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samedi, 09 mars 2019

Silences d'une âme

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Je recherche l'épanouissement. Malgré ma souffrance, mon amertume, mon désespoir, ma jalousie, mon incompréhension, je suis contente. J'ai l'impression d'une injustice, quand la haine reçoit le bien et que l'amour est puni ; la dureté de coeur est récompensée par la tendresse, et l'abnégation par la solitude. L'égoisme est rétribué en argent, le partage en mépris.

Mais ce n'est peut-être qu'une apparence.

كاين اللي يبكي على زهره

كاين اللي هيبكي فوق قبره

كاين اللي شاخ في صغره

كرهنا م هاد الحيات

كاين اللي يبكي على زهره

كاين اللي هيبكي فوق قبره

كاين اللي شاخ في صغره

تلفونا الوقات

Souad Massi dans la cuisine, le soir... Après minuit. Une nouvelle information en tête, un sourire triste, des larmes qui ne jaillissent pas, un soulagement, une joie et un approfondissement du désespoir. C'est cette chanson, cette voix qui m'accompagne. L'homme qui succombe dans un asile et dont je reprends l'oeuvre, encore un enfant à naître, cette femme que j'aime et que je fais souffrir quand j'ai mal. Le cadeau de l'inconnu me soulage, signe du bienfait profond d'une ville où la violence s'efface dans la musique et le vin.

Malgré toutes les ambivalences, la gratitude l'emporte. Sans doute parce que j'ai beaucoup prié. Je remercie sainte Thérèse de Lisieux, tout particulièrement, mais aussi Marie, son Fils, Dieu... et je sais que sainte Anne travaille.

J'aime cet appartement perché, tout à l'Est de la ville. Les plantes à l'intérieur, les tours par la fenêtre, le ciel qui change l'atmosphère de mon coeur, comme un marionnettiste. Mettre un enfant au monde, c'est lui promettre tant de souffrances ! Mais une fois qu'il est là, son regard unique enrichit le monde. Car je crois à l'âme de chacun.

Chaque homme est une personne, chaque bête aussi. L'homme et la bête se ressemblent comme deux gouttes d'eau. Et dans la nuit de ce vingtième arrondissement, je ne peux pas dormir. La nausée est passée, il demeure l'attente. attendre quoi ?
Attendre pour le plaisir d'attendre, ce léger enivrement, cette quiétude trouble. Qu'il existe ou qu'il n'existe pas, Dieu m'a sauvée. Lui seule pouvait le faire.

samedi, 16 juillet 2016

Amer savoir, celui qu'on tire du palais !

 (Tout ici-bas est initiatique)

Il y a quelques semaines, dans mon cher Carrefour Market du boulevard Castelnau des Sables d'Olonne où les produits locaux côtoient les journaux ni subventionnés ni côtés en bourse de l'extrême-gauche fidèle à elle-même, j'ai hésité de longues minutes devant le vaste rayon de bières et j'ai fini par choisir une bouteille que je ne nommerai point, que je goûtai le soir même et qui me laissa un goût amer inconnu dans la bouche. Je ne sais même pas si, buveuse invétérée que je suis, j'ai terminé la bouteille, méfiante, bien que séduite, ignorant si j'aimais ou n'aimais pas, croyant m'être trompée dans mon choix. Il se peut que j'aie jeté le quart restant du liquide dans l'évier, me disant que cela ferait du bien au tuyau (on le dit bien du marc de café). Comme la bouteille était belle, je l'ai gardée, qui me sert de carafe (d'eau) aujourd'hui.

Tout à l'heure, l'intérêt à nouveau suscité par ma jolie carafe au nom de bière, j'ai tenté de rechercher sur Internet quelle était cette bière, choisie avec tant de soin dans ce rayon d'un supermarché vendéen, bue avec tant d'appréhension voire de rejet. Eh bien, de l'avis des spécialistes, c'est un excellent produit, artisanal, amoureusement préparé, à l'occasion de l'anniversaire de création de la brasserie française dont elle provient, une entreprise de brasseurs éclairés, connaisseurs de leur métier, qui furent pionniers en agriculture biologique, qui cultivent eux-mêmes leur houblon, au lieu de l'importer comme l'écrasante majorité des brasseurs. Il a fallu me rendre à l'évidence. Quel que serait mon appréciation réelle de cette fameuse bière si j'étais connoisseuse, il reste évident que l'aspect « bizarre et inquiétant » de son goût ne m'est apparu que parce que mon palais biéral est phagocyté par le « goût industriel », celui là qui m'avait tant marqué à propos d'un « milk-shake » non loin du Panthéon, à Paris. Moi qui ai « découvert » le vin (que je buvais sans le connaître) à trente ans passés, à quoi cela m'a-t-il servi, scrogneugneu ? À trouver bizarre un goût artisanal que je n'ai pas appris à (re)connaître. Un peu comme un pompier qui regarderait une émission de télévision sur les pompiers et s'étranglerait devant les raccourcis et affabulations journalistiques, mais qui, la semaine suivante, avalerait un documentaire sur la Serbie sans aucun esprit critique.

Lorsqu'on se passionne pour un sujet – les langues, le vin, la poésie hongroise, le meuble artisanal, le manga, le chant grégorien, que sais-je d'autre -, le risque est, en même temps que l'on se perfectionne, de devenir une sorte de petit dictateur du goût, méprisant d'emblée ce que les non-initiés ont tendance à aimer, choisissant telle ou telle coterie de la « profession » et se ralliant à ses opinions en se croyant très indépendant. Cet orgueil du faux connaisseur, du demi connaisseur, cet orgueil qui ne pourrait jamais survivre à une vraie intelligence, à un vrai approfondissement, je l'ai connu une fois, au cours de mes études, et je me suis trouvée insupportable. Il n'était pas question de retomber dans le panneau avec le vin : avant même ma première dégustation, la vie m'avait déjà appris à mettre de l'eau dans les vins les plus sophistiqués. À présent que, grâce à cette bière, je suis ravalée au dessous du niveau de la mer de l'humilité, je me propose avec une certaine joie de faire le voyage qui me mènera à la science intérieure de la bière, celle qu'on ne peut atteindre ni en enfilant les bières grand public, ni en lisant les blogs de spécialistes, mais en buvant, à l'écart des condescendances, des bières choisies par intuition, et en tentant de me demander pourquoi je les aime et comment mon goût évolue, sans former de discours intellectuel sur la question. Je participe ainsi à ma mise en bière, mais c'est le cercueil de mon inconscience que je descendrai dans les terres fertiles et humides pour que prospère le houblon.

 

dimanche, 06 mars 2011

L'art de boire les vins

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Extrait d'une brochure intitulée Nos grands vins de Bordeaux, publiée Féret & Fils, Editeurs à la fin des années (19)40.

 

"Savoir boire le vin n'est donné qu'à un gourmet exercé ; savoir le faire boire à ses convives n'appartient qu'à un maître de maison doué d'un tact exquis et d'un goût éclairé.

Un tableau de maître a besoin d'une lumière et d'un entourage favorables pour faire apprécier le talent du peintre ; aucune femme, malgré sa beauté souveraine, n'ignore et ne dédaigne l'art de rehausser ses charmes par un accord harmonieux ou par un contraste savant. Il est, de même, une science et un art de boire les grands vins. Il faut d'abord connaître les caractères qui distinguent chacun des vins que l'on veut servir à ses convives. Il est nécessaire de savoir les offrir avec les mets qui seront de nature à les faire apprécier et d'observer la famme, savamment graduée, qui permettra de faire ressotir tous leurs mérites. Ils gagnent à être servis dans de grands verres en cristal fin.

Après avoir étudié le menu, on décidera quels sont les vins qu'on doit offrir et dans quel ordre ils seront dégustés. Les bouteilles choisies seront prises dans le caveau, apportées avec précaution dans l'office, dans la position verticale, après les avoir relevées délicatement et fait une marque pour savoir où se trouve le dépôt de lie. De cette façon, on évite un va-et-vient qui ne saurait manquer de se produire et troublerait le vin. En le versant soigneusement et dans la même position qu'elle avait dans le caveau, la très vieille bouteille ne sera décantée qu'au moment où elle devra être bue, pour conserver l'arôme et le bouquet du vin. Un vin dans la plénitude de ses qualités doit être décanté quelques heures avant d'être bu.

Le vin rouge doit être chambré, c'est-à-dire porté à graduellement à la température de la salle à manger.

Le flacon qui doit recevoir le vin doit être, en hiver, attiédi légèrement, mais il ne faut pas chauffer le vin. Quand on n'aura pas eu le temps de laisser prendre au vin rouge la température de l'appartement, on pourra y remédier en plongeant dans l'eau chaude les carafes qui serviront à décanter le vin.

Aucun des instruments inventés pour décanter le vin ne vaut la précaution de ne pas déplacr le dépôt et la sûreté de la main.

Dans quel ordre les vins seront-ils servis ?

La règle à observer pour la concordance des vins avec les mets est celle-ci : avec les poissons, les vins blancs ; avec les viandes, les vins rouges généreux ; à la fin du repas, les vins rouges les plus vieux ; au dessert, les vins blancs liquoreux et mousseux.

Les vins blancs seront d'autant plus fortement frappés qu'ils seront plus liquoreux.

Pour la dégustation des vins blancs liquoreux, tels que ceux de Sauternes, il y a parmi les gourmets deux écoles : l'une qui les préfère au dessert, l'autre, au commencement du repas, avec le poisson.

La règle pour la graduation des vins rouges est de commencer par les plus jeunes et les moins célèbres.

Voyons comment ces règles sont observées par les gourmets.

Quelques cuillerées de potage ont, par leur douce chaleur, préparé le palais et l'estomac à remplir leurs utiles et agréables fonctions. Avec les huitres, que suivent le saumon ou le turbot, apparaissent les grands vins blancs de Bordeaux, secs, demi-secs ou liquoreux ; mais, à notre avis, les vins blancs trop liquoreux au début d'un repas empêchent de bien goûter les bons vins rouges qui suivent. Dès que le poisson est enlevé, le sommelier cesse de verser les vins blancs.

Quand le chef sert les viandes, on offre les grands ordinaires et les bourgeois du Médoc, pleins de moelleux et de corps, à la robe purpurine, au bouquet parfumé. C'est avec les grosses viandes, le boeuf roti, le sanglier, le chevreuil, qu'on servira les excellents vins corsés et capiteux, premiers crus de Saint-Emilion ou de Pomerol.

Quand, vers le milieu du repas, les convives sont arrivés peu à peu à cet état de satisfaction où l'estomac, docile encore, ne manifeste plus d'impétueuses exigences ; où le goût, préparé par une savante graduation de sensations, est susceptible des impressions les plus délicates, les grands vins rouges du Médoc font leur entrée triomphale et le sommelier annonce avec orgueil des noms et des dates illustres.

Après ces vins, on peut encore savourer les Sauternes liquoreux et vider quelques coupes écumantes de Champagne".