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mercredi, 28 juillet 2021

Oser faire ça !

"Le motif spécifique de licenciement a été supprimé pour les salariés travaillant dans des lieux où le pass sanitaire ou la vaccination sont obligatoires. Le texte prévoit cependant une suspension de contrat sans salaire tant que le salarié n'est pas en règle. Cela ne veut cependant pas dire que l'employeur ne pourra pas, à terme, licencier le salarié pour motif personnel s'il refuse de façon répétée de présenter un pass sanitaire, mais il devra le faire en se basant sur des motifs déjà existants".

(Lire l'article entier)

 

Nous n'avons plus qu'à prendre acte que notre société a basculé dans un tunnel de non-droits déguisé en démocratie. Restons calmes, trouvons mille manières d'être heureux, cultivons la joie de vivre et d'être et d'aimer, la joie de penser librement, et protégeons-nous des punitions étatiques et des lynchages de foules.

Cet article sur les dictatures douces se pare d'un léger voile de caducité. Mais celui qui évoque la traversée d'une époque troublée demeure tout à fait actuel.

Ma mère et moi avons lu l'année dernière l'un des gros tomes du journal de Sandor Maraï et l'on assiste avec pénibilité au passage de la seconde guerre mondiale sur la Hongrie. C'est intéressant de voir Maraï déjeuner au restaurant et, par la fenêtre, assister, médusé, à la déportation de Juifs. Le restaurant est plutôt chic, la nourriture bonne, le service agréable, mais par la fenêtre des malheureux sont conduits vers leur funeste destin. Quelques années plus tard, dans le même restaurant, il assiste à la même scène de déportation, mais ce ne sont plus des Juifs qui sont emmenés, ce sont des Sudètes, car les Allemands viennent de perdre la guerre.

Et après tout c'est sans doute cela, la vie d'un restaurant. Et c'est sans doute cela aussi, la vie d'un citoyen : manger et boire, voir ses amis, se réjouir d'un achat et souffrir d'une rupture ou d'un échec ; travailler ou subir le chômage ; aimer ou non les jours qui passent, et puis un jour, pourquoi pas, si on manque de chance, si le hasard des idéologies et des lois martiales l'exige, passer de l'autre côté : un matin, par la grâce d'une délation, d'une visite policière ou d'un contrôle administratif, n'être plus qu'un corps qu'on achemine vers son destin. Et soudain comprendre l'envers du décor, celui qui n’apparaissait pas à nos yeux la veille encore.

 

 

(Nota Bene : Sur l'intelligence forcenée du passe sanitaire quasi-obligatoire, on peut en sus lire cela : La vaccination Covid à l’épreuve des faits.)

jeudi, 20 février 2014

Une bibliothèque Cornulier : Réflexion sur la délation et le comité des recherches

(La bibliothèque dont on vous parle fut créée, trente ans durant, dans un appartement au fond d’une cour du 13 boulevard du Montparnasse, avant de devenir une bibliothèque éparpillée).

réflexions sur la délation, francis de pange

Titre : Réflexion sur la délation et sur le comité des recherches

Auteur : François de Pange

ÉditionsAllia (2011)

Édition originale : 1790, chez Banois l'aîné, Paris

nombre de pages : 55

Prix 3 euros

Acheté en 2011 à la librairie Michèle Ignazi, 17 rue de Jouy, 75004

Exergue de Lucien de Samosate

Suivi d'un mini-essai intitulé "Traces d'un révolutionnaire aristocrate", de Stefan Lemny

Première phrase : "L'instruction du procès de M. de Besenval a été publique, ceux qui l'ont suivie doivent en prévoir le résultat ; admis à toutes les séances, instruits par tous les témoins, ils n'ont entendu que des dépositions insignifiantes ou des témoignages honorables à l'accusé."

Première phrase de la page 30 : "Mais nos constitutions n'ont avec celles-là aucune analogie".

Dernière phrase : "Pour moi, qui ne puis apercevoir de liaison nécessaire entre des idées métaphysiques et des assassinats, je ne partagerai pas les passions de ceux dont j'applaudis les systèmes ; je m'efforcerai d'écarter ces glaives que des aveugles agitent au milieu de nous ; et, adorateur de la Liberté, je presserai mes concitoyens d'honorer cette divinité nouvelle en lui rendant ici ses compagnes immortelles, la Justice et l'Humanité".

 

 

 

Extrait :

"J'ai parlé des maux publics que la délation prépare. Si j'entrais dans le détail des infortunes particulières qu'elle entraîne, je pourrais écrire quelques pages intéressantes, mais inutiles. Qu'apprendrais-je aux hommes qui sont sont sensibles ? Qu'obtiendrais-je de ceux qui ne le sont pas ?
Avant de terminer ces réflexions sur les délateurs, je ne dois pas taire que, de tous ceux qu'a produits la France, les plus méprisables et les plus sanguinaires ont été des journalistes ; ces hommes que la multitude stipendie ont besoin de lui plaire et nous avons montré que la délation en fournit les moyens. Il semble aussi qu'ils aient compté sur ce désir curieux et cruel que quelques âmes ressentent pour contempler de grandes vicissitudes de fortune, pour voir même (il faut l'avouer) couler du sang humain.

Pendant l'instruction du procès de M. de Besenval, on les a vus, attristés par son innocence, déplorer l'absence des charges, en désirer de graves contre lui ; et tandis que cet homme presque septuagénaire languissait dans une injuste et dure captivité, de tranquilles folliculaires insultaient à sa longue infortune, essayaient de la rendre plus amère par les sinistres présages qu'ils lui faisaient parvenir et promettaient son sang pour vendre un peu mieux leurs feuilles.

On sait que les Romains couraient aux amphithéâtres épier avidemment les derniers soupirs d'un gladiateur ou d'un esclave déchirés par les bêtes et ne pouvaient se rassasier de ces scènes de carnage qu'ils appelaient des jeux. Que des hommes soient organisés de manière à trouver là quelque plaisir, on doit les plaindre ; mais il faut réserver tout son mépris et toute sa haine pour ceux qui, par cupidité, se rendaient les entrepreneurs de ces affreux spectacles et prenaient le soin de chercher, à de tels plaisirs, des instruments et des victimes".

 

Une bibliothèque Cornulier : les titres

mercredi, 19 février 2014

Traité de la délation

Traité de la délation

Romain Motier

Citoyen de Genève

1947

(Publication aux dépens des Amis de Romain Motier)

 

Article 30 du Code d'instruction criminelle français
"Toute personne qui aura été témoin d'un attentat soit contre la sûreté de l’État, soit contre la vie ou la propriété d'un individu, sera tenue d'en donner avis au Procureur, soit du lieu du crime ou délit, soit du lieu où le prévenu pourra être trouvé".

Article 58 du Code Pénal soviétique, paragraphe 12

"L'omission de la dénonciation, s'il s'agit de la préparation dûment connue ou de l'exécution d'un délit contre-révolutionnaire, comporte la peine de la privation de la liberté pour une période de temps qui ne sera pas inférieure à six mois".

 

NOTE de l'Editeur

Le public trouvera ici les notes posthumes qui constituent le dernier écrit de M. Romain Motier. On sait qu'il est mort le 17 novembre 1946 dans sa modeste maison de Plan-les-Ouates où ses amis et disciples avaient coutume de le visiter. Il était né à Carouge en 1873. Parmi ses grands-oncles, il comptait le fameux Daniel Roguin, d'Yverdon, qui a échangé avec Jean-Jacques Rousseau une correspondance dont les copies sont conservées aux Bibliothèques de Zurich et Neuchatel.

Tout en s'adonnant aux travaux historiques et philosophiques qui lui étaient chers, il a suivi une carrière paisible à la Bibliothèque publique de notre Université, jusqu'en 1905 où il fut affecté au fonds Gustave Revilliod et nommé conservateur-adjoint du Musée de l'Ariana. Pendant les deux grandes guerres, il prodigua ses soins à l'Office Central de la Croix-Rouge. Ses voyages en Europe, son érudition, le journal intime qu'il n'a cessé de tenir pendant près d'un demi-siècle, et dont quelques intimes connaissent des passages, lui avaient acquis une réputation solide plutôt que brillante. En France, où ses mérites de moraliste n'étaient reconnus que par une élite, il connaissait fort bien le monde littéraire, les conjonctures politiques, car il y fit de longs et fréquents séjours ; et il y amassa une grosse quantité de documents historiques sur le siècle passé, l'époque contemporaine et même les tout derniers événements. Les vicissitudes de ce malheureux pays l'intéressaient beaucoup, depuis dix ans, bien qu'il en fût le témoin détaché et indirect.

Nous n'avons pas ici à rappeler tous ses précédents ouvrages : il nous suffira de citer L'histoire générale des Conférences pour le désarmement (Lausanne, 1924) et Les biens des émigrés, leurs acheteurs, leurs revendeurs, étude sur les conséquences économiques de la Révolution française - livre devenu rarissime, car le tirage tout entier a été racheté par certaines familles - enfin Principes de la censure dans les États modernes (Tome I : Le Cabinet noir - Tome II : la Propagande - Tome III : L'information dirigée.) Cette dernière œuvre, dès sa parution, a été honorée d'une souscription par l'Académie des Sciences Morales de Rio-de-Janeiro et interdite sur le territoire de plusieurs nations européennes.

Quant à son fameux Traité de l'Intolérance, achevé dès 1945, le manuscrit en a disparu, mais nous faisons des recherches pour en récupérer une copie très fidèle, qui paraît-il, serait aux mains d'un délégué tchécoslovaque à l'O.N.U. (Bureau de l’Énergie atomique).

M. Romain Motier, surpris par la maladie qui l'emporta, n'a pas eu le temps de mettre la dernière main au présent livre, mais on verra qu'il avait gardé à un âge avancé, la verdeur d'esprit, l'originalité critique et le style très châtié qu'on se plaît à lui reconnaître. Notre ami semble avoir été atteint dans ces dernières années d'une paranomatose. Cette affection découverte par le professeur Nideck, de Berne, le conduisait à déformer la plupart des noms propres. Nous avons tenu cependant par respect pour sa mémoire, à reproduire fidèlement son manuscrit.

Signalons que, notre auteur ne laissant aucune famille, un Comité d'amis et d'admirateurs se propose de faire dresser un buste à son effigie, dans sa commune même, sur l'ancien champ de manœuvres des milices genevoises ; nous assurons bien que ce monument commémorera un homme de bien qui, toute sa vie, a voulu servir la vérité et la civilisation.

 

Traité de la délation

Chapitre premier

De la délation en général

 

Il est curieux que le mot de délation s'applique tout ensemble, chez les auteurs qui savent les nuances de leur langue, à la dénonciation politique et à une démarche méprisable. Pourquoi ce sens péjoratif ? Parce que la délation est censée, en principe secrète, tortueuse et au surplus intéressée.

Certes, on peut remarquer que la délation est rarement franche et publique quand il s'agit d'atteintes à la sûreté de l’État. Ou bien les coupables (disons plutôt les accusés) peuvent redevenir puissants, et il vaut mieux ne point s'exposer à leur vindicte. Ou bien ils appartiennent à un parti définitivement vaincu, à une minorité imbécile, et l'on fait scrupule de leur donner le coup de grâce, trop ostensiblement, de hurler avec les loups qui déjà les dévore. Dans les deux cas, la délation prend des précautions dictées par la prudence ou le respect humain...

A suivre...

Et, sur le même sujet :

Liberté, vérité, action

Journalistes pousse-au-crime

 

 

 

mercredi, 15 février 2012

Journalistes pousse-au-crime

françois de pange

Désespoir de cachot, photo Edith de CL


Nous proposons un extrait des Réflexions sur la délation, de François de Pange, révolutionnaire non-violent (1790)

"J'ai parlé des maux publics que la délation prépare. Si j'entrais dans le détail des infortunes particulières qu'elle entraîne, je pourrais écrire quelques pages intéressantes, mais inutiles. Qu'apprendrais-je aux hommes qui sont sont sensibles ? Qu'obtiendrais-je de ceux qui ne le sont pas ?
Avant de terminer ces réflexions sur les délateurs, je ne dois pas taire que, de tous ceux qu'a produits la France, les plus méprisables et les plus sanguinaires ont été des journalistes ; ces hommes que la multitude stipendie ont besoin de lui plaire et nous avons montré que la délation en fournit les moyens. Il semble aussi qu'ils aient compté sur ce désir curieux et cruel que quelques âmes ressentent pour contempler de grandes vicissitudes de fortune, pour voir même (il faut l'avouer) couler du sang humain.

Pendant l'instruction du procès de M. de Besenval, on les a vus, attristés par son innocence, déplorer l'absence des charges, en désirer de graves contre lui ; et tandis que cet homme presque septuagénaire languissait dans une injuste et dure captivité, de tranquilles folliculaires insultaient à sa longue infortune, essayaient de la rendre plus amère par les sinistres présages qu'ils lui faisaient parvenir et promettaient son sang pour vendre un peu mieux leurs feuilles.

On sait que les Romains couraient aux amphithéâtres épier avidemment les derniers soupirs d'un gladiateur ou d'un esclave déchirés par les bêtes et ne pouvaient se rassasier de ces scènes de carnage qu'ils appelaient des jeux. Que des hommes soient organisés de manière à trouver là quelque plaisir, on doit les plaindre ; mais il faut réserver tout son mépris et toute sa haine pour ceux qui, par cupidité, se rendaient les entrepreneurs de ces affreux spectacles et prenaient le soin de chercher, à de tels plaisirs, des instruments et des victimes".

 

Plus sur François de Pange et son opuscule... par ici.