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Same town, new story

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Les heures passent lentement ; l’atmosphère du jour se tamise. J'ai laissé depuis maintenant plusieurs mois la grande ville où dans les salons les histoires de demain se fomentent et j'ai laissé ce matin les étangs, les prairies, les bois. Avant l'aube un camion attendait devant la double-porte de la maison basse. La route fut courte et ne ressembla pas à la route de Kerouac, à cause du GPS et d'un rendez-vous précis, mais à l'heure dite j'étais assise dans un train qui m'emmenait où je suis maintenant. Same town, new story : c'est la même petite ville de l'Ouest, où s'ouvre une histoire qui ne recommence pas. J'ai failli ricaner en ressassant les comportements des uns, des autres : et puis je me suis souvenue : l'histoire ne recommencera pas.

L'histoire ne recommencera plus jamais : je laisse le passé s'envoler au vent mauvais, au vent trop frais, au vent qui passe. J'appelle une femme : elle est danseuse. Je lui parle un long moment. J'écris par voie de mail à un ami qui vit dans une cité nordique. Je lui envoie quelques pensées et une électrobise.

Combien encore d'heures, de jours, d'années à vivre ? Peu importe, si chaque respiration me rapproche de mon âme.

Étonnante vie humaine de ces premières décennies du XXIème siècle, accaparée toute entière par des à-cotés et des contrebas, des détours et des réflexions parallèles.

J'aime des personnes à qui je n'écris jamais.

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vendredi, 28 novembre 2014 | Lien permanent

La chambre obscure

Comme l'âme est lourde quand elle ne sait plus qui elle est ni où elle va. Les vacanciers d'hiver vont et viennent sur le remblai, dans les restaurants. Dans le train une femme parlait sur son fils d'un ton si méprisant et arbitraire que je me suis mise à prier pour lui. Que faire dans ce cas là ? Pourquoi tant de gens font tant d'enfants qu'ils n'arrivent pas à aimer, embourbés qu'ils sont dans leur malêtre, dans leurs absurdités mentales ? L'enfant l'appelait sans cesse, il quémandait je ne sais quelle preuve d'affection et, plus de deux heures durant, ne recueillit que des signes de haine. Il n'avait pas encore sept ans.

Depuis mon départ de cette maison du 13, je n'ai pas lu un livre. J'ai du mal à chanter juste (une nouveauté). J'ai dansé une fois, enserrée dans un corset de fer que je ne me connaissais pas. J'ai découvert des musiques qui me plongent dans des ambiances plus douces encore et plus profondes qu'auparavant. J'ai nagé, lentement, dans l'eau dormante.

Depuis mon envol, j'ai modifié ma conception de la tarte au citron. Amère, désormais, plus jamais meringuée. Et surtout, que la saveur du sucre n'apparaisse pas.

Depuis que j'existe, je me suis rencontrée trois fois.

 

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dimanche, 28 décembre 2014 | Lien permanent

Le parchemin de la cabane d'Anselme

 

Ne te fâche avec personne. Reste calme, chaleureux, un peu distant et courtois.

Ne fais pas de choix en vue d'obtenir de la valeur aux yeux des autres ; ce serait un fourvoiement. Mène ta propre vie en acceptant de n'être pas compris pendant un temps. Il n'y a aucun intérêt à avoir un enfant, un amoureux, un bel appartement, si l'objectif primordial est simplement de se sentir plus respecté.

Les projets à long terme que tu mènes au creux de ton cœur, ou à tes heures perdues, mettront sans doute dix ou vingt ans pour devenir visibles aux yeux des autres ; mais lorsque ce sera le cas, ils éclateront de tous leurs feux et s'imposeront comme des réalisations majestueuses, hors du commun.

Un jour, ta création fera l'effet d'un beau château médiéval, authentique, indestructible, dont tu seras le seigneur indiscuté.

Les modes passent. Tu auras en temps et en heure ta maison, si tu acceptes de ne pas la désirer ni la posséder, et elle sera le versant matériel de ton âme.

Enfin, si tu travailles pour ceux qui viendront, nul ne pourra nier que tu es père ou mère, autant que ceux qui croient posséder leurs enfants, et que ta transmission est féconde ; tu auras non seulement un héritier qui surgira de la terre au moment opportun, et te donnera l'amour filial que ta valeur mérite, mais en plus il sera à ta suite un défricheur, un créateur, un maître élu par Dieu, dont la puissance n'a qu'une égale : l'humilité dont il ne se départit pas.

La patience, la confiance, le labeur tranquille sont tes atouts. Leurs semences donneront des récoltes d'une abondance inimaginable aujourd'hui.

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mercredi, 20 août 2014 | Lien permanent

Le sacrifice

Peu à peu la France redevient Gaule. Dans les bois que l'on croyait morts, cernés par les routes et dépeuplés de cerfs, il n'est plus rare de rencontrer une hutte celtique. Les vieilles incantations des anciens druides reviennent ; en dépit des apparences encore en place, les sorcières du moyen-âge ont vaincu la République administrative et légiste.

Ce matin, j'ai surmonté ma peur et j'ai marché jusqu'à l'endroit d'où s'élevait une fumée. Au milieu des dernières flammes, une barbare gauloise incantait des prières aux dieux secrets de ce bois. Elle prophétisait le retour des puissances forestières, la grande multiplication des cerfs, des chevreuils, des grenouilles et des corneilles. Je me cachais, mais j'entendis distinctement sa voix qui me parla soudainement en français et me dit : "ce soir, écoute auprès de la mare le sermon du crapaud".

Mes yeux piquants de fumée ne me permirent plus d'observer la suite. Lorsque je pus voir à nouveau les environs, le feu s'éteignait, la sorcière avait disparu. Je restais seule, et me demandais, en regardant les bûches mourir, qu'est ce qui donnait à ce feu cette odeur âcre et quelque peu effrayante.

Me voilà revenue dans la maison. La mare est toute proche. J'ai peur, ce soir, du crapaud.

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mercredi, 08 octobre 2014 | Lien permanent

Soigner mes dimanches

Ni diagnostic clair, ni pronostic pour l'avenir, ni ordonnance ni prescription, juste une recherche de la bonne posologie pour que mon foie, ma bile, mon cerveau, ne cessent pas de fonctionner le dimanche, dès le matin, quand les cloches sonnent de loin mais que je n'ai pas de paroisse, que les familles vont au jardin et que les amis grasse-matinent chez eux, que les tartes brûlent au four parce que c'est dimanche.

C'est dimanche et mon cœur se ferme. C'est dimanche et ma vie s'enferme. C'est dimanche.

Dominicale langueur, dominicale terreur, dominicale torpeur.

Il fait frais. Il fait froid. Des étudiants révisent leur droit.

La personne que l'on aime ressemble à un reproche, la sœur ne téléphone pas, le frère joue avec ses chiens dans une maison très loin, le père s'ennuie avec une femme inconnue, la mère nettoie son petit appartement entre deux chapitres d'un gros livre. C'est dimanche et rien ne se passe, c'est dimanche et la vérité apparaît lentement.

L'alcool est interdit avant six heures du soir, sans quoi je serais ivre au milieu du bazar, dans cet appartement qui ne m'appartient pas. Quelqu'un connaît-il l'aspirine du dimanche, le lexomil à prendre quand on flanche, l'ail des ours qu'on mêle au cocktail de l'espoir ?

C'est dimanche et je n'existe pas.

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samedi, 28 octobre 2017 | Lien permanent

قسنطينة poème du printemps 2020

Tu disais des poèmes aux quatre saisons. Tu n'es plus. Il faut bien que quelqu'un te succède à cette valse de mots.

voici, Le vieux majordome, le poème de l'hiver 2017 ;
voici Fazil, le poème du printemps 2017 ; 
voici Dans la chambrée, le poème de l'été 2017 ; 
voici Silentium, le poème de l'automne 2017, ; 
voici Héroïne, le poème de l'hiver 2018 ; 
voici Tbilissi, le poème du printemps 2018 ; 
voici Portrait d'été, le poème de l'été 2018
voici Pluie d'étoiles, le poème de l'automne 2018 ;
voici Spectre, le poème de l'hiver 2019 ;
voici Les champs de persil, poème du printemps 2019 ;
voici Antigua, poème de l'été 2019,
Voici Humus, poème de l'automne 2019.
Voici Je descends l'escalier du temps, poème de l'hiver 2020

 

Constantine

 

Sur tes ponts suspendus, Constantine,

Les soleils se couchaient en murmurant à l'âme

Les arcanes d'un présent perpétuel,

Et dans tes rues et dans tes ruelles,

Le silence descendait en menace constante.

 

Au fond des maisons et des cours,

A travers les feuillages fragiles,

Se glissait un secret que nous n'entendions pas.

Il se faufilait par tes toits,

Ville de l'attente, Constantine !

 

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samedi, 21 mars 2020 | Lien permanent

Apsyaï : extrait d'un reportage sur l'asile invisible

 

AlmaSoror présente l'extrait d'un reportage de Stella Mar, sur Apsyaï, l'organe psychiatrique le plus développé au monde.

Situé sur un atoll du Pacifique Sud, ayant plusieurs antennes (à Québec, à Paris-France, à Paris-Texas, à Chaumont et aux Kerguelen), l'asile propose aux médecins, infirmiers, masseurs et patients (demi-pension ou internés) une vie commune, fondée sur des règles de communauté libertaires, laïques où l'individualisme garde ses droits.

L'asile propose une maison d'édition-bibliothèque en ligne (Littératures du Cyborg), des soins à distance (pris en charge par la Fondation Étoile de Mer -Insomniapolis), une ligne d'appel d'urgence (SOS vaisseau errant) ainsi que de nombreux services et informations que le reportage de Mar étudie et dévoile. La seule unité à laquelle la cinéaste documentariste n'a pas eu accès est incidemment le fameux Quartier des Songes Perdus.

Malheureusement, nous n'avons pas la permission de diffuser le documentaire intégral. Ce court extrait, nous l'espérons, vous donnera l'envie de vous intéresser à l'équipe soignante d'Apsyaï et à ses internés psychiatriques.

La devise d'Apsyaï :
Nous fûmes poisson, nous sommes verseau et nous sommes l’Écrivain du Renouveau.

(En raison de l'extrême puissance du symbolisme des images, le logo-blason d'Apsyaï est interdit de propagation).

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mardi, 24 juin 2014 | Lien permanent

Larmes noires

Larmes noires, tes larmes noires coulent le long de tes joues,

La voix éraillée des femmes d'hier chante encore l'hymne des arrières-cuisines dans ton salon de misère,

et tu penses à ceux là qu'on oublie quand ils meurent, et qui tenaient vivants des êtres et des mondes.

Et tu penses à ceux là qu'on oublie quand ils meurent et qui faisaient vibrer les climats et les lieux.

 

Larmes noires, tes larmes noires coulent le long de tes joues.

Ta mère était une femme trop vieille pour que tu la connaisses, trop jeune pour mourir avant tes sept ans.

Et tu penses à celles qui chantèrent tes louanges et tes drames quand tu n'avais pas encore vingt ans.

Et tu penses aux grand-mères et aux tantes qui cuisinaient sans faiblir par temps de guerre ou par temps de paix, temps de vaches maigres toujours.

 

Larmes noires, tes larmes noires coulent le long de tes joues,

un air de guitare hispanique fait glisser la mélancolie sur les murs d'une maison délabrée.

Assise sur un fauteuil en osier, tu feins d'ignorer les taches de vieillesse des tentures colorées.

Assises près d'une cheminée éteinte, tu feins d'ignorer les insectes qui encerclent la bûche de bois qu'on a laissé pourrir depuis des mois et des siècles.

 

Larmes noires, tes larmes noires coulent le long de tes joues.

Larmes noires, tu souris au passé à travers les douleurs du présent.

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lundi, 27 novembre 2017 | Lien permanent

Locus obscurior

J'aimerais être la dernière locutrice d'une langue et languir de la peur et du désir de mourir. Toute-Puissance et totale impuissance de la femme-langue des fins dernières, avant terme.

Écouter, un dernier été, les grouillements et les chants des grenouilles au bord d'un étang teinté d'éternité. Moustiques de la tiédeur, ronds des carpes. Des moines passent de l'autre côté de l'eau morte, dans leur vêtement marron, habit d'énigme qui les distingue du reste des hommes, triviaux.

(Une vieille dame récite un poème en yiddish dans un château de bohème, entourée de jeunes visages qui se détournent du sens, quelque part dans une région de l'Est de l'Europe. Un homme âgé, sur un chemin aux alentours de Ferreñafe au Pérou, invoque son père en langue quechua).

Quel est ce secret qui me donne envie de vivre pour toujours et de mourir tout de suite ? Un secret enfoui dans le langage, sans nul doute. Au fond d'une langue latine qui a perdu le fil de l'espoir.

Indicible, la beauté de ma douleur. Intangible, ce matin où la sépulture s'est formée dans mon coeur-vivant. Les grenouilles rassurent cette impression d'être dans un coin de France qui ressemble à l'ancienne maison du vrai nom.

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samedi, 30 juin 2018 | Lien permanent

Toi qui communiques

Sur tous les réseaux sociaux possibles, tu postes des images de tes enfants qui t'entourent, d'un bout de ta maison, des paysages que tu traverses en vacances, du bel appartement qui t'attend dans la ville du quotidien. Tu racontes comme tes enfants sont sympathiques, après avoir montré comme ils sont beaux, tu démontres à quel point ils t'entourent, te donnent des nouvelles, te visitent, te confient leurs enfants. Tu es accompagnée, aimée, bien lotie.
De temps en temps, tu te révoltes contre les gens qui font du mal aux autres, toi qui ne supporte pas l'injustice, toi qui aime les migrants, les pauvres, l'art et le partage !
Et puis tu retournes à l'étalage plus ou moins bien dosé des bienfaits dont le dieu de la réussite ne cesse d'inonder ta vie. Les femmes stériles, les hommes sans femmes, les enfants cloués aux fauteuils roulants, les inssolvables sont assis devant leurs écrans et ils regardent défiler ta si belle vie. Ils cliquent « j'aime », « j'aime », disposent des cœurs sous tes images, puis ils boivent un second ricoré. Ils savent qu'il faudraient qu'ils passent l'aspirateur mais n'en ont pas l'énergie dans l'immédiat. Ils se souviennent de leurs rêves adolescents. Mais ils n'ont pas le temps de se souvenir trop longtemps car une notification les interpelle sur leur écran. C'est toi, tu viens de poster cette photo de ton amoureux et de tes fils qui rient ensemble sur la terrasse face à l'océan. Leurs corps sont gorgés de muscles et les ambroisies aux belles couleurs qu'ils sirotent ne créent jamais de bourrelets sur leur ventre.

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samedi, 14 août 2021 | Lien permanent

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