samedi, 13 janvier 2018
Esthétique inaccessible
Parmi les éléments essentiels de l'écriture (d'un billet de blog, d'un roman, d'un article de réflexion), viennent avant tout la beauté et la pérennité. La beauté, parce que l'esthétique est un des fondements de l'éthique. La pérennité, parce que la force d'un texte provient de ce qu'il peut conserver sa beauté, son pouvoir d'attraction et d'inspiration, son intérêt intellectuel, des décennies et même des siècles après avoir été écrit.
Que nécessite alors un texte pour être beau et durable ? Pour être beau, il faut que les phrases ne soit seulement fonctionnelles, mais qu'elles marient le style et le fond de façon harmonieuse et inventive. La durabilité s'obtient en s'élevant au-dessus des modes de langage, au-dessus des pensées à la mode, en se délivrant des détails dus à l'époque pour toucher aux aspects universels du sujet. Il faut faire attention aux ellipses : souvent, l'on considère comme évident ou connu du lecteur, des éléments qui ne sont connus qu'à nos contemporains. Un texte trop elliptique, ou un texte bardé de références à des choses de l'éphémère présent, ne gardera pas la même force aux yeux des générations de l'avenir, parce qu'elles ne pourront deviner ce qu'évoquent les allusions. Les plus motivés devront se renseigner énormément pour recomposer le contexte dans lequel fut écrit le texte, tandis que le grand nombre des démotivés laissera tomber.
Tout a-t-il déjà été écrit ? Relire les Anciens, c'est se rendre compte qu'ils avaient tout pensé, malgré l'ignorance dans laquelle ils étaient de l'évolution du monde après leur disparition. Qu'écrire, après Aristote, Epictète, les évangélistes, Sénèque et Sophocle, Virgile ?
Kevin Mozloviet
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jeudi, 17 janvier 2013
Qu'est-ce que le polar ? - Paralittératures
Photos de H.L.
Né à l'aube du XX°siècle, le polar a connu un grand essor depuis.
Un jour, nous étudierons la définition de polar, ou roman noir ; ainsi que l'expression "paralittérature".
Nous parlerons de Paul d'Ivoi, à cheval entre le roman d'aventure et le roman policier ; Gaston Leroux, précurseur à la fois du roman policier français et du roman d'horreur et de fantastique ; Maurice Leblanc et son frère-ennemi, sa créature Arsène Lupin.
Nous mentionnerons l'existence de la collection, chez Gallimard, de la Série noire, pour s'introduire dans les arcanes de la collection enfantine de mini-polars Souris noire.
Un soir, nous relirons ensemble plusieurs albums illustrés directement inspirés du polar : La reine des fourmis a disparu, de Roca et Bernard ;
La série des Chatterton, d'Yvan Pommaux ;
Et le scandaleux Petit chaperon rouge, de Sarah Moon.
Qu'est-ce que le polar ?
Le mot polar correspond au mot anglais "thriller".
Avant "thriller", on disait, en anglais, "detective novel".
Pour traduire "detective novel" en français, les Français ont d'abord hésité entre "roman policier" et "roman judiciaire". Selon le Dictionnaire historique de la langue française, l'expression "roman policier" date de 1908.
Peu à peu, "roman policier" s'est imposé, on a cessé de dire "roman judiciaire".
Et puis, pour parler plus vite, on dit, "un policier" pour désigner un roman policier.
Enfin, de façon argotique, "policier" est devenu "polar".
Selon le Dictionnaire historique de la langue française, le mot "polar" date de 1970.
ROMAN NOIR
Une autre expression est employée en français pour parler du polar, c'est le "roman noir". Noir, parce que l'univers de cette littérature est sombre. Les événements s'y déroulent souvent la nuit, dans les quartiers laissés à l'abandon, dans des zones oubliées par la société. Ce qui est blanc est assimilé à la lumière, ce qui est noir à la nuit. De plus, à l'instar du polar américain, le polar a souvent une connotation sociale : on y dévoile les aspects les moins reluisants de la société, on y dénonce la corruption.
Le monde du polar est le monde du sombre, du caché, du ténébreux, l'inframonde, celui que les "gens normaux" ne voient pas ou ne veulent pas voir.
ESTHETIQUE
Enfin, sur le plan éditorial, le polar est lié à une certaine esthérique, noire et blanche avec un peu de rouge, pour le sang. L'identité visuelle du polar est présente dès la couverture du roman. Souvent, les auteurs jouent avec cette identité, s'habillant en noir, ayant des airs de personnages de leurs romans.
FESTIVAL
Il existe plusieurs Salon du polar en France. Le plus connu est celui qui a lieu dans la ville de Cognac, en Charente.
La ville de Cognac :
La boisson "Cognac" :
Paralittératures
Qu'est-ce que la paralittérature ?
Le mot désigne les littératures populaires, celles qui ne sont pas considérées par les "élites" comme de la vraie littérature.
Un prestige est attaché à la littérature. Aussi, tout ce qui est écriture mais n'accède pas à ce prestige est taxé de paralittérature.
Ce mot a été inventé pour désigner le roman populaire, celui qui connait des tirages de masses, un grand succès populaire, écrit par des auteurs dénués d'élitisme.
Exemples au XIX°siècle : Alexandre Dumas, Eugène Sue. Eux, ont fini par être reconnus comme des écrivains à part entière.
Exemples de paralittératures :
Littérature pour les enfants
Roman noir (ou polar)
Science-fiction
Fantastique (fantasy)
Littérature érotique
Roman photo
Bande dessinée
Roman historique
Bien que la poésie ne soit pas vraiment de la littérature, on ne la classe pas dans les "paralittératures", car elle a un grand prestige.
ROMANS DE GARE
Pour cette littérature dite facile (facile à lire, soi-disant facile à faire !), on emploie aussi l'expression "romans de gare" : les romans qu'on achète dans une gare pour se distraire lors d'un voyage en train.
Faciles à lire, ce sont, soit des romans policiers, soit des histoires d'amour à l'eau de rose (sirupeuses).
Exemple : Les écrivains Guy des Cars et Jean des Cars, auteurs très populaires, méprisés par les élites, étaient souvent appelés par les critiques "Guy des Gares" et Jean des Gares, pour souligner qu'ils ne faisaient pas de la vraie littérature, mais des romans de gare.
Le cinéaste Claude Lelouch a tourné un film intitulé Roman de gare... Qui raconte l'histoire d'une écrivain de romans policiers.
En bref, le mot paralittérature a d'abord servi pour décrire tout ce qui, dans le domaine littéraire, recevait le mépris des universitaires.
Puis, peu à peu, un intérêt s'est accru pour les littératures populaires. Alors le mot paralittérature a pris le sens de "littératures marginales".
Mais, bientôt, avec Internet, l'affluence des oeuvres multimédia, il y aura certainement moins besoin de séparer radicalement la "littérature noble et pure" des autres littératures.
Alors, comment fera-t-on pour établir une différence entre l'art des élites, respectable, et l'art des masses, pitoyable ? Bah, on inventera autre chose !
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mercredi, 09 décembre 2009
Quelle musique écouter dans sa salle de bains ?
...Mais les vrais voyageurs sont ceux-là seuls qui partent
Pour partir ; coeurs légers, semblables aux ballons,
De leur fatalité jamais ils ne s'écartent,
Et sans savoir pourquoi, disent toujours : Allons !
Ceux-là, dont les désirs ont la forme des nues,
Et qui rêvent, ainsi qu'un conscrit le canon,
De vastes voluptés, changeantes, inconnues,
Et dont l'esprit humain n'a jamais su le nom !...
Charles Baudelaire
Par H.L
Si elle est bleue, pleine de lumière et si quelque chose de l’absence intérieure flotte dans l’espace vide qui entoure les murs, il faut écouter Alone in the bathtub, de Nils Petter Molvaer. Le bain fait des bulles, la musique aussi. Bientôt, une vision émerge : des poissons de toutes les couleurs dansent une chorégraphie dans l’air tiède.
A la musique et au film des poissons, se mêlent des souvenirs d’une enfance qui revient en bribes nouvelles : sans queue ni tête, sans mots ni sens, des émotions et des sensations ressenties au cours des après-midi languissantes d’enfance reviennent émaner leur senteur. Le bain se prolonge bien après les huit minutes trente trois secondes de musique. Une complicité s’est créée entre tous mes êtres : l’enfant, le grand, le méchant et le gentil sont si contents d’avoir contemplé ensemble la danse des poissons !
Vous savez, l’esthétique de nos vies marque nos corps, nos mouvements, nos sentiments même si nous n’en parlons jamais. Persiennes anciennes ou volets coulissants dans un métal moderne, rues vieillottes ou allées magistrales bordées de hautes tours, arbres sauvages de la nature encor vierge ou hêtres bien rangées comme des écoliers sages, marrons et allumettes pour faire des vaches au fond d’un fouillis de jardin ou cannettes de bière dans le terrain vague mangé par le périphérique, vieilles dames maquillées susurrant autour de leurs tasses de thé ou vieux gars du comptoir aux bons rires et aux bonnes torgnoles, brasseries beaufardes qui se veulent chic ou troquet pouraves des bouts des villes, plages qui s’étendent à l’infini au bord du grand bleu et aires aménagées par les conseillers municipaux, construisent nos cerveaux de symboles et d’images qui nous façonnent et que la nouveauté égare.
L’esthétique de nos vies marque nos corps, nos mouvements, nos sentiments même si nous n’en parlons jamais. Quelques lectures, cependant, ouvrent des portes. Nous pouvons ainsi fuir le monde qui nous est à la fois offert et imposé. Nous pouvons partir sur le grand bateau de la littérature et faire le tour du monde. Les aéroports sont pour les faux voyageurs, ceux qui paient, ceux qui montrent leurs papiers aux surveilleurs des comptoirs de contrôle. Les vrais voyageurs ne paient pas. Ils refusent tout contrôle. Ils s’embarquent, quelque fois sans le dire à personne. Et les marques du voyage sont invisibles sur leur peau. Elles n’émergent qu’au milieu des caresses profondent. Là, elles trahissent un naufrage passé, une île secrète, une attente des sirènes du lendemain.
H.L.
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