Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

samedi, 15 août 2009

La beauté est-elle absolue ?


2CNT.jpg



Je réponds oui. 

L'univers dans lequel nous vivons est un univers organisé, auto organisé qui n'est pas probable.

Mais il est là. Et nous les hommes et les femmes voyons cet univers et le trouvons beau.

L'univers est-il beau intrinsèquement ou beau parce que nous l'interprétons tel?

Faut-il de la culture, de l'éducation pour trouver les choses belles?

Ne sommes nous pas doués tout simplement du don de pouvoir le voir tel qu'il est? Beau parce que tel. Beau parce que nous en sommes le fruit? Et seulement doué de le voir beau mais pas de le comprendre. Qu'au fond notre évolution nous a mené aux portes du début de la compréhension et qu'un long chemin reste à parcourir.

Nous ne sommes pas absolus. Nous sommes le fruit d'une évolution, d'une construction qui a débutée il y a quelques milliards d'années. Pas seulement lorsque la Vie est née sur terre. Intéressant, non ?

Notre conscience et notre inconscient ne sont ils pas tout simplement le résultat de ce que l'univers est : un ensemble capable d'auto organisation, capable d'éliminer ce qui n'est pas lui même? Un Darwininisme des quarks et des gluons?

Et pour conclure cette introduction, ne sommes-nous pas trop imbus de nous même en pensant que notre émerveillement et notre capacité à créer est un don humain dont nous devons nous féliciter nous-même, seuls? Ce qui semble être la loi du genre depuis la nuit des temps…

Je réponds non. Le processus de création, et par là de beauté,  est une loi absolue de l'univers. Comment imaginer les solutions futures à partir d’un point de départ ? Comment se réconcilier avec nos visions actuelles ? Plus spécifiquement comment imaginer et se représenter le processus de création de la matière. ? Je réponds que la loi de divergence, paradoxale, mais constituante de la matière, est de se rassembler pour créer des choses nouvelles. La loi fondamentale de la matière de notre univers, le vrai processus de création de l’univers que nous voyons, est de savoir s'agréger. Elle aurait pu très bien, cette soupe originelle non lumineuse et sans éclat, ne jamais vouloir se combiner. Pas de problème. L'univers serait, disons, une sorte de gaz ne voulant jamais se combiner. Nous sommes le rassemblement complexe de milliards d'années d'évolution. La loi de l'évolution ne commence pas avec Darwin et la vie. Elle est préexistante à la vie. La vie n'est qu'une des conséquences de cette formidable machine. Et la machine est belle, en soi. Parce qu'elle permet l'organisation, et dans sa forme la plus complexe la Vie.

L’organisation n’est pas une valeur de beauté en soi. On est d’accord, sans discussion. Mais ce qu’il faut voir dans les lois de l’organisation c’est cette formidable machine qui se créée en parallèle du « normal » et qui est la divergence. Sans règles, pas de divergence. Et c’est l’organisation et la contrainte qui crée le nouveau, le stable nouveau. Pas de contraintes, pas de stabilité. Pas d’existant pas de nouveau… 

L'univers d'aujourd'hui a environ 14 milliards d'années.

Ce n'est pas rien à notre échelle.

Et il existe et a évolué depuis ces 14 milliards d'années selon une loi programmée.  

Au tout début l'univers était un gaz très indifférencié et même la lumière n'y était pas possible.

Les lois de la matière de notre univers sont telles qu'à partir de briques élémentaires, tout ce que nous voyons a pu être possible.  

Partons de la constitution des premiers noyaux atomiques. Hydrogène, Hélium... petits noyaux.

Briques élémentaires s'assemblant et restant stables au moins un certain temps.

Refroidissement. Les noyaux deviennent stables. Des électrons peuvent les entourer. Ils sont nécessaires à l'assemblage entre noyaux atomiques. La lumière peut enfin s'échapper de ce gaz. L'univers s'illumine, l'univers se condense en de petits endroits, l'univers se construit tel qu'il est programmé  pour le faire. Il y a des fluctuations, des choses indescriptibles par les lois physiques classiques mais si on regarde avec un certain recul, on voit que la statistique est respectée. Tout dépend de l'échelle considérée.  

Je vais aller vite par souci de pédagogie.   

Les premiers atomes (Hydrogène) se condensent, attirés l'un vers l'autre par la gravitation.

Naissances des étoiles qui sont des concentrations de matière primitive.

Etoiles de première génération, de deuxième génération, de troisième génération...

Agrégation réactions, explosion, naissance de nouveaux atomes.  

L'univers s'ordonne. L'univers est doué  du pouvoir de s'ordonner, de se condenser en certains endroits. Ces lieux d'organisation grossissent avec le temps. De l'échelle atomique (naissance d'atomes lourds) à l'échelle moléculaire (gaz constitué  de deux atomes identiques) puis vers des structures de plus en plus complexes (molécules constituées d'atomes différents).  

Autour des restes d'explosion d'étoiles, les atomes se combinent dans des structures "minérales" complexes. Des cristaux géométriques apparaissent. Des structures ordonnées et mathématiquement déterminées prennent naissance. Le gaz primitif, sans individualité, constitué d'autant de particules nécessaires à la construction de tout l'univers se sont agrégés, se sont séparés et se sont réassemblés pour créer en des endroits particuliers des structures logiques, descriptibles et stables. Ces structures complexes deviennent douées de propriétés physiques étranges : conducteur électrique, isolant, transparent, opaque, durs, mous... Ces structures sont répétitives tout en étant innombrables. Elles sont toutes descriptibles avec nos connaissances. Du moins jusqu'à un certain point. En tout cas avec un certain formalisme qui n'admet pas d'exception.   

Tout le monde est d'accord pour dire qu'on ne sait rien expliquer de l'origine vraie de l'univers. Que s'est-il passé entre rien et un milliardième de seconde? Oui on sait faire beaucoup de choses. Et le milliardième de seconde est connu et descriptible. Mais en dessous d'une certaine limite de temps (temps de Planck) on ne sait plus décrire. Et je dirais que même si on savait un jour décrire, cela n'expliquerait pas ce que nous ne pouvons pas savoir. Un temps encore plus court?   

Le temps... une notion très incertaine. Le temps peut ne plus exister en tant que notion physique dans certains endroits (les trous noirs). Là, dans ces endroits qui nous font peur mais qui sont prouvés, la matière de l'univers que nous connaissons retombe dans son état primitif. Indifférencié, sans idée ni possibilité de différentiation. Lorsque le temps n'est pas possible, la matière organisée n'existe pas. (Toutefois je ne sais pas, mais je soupçonne que c'est possible, si le principe d'exclusion de Pauli ou de différentiation de type Fermi-Dirac n'existe pas dans notre compréhension de l'intérieur des trous noirs. Je ne suis pas assez calé en histoire de la physique).    

L'univers est donc doué, dans son expansion, du pouvoir de s'organiser. Selon des lois intrinsèques, semble t-il immuables depuis sa naissance. Et la faculté de l'univers à produire l'improbable est infinie. L'homme y contribue en étudiant les lois physiques de la matière et déduit de nouvelles structures, ou assemblages de structures, douées de propriétés encore plus étranges que ce que la nature produit naturellement (par exemple les transistors, les matériaux supra conducteurs, les nano-structures...)  

L'univers a aussi produit ce que nous appelons la vie. Cet assemblage qui est la vie est constitué d'un nombre très limité de type d'atomes (Hydrogène, Carbone, Oxygène, Azote) assemblés avec des quantités limitées d'autres atomes (Potassium, Phosphore) et parfois des choses étranges comme le Fer, l'Or que la nature a choisi probablement parmi d'autres choix. Ces molécules complexes dont le dictionnaire est infini sont capables de s'assembler, de se dupliquer, de diverger pour essayer (processus essentiel de la créativité  : la divergence) de se "regarder". Et puis comme dit la Genèse "...et Dieu vit que cela était bon". La "nature" que l'on assimile dans notre langage courant à la vie est capable de se créer "bonne". Constatons le! Ou alors disons que nous sommes mauvais. La question sera alors réglée. Mauvais donc laid. Mais nos artistes pensent le contraire… Notons donc qu’avant la vie, l'univers a aussi su se créer "bon", capable d'engendrer des atomes stables, des molécules stables, des cristaux stables. Des réacteurs nucléaires capables de fabriquer des structures de plus en complexes. Tout cela est totalement improbable. En fait l'esprit humain n'est pas capable de l'appréhender. Il est capable de le constater, de décrire. De remonter le temps. Mais est-il capable de tout expliquer? Non. Disons qu'il est doué, et que la nature divergente et donc créative (mais finalement pas tellement plus que la loi de constitution du premier atome stable qui est l'élément fondateur de la "matière"), et a su élaborer des êtres vivants doués de sensibilité, instables et curieux.  

Maintenant la question est de savoir si l'univers peut-être qualifié d'intrinsèquement beau, à  toutes échelles. De l'atome jusqu'aux galaxies spirales illuminées par des lumières irréelles, du soleil à la lune, de l'homme à la femme? Pourquoi le cercle, symbole fondamental, nous semble t'il plus beau qu'une ligne brisée? Pourquoi notre émotion, ancestrale, à regarder la lune. Et pourquoi tant de poètes qui en ont célébré la beauté? Pourquoi notre chien familier semble heureux quand nous sommes heureux et nous fait la fête? Que le cheval aime notre caresse? Et que nous trouvons l'autre beau ou belle?  

Je reviens vers François Cheng qui rapproche les mots de beauté et de bonté et puis d'amour.  

Je voudrais placer ma discussion sur un plan détaché de notre toute petite histoire ridicule dans le temps de l'univers. Dire d'abord que l'homme et la femme (entités intellectuelles supérieures dans la vie sur notre planète Terre) sont des constructions improbables. Que l'univers tel que nous le voyons est improbable. Incalculable, imprévisible et totalement incompréhensible pour nous. On a décrit les atomes, les galaxies. Décrit le rôle du fer dans les processus d'oxygénation des globules rouges. Nous irons beaucoup plus loin avec notre science nouvelle. Et je me souviens avec émotion de celui qui le premier a découvert le bronze, le fer. Celui qui le premier a peint des figures d'animaux sur des parois de pierre. 25 000 ans... Nous sommes jeunes, incroyablement jeunes.    

Je voudrais dire aussi qu’il semble indéniable que l'homme et la femme sont également doués du don de pouvoir voir les choses telles qu'elles sont. Belles et émouvantes. Emouvantes pour nous. Sont elles émouvantes parce que nous les « voyons telles » ou bien parce qu’elles sont absolument et intrinsèquement émouvantes. Je réponds OUI.  

L'univers est beau parce qu'il est capable de s'organiser à toute échelle. Il est beau tout simplement parce qu'il EXISTE. S'il existe c'est que les lois "physiques" qui gouvernent l'assemblage des particules élémentaires pour donner atomes, molécules et systèmes complexes est un ensemble de lois qui tendent à produire des assemblages stables. Des assemblages qui "s'aiment". Qui veulent créer localement un ordre. Que cet ordre est à longue portée dans le temps. Qu'il est stable et que les lois ayant présidées à son origine sont conservées aujourd'hui. Ce qui est loin, quand on y pense, d'être totalement évident... Que le temps est une donnée essentielle qui garantit la continuité entre il y a 14 milliards d'années et maintenant. Que le temps n'existe pas partout et c'est assez incroyable. Que le temps n'est que la constatation d'une continuité absolue entre un état initial, indescriptible, et maintenant. Et que donc c'est beau. Parce que c'est improbable, impossible et totalement incompréhensible. Et surtout que le résultat est là. Nous et l'univers. Et que le sentiment de beauté existe. La beauté serait une invention de l'homme et de la femme? Evidement NON.  

Nous sommes seulement aptes à constater la beauté. Après tout nous pourrions (et nous le seront peut-être) être aptes à une compréhension plus exacte de l'origine de l'univers. Mais non, aujourd'hui nous sommes seulement des spectateurs intelligents doués de capacités étonnantes mais quand même limitées. Demain sera demain. Mais aujourd'hui est aujourd'hui. Nous sommes doués de pouvoir regarder la beauté et c'est tout. De créer et c'est bien. Parce que la beauté nous attire. Et c'est notre qualité. Mais les chevaux, nos chers amis, cherchent aussi des grandes plaines libres pour cavaler le museau au vent. Et je pense qu'ils sont sensibles à la lune. C'est bien.  

Je n'entrerai pas dans la question de l'envie du mystique, des symboles et des religions... Sauf à dire que les religions monothéistes, anthropo-centrées, ont été des freins considérables à nos perceptions de l'univers qu'il faut regarder comme un tout, notre origine. Nous avons trop longtemps eu cette vision ridicule d'un homme destiné par un Dieu assez imaginaire à dominer la nature, les bêtes et les arbres. Une vision d'une terre plate, contrainte, avec une machinerie absurde qui nous donnait l'illusion d'un monde compris et dominé.  

Je ne suis pas sûr que l'humanisme de la Renaissance et le Siècle des Lumières soient vraiment loin derrière nous. 400 ans c'est pas beaucoup. Quelques générations et les archétypes chers à Jung sont encore là.  

Nous progresserons de par notre fait parce que nous en avons l'intelligence. L'intelligence crée l'intelligence. C'est évident. L'homme et la femme sont maintenant capables de s'évaluer. De comprendre nos maladies, nos souffrances, nos règles sociétales. Nos récents grands traumatismes (nazisme, communisme) magnifiquement mis en lumière par Jonathan Litell devraient nous inciter à la modestie mais aussi à une ambition qui serait de nous accepter non comme des êtres tout puissants mais comme modestes enfants d'une évolution qui n'admet pas trop d'influence autre que celle de l'auto-organisation, du "progrès" et sommes toute d'un replacement de notre toute puissance dans un contexte large d'univers, de système solaire et de notre bonne terre. A moins de destruction. Mais cela je ne le crois pas. Ce n'est pas intrinsèquement possible. Il restera quelque chose de ce que nous sommes parce que nous avons déjà survécu à beaucoup de traumatismes. Beaucoup d'êtres humains, femmes et hommes, ont de la bonté et je ne peux m'empêcher de penser que nous avons fait du chemin positif dans l'histoire de l'humanité depuis nos ancêtres (qui n'étaient pas plus mauvais que nous probablement). Bien sûr des débordements, des excès, mais toujours les philosophes, les écrivains, les artistes, les créateurs, les divergents ont fait œuvre pour que les choses se stabilisent et nous fasse un avenir plus serein. Je remercie mes aïeux. Je remercie la divergence et l'envie de reconstruction, d'agrégats.   

Je voudrais aussi célébrer l'amour qui est indissociable dans mon idée de la beauté. De la beauté  de l'autre. De l'autre qui sera toujours indispensable à l'un. Car l'univers depuis son origine réconcilie les particules élémentaires pour qu'elles s'assemblent. Cela semble une une loi immuable. Elle est belle si elle telle.  

Je remercie l'univers de sa beauté  sans laquelle je ne serais pas là.

Etre et beauté sont consubstantiels. Encore faut-il une conscience... nous l'avons c'est tout et c'est assez. N'allons pas plus loin.  

Le beau est intrinsèque.

Nous ne sommes doués que de vision.

Par nos sens. 

Et du pouvoir de créer.

Nous ne sommes divins que parce que nous pouvons imaginer le divin.

Et voir le beau.  

Bruno  

Dr Physique

MBA  

Les commentaires sont fermés.