peine lui ai je communiqué mon petit problème intime, la voila qui s'enfuit vers le centre du magasin en appelant bruyamment et devant une foule ébahie un vendeur et professionnel du pantalon! 
En moins de temps qu'il ne faut pour le dire (pour preuve: je n'ai même pas eu le temps de me cacher dans la cabine d'essayage), un jeune homme, l'occiput rasé de près, le menton affichant un négligé de quelques jours, pantalon moulant et tea-shirt échancré sur torse épilé, accourt et ajuste ses lunettes fluo pour mieux regarder mon arrière train ... 
"très joli", s'écrit il!
Moi, foudroyant du regard l'organisatrice de cette mascarade et reine de la délation, je serre les fesses...
Rouge de honte et de fureur, je marmonne quelques mots qui le font s'éloigner quelques instants à la recherche de la taille supérieure!
N'osant apostropher l'indélicate en public, qui ne se rend compte de rien, elle suit le pro, enfin persuadée qu'il me faut effectivement la taille au dessus.
Quant à moi, la terre entière me regarde rentrer maladroitement dans la cabine pour retirer le maudit froc!!
Les deux complices reviennent après que j'eusse retrouvé mes esprits, avec un pantalon d'une autre couleur, n'ayant pu mettre la main sur la taille supérieure du précédent...
Une fois enfilé, la taille étant acceptable cette fois, je ne dis trop rien, donnant pour tout avis une moue maussade, échaudé par ma première expérience!
L'affaire est presque conclue, le type m'a suffisamment maté et je me réjouis intérieurement de pouvoir très bientôt quitter cet endroit malsain ou je n'ai que trop trainé!!!
Mais fatale erreur! il était dit qu'E ne lâcherais pas si facilement sa proie et me ferait boire le calice jusqu'à la lie!
Considérant ma moue, sachant pourtant pertinemment qu'elle n'était que la manifestation d'une lassitude certaine, l'impertinente se ravise soudainement et clame haut et fort que la couleur du futal n'est finalement pas si plaisante, un peu démodée, et même carrément moche, limite insupportable!!!
Le tout bien évidemment en arrivant à la caisse, sur le point de payer, pantalon emballé, alors qu'une file d'attente interminable s'est formée derrière nous, avec pour conséquence directe qu'une foule immense assiste à la scène!!! On va se faire lyncher!!!! Je regarde le sol, à la recherche d'un défaut, puis le plafond, superbe...
Devant l'esclandre, le bonhomme de la caisse lève les yeux au ciel, considérant une bonne paire de farfelus. Son acolyte, celui aux lunettes fluos se précipite à la rescousse pour argumenter sur le produit qu'il tente de nous refiler!
"Mais il est très bien ce pantalon, et cette couleur est magnifique!"
Tournant son regard globuleux sur mon torse avantageux, écartant (lui même!) les pans de ma veste, il s'exclama devant le public enthousiaste que la couleur m'irait à merveille, moyennant le port d'une chemise... rose, par exemple!!!!
sentant mon teint rosir à vue d'œil, je reste sans voix!
E aussi, retenant péniblement un fou rire, sachant évidemment ce que donne à penser une telle évocation...
Une chemise rose! non mais je rêve!!!
N'y tenant plus, je prends mes jambes à mon cou, abandonnant femme et pantalons, me promettant qu'on ne m'y prendrait plus, et retrouvant enfin à la maison mes vieux jeans si seyants!!
Voila mes aventures peu glorieuses d'un WE de tempête! Le Dimanche a été beaucoup moins riche en terme d'émotions, puisque j'étais à mon avantage pour initier E au bricolage...


Kenavo

Olivier du Chélas