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dimanche, 14 novembre 2021

Le crachat de Drakulie Pandor, banale citoyenne d'Echthrapolis #Répulsion

Dimanche, j'oublie les cloches des églises pour me concentrer sur la laideur sonore des camions de poubelles verts qui traversent les allées de béton sale de notre ville en phase de tiers-mondisation. Arythmie du cœur, haleine fétide, fluides sortant par les orifices, épaule coincée, peau flasque, cheveux incoiffables, mon corps est de plus en plus difficile à civiliser. Pourtant, sortir dans la rue va être nécessaire, se tenir le moins voûté possible, entrer dans des magasins mal tenus par des gens que je déteste, saluer un voisin,

et croiser ces couples élégants, ces belles familles correctement vêtues qui semblent se diriger quelque part, ces personnes tendues vers un but noble, dans une vie calmement structurée.

Ce fiel est un mélange de rage et de dépit, de colère et d'amertume, de haine et de tristesse qui découle de la comparaison entre les espoirs que j'avais dans la jeunesse et les déceptions que je connais dans mon âge mûr. Heureusement, d'opaques rideaux me séparent des personnes que je fréquentais alors, mais si par hasard je tombe sur quelqu'un d'avant et dont la vie s'est déroulée sous de meilleurs auspices ou du moins avec de meilleurs résultats, le sentiment que j'éprouve s'apparente à une déflagration interne qui fait du paysage pauvret de mon for intérieur un Nagasaki intégral

et recevoir ces sourires, ces voix dynamiques, ces nouvelles positives en pleine face creuse mon rictus aigri, empâte ma voix, annihile le filet d'énergie qui restait pour survivre au fil du jour.

Vous désirez le bien des autres et le soleil sociétal parce que vos organismes fonctionnent correctement et que votre vie ressemble aux images d'une vie bonne, mais moi, constipée et pleine d'acouphènes, j'attends, assise sur le banc de l'échec, que se déversent sur la ville les meurtriers et les fous-furieux pour éventrer tout ce qui éprouve quelque fois de la joie et tout ce qui contient de la beauté

et j'attends ainsi le Mal et l'Horreur et la défaite collective qui fera de chaque individu mon égal !

 

 

jeudi, 12 juillet 2018

Une intense sensation de liberté...

... t'aide à mieux respirer depuis quelques jours.

Elle coéxiste avec une intense sensation d'oppression, celle d'être cernée par des forces de destruction qui se donnent le doux nom de progrès.

(Il n'y avait pas de vieille armoire dans cette habitation ; pas d'étagères débordant de vieux livres, pas de poussière sur des tables d'antan).

L'ennemi siège aux portes de la ville, il a déjà infiltré les institutions à tous les étages.

(Les couleurs ne se modulaient pas au rythme de la journée. Les couleurs étaient toujours les mêmes, sans influence extérieure).

Une intense sensation de liberté est survenue lorsque tu as dissocié ta peur de ta culpabilité. Tu as peur de l'ennemi, tu as nommé son nom dans ton for intérieur et tu sais désormais que tu es libre, quoi qu'il arrive. La liberté de tracer les frontières de ton être.

Tu ne confonds plus ton désir de survie avec une mauvaise éducation. Tu ne confonds plus ton refus de l'ennemi avec une résistance psychique au changement.

(La langue qui s'y parlait ressemblait à la nôtre, en apparence. Mais les flots de sens charriés par les mêmes mots, différaient ; et les conversations ne pouvaient plus éclaircir nos destins).

La politesse, qui voulait annihiler le combat politique du pauvre, a été remplacée par la tolérance, qui annihile le combat politique de l'autochtone. Pour l'instant, aucune parole de délivrance n'est possible : elle serait assimilée à la haine du progrès, au refus de la tolérance. On lui ferait honte. Pour l'instant...

Mais, quand le siège sera levé, il te faudra rester calme face aux petits soldats du progrès et de la tolérance qui changeront de chemise et de camp en moins de temps qu'il ne faut pour l'écrire.

(Il te faudra marcher loin des habitations sages et neutres. Jusqu'au vol concentrique des corneilles de la violence. Alors, comme un soleil qui descend sur les fleurs du soir, tu seras restauré dans le crépuscule de tes idoles).

Il te faudra partir marcher dans le calme de la campagne, il faudra respirer sans joie ni rancoeur. Il te faudra savoir que pendant que tout le monde criera ce que tu penses en cachette aujourd'hui, un autre silence s'imposera peu à peu sur la ville et sur la foule. Un autre silence, un même interdit : celui de dire vrai.

(Dans ton ventre qui gargouille, germe le fruit d'une nouvelle génération, qui reprendra les chants anciens de guerre et de procréation).

 

En miroir, sur AlmaSoror :

Extrait de La philosophie de la révolution, de Nasser

Maryvonne

Mon pays

vendredi, 21 juin 2013

Rage II

«Si la rage avait du poids, ce billet de blog vous pèterait à la gueule comme une grenade».
Esther Mar

La rage monte en moi, lentement, sûrement. Elle est là, je le sais, elle est énorme, elle gronde en silence et serait capable de dévaster des vies plus sûrement qu'un ouragan. Elle est tournée vers quelqu'un, (de temps en temps, pour changer, vers quelqu'un d'autre), mais je sais que je suis entièrement responsable de la situation qui la fait naître.

J'essaie de rester polie, d'accomplir le minimum requis pour que les événements se déroulent du mieux possible.

J'essaie de la contenir, de la diminuer, de la transformer.

Elle monte, pourtant. Elle est énorme, c'est une lame de fond dont s'élèvent des vagues de rancoeur, de haine. Née de mon impuissance, de mes incapacités multiples, elle cherche à punir les soi-disant coupables.

Mais je la contiens. Pour l'instant, je la contiens et j'avance masquée, bien qu'on puisse apercevoir, à certains moments, un rictus qui se fige un instant.

Edith

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AlmaSoror avait déjà publié Rage


Pour ne pas sauter dans le vide, sautons dans le fou. Expérimentons l'expérimental avec Jeanne Liotta.

 Si nous craquons et finissons internés aux urgences de l'âme, au moins aurons-nous quelques idées d'une psychose transformée en expérimentoeuvre.

dimanche, 17 janvier 2010

notes et bulles bleues

 

 

sam.jpg

 

 

Extrait du mail de Siobhan d’hier matin (reproduit avec son autorisation) :

(Siobhan H est notre deltaplaniste et tient la rubrique aérienne "vol libre)

“Je t’aime”

C’est l’expression qui est revenue ce matin échouer sur les bords de ma conscience le long de ce long vol sans but autre que celui de n’être pas sur terre. Le vent rebelle me donnait l'impression de piétiner dans le ciel. Ma cage m'oppressait et je voulais la lâcher. "Je t'aime". Ce mot me retenait.

Mais à qui parlais-je ? C’est la question qui me hante, maintenant que je suis redescendue et que je marche dans cette ville trop nordique pour être jamais joyeuse.

J’ai appelé Mickaël et Michel, mes deux archanges d’Amiens. Ils étaient justement ensemble au fond d’une brasserie, attablés devant une spécialité picarde et des bières belges.

Ils ont ri, blagué, toujours aussi bêtes, toujours aussi bons.
Mickaël m’a dit : tu parlais de Katharina.

J’ai raccroché rapidement. Je me suis demandée si c’était vrai le plus objectivement possible. En clair, où que je scrute ma conscience, je hais Katharina. Je la respecte, je l’admire, je la trouve belle - mais je la hais.

(...)

Et quand j’y repense je pleure presque, je hante la ville si triste (comme toutes les villes du Nord) où je ne sais même pas pourquoi j’habite, et je t’en veux de nous avoir rassemblées un jour au 13 boulevard du Montparnasse, pour une soirée qu’il fallait faire semblant de trouver sympathique et qui était à vomir. D’ailleurs, j’avais vomi dans la rue en rentrant chez moi”.

 

Siobhan

 

 

Je rappelle que la relation entre Siobh et Katharina a déjà ébranlé AlmaSoror... ICI.

Un ami lecteur avait alors posté ce commentaire éclairant : "Lontemps après le temps des déchirures, restent les morsures de l'incendie intégral. Comme une biographie à rebours et marquée dans la chair". Merci, toi qui signas Habitant d'Insomniapolis et qui fit partie de notre éphémère Club d'alors...