vendredi, 01 juin 2012
La nuit
Phot.Mavra Nicolaïevna Novogrochneïeva
Un billet d'Esther Mar-Adentro
La vie est une nuit. Nous attendons tous l'aube, qui nous délivrera du poids des ténèbres, ténèbres de nos entrailles, ténèbres de nos douleurs, de nos tentatives et de nos échecs, de nos tentations et de nos âmes piégées.
"La vie est un songe", disait Pédro Calderon de la Barca.
"La vie n'est qu'une nuit à passer dans une mauvaise auberge", disait Sainte Thérèse d'Avila.
"La vie est un voyage", disait Ernst von Kleist.
"La vie est un sommeil", disait Alfred de Musset.
"Cette vie est un hôpital", disait Charles Baudelaire.
La vie est une nuit, où la lune brille trop faiblement pour guider nos pas. Nous nous cognons les uns contre les autres, et pour nous venger de notre condition, de nos espoirs déçus, nous bridons l'enfance et malmenons les bêtes.
La vie est une nuit et nous attendons la fin du noir, la venue de l'aube, l'avenue du jour qui se déploie sous nos yeux jusqu'à l'horizon. Alors, que ferons-nous ?
Nous verrons. Pour l'instant, nous geignons et nous prions.
Esther Mar-Adentro
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dimanche, 29 août 2010
Les poètes maudits
Photo Sara
Nous avons récemment cité deux portraits de Vigny, écrits par Lamartine et Dumas.
Maurice Allem, dans sa biographie d'Alfred de Vigny publié à Paris aux éditions Louis-Michaud en 1911, dresse un portrait émouvant des "poètes maudits", que Jules Vallès ou Vigny lui-même ont si bien décrit.
"Victor Hugo et Vigny semblent s'être moins vus souvent à partir de 1830 ; mais à cette date le groupe romantique commence à perdre de sa cohésion ; si de nouvelles recrues lui arrivent encore, comme Théophile Gautier, (...) d'autres, comme Alfred de Musset, s'en éloignent déjà ; certains, et c'est le cas de Vigny et de Hugo, ont a présent conquis une sûre renommée, ils sont de plus en plus absorbés par le souci de leur propre carrière. La brèche est faite. Individuellement, chacun va passer. Les poètes qui seront maintenant attirés par l'éclat romantique seront souvent de pauvres jeunes gens, dont le talent poétique égalera rarement le saint enthousiaste, et qui, loin des salons où leurs aînés se réunissaient et s'organisaient pour la guerre, mourront lentement, à la lumière d'une faible lampe, dans leur chambre sans feu. Ceux-là seront vraiment, non pas les maudits, sans doute, comme l'écrira bientôt Alfred de Vigny, comme plus tard doit le redire Baudelaire, mais les hallucinés et les faibles, ceux qui n'auront pas su voir la réalité telle qu'elle est, qui ne se seront pas vus eux-mêmes tels qu'ils sont, et dont quelques uns, - un trop grand nombre -, las d'attendre sans lutte une fin qu'ils désirent, ne trouveront que le courage de hâter l'heure de leur mort".
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