dimanche, 23 novembre 2008
Epiphanie d'Esther Mar
« Ce qui fait la noblesse d’une chose, c’est son éternité ».
Leonard de Vinci
Ma vie ne ressemble pas aux grandes affiches de publicité qui dominent la rue et le métropolitain.
Je ne croque pas la vie à pleines dents, ni ne consomme, ni ne suis consommée.
Je regarde les photos de ma prime jeunesse : un visage adulte regarde un visage nubile.
Je sais que je n’étais pas heureuse, pourtant je regrette cette jeunesse.
Chaque pas est un pas vers la mort. Chaque souffle, en créant la vie, appelle la mort.
Comment accepter cette inexorable fuite en avant du temps, qui marque ma personne physique et morale ?
I'm trying to tell you something about my life
Maybe give me insight between black and white
The best thing you've ever done for me
Is to help me take my life less seriously, it's only life after all
Choisir l’intemporel.
Puisque tout passe, puisque rien ne me remplit, puisque l’angoisse ne sera jamais vaincue que par la force intérieure, puisque l’amour est incertain comme le temps, puisque le temps change dans l’espace, puisque l’espace m’est inaccessible…
Puisque je vais mourir un jour, peut être sans douleur, peut être dans la souffrance, puisque je vieillis jour après jour malgré ma soif d’enfance, puisque je m’affaisse malgré mes faims vitales, puisque mon corps n’est qu’un corps, puisque dans la nuit, quelque fois, je ne crois plus à l’âme… Je choisis l’intemporel.
Well darkness has a hunger that's insatiable
And lightness has a call that's hard to hear
I wrap my fear around me like a blanket
I sailed my ship of safety till I sank it, I'm crawling on your shore.
Les commandements de la vie intemporelle
1 J’accepte que la nouvelle jeunesse me pousse de l’autre côté de l’âge et prenne ma place
2 Tous les jours j’accomplis des choses essentielles qui m’auraient paru autant essentiels si j’avais vécu dans un autre lieu il y a plusieurs siècles et qui me paraîtraient essentiels si je vivais dans un autre lieu dans plusieurs siècles
3 Chaque jour, je touche à la haute culture (par exemple, je lis le Voyage de Baudelaire, ou une tirade d’Andromaque, de Racine), à la nature (je m’occupe d’une plante, admire une étoile…), à l’animalité (j’offre à manger à une bête, j’observe fraternellement un animal…) et à la spiritualité (je prie ou je laisse mon cœur ouvert à tout ce qui le dépasse et qui lui survivra)…
4 Je sais que mon existence a autant de valeur que le plus riche et admiré des êtres de cette terre et que le plus misérable et laid des êtres de cette terre
5 Je ferme les yeux, souffle loin du monde immédiat et fais se rencontrer mon cœur, mon corps et mon esprit. Je les vide. Je laisse alors la vie les remplir ou ne pas les remplir.
6 Je pose un acte qui fasse que ma vie aura été quelque chose de bien pour quelqu’un. J’allume un ou plusieurs cœurs. Je m’oublie pour réchauffer la vie d’un autre. Un sourire ? Un regard ? Une gentillesse ? Quelque chose qui fasse que ma vie aura créé de bonnes sensations.
En suivant ces commandements je sais que je toucherai chaque jour à l’essentiel. Je ne laisserai pas trop de temps passer sur mon ego, ma vulgarité et mes petitesses.
I stopped by the bar at 3 a.m.
To seek solace in a bottle or possibly a friend
I woke up with a headache like my head against a board
Twice as cloudy as I'd been the night before
I went in seeking clarity.
L’intemporel seul est éternel. Les modes et les pensées passent. Que reste-t-il à travers les siècles ? L’intemporel. Alors pourquoi se noyer dans le temporel ?
- Parle-moi, Rainer Maria Rilke, comme tu parlais à Franz Kappus.
- L’avenir est fixe, cher monsieur Kappus, mais c’est nous qui nous déplaçons dans l’espace infini.
- Merci.
Je choisis l’intemporel. C’est ma façon de toucher l’éternité.
Et des extraits de Closer to Fine, une chanson des Indigo Girls
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