dimanche, 18 novembre 2012
L'orgueil
Nous reproduisons ici, un extrait du Manuel de spiritualité composé par l'abbé Saudreau (1859-1946).
C'est la seconde fois que nous reproduisons un fragment de ce livre. Le premier passage enseignait que tous les métiers mènent au ciel ; celui-ci définit l'orgueil.
Nature de l’orgueil ; ses diverses formes.
" Chacun est tenté par sa propre concupiscence qui l’emporte et le séduit " dit l’apôtre saint Jacques (i, 14). Les attaques du démon, dont nous parlerons bientôt, seraient peu dangereuses, si nous n’avions au-dedans de nous des ennemis redoutables, nos passions. Ces inclinations au mal, déjà par elles-mêmes impétueuses et ardentes, trop souvent sont devenues plus tyranniques par les fautes commises, par les concessions qui leur ont été faites. On ramène assez ordinairement à trois divisions principales les mauvais penchants : l’orgueil, la sensualité, l’attachement aux biens de la terre.
L’orgueil est un amour désordonné de sa propre excellence. Saint Thomas, reproduisant un texte de saint Grégoire, enseigne que l’orgueil se manifeste de quatre manières différentes : ou nous nous attribuons à nous mêmes ce que nous avons de bon, ou, si nous reconnaissons que ce bien vient de Dieu, nous croyons qu’il était dû à nos mérites, ou nous nous vantons de posséder des qualités que nous n’avons pas, ou méprisant les autres nous désirons être estimés singulièrement pour les qualités que nous avons. (2.2, q.162, a.4)
Le principe de l’orgueil réside dans une complaisance exagérée en soi-même : on aime à penser aux qualités que l’on a ou que l’on croit avoir, on s’en réjouit, non pas comme d’un don de Dieu accordé à un indigne, mais comme d’un bien personnel, dont on s’attribue la gloire, que l’on est fier de posséder ; l’homme ainsi disposé se fait une idée exagérée de ses qualités et souvent s’attribue des qualités qu’il n’a pas : ainsi font ceux qui n’ont confiance que dans leur propre jugement ; ou il prend pour des qualités ce qui n’en est pas : ainsi font ceux qui sont fiers de posséder des richesses, de porter de brillantes toilettes.
La complaisance exagérée en soi-même entraîne naturellement la dépréciation du prochain : l’orgueilleux, à son insu, est sévère et injuste dans les jugements qu’il porte sur ses frères, il veut se croire supérieur, et cette disposition de sa volonté le porte inconsciemment à abaisser les autres, il pensera volontiers que seul il a raison et que les autres se trompent.
De la complaisance en soi naît la vaine gloire, appelée encore la vanité, qui est le désir déréglé de l’estime et des louanges. Tout désir de gloire est désordonné si l’on cherche sa gloire dans des choses fragiles et éphémères, si l’on fait reposer sa gloire dans le jugement des hommes, qui sont si sujets à l’erreur, si on désire l’estime et l’approbation pour autre chose que pour l’honneur de Dieu et le bien des âmes. (S. th., 2.2, q. 132, a. 1) Elles ont donc le vice de la vaine gloire ces personnes éprises d’elles-mêmes qui tiennent à occuper l’esprit des autres, à être l’objet de leur attention, à en être admirées, mêmes pour de futiles avantages ; de même celles qui ont une crainte excessive d’être oubliées, d’être comptées pour rien, qui ont horreur d’être méprisées, d’être raillées.
L’orgueil produit aussi l’ambition, qui est l’amour de l’autorité et des honneurs. Imposer sa volonté, recevoir des marques de respect, voilà à quoi aspirent les personnes autoritaires et les personnes ambitieuses.
Une autre forme plus cachée de l’orgueil est celle qui porte à la tristesse, au dépit, au découragement. Si la personne qui nourrit en elle-même un amour désordonné de sa propre excellence, est par tempérament portée aux noires pensées, elle sera frappée de ses défauts, comme d’autres sont épris de leurs qualités ; elle y pensera sans cesse, elle en concevra une tristesse amère, et elle sera très vite la proie de l’abattement et du découragement. Cette forme de l’orgueil est dangereuse, parce qu’elle simule l’humilité et parce qu’elle paralyse les âmes".
Autre fragment du Manuel de spiritualité proposé par AlmaSoror
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lundi, 22 octobre 2012
Tous les métiers mènent au ciel
Nous proposons à la lecture, un extrait du manuel de spiritualité, intéressant, délicieusement désuet, composé par l'abbé catholique Auguste Saudreau (1859-1946), et mis en ligne par le site Salve Regina
Il donne ici des exemples de saints issus de diverses professions.
"La preuve que la piété convient à tous les états de vie nous est fournie par l’histoire qui nous apprend que dans toutes les professions il y a eu des héros de vertu, des serviteurs de Dieu qui ont su allier la piété la plus tendre à la pratique des devoirs les plus dissipants. Nous donnerons ici une liste forcément incomplète de saints qui ont su trouver au milieu du monde les moyens de perfectionner leur vie et de s’élever jusqu’à l’héroïsme de l’amour.
Ceux pour qui le travail de sanctification paraît le plus difficile ce sont les rois et les princes, parce que, beaucoup plus que d’autres, ils sont comblés des biens terrestres, sollicités par les plaisirs et les honneurs, flattés par leur entourage, et ils ont, beaucoup plus que d’autres, la facilité de satisfaire les passions humaines. Il est vrai que, s’ils sont fidèles, ils peuvent recevoir plus de grâces parce qu’ils ont à remplir une plus haute mission.
Saint Richard, roi saxon, saint Canut, roi de Danemark, saint Herménegild, roi des Visigoths, saint Pierre Urséole, doge de Venise, saint Edmond, saint Edouard, rois d’Angleterre, saint Henri II, empereur d’Allemagne, saint Olaf, roi de Norvège, saint Emeric, prince de Hongrie, saint Etienne, roi de Hongrie, le B. Charles le Bon, comte de Flandre, saint Ferdinand, roi de Castille, saint Casimir, duc de Lituanie, le B. Evrard, comte de Mons, saint Louis, roi de France, le B. Amédée, duc de Savoie, le B. Elzéar, comte d’Arian, sa femme, la B. Delphine, sainte Adélaïde, et sainte Cunégonde, impératrices d’Allemagne, sainte Agathe Hildegarde, épouse d’un comte palatin, sainte Marguerite, reine d’Ecosse, sainte Elisabeth de Hongrie, princesse de Thuringe, sainte Hedwige, duchesse, V. Marie-Clotilde, reine de Sardaigne, sainte Elisabeth, reine de Portugal, la B. Marie-Christine, reine des Deux-Siciles.
Vécurent encore au milieu du monde et s’y sanctifièrent, saint Sébastien, saint Georges, saint Maurice, qui étaient soldats, saint Come et saint Damien, médecins, saint Crépin et saint Crépinien, et, au XIIe siècle, saint Thibaud de Mondosi, cordonniers, saint Vincentien, palefrenier, saint Evrard, saint Nicétas Pérégrin, saint Bénezet, le B. Jean de Monchy, bergers, saint Isidore, laboureur, saint Goiry, colporteur, saint Ludain, pèlerin en Alsace, saint Pazzio, orfèvre à Vérone, le B. Albert, d’Ogna, paysan, puis homme de peine, saint Daniel, marchand, le B. Pierre de Sienne et le B. Jean d’Epire, simples ouvriers, le V. Antoine Bermejo, qui passa sa vie à soigner les malades, saint Benoît-Joseph Labre, mendiant, sainte Germaine Cousin, sainte Thareste, la V. Elisabeth Canori, la V. Villana de Bottis, mères de famille, la B. Louise d’Albertone, veuve, la V. Grâce de Valence, qui mourut à 112 ans et eut à subir de violents assauts du démon jusqu’à sa mort.
L’Eglise a reconnu les vertus héroïques de ces grands serviteurs de Dieu ; combien d’autres n’ont pas eu cet honneur et ont su aussi au milieu du monde dans des professions qui ne favorisent pas la piété, servir le Seigneur avec une grande fidélité et gagner pour le ciel d’immenses mérites ! Au XVIIe siècle, M. de Bernière Louvigny, trésorier du roi, qui a laissé de si pieux ouvrages, le Baron de Reinty, se distinguèrent par une grande sainteté de vie ; deux habitants de Paris, Clément, coutelier et Beaumais, mercier, convertirent beaucoup d’hérétiques, par leurs controverses, mais plus encore par leur sainteté, Clément en convertissait en moyenne jusqu’à six par jour. Marie de Valence, Marie des Vallées, surnommée la sainte de Coutances, si intimement liée avec le B. Père Eudes, Marie Rousseau, femme d’un marchand de vin, qui soutint M. Olier dans ses œuvres et que les personnages les plus éminents consultaient, Esprite de Jésus, Madeleine Vigneron, Armelle Nicolas, qui furent favorisées de communications divines, pratiquèrent d’héroïques vertus. Au XIXe siècle le commmandant Marceau, M. Dupont, le saint homme de Tours, le général de Sonis, M. Philibert Vrau, Marie Brotel etc, etc., vécurent saintement au milieu du monde.
Il est vrai, le nombre des saints et des parfaits est incomparablement plus grand parmi ceux qui sont consacrés à Dieu, et qui trouvent, soit dans le sacerdoce, soit dans la vie religieuse, des secours inappréciables, mais les exemples de tant d’âmes généreuses qui se sanctifièrent au milieu du monde, prouve la vérité du principe : Bona voluntas requiritur et sufficit : il faut une bonne volonté, mais une bonne volonté suffit, une volonté énergique et constante, correspondant fidèlement aux grâces que le Seigneur verse toujours avec abondance sur les âmes courageuses".
Abbé Auguste Saudreau (1859-1946)
Le manuel dans son intégralité, sur le site Salve Regina
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mardi, 24 juillet 2012
Je crois vous reconnaître, homme bizarre qui m'évitez
Marchand, étiez-vous au bar des désespérés le soir où Nayon s'est noyé ? Y buviez-vous cette bière oblongue, vers neuf heures du soir, le 23 ventôse de l'an 2087 ? Si oui, avez-vous noté la lueur falote qui dansait au fond des yeux de la barmaid noire, quand son amie l'a caressée aux cheveux ? Et croyez-vous qu'on puisse un jour réécrire l'histoire, cette histoire du pirate blessé qui chantait le rorate caeli grégorien en levant le regard vers le ciel ? Et savez-vous ce que sont devenus ces âmes éparses qui nous lorgnaient en vidant des verres de Côtes du Mont Ventoux ? Marchand, était-ce vous qui chantonniez l'angélus de Jean-Christian Michel en dépassant d'un pas rapide les trois hommes en noir, comme pour une procession funèbre ? Marchand, je crois vous reconnaître. Je crois me souvenir de votre nom : Marchand. Et de votre sourire : triste. Et de votre profession : maçon en préretraite. Et je crois que c'était vous, et que vous le savez, et que vous ne le direz pas.
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