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lundi, 31 août 2009

Les enfermés

 

 

 

La question de la réparation du crime et de la dignité corporelle

 

 

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phot Sara

 

 

Condamnation et enfermement
La Justice envoie beaucoup en prison. Il est frappant de penser que l’enfermement n’est pas réservé à ceux qui portent atteinte à la vie et à la dignité d’autrui ; des gens qui ne représentent aucun danger pour les autres croupissent de longues années en prison.

S’agit-il de faire payer à quelqu’un sa dette envers la société ou de protéger les membres de la société d’un individu violent ? Ces deux actions se confondent-elles ?
Les citoyens, au nom desquels on enferme, sont-ils seulement en mesure de répondre à ces questions ?

Réparation, dépossession
Les moyens de réparer un tort – travaux, amendes - ne manquent pas.
Pourquoi la société ne demande-t-elle pas plus souvent au « coupable » de réparer son tort, au lieu de lui faire subir une exclusion et de porter atteinte à sa dignité pendant un certain nombre d’années ?

Enfermer, c’est prendre possession du corps de l’autre. Dès lors, la prison ne devrait-elle pas être réservée aux gens dont la liberté de mouvement constitue une menace pour les corps, la vie, la santé des autres ? Peut-elle servir à autre chose qu’à protéger la société du meurtre et du viol ?

Respect et protection
Si nous admettons que la peine de prison n’est ni une punition – une société humaniste ne punit pas en enfermant les corps et en annihilant l’intimité -, ni une réparation – est-ce réparer, que de subir un enfermement ?-, alors elle ne constitue rien d’autre qu’une « solution » extrême et désespérée de protéger les gens. Dès lors, nous devrions faire en sorte que les criminels dangereux soient traités au mieux. Assurer à la personne que l’on enferme pendant plusieurs années, plusieurs dizaines d’années, un confort qui traduise le respect que nous accordons à la vie humaine et permette au prisonnier de vivre, au sens entier du terme : penser, se déployer dans l’espace, contempler la vie.

Espace vital
La question du (statut du) corps, animal ou spécifiquement humain, est centrale dans beaucoup de nos activités. On s’approprie le corps des animaux. On enferme de force les « malades mentaux ». On prive les prisonniers de leur liberté de mouvement.
Jusqu’à quel point la société peut elle prendre possession du corps et de l’intimité du criminel ou du déviant ?

Devrait-on définir le droit à un espace vital minimal, inaliénable ? Quel serait-il ?
Cette question, nous nous la posons de plus en plus au sujet des animaux. Mais nous devrions aussi considérer la prison sous cet angle corporel : quelle étendue spatiale et quelle possibilité d’intimité laissons-nous à ceux que nous enfermons ?

La question de la prison devrait tous nous préoccuper.
L’utilisation de la prison révèle notre rapport au corps humain, au corps d’autrui, et notre vision de la justice.

Edith de Cornulier-Lucinière

 

 

dimanche, 30 août 2009

Le Forçat innocent

 

 

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phot Sara

 

Solitude au grand coeur encombré par des glaces,
Comment me pourrais-tu donner cette chaleur
Qui te manque et dont le regret nous embarrasse
Et vient nous faire peur?
 

Va-t'en, nous ne saurions rien faire l'un de l'autre,
Nous pourrions tout au plus échanger nos glaçons
Et rester un moment à les regarder fondre
Sous la sombre chaleur qui consume nos fronts.
 

Jules Supervielle

 

 

vendredi, 28 août 2009

La ville de perdition

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« La ville est morte, faite de choses mortes et pour des morts. Elle ne peut pas produire ni entretenir quoi que ce soit. Tout ce qui est vivant doit lui venir de l’extérieur. Ce qui est une évidence pour la nourriture, mais également pour les hommes. On ne peut assez répéter que la ville est une vaste mangeuse d'hommes. Elle ne se renouvelle pas de l'intérieur, mais par un import constant de matière fraîche extérieure. »
Sans feu ni lieu, Jacques Ellul

 

Je me suis souvenu cette nuit, alors que la ville illuminée de Zurich révélait ses visages nocturnes, ceux qu'elle cache le jour parce qu'ils sont trop bizarres, je me suis souvenu des livres qui parlent de la ville, de la ville de perdition.
J'ai eu un ami, dans le temps, qui s'appelait Frédéric et qui venait d'une campagne lointaine, là-haut dans la montagne, pas de là où les monts deviennent bleus et dominent les nuages, mais à la frontière des moyennes et des hautes montagnes.
Frédéric était venu à la ville pour travailler et il avait connu cette empire urbain qui prend certains coeurs, les entraîne dans une valse effrénée qu'ils ne peuvent plus jamais abandonner.
Au bout de quelques années, Frédéric était devenu un citadin dépravé, et aux yeux de sa famille des hautes collines, un étranger.
Il en souffrait. Parfois, à la fin des dîners, quand les autres étaient partis et qu'il ne restait que ceux qui n'avaient pas de masque social, il en pleurait.
Alors on buvait ensemble jusqu'au comas éthylique.
Cette nuit, j'ai repensé à Frédéric ; j'ai repensé à tous les livres que j'ai lu et qui parlent de cette perdition. La ville qui mange les gens, avale les âmes et les vies.
Des livres d'auteurs tchouktches. Peuple de Sibérie presque entièrement détruit, mais dont des voix émergent encore, en langue tchouktche ou en langue russe, pour conter les contes cruels des individus échappés d'un monde rassurant et mort, broyés dans la grande ville. Avez-vous lu Unna, de Youri Rythkéou ?
Des livres d'auteurs quechuaphones, conseillés par Katharina F-B, notamment les nouvelles de Porfirio Meneses (Achikyay willaykuna), mais d'autres aussi, qui racontent l'Indien venu à la ville et mangé par elle.
Le livre d'Alan Paton, Cry, the beloved country. Un pasteur noir quitte son pays pour venir à la ville magique, Johannesburg. La ville qui a dévoré son fil unique. Car Absalom, fils de pasteur, est venu à la ville, a vu des prostituées, a essayé de travailler, à subi le racisme, a tué un Blanc.
Noirs & Blancs se donnent la main pour conjurer l'horreur de la grande ville raciste, violente, luxurieuse.

C'est si simple de se perdre dans la ville. Il suffit d'un moment de faiblesse et alors on tombe de l'autre côté, du côté sauvage. Celui que chante Lou Reed. Le côté dont on ne revient jamais, parce qu'il entraine les sens au delà des sens interdits dans une danse qui mélange les sens.
J'ai essayé de me remémorer la chanson de Simon & Garfunkel, The Boxer. J'ai demandé à mes frères de m'apporter un disque pour la réécouter. 

J'ai repensé à Rocky 1, le grand film de Sylvester Stallone, et à Fat City, l'immense film de John Huston.
Un moment de faiblesse, c'est la rupture. La sagesse est morte. La société vous quitte. Vous marcherez désormais dans son ombre.
J'ai repensé à Breakfast at Tiffany's. Truman Capote se projette dans son narrateur, jeune gars du Sud qui débarque à New York pour être écrivain et découvre, par l'intermédiaire de sa voisine, un monde de luxe, de paillettes, de tromperies, d'illusions, où, de temps en temps, au bord d'un instant fragile, en instance, une vérité bleu ciel éclate.

Depuis les Romains, le thème de la ville de perdition est inépuisable. Pourquoi le trouvé-je magnifique ? Parce qu'il ressemble au thème de l'enfance perdue dans la noyade adulte.
De Quincey et ses Confessions d'un mangeur d'opium : les jeunes filles (Ann... ma soeur Ann...) qui s'y engloutissent encore plus que lui, parce qu'elles sont encore plus pauvres, et du mauvais côté du genre humain – du côté violé.
Elise ou la vraie vie, belle histoire d'amour de Claire Etcherelli. Elise quitte sa ville de province pour venir être ouvrière à Paris. Elle y découvre la lutte des classes et la lutte des races. Elle tombe amoureuse d'Arezki, algérien menacé, qui l'aime aussi.
L'attrait des plaisirs, de la gangerosité, de la luxure. Nuits sauvages et incendies de corps. Aubes blanches et gueules de bois. Alcool, sexe, breuvages, étreintes... Poudre dans le nez et poudre aux yeux.
Tout cela m'a bien détruit. Tout cela a bien détruit mon cher Frédéric. Où est-il aujourd'hui ? Il erre sans doute quelques part, dans notre ville, ou dans une autre, encore plus grande. 

Nous nous retrouverons au paradis des anges déchus, auquel nous ne croyons même pas. 

La ville corruptrice qui transforme les jeunes innocents en maîtres de crime ne mourra jamais. Nul doute qu'elle s'exportera sur Mars, et bien plus loin, dans des temps à venir.

On voudrait dire à ceux qui jugent : la ville de perdition, vile, servile malgré elle, est pourtant mille fois plus artistique que vos sentiers battus. 

 

Axel RANDERS

(2007)

 

 

mercredi, 26 août 2009

Ave Imperator ! Morituri te salutant !

 

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Sara par Edith CL

 

 

« S'il faut donner son sang, Allez donner le vôtre, Vous êtes bon apôtre, Monsieur le président »
Boris Vian

« Du combat, seuls les lâches s'écartent »
Homère

Dans l’Antiquité, puis au Moyen-Âge, les chefs étaient au premier rang dans les batailles. Peu à peu, les dirigeants apprirent à faire la guerre sans risquer leur vie.
Lors de la campagne française en Russie, le prince russe, Bagration, finissait certaines batailles au corps à corps… Dans le camp d’en face, l’empereur Napoléon restait en retrait du champ de bataille. Il risquait beaucoup moins sa vie que ses prédécesseurs ; mais les canons sifflaient sur sa tête et il pouvait à tout moment exploser avec sa longue-vue. Pourtant, il fuit en cachette la Russie, pour rejoindre Paris, où il reprit sa vie de palais pendant que ses soldats mouraient de faim, de froid et de fatigue dans la neige russe. Il ouvrait ainsi une ère très agréable aux chefs : celle où leurs décisions ne les engageaient plus à mourir.

Certaines scènes appartiennent à nos époques, comme celle d’un chef des armées qui dirige les opérations depuis sa maison de campagne, n’ayant aucune expérience matérielle, physique et psychologique de ce qu’il prône. Il nous paraîtrait aberrant que Messieurs les présidents de la république des Etats-Unis d’Amérique, d’Israël, du Liban, soient en train de se battre aux côtés de leurs soldats, de lâcher eux-mêmes les bombes sur les villes et sur les populations.
Saint-Exupéry écrivait : « La guerre, ce n’est pas l’acceptation du risque. Ce n’est pas l’acceptation du combat. C’est, à certaines heures, pour le combattant, l’acceptation pure et simple de la mort ». Cette parole est vraie pour ceux qui font la guerre ; elle ne l’est pas pour ceux qui la décident, ni pour ceux qui la votent à l’Assemblée, ni pour le chef des armées. Pour eux, il ne s’agit pas de l’acceptation de leur propre mort, mais de celle des autres.
La répartition des rôles et des métiers a ses utilités, ses justifications, certes.
Mais le sacrifice de la vie des autres n’exige pas le même engagement personnel que l’acceptation de sa propre mort… L’observation des hommes et des animaux nous rappelle assez comme l’horreur de la mort et l’amour irrationnel de la vie sont répandus ; la gloire de ceux qui décident la guerre, et la mort de ceux qui la font, laissent rêveur.
Comme les chefs d’Etat, la plupart des citoyens ne connaissent pas la guerre réelle, directe, celle qui fait irruption dans la vie pour balayer toutes les choses aimées. Que signifie « intervenir en Afghanistan, en Irak, en Serbie », pour un citoyen dont le rapport à la guerre se réduit à regarder une télévision ? La perte de soldats français en Afghanistan ne faisait pas même l’objet d’une ligne dans les grands journaux français. Le peuple français ne s’intéressait pas aux conséquences des décisions prises en son nom, puisqu’il n’était pas en danger.
« Se faire tuer » est le métier du soldat ; les citoyens des nombreux Etats engagés en Serbie pouvaient approuver de concert les interventions meurtrières sans réfléchir outre mesure. S’ils avaient été concernés par la mort, sans doute la défense guerrière des droits de l’homme aurait paru moins alléchante, plus discutable.

A la barbarie des chefs sanguinaires des despotismes d’antan, succède l’indifférence des technocrates décisionnaires. Dès lors, comment penser la guerre ? Faut-il la refuser complètement ? Ou, considérant qu’elle est inéluctable, faut-il l’organiser ?
Lorsqu’on compte les morts au combat, comment accepter que le chef des armées ne déplore pas la moindre foulure, ni même une tâche de boue sur ses costumes ?
Quelle est la valeur d’une décision qui met la mort en jeu, quand le décisionnaire sait que lui et les gens qu’il aime seront totalement épargnés ? Dans quelle mesure des chefs d’Etat et des ministres, désolidarisés, dans les faits, de ceux qui mourront d’appliquer leurs décisions, peuvent-il les représenter officiellement ?
Quelle considération donner à des décisions prises par des hommes protégés, sacrifiant, au nom des droits de l’homme ou au nom d’autres idéaux paisibles, la vie d’autres hommes ? Y a-t-il une légitimité à voter la mort des autres, même au nom des idéaux les plus élevés, quand soi-même on ne s’engage pas dans la bataille ? La réponse à ces questions abyssales oscille entre la vie et la mort.

Edith de Cornulier-Lucinière, Paris

 

 

lundi, 24 août 2009

Soirs d'exil

 

 

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phot Sara

 

Venez sous cette lampe amie et près du feu.
Parlez-moi du Berri, de la mousse câline,
De l' étang lumineux sur qui le jonc s'incline,
Paupière de velours où brille un regard bleu.
 

Je vous dirai l'ardeur de nos Juillets en feu,
Les vignes d'Août saignant à flots sur la colline,
Et, quand le vent le tord d'une étreinte féline,
Le grand pin qui nous parle avec la voix d'un dieu.
 

Au dehors, c'est la nuit, l'hiver, Paris hostile;
L'heure morne s'égoutte aux beffrois de la ville:
Évoquons la patrie et le passé charmant!
 

Un mirage en nos yeux met sa lueur qui tremble,
Et nous rêvons, muets, avec le sentiment
D'être moins exilés quand nous sommes ensemble.
 

Anne Osmont

 

 

dimanche, 23 août 2009

été

 

 

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Une statue bleue et blonde de la Vierge. Le soleil descend sa douceur chrismale dans le calcaire rose du matin.

Du chant grégorien dans la maison, et jusque dans la rue. Les cris de mouettes, et dehors, vers la mer, hauts vols d’oiseaux, et leurs cris. Bleu du ciel et blanc des nuages, la plage est presque vide et le vent se balade dans l’air chaud. L’après-midi s’est arrêté pour toujours ? 

 

Monk David

 

mercredi, 19 août 2009

What Has Happened To Lulu?

 

 

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What has happened to Lulu, mother?
What has happened to Lu?
There's nothing in her bed but an old rag-doll
And by its side a shoe.

Why is her window wide, mother,
The curtain flapping free,
And only a circle on the dusty shelf
Where her money-box used to be?

Why do you turn your head, mother,
And why do tear drops fall?
And why do you crumple that note on the fire
And say it is nothing at all?

I woke to voices late last night,
I heard an engine roar.
Why do you tell me the things I heard
Were a dream and nothing more?

I heard somebody cry, mother,
In anger or in pain,
But now I ask you why, mother,
You say it was a gust of rain.

Why do you wander about as though
You don't know what to do?
What has happened to Lulu, mother?
What has happened to Lu?

 

Charles Causley

 

mardi, 18 août 2009

Requiem pour la liberté

 animalité,antispécisme,liberté,esclavage,prisons

Il est une question qui ouvre des abimes. Pourquoi attachons-nous les bêtes 

Ma première abysse : le souvenir d’un prisonnier américain, vu sur la télévision d’un voisin, enchaîné, comme dans les bandes dessinées de Lucky Luke. Le pénitencier dans lequel il vivait emmenait ces hommes, pour la plupart noirs, travailler dans les carrières ou d’autres types de grands travaux.  

Il racontait à la caméra : « Chez moi il y avait un chien qui était attaché à une chaîne devant la maison. J’ai écrit à ma famille pour leur dire de détacher le chien. C’est trop horrible d’être enchaîné ».

Pourquoi laissons-nous les chiens sous la table lorsque nous mangeons tous ensemble un festin ? Les grondant lorsqu’ils tentent de participer.

Parce qu’ils sont sales ?

On l’a dit de beaucoup d’humains qu’ils étaient sales aussi – trop sales pour toucher ce que nous touchions.

Parce qu’ils ne comprennent rien ?

Pour cela on gardait les enfants et les Indiens loin des endroits de fête et de décision.

Parce qu’ils ne ressentent rien ?

Certes, ils ne ressentent pas plus que ces bébés qu’on opérait sans anesthésie, pensant qu’ils ne ressentaient pas la douleur.

Lorsqu’on parle des sentiments, de la conscience, de la propreté, de la profondeur des autres, parle-t-on d’autre chose que de soi ?

Je sais que mon chien ressent parce que je sais ce que c’est que de ressentir.
 

Je sais que mon chien aime parce que j’ai aimé.

Je sais que mon chien jalouse parce que j’ai jalousé.

Je sais que mon chien a sa dignité parce que j’ai le sens de ma dignité.

Je sais que le cochon aussi. Et le bouc. Et le mouton. Et l’éléphant. Et le rat.

Et le poisson ? Je ne sais pas.
Je n’ai pas d’écailles, pas de nageoires… je suis modelée par mes vertèbres alors je sais que je ne sais pas.

Que ressentent donc ceux qui ne voient pas autrui ressentir ?

Il semble que chaque être doit être à sa place pour la tranquillité d’esprit de Monsieur et Madame : le chien sous la table, la chèvre à l’autre bout du champ, l’enfant en bout de table, etc.

Or, on voit mal de quelle morale, de quelle nature, se dégagerait une place « normale », naturelle des êtres vivants…

Cette histoire de places m’interpelle. Deux sujets font tressaillir les gens, du fond de leurs tripes : ce qu’ils dénoncent comme la « confusion des genres » et « l’anthropomorphisme ».

Or, on pourrait leur rétorquer qu’eux, font du racisme du genre et de l’anthropocentrisme. Ces batailles de mots ne devraient pas oblitérer les vraies questions : pourquoi sommes-nous affolés de l’intérieur lorsqu’on « change la place » des hommes et des femmes, des humains et des bêtes ? 
 

 

José Vengeance Dos Guerreros

 

lundi, 17 août 2009

Université d’antan, amis de demain

 

 

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Je me souviens de l’université et de ses déchirantes disputes qui nous tenaient éveillés jusque tard dans les bars de la nuit de Genève. Français, Allemands et Suisses Allemands, quelques Belges, nous formions un groupe européen ambitieux et arrogant. Nous pensions pourtant que nous étions humbles et généreux.
 

A cette époque, je croyais en l’avenir, sans doute parce que la jeunesse me tenait éveillé tard dans les bars de la Nuit de Genève, que la maison familiale zurichoise paraissait lointaine et que les filles qui se criaient les plus féministes se pendaient à mes bras méchants sans retenue. Depuis j’ai connu la vérité de l’arrogance – sa face cachée, laide – et la vérité de l’amour vrai. Alors ma jeunesse m’apparaît comme une fougue chargée d’erreurs. 
 

Nous étions de gauche comme les jeunes de demain seront de droite : avec la certitude d’être l’apogée de la pensée et d’avoir raison pour les siècles des siècles. Hélas, la raison, la certitude et le mépris passent moins vite que les idées qu’ils véhiculent. 
 

Je ne me rappelle pas avoir beaucoup réfléchi à la mort. Je ne m’imaginais pas malade, encore moins mourant. J’avais de temps en temps peur d’un accident de motocyclette et quand je croisais quelqu’un qui me semblait, en âge et en style, proche de moi, en fauteuil roulant, aveugle, handicapé, je détournai les yeux, traversé d’un doute effrayant. Mais ce doute se noyait l’instant suivant dans une occupation ou une pensée vivante. 
 

Ces gens d’alors, je ne les revois plus beaucoup. 
 

 

Puis j’ai enseigné à la faculté. Ma carrière s’annonçait bien, quoique je précise à tout un chacun que j’étais bien trop intègre, audacieux et rebelle pour faire carrière. Puis je suis tombé malade. Alors le rideau de fumée qui s’installait toujours entre moi et la vie s’est déchiré. Je me suis trouvé seul face à moi-même. La confrontation fut rude. Nous fûmes tous les deux déçus : l’Axel social et l’Axel profond. Le premier découvrait un monde de sentiments et de paradoxes qu’il aurait voulu ignorer. Le second comprit qu’il n’y avait rien à tirer du premier et qu’il faudrait s’en sortir avec ses seules forces vitales, animales, ancestrales. Alors je rencontrai de vrais amis.
 

D’abord, Esther. Esther, ma plus belle ennemie. Elle était seule, en longue robe, au fond d’un grand salon de Genève quand je la rencontrai. Je venais d’apprendre ma maladie. Elle ressemblait à la fois à un rêve de jeunesse et à un ange de mort. Elle trônait seule, reine méprisée de cette soirée faussement élégante. Elle seule était élégante, c’est sans doute pour cela que personne ne lui parlait. Quel événement nous attira l’un vers l’autre ? Je l’ai oublié. Nous parlâmes et j’adorai le son de sa voix. Ses mots sonnaient étranges. C’était la première rencontre entre un intellectuel militant d’extrême gauche et une catholique traditionaliste de droite en déshérence. 
 

Esther m’accompagna mois après mois, le long de ce parcours de malade en état perpétuel d’aggravation. Je rêvai bien sûr assez vite à une histoire, mais Esther ne se détourne que très rarement de sa vie spirituelle, et lorsque cela lui arrive les heureux élus sont des femmes et des transsexuels. Elle qui, raide et intransigeante, défend sans cesse la famille traditionnelle, l’ordre moral et religieux, la patrie et la fidélité aux cultures européennes, préfère sombrer dans les bras de dépravées des bas fonds de la banlieue parisienne ou bien dans les bras d’autres échouées du catholicisme tridentin. Mais je lui pardonnai le dépit que ces préférences étranges me procurèrent et Esther, encore aujourd’hui, est l’Amie de mon cœur. 
 

Ensuite, Edith. Je la rencontrai par Esther, qui m’en parlait beaucoup. Elle, entre chien et loup, entre gauche et droite, entre religion et athéisme, entre spiritualité et matérialisme, entre confort et misère, entre mondanité et solitude, sut parcourir les quelques ponts qui séparaient Esther et moi et nous accompagner, à travers disputes et incompréhensions, sur les chemins de l’amitié. Longs et incertains, ces chemins n’en sont pas moins les plus beaux. 
 

Enfin, Mayeul. Encore un Français, mais lui a une mère suisse allemande. Nous conversons toujours en allemand.  Mayeul est contrebassiste. Il a perdu son père anarchiste dans une manifestation violente quand il avait treize ans. Il visite sa sœur en prison chaque semaine. Il me visite à l’hôpital chaque semaine aussi. Mayeul a sa musique qui l’a tenu loin des drames et qu’il joue pour nous, ses amis et ses proches cassés. Mayeul, tu sais que tu auras compté plus que tout dans ma vie. Si j’ai vécu d’une belle façon, c’est grâce à toi. Je te dois les conseils du temps de Julie, le soutien et des reproches durs mais bons après notre séparation, et cet accompagnement fidèle, incorruptible depuis la maladie. Mayeul, il est difficile de te souhaiter de belles aventures dans la vie car trop de gens autour de toi sont morts vivants, ou si blessés. Mais sache que tu es notre arbre de vie. J’espère qu’un jour, nous partis, tu vivras enfin heureux, entouré de gens sages et attentifs. La vie que tu méritais et qui ne t’as pas été donnée. 
 

Ces souvenirs des arrogances universitaires, de la fracture entre mes deux vies, de la naissance des vraies amitiés, toujours la présence de mon fantôme adoré Julie… J’ai écrit tout cela avant que naisse l’aube, ne dormant pas. Je le poste maintenant sur mon journal en ligne, je l’envoie par ma fenêtre de la Toile, et qui sait peut-être d’autres dépités trouveront dans ces souvenirs si particuliers et si communs l’image de leur propre route, regrettable et nostalgique. 
 

Ah, vieillir. 

 

AXEL Randers

 

samedi, 15 août 2009

Petite brouette de survie

 

 

édith N&B3.jpgphot Sara

 

 

J’aime les grands classiques de la littérature jeunesse. Je suis sorti pourtant hier de ces belles avenues pour découvrir un très étrange livre : petite brouette de survie de Tieri Briet et Alejandro Martinez, aux Editions Où sont les enfants ? 

Un texte étonnant illustré par des photos. Une sorte de road movie pour les petits. 

 

Un enfant ouvre le frigo de la cuisine familiale et trouve Oscar, un vieux poisson. Les lèvres du poisson tremble. Il murmure d’une voix préhistorique : « Ramène-moi jusqu’à la mer ».

L’enfant prépare donc sa brouette, qui devient un carrosse à une roue. Il demande la route de la mer à sa maîtresse. Puis il part avec Oscar. 

Je cite quelques phrases : 

« Maîtresse avait dit : « la mer est côté Sud. » A l’Ouest, il y avait l’océan. Et si je me perdais, il suffirait de suivre la rivière ». On voit que la Petite Brouette de Survie est un Water-Road Movie…

« Oscar ignorait tout des flammes et du feu. « Je suis un animal venu des eaux, répétait-il. Mes allumettes lui faisaient peur, et la folie des hommes aussi ». 

« Parce que la mer est partout, tu verras, même dans le cœur des gens qui vivent autour. »

Les phrases d’Oscar « ressemblaient à des poèmes venus d’une autre langue. Très ancienne langue animale, difficile à comprendre. »

Et à la fin du livre : « Au revoir, vieux poisson… Si tu reviens dans mon frigo, tu me raconteras la traversée du fond des eaux. »

 

Je crois que le monde entier est contenue dans cette immense petite histoire : le vent, la mer, la préhistoire, l’enfance et la vieillesse, les relations entre les hommes et entre les espèces. Et aussi le rêve, le voyage, la route.

Et puis l’amitié. Le Feu. La Spiritualité. 

Axel Randers

 

La beauté est-elle absolue ?


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Je réponds oui. 

L'univers dans lequel nous vivons est un univers organisé, auto organisé qui n'est pas probable.

Mais il est là. Et nous les hommes et les femmes voyons cet univers et le trouvons beau.

L'univers est-il beau intrinsèquement ou beau parce que nous l'interprétons tel?

Faut-il de la culture, de l'éducation pour trouver les choses belles?

Ne sommes nous pas doués tout simplement du don de pouvoir le voir tel qu'il est? Beau parce que tel. Beau parce que nous en sommes le fruit? Et seulement doué de le voir beau mais pas de le comprendre. Qu'au fond notre évolution nous a mené aux portes du début de la compréhension et qu'un long chemin reste à parcourir.

Nous ne sommes pas absolus. Nous sommes le fruit d'une évolution, d'une construction qui a débutée il y a quelques milliards d'années. Pas seulement lorsque la Vie est née sur terre. Intéressant, non ?

Notre conscience et notre inconscient ne sont ils pas tout simplement le résultat de ce que l'univers est : un ensemble capable d'auto organisation, capable d'éliminer ce qui n'est pas lui même? Un Darwininisme des quarks et des gluons?

Et pour conclure cette introduction, ne sommes-nous pas trop imbus de nous même en pensant que notre émerveillement et notre capacité à créer est un don humain dont nous devons nous féliciter nous-même, seuls? Ce qui semble être la loi du genre depuis la nuit des temps…

Je réponds non. Le processus de création, et par là de beauté,  est une loi absolue de l'univers. Comment imaginer les solutions futures à partir d’un point de départ ? Comment se réconcilier avec nos visions actuelles ? Plus spécifiquement comment imaginer et se représenter le processus de création de la matière. ? Je réponds que la loi de divergence, paradoxale, mais constituante de la matière, est de se rassembler pour créer des choses nouvelles. La loi fondamentale de la matière de notre univers, le vrai processus de création de l’univers que nous voyons, est de savoir s'agréger. Elle aurait pu très bien, cette soupe originelle non lumineuse et sans éclat, ne jamais vouloir se combiner. Pas de problème. L'univers serait, disons, une sorte de gaz ne voulant jamais se combiner. Nous sommes le rassemblement complexe de milliards d'années d'évolution. La loi de l'évolution ne commence pas avec Darwin et la vie. Elle est préexistante à la vie. La vie n'est qu'une des conséquences de cette formidable machine. Et la machine est belle, en soi. Parce qu'elle permet l'organisation, et dans sa forme la plus complexe la Vie.

L’organisation n’est pas une valeur de beauté en soi. On est d’accord, sans discussion. Mais ce qu’il faut voir dans les lois de l’organisation c’est cette formidable machine qui se créée en parallèle du « normal » et qui est la divergence. Sans règles, pas de divergence. Et c’est l’organisation et la contrainte qui crée le nouveau, le stable nouveau. Pas de contraintes, pas de stabilité. Pas d’existant pas de nouveau… 

L'univers d'aujourd'hui a environ 14 milliards d'années.

Ce n'est pas rien à notre échelle.

Et il existe et a évolué depuis ces 14 milliards d'années selon une loi programmée.  

Au tout début l'univers était un gaz très indifférencié et même la lumière n'y était pas possible.

Les lois de la matière de notre univers sont telles qu'à partir de briques élémentaires, tout ce que nous voyons a pu être possible.  

Partons de la constitution des premiers noyaux atomiques. Hydrogène, Hélium... petits noyaux.

Briques élémentaires s'assemblant et restant stables au moins un certain temps.

Refroidissement. Les noyaux deviennent stables. Des électrons peuvent les entourer. Ils sont nécessaires à l'assemblage entre noyaux atomiques. La lumière peut enfin s'échapper de ce gaz. L'univers s'illumine, l'univers se condense en de petits endroits, l'univers se construit tel qu'il est programmé  pour le faire. Il y a des fluctuations, des choses indescriptibles par les lois physiques classiques mais si on regarde avec un certain recul, on voit que la statistique est respectée. Tout dépend de l'échelle considérée.  

Je vais aller vite par souci de pédagogie.   

Les premiers atomes (Hydrogène) se condensent, attirés l'un vers l'autre par la gravitation.

Naissances des étoiles qui sont des concentrations de matière primitive.

Etoiles de première génération, de deuxième génération, de troisième génération...

Agrégation réactions, explosion, naissance de nouveaux atomes.  

L'univers s'ordonne. L'univers est doué  du pouvoir de s'ordonner, de se condenser en certains endroits. Ces lieux d'organisation grossissent avec le temps. De l'échelle atomique (naissance d'atomes lourds) à l'échelle moléculaire (gaz constitué  de deux atomes identiques) puis vers des structures de plus en plus complexes (molécules constituées d'atomes différents).  

Autour des restes d'explosion d'étoiles, les atomes se combinent dans des structures "minérales" complexes. Des cristaux géométriques apparaissent. Des structures ordonnées et mathématiquement déterminées prennent naissance. Le gaz primitif, sans individualité, constitué d'autant de particules nécessaires à la construction de tout l'univers se sont agrégés, se sont séparés et se sont réassemblés pour créer en des endroits particuliers des structures logiques, descriptibles et stables. Ces structures complexes deviennent douées de propriétés physiques étranges : conducteur électrique, isolant, transparent, opaque, durs, mous... Ces structures sont répétitives tout en étant innombrables. Elles sont toutes descriptibles avec nos connaissances. Du moins jusqu'à un certain point. En tout cas avec un certain formalisme qui n'admet pas d'exception.   

Tout le monde est d'accord pour dire qu'on ne sait rien expliquer de l'origine vraie de l'univers. Que s'est-il passé entre rien et un milliardième de seconde? Oui on sait faire beaucoup de choses. Et le milliardième de seconde est connu et descriptible. Mais en dessous d'une certaine limite de temps (temps de Planck) on ne sait plus décrire. Et je dirais que même si on savait un jour décrire, cela n'expliquerait pas ce que nous ne pouvons pas savoir. Un temps encore plus court?   

Le temps... une notion très incertaine. Le temps peut ne plus exister en tant que notion physique dans certains endroits (les trous noirs). Là, dans ces endroits qui nous font peur mais qui sont prouvés, la matière de l'univers que nous connaissons retombe dans son état primitif. Indifférencié, sans idée ni possibilité de différentiation. Lorsque le temps n'est pas possible, la matière organisée n'existe pas. (Toutefois je ne sais pas, mais je soupçonne que c'est possible, si le principe d'exclusion de Pauli ou de différentiation de type Fermi-Dirac n'existe pas dans notre compréhension de l'intérieur des trous noirs. Je ne suis pas assez calé en histoire de la physique).    

L'univers est donc doué, dans son expansion, du pouvoir de s'organiser. Selon des lois intrinsèques, semble t-il immuables depuis sa naissance. Et la faculté de l'univers à produire l'improbable est infinie. L'homme y contribue en étudiant les lois physiques de la matière et déduit de nouvelles structures, ou assemblages de structures, douées de propriétés encore plus étranges que ce que la nature produit naturellement (par exemple les transistors, les matériaux supra conducteurs, les nano-structures...)  

L'univers a aussi produit ce que nous appelons la vie. Cet assemblage qui est la vie est constitué d'un nombre très limité de type d'atomes (Hydrogène, Carbone, Oxygène, Azote) assemblés avec des quantités limitées d'autres atomes (Potassium, Phosphore) et parfois des choses étranges comme le Fer, l'Or que la nature a choisi probablement parmi d'autres choix. Ces molécules complexes dont le dictionnaire est infini sont capables de s'assembler, de se dupliquer, de diverger pour essayer (processus essentiel de la créativité  : la divergence) de se "regarder". Et puis comme dit la Genèse "...et Dieu vit que cela était bon". La "nature" que l'on assimile dans notre langage courant à la vie est capable de se créer "bonne". Constatons le! Ou alors disons que nous sommes mauvais. La question sera alors réglée. Mauvais donc laid. Mais nos artistes pensent le contraire… Notons donc qu’avant la vie, l'univers a aussi su se créer "bon", capable d'engendrer des atomes stables, des molécules stables, des cristaux stables. Des réacteurs nucléaires capables de fabriquer des structures de plus en complexes. Tout cela est totalement improbable. En fait l'esprit humain n'est pas capable de l'appréhender. Il est capable de le constater, de décrire. De remonter le temps. Mais est-il capable de tout expliquer? Non. Disons qu'il est doué, et que la nature divergente et donc créative (mais finalement pas tellement plus que la loi de constitution du premier atome stable qui est l'élément fondateur de la "matière"), et a su élaborer des êtres vivants doués de sensibilité, instables et curieux.  

Maintenant la question est de savoir si l'univers peut-être qualifié d'intrinsèquement beau, à  toutes échelles. De l'atome jusqu'aux galaxies spirales illuminées par des lumières irréelles, du soleil à la lune, de l'homme à la femme? Pourquoi le cercle, symbole fondamental, nous semble t'il plus beau qu'une ligne brisée? Pourquoi notre émotion, ancestrale, à regarder la lune. Et pourquoi tant de poètes qui en ont célébré la beauté? Pourquoi notre chien familier semble heureux quand nous sommes heureux et nous fait la fête? Que le cheval aime notre caresse? Et que nous trouvons l'autre beau ou belle?  

Je reviens vers François Cheng qui rapproche les mots de beauté et de bonté et puis d'amour.  

Je voudrais placer ma discussion sur un plan détaché de notre toute petite histoire ridicule dans le temps de l'univers. Dire d'abord que l'homme et la femme (entités intellectuelles supérieures dans la vie sur notre planète Terre) sont des constructions improbables. Que l'univers tel que nous le voyons est improbable. Incalculable, imprévisible et totalement incompréhensible pour nous. On a décrit les atomes, les galaxies. Décrit le rôle du fer dans les processus d'oxygénation des globules rouges. Nous irons beaucoup plus loin avec notre science nouvelle. Et je me souviens avec émotion de celui qui le premier a découvert le bronze, le fer. Celui qui le premier a peint des figures d'animaux sur des parois de pierre. 25 000 ans... Nous sommes jeunes, incroyablement jeunes.    

Je voudrais dire aussi qu’il semble indéniable que l'homme et la femme sont également doués du don de pouvoir voir les choses telles qu'elles sont. Belles et émouvantes. Emouvantes pour nous. Sont elles émouvantes parce que nous les « voyons telles » ou bien parce qu’elles sont absolument et intrinsèquement émouvantes. Je réponds OUI.  

L'univers est beau parce qu'il est capable de s'organiser à toute échelle. Il est beau tout simplement parce qu'il EXISTE. S'il existe c'est que les lois "physiques" qui gouvernent l'assemblage des particules élémentaires pour donner atomes, molécules et systèmes complexes est un ensemble de lois qui tendent à produire des assemblages stables. Des assemblages qui "s'aiment". Qui veulent créer localement un ordre. Que cet ordre est à longue portée dans le temps. Qu'il est stable et que les lois ayant présidées à son origine sont conservées aujourd'hui. Ce qui est loin, quand on y pense, d'être totalement évident... Que le temps est une donnée essentielle qui garantit la continuité entre il y a 14 milliards d'années et maintenant. Que le temps n'existe pas partout et c'est assez incroyable. Que le temps n'est que la constatation d'une continuité absolue entre un état initial, indescriptible, et maintenant. Et que donc c'est beau. Parce que c'est improbable, impossible et totalement incompréhensible. Et surtout que le résultat est là. Nous et l'univers. Et que le sentiment de beauté existe. La beauté serait une invention de l'homme et de la femme? Evidement NON.  

Nous sommes seulement aptes à constater la beauté. Après tout nous pourrions (et nous le seront peut-être) être aptes à une compréhension plus exacte de l'origine de l'univers. Mais non, aujourd'hui nous sommes seulement des spectateurs intelligents doués de capacités étonnantes mais quand même limitées. Demain sera demain. Mais aujourd'hui est aujourd'hui. Nous sommes doués de pouvoir regarder la beauté et c'est tout. De créer et c'est bien. Parce que la beauté nous attire. Et c'est notre qualité. Mais les chevaux, nos chers amis, cherchent aussi des grandes plaines libres pour cavaler le museau au vent. Et je pense qu'ils sont sensibles à la lune. C'est bien.  

Je n'entrerai pas dans la question de l'envie du mystique, des symboles et des religions... Sauf à dire que les religions monothéistes, anthropo-centrées, ont été des freins considérables à nos perceptions de l'univers qu'il faut regarder comme un tout, notre origine. Nous avons trop longtemps eu cette vision ridicule d'un homme destiné par un Dieu assez imaginaire à dominer la nature, les bêtes et les arbres. Une vision d'une terre plate, contrainte, avec une machinerie absurde qui nous donnait l'illusion d'un monde compris et dominé.  

Je ne suis pas sûr que l'humanisme de la Renaissance et le Siècle des Lumières soient vraiment loin derrière nous. 400 ans c'est pas beaucoup. Quelques générations et les archétypes chers à Jung sont encore là.  

Nous progresserons de par notre fait parce que nous en avons l'intelligence. L'intelligence crée l'intelligence. C'est évident. L'homme et la femme sont maintenant capables de s'évaluer. De comprendre nos maladies, nos souffrances, nos règles sociétales. Nos récents grands traumatismes (nazisme, communisme) magnifiquement mis en lumière par Jonathan Litell devraient nous inciter à la modestie mais aussi à une ambition qui serait de nous accepter non comme des êtres tout puissants mais comme modestes enfants d'une évolution qui n'admet pas trop d'influence autre que celle de l'auto-organisation, du "progrès" et sommes toute d'un replacement de notre toute puissance dans un contexte large d'univers, de système solaire et de notre bonne terre. A moins de destruction. Mais cela je ne le crois pas. Ce n'est pas intrinsèquement possible. Il restera quelque chose de ce que nous sommes parce que nous avons déjà survécu à beaucoup de traumatismes. Beaucoup d'êtres humains, femmes et hommes, ont de la bonté et je ne peux m'empêcher de penser que nous avons fait du chemin positif dans l'histoire de l'humanité depuis nos ancêtres (qui n'étaient pas plus mauvais que nous probablement). Bien sûr des débordements, des excès, mais toujours les philosophes, les écrivains, les artistes, les créateurs, les divergents ont fait œuvre pour que les choses se stabilisent et nous fasse un avenir plus serein. Je remercie mes aïeux. Je remercie la divergence et l'envie de reconstruction, d'agrégats.   

Je voudrais aussi célébrer l'amour qui est indissociable dans mon idée de la beauté. De la beauté  de l'autre. De l'autre qui sera toujours indispensable à l'un. Car l'univers depuis son origine réconcilie les particules élémentaires pour qu'elles s'assemblent. Cela semble une une loi immuable. Elle est belle si elle telle.  

Je remercie l'univers de sa beauté  sans laquelle je ne serais pas là.

Etre et beauté sont consubstantiels. Encore faut-il une conscience... nous l'avons c'est tout et c'est assez. N'allons pas plus loin.  

Le beau est intrinsèque.

Nous ne sommes doués que de vision.

Par nos sens. 

Et du pouvoir de créer.

Nous ne sommes divins que parce que nous pouvons imaginer le divin.

Et voir le beau.  

Bruno  

Dr Physique

MBA  

vendredi, 14 août 2009

Où est la folie ?

 

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Où est la folie ? la folie est partie et ne revient jamais, ni avec le whiskey ni avec les poudres.
La folie n’est plus attachée au cœur de l’enfant

Où est la magie ? la magie est partie et ne revient plus, ni avec les femmes ni avec les hommes. La magie n’est plus attachée au cœur de l’enfant.

Où est la tendresse ? la tendresse s’est tarie il y a si longtemps. La tendresse n’est plus attachée au cœur de l’enfant.

Où sont les caresses ? les caresses ont changé quand les mains ont grandi. Les caresses ne font plus fondre autant.

Danser dans le soir jusqu’à la nuit noire, oublier la ville, les vils, conjurer les cauchemars, tourner pour retrouver le cœur, la joie, l’espoir.

Où est la souffrance ? la souffrance s’est maquillée, elle ne crie plus comme avant. La souffrance nue est partie avec le cœur d’enfant.

Rêves morts, vous reviendrez avec Elle.
Quand elle s’approchera grande et longiligne avec sa faux ses rires ses dents
Cruella la mort viendra m’emporter et renaîtront de leurs cendres
les beautés, les misères, les grandeurs et les luxures des temps trépassés.

 

Nadège S, pour Esther M

23.01.2008

 

 

jeudi, 13 août 2009

La liberté mentale en Europe

 

 

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« Notre conception humaniste du droit empêche de punir les hommes d’une façon préventive, avant qu’ils aient commis un méfait : la liberté qu’on leur accorde interdit de les assimiler à un animal nuisible, à un serpent venimeux ou à un chien atteint de rage. »
Chaïm Perelman

Les pays de civilisation occidentale développent à la fois une solidarité sociétale élaborée et les libertés civiles. Ils sont partagés entre deux tentatives : prescrire la vie de chacun selon des normes correspondant au meilleur du développement ; ou favoriser l’expression d’expériences variées, de talents créateurs.
Les questions de santé mentale se situent là où la liberté individuelle et la surveillance sociale s’opposent le plus. La psychologie et les sciences de la santé mentale cherchent à distinguer l’attitude juste de celle qui outrepasse la norme de bienséance. La surveillance de la santé mentale est entrée dans les écoles, dans les entreprises, dans les Cours de justice, et s’immisce, par ces biais, dans de nombreuses vies.

Ordre et civilisation

Comment gérer efficacement des millions d’individus, libres dans l’expression de leurs désirs et divers dans leurs choix de vie ? Il est naturel à un système administrant et sécuritaire de chercher à normaliser les gens, afin de traiter efficacement la multitude de cas individuels. Cette grande organisation ne manque pas de bienfaits. Elle assure à chacun un traitement égal, conçu d’après des besoins mesurés à l’aune du plus grand nombre.
Pourtant, quand la mesure du plus grand nombre s’impose avec force, inéluctablement un certain nombre d’individus souffrent sans recours de ce « bien » écrasant, étranger à leur être, qu’on veut leur imposer. Lorsqu’il s’agit de santé mentale, ces personnes sont touchées au plus profond de leur intimité : la pensée, la relation à son corps, le rêve, les croyances sur l’univers.

Administration et organisation sont toujours normatives, et de ce fait, malgré leurs avantages, toujours liberticides. Pourtant, la pensée radicale et le rêve forment des composantes essentielles de la civilisation, de la liberté. Nos héros des temps passés, rêveurs, créateurs, novateurs, n’auraient pas échappé, dès l’école primaire, aux diagnostics destructeurs des personnes chargées de la santé mentale. L’intrusion à l’excès de la société chez l’individu ne reflète pas un niveau élevé de civilisation, mais d’ordre.

Déviances et contextes

Il est facile d’être déviant : il suffit que la voie soit très étroite. Quand l’ordre social est serré, les personnes qui s’en écartent sont vues comme pathologiques. Dans une société qui exige peu de conformisme, les gens peuvent plus aisément développer des comportements variés.
La norme psychologique d’une époque est témoin de sa nullité autant que de sa beauté. La norme change avec la société. Le malade d’une époque peut-être un héros ou un bon citoyen à une autre. Devons-nous « soigner » tous ceux qui ne sont pas de leur époque mentale ?

Quand les éducateurs ont besoin de bras, ils mésestiment les enfants réfléchis et calmes. S’ils ont besoin de calme, ils conspuent la vivacité et l’énergie. L’hyperactivité est une maladie enfantine nouvelle qui consiste à crier, pleurer, taper, à ne laisser aucun répit aux adultes. En d’autres époques, cette vitalité aurait été appréciée, parce qu’elle aurait été utile. Mais quand l’école consiste à demeurer assis de longues heures entrecoupées de récréations dans de petites cours bétonnées, quand les appartements citadins ne permettent pas de liberté de mouvement, comment l’enfant énergique et libre ne paraîtrait-il pas déséquilibré ?

Dans un village de cultivateurs au Mexique, un villageois, à cause de son impotence pour la vie des champs, était vu comme un demi idiot par les villageois ; il passait cependant ses journées à compiler par écrit leur culture nahuatl millénaire.

Au regard de la pensée amérindienne, les hôpitaux psychiatriques ne peuvent être que le reflet monstrueux d’un monde totalitaire où l’esprit et le corps sont enchaînés ; ou l’on appelle les chamanes des schizophrènes.

Il n’y a pas de certitude psychiatrique. Plutôt que de tenter à tout prix de réaliser un monde parfait, cherchons à laisser le maximum de gens imparfaits vivre à leur guise.
« Ce qui aurait dû mourir avec le communisme, c'est la croyance que les sociétés modernes peuvent être gouvernées selon un seul principe, qu'il s'agisse de planification collective ou de libre jeu de marché, » note le philosophe canadien Charles Taylor, et l’on pourrait élargir sa pensée à la gestion psychologique de la société.

Troubles mentaux ou troubles sociétaux

Certes, on ne va pas laisser des fous faire n’importe quoi sous prétexte que tout est relatif. La santé mentale pose la question de la responsabilité. Celle de l’individu face à la société ; celle de la société face à l’individu. Mais, de même qu’il n’est pas difficile d’avoir l’air coupable face à un juge, il n’est pas difficile de paraître malade face à un docteur… Le diagnostic médical, comme le jugement, disqualifie la parole de la personne en observation.

Les valeurs peuvent être différentes sans être criminelles. Interdire l’inceste, saine résolution, n’implique pas d’imposer des modes de relations familiales. Les psychologues prônent aujourd’hui sévèrement que les parents ne dorment pas avec leurs enfants. C’est pourtant chose fort répandue dans toutes les sociétés du monde où la maison familiale ne possède qu’une couche, et ce l’était également dans les fermes d’Europe il y a peu.
A force d’organiser une gestion humaine parfaite, qui prend en compte tous les aspects de la vie, nous planifions l’annihilation totale de la liberté individuelle et de conscience. Définir précisément ce qu’est l’humanité, la société, l’individu, la santé mentale, revient à imposer une idéologie, une vision du monde qui périme toutes les autres.

Lorsque nous nous protégeons de qui met en danger la vie d’autrui, et aidons les gens malheureux à mieux respirer dans notre monde, demandons nous à quel point nos rues doivent être normales, à quel point nos vies doivent être lisses. La présence des gens « fous » dans notre sphère de vie quotidienne est vitale pour eux, mais aussi pour toute la société, parce qu’ils étirent l’espace de vision, de pensée et d’attitude. Nos exclus, nos parias, nos fous représentent nos plus grandes peurs. Être en quête obsessionnelle d’équilibre, n’est-ce pas être encombré en permanence de pensées qu’une personne « équilibrée » n’aurait jamais ? On emploie l’expression de « personnes atteintes de troubles mentaux. » Mais vivre, n’est-ce pas, justement, être atteint de graves troubles mentaux qui ne guériront que dans la mort ?

Psychiatrie et Incertitudes

Au sein d’une famille, d’un Etat, les anormaux et les déviants ne sont pas rentables. L’acceptation ouverte de ces gens, dès lors qu’ils ne posent pas de danger grave, représente la garantie que nous avons d’autres valeurs que le contrôle total et la rentabilité, d’autres aspirations que le fonctionnement optimal des choses, d’autres envergures intellectuelles que la certitude de ce qui est et de ce qui n’est pas comme il faut.


Selon l’Organisation mondiale de la santé, « Good health is a state of complete physical, mental and social well-being, not merely the absence of desease and infirmity ». C’est très vrai ; mais c’est si flou qu’il faudrait décider de renoncer à jamais à établir des normes européennes pour la santé mentale.
Qui peut ôter à autrui la liberté d’être soi ? Aux égarements individuels, ne répondons pas par la folie du contrôle total.
Ne croyons pas que nous progressons parce que nous quittons une erreur pour entrer dans une autre. Il n’y a sans doute pas de progrès. Il n’y a sans doute pas de régression. Il n’y a peut-être que la vie, ce grouillement impulsif, et la prison mentale des humains, dont la forme des barreaux change au gré des générations.


Edith de Cornulier-Lucinière, Paris

 

 

mercredi, 12 août 2009

Un amas confus de maisons ...

Paris au XVIIème siècle...

 

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Phot Sara

 

Un amas confus de maisons
Des crottes dans toutes les rues
Ponts, églises, palais, prisons
Boutiques bien ou mal pourvues

Force gens noirs, blancs, roux, grisons
Des prudes, des filles perdues,
Des meurtres et des trahisons
Des gens de plume aux mains crochues

Maint poudré qui n'a pas d'argent
Maint filou qui craint le sergent
Maint fanfaron qui toujours tremble,

Pages, laquais, voleurs de nuit,
Carrosses, chevaux et grand bruit
Voilà Paris que vous en semble ?

 

Paul SCARRON
 

(1610-1660)

 

lundi, 10 août 2009

L’amitié

 

 

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Phot Sara


Pourquoi l’amitié est toujours reléguée derrière l’amour ?


Quelqu’un qui se met en couple, dans notre société, a tendance à faire imperceptiblement (ou parfois très perceptiblement) passer le partenaire de couple avant les autres personnes qui l’accompagnent. Cette hiérarchie des relations, mise en avant par le modèle social qui émerge du fouillis des médias, de la culture populaire, des publicités, ne me parait pas justifiée.
Le sentiment d’évidence encore une fois n’est souvent que le résultat d’une campagne idéologique.

En quoi une relation amoureuse impliquerait l’union quasipermanente, économique, sociale, amicale, des deux amants ?
En quoi fonder une famille ensemble impliquerait la désagrégation de deux vies personnelles au profit d’une fusion qui ne laisse pas la place aux projets personnels, aux grandes amitiés individuelles ?

Cette primauté du couple, qui n’a rien à voir avec la vie amoureuse, est une norme sociale étouffante qu’on met en avant. Elle n'a rien à voir avec la liberté ou l’amour. Et ne pas être en couple, au regard de beaucoup, est un manque à combler, la marque d’un échec. A l’instar de la publicité, l’opinion courante créée une pression en associant le couple avec la liberté et l’amour, l’individu célibataire avec la solitude et la frustration. Lorsqu’une personne est seule, il semble que tout l’entourage s’accorde à penser que c’est parce qu’elle n’a pas trouvé quelqu’un. Pourquoi un tel idéal de couple ?

Le couple économique et amoureux (un foyer, un lit double), censé mélanger, comme mon amie Mathilde Felix-Paganon me l’exprimait un jour, le sel de l’amour fou hollywoodien et le beurre de la PME fleurissante, trouve à mon avis sa source dans l’accomplissement du capitalisme.

Virginia Woolf décrit bien dans Orlando cette petite-bourgeoïsation de la société européenne, qui apparaît au XIXème siècle, avec le tourisme, les classes moyennes, la société industrielle et qui regroupe les gens par deux. Un foyer, deux adultes qui partagent le lit.
Ce n’est plus vraiment une alliance économique, car le rêve de l’amour fou est là. Ce n’est pas non plus une histoire d’amour libre, car des considérations économiques et sociales pèsent largement.
C’est donc une norme morale et sociale économicoaffective. Une norme qui atténue la libération de l’individu en lui accolant un partenaire sous peine de passer pour un échec. Une norme qui atténue la vie collective parce qu’elle relègue les enfants et surtout les vieux sur un plan second (les premiers doivent quitter le nid familial dès que possible pour fonder leur couple si possible, se démerder tous seuls sinon, les seconds ne sont pas invités à vieillir chez leurs enfants mais doivent partir en maison de retraite).


Les publicités des banques, des assurances, des marques mettent en scène des couples amoureux.
Les publicités gays le font aussi. La militance homosexuelle s’attarde beaucoup à mettre en valeur le couple et contribue à imposer cette domination de l’assemblage binaire (économique, affectif, social) des gens.
Il semble que l’imagerie générale s’est mise au pas du ménage type Insee. Et si l’on remet beaucoup en cause l’hétérosexualité du couple, on évoque rarement la possibilité de créer d’autres formes d’alliance, de familles et de modes de vie que celles fondée sur le couple.

Pourtant… Sur les rives de l’amitié il y aurait tant d’aventures à vivre.

L’amitié est plus libre car elle n’est pas prise d’assaut par la publicité. Elle ne figure pas en première place du kit que toute personne ayant réussi socialement doit être en mesure de brandir.

L’amitié est belle aussi parce qu’elle peut s’insérer dans les relations familiales et amoureuses. Il y a de belles amitiés entre mère et fils, entre frère et frère, entre amants.
Un ami, c’est une histoire d’amour et de fraternité
Pourquoi ne pourrait-on pas adopter un enfant avec un ami ?
Se pacser avec un ami pour le faire hériter ?

Je ne vais pas commencer à demander de légiférer l’amitié (prônant, par exemple, l’amicoparentalité, le mariage amical…), parce que justement toute la beauté de l’amitié réside dans le fait que l’administration et les médias de masse ne l’ont pas encore découpée, mesurée, asservie.
Je voulais juste mettre en scène le fait que nous sommes beaucoup moins libres que nous pourrions l’être, quand nous correspondons à l’image du bonheur tel que l’imagerie de la société nous la renvoie. Un bonheur deux par deux, clos. Un bonheur par paire, qui nous cache toutes les magnifiques histoires d’amitié, les partages, les inventions que nous pourrions créer si nous étions libres, des histoires qui mélangeraient nos familles, nos amants, nos amis.