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mardi, 24 novembre 2015

Teče, voda, Teče (n'épouse pas ce soldat...)

C'est un chant qui s'écoute par un soir de pluie, quand la nuit tombe trop tôt par la fenêtre. Un chant slovaque qu'écoutait un jeune Français. Il le sifflotait dans les rues de Nantes, il le chantait en prononçant maladroitement les paroles slaves au cours des promenades solitaires entre les arbres des forêts de la Loire-Atlantique. Les corbeaux qui volaient en cercle sur les marais boueux ajoutaient leurs cris à sa voix juvénile, fraîchement muée.

Quelques années après, le jeune homme meurt à la guerre, torturé par des ennemis de son âge, après avoir parachuté sur Dien Bien Phu.

Mais le chant slovaque du soldat français parti mourir en Indochine résonne encore. Une classe d'enfants l'apprend en chœur à Bratislava. Un professeur de violon l'écoute en disque dans un appartement de Prague. Un vieil homme le fredonne à Rio de Janeiro. Je passais l'autre jour à Paris dans la calme rue Milton, et j'entendais au loin quelqu'un qui sifflait. C'était encore Teče, voda, Teče. Les cœurs de ceux qui restent sont des tombes vibrantes.

Commentaires

Toute la beauté d'Alma Soror dans un récit presque impossible à oublier.

Écrit par : Tieri | mercredi, 25 novembre 2015

Merci Tieri de ce message et du texto nocturne.

Écrit par : AlmaSoror | samedi, 28 novembre 2015

Merveilleuse Alma Soror! Se souvenir d'un para du 1er Bataillon de Choc mort pour la France à Dien Bien Phu, bataille des temps préhistoriques!
En remerciement, et comme je sais qu'elle saura apprécier, voici le récit des funérailles d'Héphestion narré par Benoist-Méchin : "...Après avoir chanté les déplorations finèbres, on procéda, face au soleil couchant, à l'apothéose du défunt. Trois mille hommes, postés au sommet des remparts, entrechoquèrent en cadence leurs boucliers d'airain, remplissant tout l'espace d'un grondement continu. La vibration sonore s'enfla, grandit encore et devint d'une intensité intolérable. On eût dit qu'elle accompagnait l'esprit d'Héphestion dans sa lente ascension vers le ciel. Puis, comme si l'âme du héros venait de rompre ses dernières attaches avec la terre, le fracas s'arrêta net, et le silence qui régna soudain parut encore plus écrasant que ce tonnerre.
Alors Alexandre s'avança vers un autel dressé au pied du catafalque. Il resta un long moment les mains levées, en un geste d'imploration. Puis il dédia les premières offrandes à son ami glorifié.
Dix mille bêtes furent sacrifiées à la mémoire du défunt et réparties entre les diverses formations de l'armée. celle-ci avait été invitée à prendre part, tout entière, au banquet funèbre. Des tréteaux avaient été dressés sur l'étroite bande de terre qui sépare le Tigre de l'Euphrate et qui avait servi de berceau à la civilisation. Là, trente mille soldats macédoniens et quarante mille cavaliers perses mangèrent et burent en silence, communiant par la pensée avec leur général disparu.
Et, jusqu'au lever du jour, les hautes flammes des torchères firent palpiter de leurs reflets les aigles aux ailes éployées qui semblaient vouloir s'élancer à la suite d'Héphestion, à travers le firmament étincelant de la Mésopotamie."
Oui, "les cœurs de ceux qui rsetent sont des tombes vibrantes".

Écrit par : Cougar | vendredi, 27 novembre 2015

Merci Cougar de ce bel extrait, qui me rappelle une vieille lecture qu'il faudrait reprendre.

Écrit par : AlmaSoror | samedi, 28 novembre 2015

Je me doutais bien que ce passage de JBM, qui m'a ouvert les portes d'Albin Michel, vous plairaient! Il y en a d'autres en réserve... Evidemment, lorsque je vois Maurras, Venner, que je relis Jean-Luc Daube sur les horreurs que le sapiens-sapiens (il faut répéter deux fois pour s'en persuader!) fait subir aux animaux et que je découvre une Croix des TOE sur la poitrine de E. de CL, je comprends mieux les sources de la quête permanente du Beau et du Vrai qui sous-tend ce blog, je comprends mieux sa rareté dans le Cloaca Maxima où nous baignons...

Écrit par : Cougar | samedi, 28 novembre 2015

Cougar ce commentaire généreux fait l'effet d'un grog, il inonde un dimanche blême d'une chaleur réconfortante.

Écrit par : AlmaSoror | dimanche, 29 novembre 2015

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