lundi, 10 mars 2014
Renaud, 8 mars 2014
Photo Mavra
Voici le cocktail musical qui coulait tandis que dans nos verres se bousculaient mille punchs, champagnes, vins de tous âges et de toutes les couleurs. C'était samedi ; nous fêtions, dans une rue de Montreuil, les quarante premières années d'une présence sur cette bonne vieille terre.
Menu musical : entrée en douceur avec un disque de duos entre le violoniste classique et un pianiste de jazz. Une musique qui se balance entre deux univers.
On pénètre ensuite dans l'orientale Tunisie d'Anouar Brahem, le maître de l'oud.
Et puis c'est Jan Garbarek qui reprend le flambeau, pour un jazz nordique qui oublie les notes bleues ou les fait traîner si longtemps qu'elles en changent de couleur.
Mais, quelques quarts d'heure plus tard, nous quittons la Norvège pour entrer sur les terres mélangées de christianisme, d'islam, de paganisme antique, de la Syrie. C'est Abed Azrié, Syrien de Paris, qui mène la danse avec ses chants chrétiens, soufis, ses hymnes à l'amour en langue arabe.
Abed Azrié, après de longues plages de chant, passe son chemin. C'est Daniel Darc qui émerge. So Dark...
Etats-Unis, où étiez-vous ? Vous apparaissez soudainement, tout entiers contenus, avec votre violence et votre rêve, dans la voix de Tracy Chapman.
Deux météores français font irruption, Le mal mon ange, de Lescop, et Je m'en vais de Miossec... Mais la musique cinématographique de Craig Armstrong vient tout ensevelir et s'étale, s'étale.
Billie Holliday apporte sa triste beauté pleine d'âme et de gouaille.
Elliott Smith erre entre les bars, suivi par son émule, Chris Garneau.
Pat Metheny reprend le son du silence ; Apocalyptica pose des contrebasses sur le son de Métallica.
Daniel Melingo envoie son rythme depuis l'Argentine.
Alex Perls s'amuse dans l'orage, puis... N'est-ce pas le grand Chet Baker, dont on entend la voix adoucie par les substances ? Tom Waits le suit de près. Vient l'heure du martini rose, qui nous stimule avant de nous laisser danser en funambule entre les cordes de la guitare espagnole.
C'est alors que le catalan Jordi Savall entre en scène. Il évoque la Turquie à l'époque où elle était encore ottomane. Une berceuse hébreu achève ce cycle.
L'Italie s'invite, le temps d'une chanson entraînante et nostalgique.
Gothique, la sœur douloureuse teinte le salon aux estampes japonaises, la cuisine au percolateur ultramoderne, d'une tonalité punk !
Et hop, Tom Waits revient. La valse In the mood for love le bouscule ;et le jazz encore, le jazz des vieux standards, puis le blues loufoque de Benton qui vient mettre la pagaille.
La mascarade de l'amour se dévoile. C'est l'heure du départ de Maissiat. A Madrid, peut-être, comme la voix séductrice d'Armelle Pioline semble le faire croire.
Et puis l'Afrique surgit, mariée à la France, bien mariée pour une fois. Chacune apporte apporte sa dot dans cette union sacrée.
Mais tout finit toujours dans la baignoire.
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lundi, 10 juin 2013
Mélancolie
Gothique, soror dolorosa, tes frères-amants en longues robes rouges, bleues, beiges, te suivent, alertes, tandis que parmi nous tu choisis ta victime bien-aimée. Pourquoi moi ? Pourquoi nous ? Le cou tourné vers le côté vivant du monde, nous te fuyons comme la peste.
Je n'ai pas besoin de ta froideur, je n'ai pas envie du désespoir que tu déverses aux veilles des anniversaires. Va t'en chanter tes romantiques déprimes au milieu des arbres morts.
Tu ressembles à la soeur des aurores ternes, celle qui marche en tenant sur son bras le drap des nuits amères. Je te fuis sans cesse, tu me poursuis de tes assiduités. Tu voudrais que j'entre dans ta danse et m'emporter sur tes rives désolées. Tu m'y enseignerais le goût des baisers aux salives noires, des caresses glacées, des dialogues sans résolution. J'y laisserais ma peau et mes rêves déjà chagrins.
«Lâche-moi, car l'aurore est levée».
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lundi, 03 juin 2013
Lammermoor
Hélène,
Tu cherches Lucie à Lammermoor et ne la trouves pas. Lucie est morte il y a si longtemps. Il ne doit rien rester de ses restes précieux, au fond de la tombe que tant de neiges ont recouvertes, durant tant d'hivers.
Que voudrais-tu lui dire ? N'y a-t-il pas d'autres femmes, d'autres soeurs à aimer dans les froids soirs de novembre, quand le vent claque contre les volets des campagnes de l'Ecosse ? Tu marches en quête d'un fantôme qui n'a plus rien à te dire. Ses oreilles n'existent plus pour écouter tes plaintes et tes rêves. Seule l'écorce des arbres pluriséculaires t'entendent. Ils sont les témoins d'une époque dans laquelle tu ne te promèneras jamais.
Les grilles des châteaux délaissés sont mangées par la rouille, tu y accroches tes mains fébriles. Le feuillage des charmilles est mort depuis longtemps. Partout où tu portes tes pas, le mystère et l'absence t'attendent.
Lucie t'aurait comprise ; Lucie t'aurait aimée ; Lucie t'aurait emportée au pays des coeurs qui ne peuvent se désunir.
Lucie t'aurait peut-être sauvée. Mais la camionnette aux gyrophares roule à travers les routes serpentines du pays des revenants, et si tu ne te jettes pas dans le fleuve qui passe en bas de la vallée, les hommes en blanc t'arracheront à ton dernier voyage.
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