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Ecclesia
Dans l'étrange beauté de l'église Saint Jean Bosco (rue Alexandre Dumas, Paris XX), je me posais des questions banales en savourant l'instant présent. La lumière pénétrait par les vitraux et le silence peuplait les bancs déserts. J'avais laissé loin derrière moi le monde morne des pensées mentales et je me délectais du vide et du plein, surtout du vide. Je riais de toutes ces luttes féroces qu'on vit dans le travail, et je m'abandonnais à la plénitude distante de l'existence dédramatisée. J'avais connu cela déjà à Arles, sur un hamac ; je découvrais ce même bouquet de sensations et de saveurs dans une architecture ecclésiale bizarre et envoûtante. Mourir et vivre perdaient leur caractère grave ; il me semblait que ma mort et ma vie n'étaient qu'un détail sans importance de ce monde, un vague phénomène imperceptible aux autres, parfois glauque, parfois charmant. J'éprouvais ce sentiment double et mélangé d'exaltation palpitante et de profonde tranquillité. C'était la première fois que je connaissais un tel calme sans avoir bu de rhum Diplomatico du Venezuela.
mardi, 01 avril 2014 | Lien permanent | Commentaires (1)
Nocturne estival I : sous le royaume des étoiles
Siobhan H continue de nous envoyer ses instantanés de deltaplane. Je les reçois dans un style textoïsé : fautes d'orthographe, grammaire abrégée. Je fais des liens entre les mots pour qu'on comprenne et elle refuse brutalement de relire pour dire si mes retouches lui conviennent. Alors tant pis pour elle et à bientôt !
(Édith & AlmaSoror)
Je vous dis que c’était si beau que j’aurais voulu ne jamais redescendre. Mais la terre humide, comme si le soir aussi avait sa rosée, m’accueillit plus doucement que d’habitude, comme si elle avait compris que j’avais besoin d’amour et de tendresse encore plus que d’habitude.
Les lumières du club de deltaplane où j’atterrissais m’éblouirent. Après la ténèbre total du vol, entrecoupée d’étoiles, par cette nuit sans lune, ce fut un choc de retrouver les réverbères et le goudron. Alors tout me parut irréel. Seule la nuit noire, le ciel et le vol libre étaient vrais : la terre et sa vie grouillante, pour l’instant endormie, était devenue féérique et je me demandais si, le lendemain, tout redeviendrait comme avant.
Tout redevint comme avant : mais je suis désormais une chouette. J’attends la nuit pour voler, et je hulule en faisant des cercles dans l’air.
Siobhan
dimanche, 31 janvier 2010 | Lien permanent
L'Occident
... Et l'astre qui tombait de nuage en nuage,
Suspendait sur les flots son orbe sans rayon,
Puis plongeait la moitié de sa sanglante image,
Comme un navire en feu qui sombre à l'horizon ;
Et la moitié du ciel pâlissait, et la brise
Défaillait dans la voile, immobile et sans voix,
Et les ombres couraient, et sous leur teinte grise
Tout sur le ciel et l'eau s'effaçait à la fois ;
Et dans mon âme aussi pâlissant à mesure,
Tous les bruits d'ici-bas tombaient avec le jour,
Et quelque chose en moi, comme dans la nature,
Pleurait, priait, souffrait, bénissait tour à tour ! ...
Ô lumière ! où vas-tu ? Globe épuisé de flamme,
Nuages, aquilons, vagues, où courez-vous ?
Poussière, écume, nuit ; vous, mes yeux ; toi, mon âme,
Dites, si vous savez, où donc allons-nous tous ?
À toi, grand Tout, dont l'astre est la pâle étincelle,
En qui la nuit, le jour, l'esprit vont aboutir !
Flux et reflux divin de vie universelle,
Vaste océan de l'Etre où tout va s'engloutir !
Alphonse de Lamartine
dimanche, 15 novembre 2009 | Lien permanent | Commentaires (3)
5 à 7 début mars, par N Steene
« La pluie percussionne les toits, les trottoirs, les meubles urbains, une lumière d'orage descend sur la ville, en un instant la majorité des gens a disparu sous des auvents, dans des immeubles, et il ne reste que les chevaliers des tempêtes urbaines pour courir sous les gouttes froides. Je t'aime mais tu n'es plus là. Peu importe. La pluie lave tout, emporte tout, sous ses vibrations me voilà en apesanteur. Et j'écoute, j'écoute Chrysler, de Yellow, et j'écoute les Nuits fauves, de Fauve.
Se mêlent dans ma vie la nuit des sens et la musique du monde, la nuit du monde et la musique des sens. J'entends que peu à peu le soir tombe et abaisse ses barrières sur le flux des foules. J'attends en écoutant la pluie et leurs musiques, j'aspire à oublier ta voix, ton ombre, la charnelle présence qui était tienne, mienne, avant le fracas du téléphone. Tous les discours mourront dans le Poème. N'attachons plus d'importance aux idées, futiles comme un pot de nutella. Seul compte l'amour – de l'homme, de l'art, de l'eau.»
Nadège Steene
dimanche, 10 mars 2013 | Lien permanent
Je suis solitaire
Je suis solitaire, Toi seul es l'ami qui connais mon pas.
Mes yeux sont aveugles, Tu mets la lumière dans ma maison.
Nous sommes ton Peuple, pitié, nous crions vers toi !
Mon coeur n'est que cendres, Ton coeur est le feu du buisson ardent.
Mon corps n'est que lèpre, Tes mains sont la source qui me guérit.
Je vais dans le doute, Tu viens me rejoindre sur mes chemins.
Tu vois ma tristesse, L'Esprit me console en parlant de toi.
La nuit vient me prendre, ma nuit devient jour quand tu prends le pain.
La mort veut me perdre, Ta mort me fait vivre à ta vie de Dieu.
Je me souviens de la mélodie, lente, retenue, triste et belle de ce chant dont je ne trouve plus la trace.
jeudi, 14 février 2013 | Lien permanent | Commentaires (1)
Mélancolie
Instance au milieu d'une journée, quand le vent chasse les rayons pâles du soleil. Une fenêtre dans un quartier où les déménagements se succèdent. Un immeuble à moitié vide, dans lequel Dylan, âgé de sept ans et demi, joue du piano sans que personne l'écoute. Sa composition étonne un peu le chat qui crâne sur le radiateur.
Aux étages identiques, des silhouettes restent immobiles. Chacun espère une autre vie, ou une autre lumière sur celle-ci ; mais le temps présent se fait pesant pour les déçus des grandes rêveries. Ainsi s'accumulent mille souvenirs, mille images sans couleurs vives, dans les mémoires mortelles des solitudes qui passent ici.
On se croise quelque fois, on se croit les uns les autres et des enfants naissent à la veille d'une rupture mitigée. C'est la vie des temps modernes qui berce nos âmes mortes-nées. Dans la pièce où le linge sèche, au piano désaccordé, l'enfant joue sans public sa chanson désenchantée.
Edith de CL
mercredi, 08 mai 2013 | Lien permanent
Après la pluie le beau temps
Vivre et regarder vivre, ou bien s'asseoir à côté d'une fenêtre.
En quelques heures, la situation a entièrement changé ; l'inspiration n'est pas la même. La motivation morte est ressuscitée.
Climats de mon cœur, de quoi dépendez-vous ?
Vous dépendez peut-être d'un sourire reçu, d'une promesse tenue - mais surtout à soi-même. D'un reflet dans la vitre, d'un clafoutis aux pruneaux, d'une tendinite qui s'achève.
Vous dépendez sûrement des rêves des enfants que l'on fut, que l'on fera peut-être, peut-être pas.
En quelques heures, le mal de vivre est résolu, par le miracle de la lumière. Pourtant, parfois, blessée par le soleil, c'est la pluie qui m'a ramassée à la petite cuillère.
mercredi, 30 septembre 2015 | Lien permanent | Commentaires (2)
Un abécédaire
Air, celui qu'on respire et celui qu'on sifflote.
Bien-être au quotidien, au moins la plupart du temps.
Calme du cœur, cœur à l'ouvrage.
Dormir quand j'en ai envie.
Élire ceux que je côtoie
Faire la cuisine
Garder les brebis de mon âme
Holistique ma vision du monde
Immensité des étendues naturelles et culturelles
Jouer avec les chiens
Kiko, mon premier bébé
Lumière par la fenêtre, sur la table, sur ta peau
Marées de l'espérance et de l'attente
Naître à chaque étonnement
Ordinateur, compagnon de création et de pensée
Prières le long du jour
Qualité de vie, présence au monde
Rester l'enfant fragile, têtu et tendre (ou bien le devenir)
Saluer ceux qui partent
Tendre le visage vers d'autres êtres
Unir les forces contraires dans un but magnifique
Vent, tu m'enivres
Wagon-restaurant avec vue sur la campagne à perte de vue
Xénon aux lueurs bleues dans mes rêves d'insomniaque
Yi King, grand explicateur des mutations
Zénon, pour la mathématique et les paradoxes qui traversent le temps
mercredi, 23 septembre 2015 | Lien permanent
La vie est un jour
Certains tronçons de rue, certains bouts de quartier ressemblent aux villes d'hier, celles que les vieux de ma jeunesse ne reconnaissaient plus. J'y bois la nostalgie des jours de malheur qui m'apparaissent, rétrospectivement, comme des aires de la jeunesse où le souffle et l'énergie coulaient entre mes doigts et dans mes cheveux.
Certains paysages se fichent des modes humaines et semblent ne changer jamais. Indifférents à tout ce qui croit sentir, à tout ce qui croit penser, à tout ce qui existe égotiquement, ils offrent leur splendeur sans se soucier des jugements d'admiration ou de mépris. Les vagues viennent de loin.
Avant minuit, les lumières électriques des ruelles éclairent encore les patios. Il est l'heure d'oublier les conflits de plomberie, d'administration, de politique et de travail pour se ressouvenir que vivre et mourir sont une seule et même action, un cocktail à la recette délicieuse et pernicieuse qu'il faut savourer sans se laisser distraire par le néant des occupations.
mercredi, 15 avril 2015 | Lien permanent
Ciudad
« Où se trouve le bonheur intime, la joie d'exister ? » se demandait Sénélé en sortant du laboratoire de biologie des ondes où le professeur aux yeux pairs (l'un bleu, l'autre vert) l'avait diagnostiquée électrosensible. Sur les parois de son ventre arrondi par la présence de trois nourrissons en gestation, des microchimères créaient des démangeaisons. La ville de Barlingot-Point diffusait à cette heure matinale la musique d'Orestia II, d'Aurel Stroë ; on était lundi. Les organistes des lumières étaient en grève depuis dix-sept jours ; ce soir encore, il serait tout à fait inintéressant de sortir se promener. Une brume chargée de pluie lui faisait pousser de petits rires inoffensifs et frais. À l'autre bout de la ville, des hommes en lutte, masqués et gantés, complotaient en vue de la renaissance du métier d'éboueurs des déchets invisibles, malgré la dernière révision de la loi. Aussi incongru que cela puisse paraître, j'étais assise sur le rebord d'une fenêtre en haut d'une tour et je rêvais à la possibilité d'aimer un être en fumant une ou deux idées d'une autre ère.
mercredi, 06 août 2014 | Lien permanent | Commentaires (2)