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dimanche, 25 février 2018

Quelques févriers d'AlmaSoror

2017

Je m'asphyxie avec de la poudre anesthésiante. Des sons dans mon oreille ressemblent à des cloaques.

Comme un dimanche

2016

Aux lupercales un centaure a fécondé les troupeaux de ratons laveurs.

Extrait d'un rêve

2015

Mes paupières, oui.

Paupières

2014

Comme me le fait remarquer un ennemi qui m'est sympathique, le mariage a été vidé en plusieurs temps ; au moment de son ouverture aux couples homosexuels (2013), il n'était déjà plus qu'un flonflon, une épée fleurie honorifique et n'engageant à rien.

Pink n'est pas punk

2013

Mais toi, État américain, tu aurais dû imposer, par une loi, que les familles restent dans ces maisons qu'on n'aurait jamais dû leur vendre puisqu'elles n'avaient pas les moyens de les payer. Au lieu de cela tu as aidé les banques et tu as laissé les familles partir sur les routes et tomber dans la misère. Tu es l'un des pays les plus riches du monde et tu es l'un des plus cruels, comme ton épouse ignare et indigne, l'Arabie Saoudite.

Dernier voyage en Amérique

2012

Pleurez aujourd'hui puisque personne n'a pleuré quand le dernier berger a été emmené à la maison de retraite, quand la dernière brodeuse a dû quitter le village mort.

Ô France, comme il est violent de t'aimer !

Hameaux-tombeaux, quelles tristesses ont clos tes derniers yeux-fenêtres ?

2011

L'aristocratie de l'Ancien Régime et le soviétisme ont mieux réussi à soutenir un art somptueux, parce que les artistes ne faisaient pas partie de la classe mécène.

Vanité des arts, vides esthétiques, vacuité des audiences

2010

Puiqu'il y a blasphème lorsqu'on remet en question une certaine idée de l'homme, de l'humanité, cet humanisme ne peut pas être considéré comme une pensée athée, bien qu'elle ne croit pas en Dieu. Car l'athéisme ne reconnait pas de blasphème.

La nouvelle religion

2009

Les Carthaginois ne touchent pas à l'or, tant qu'il ne leur paraît pas payer leurs marchandises, et les Indigènes ne touchent pas aux marchandises avant que les Carthaginois n'aient pris l'or.

Le trafic à la muette

jeudi, 03 septembre 2015

Marketingue

 

Tu t'es baigné dans l'océan au soleil couchant ce soir, mais tu n'as pas de compte facebook pour le partager avec tes centaines d'amis.

Personne ne te regardait. Personne ne sait que tu as connu des sensations merveilleuses quand ton corps est entré dans l'eau. Si tu te pinces pour savoir que tu existes, tu ressens une légère douleur au bras, preuve que tu existes en effet au moins un petit peu. Tu détiens une carte d'identité qui prouve que l’État, possesseur et dominateur de tout ce qui bouge, reconnaît ton existence : tu existes encore un peu plus. Mais tant que tu n'auras pas marketé ton bain dans l'océan, et le porto qui l'a suivi et les conversations sympathiques qui ont accompagné le porto avec ces trois hommes appuyés sur leurs planches de surf, ton expérience n'aura aucune retombée sociale positive pour toi.

Pourquoi ne markètes-tu pas ta vie, d'une manière fine et intelligente, sans en avoir l'air, dans ta conversation au jour le jour et sur tes réseaux sociaux ? Par une sorte d'abstinence ? Parce que tu crois que tu abaisserais ton âme à faire semblant de ne pas faire exprès de faire souffrir les autres ? Faire souffrir en étalant ton entourage chaleureux, tes mignons enfants, tes connaissances culturelles et scientifiques, ta pensée radicalement engagée au service des causes justes, ton art de vivre de multiples bons moments dans la vie quotidienne, ta capacité à mener des projets au long cours, ton sens de l'humour, ton sens du partage, ton originalité exceptionnelle bien sûr mais aussi ta fabuleuse capacité à cocher toutes les cases de la réussite sociale, et enfin, ce détachement qui te caractérise et qui te rend capable de communiquer aussi avec le clochard ou l'ermite.
Pourquoi cette abstinence, as-tu peur qu'à force d'interpréter ta vie en public, cette interprétation à son tour influerait ta personne, et te ferait dériver, t’éloignant de toi-même sans que tu en prennes pleinement conscience ?

Le marketingue a envahi presque toutes les parcelles de notre monde mental partagé.

Il ne s'agit pas tant de créer la haine que de susciter l'envie, non cette envie qui galvanise, mais ce désir déjà perdant d'être l'autre, comme l'autre, d'avoir ce qu'a l'autre, de monter à sa hauteur ontologique.

Peut-on faire naître l'amour et l'admiration sans attiser l'envie maladive, peut-on aviver chez l'autre la confiance, le contentement d'être soi, ici et maintenant, tel qu'on est et avec ce qu'on a ? Peut-on provoquer chez autrui, par un acte, par un mode de vie, la paix avec la vie accomplie et envers celle à venir ?

Oui, peut-être, mais en dehors de tout discours sur soi.

Ne marketer ni son bonheur, ni son courage, ni sa peine.

De ce que je lis, partout et tout le temps, tous les discours sont faux. Les discours estampillés authentiques sont de l'authenticité marketée. Voici un homme qui markète son expérience d'isolement dans une plaine perdue de Sibérie. Voici un autre qui markète son cheminement auprès des grands maîtres bouddhistes. Voici encore un autre qui markète le fait d'avoir plaqué son placide et monotone boulot dans un bureau pour courir les hautes montagnes. Voici encore cette dame qui markète sa formidable résilience après avoir découvert la maladie grave de son petit. Tous discourent sur le sens de l'humilité, la quête de l'absolu, la prise de liberté par rapport aux carcans de la vie dans un pays trop calibré, la souffrance intime et son dépassement. Leurs phrases dites et écrites, émoustillent les sponsors, galvanisent les personnes assoiffées de sens, et voilà qu'on murmure leurs noms dans des cercles de plus en plus larges : c'est la reconnaissance des autres qui commence.

Drogue dont on sort très difficilement : l'addiction à la reconnaissance des autres. La souffrance sociale, on peut le mesurer avec des observations cérébrales, active les mêmes zones que la souffrance physique. Il est tentant d'en conclure que la jouissance sociale procure un vrai plaisir au corps. (Du reste, où-peut on éprouver du plaisir ailleurs qu'en notre corps ? Penser, ressentir, sont des activités que l'on ne ferait pas sans corps).

 

A lire (en anglais) sur The Edge : SOCIAL PAIN

 

mercredi, 11 juin 2014

Substance : solitude

De retour d'un grand et beau festival, je rentre dans ma chambre comme on retrouve sa cellule. Pas une cellule de prison ; celle d'un moine ou d'une moniale. Celle qui a été créée, non pas pour punir l'homme en le coupant du monde, mais pour délivrer l'âme en la retirant à l'écart du monde.

Les bruits, les paroles et les mouvements incessants se dissipent et s'échappent dans le passé ; l'instant présent redevient pur bruissement des secondes qui s'écoulent mystérieusement.

Mon souffle réapprend la lenteur et le calme. Mes gestes se font plus rares. Je reconnais la douceur étonnante du silence. Mon coeur cesse de commenter ; mon esprit cesse de réagir.

La sensation de perpétuelle urgence, qui primait lors de ces jours animés, éclate comme une bulle. L'urgence me paraît une folie incompréhensible, aujourd'hui que je suis de retour dans ma cellule.

Le point de rencontre entre moi et moi, celui où je suis Une et Réunie, correspond au point exact où j'épouse parfaitement l'instant qui vient. Cette présence intacte dans l'existence brute, née d'une solitude qui ressemble à une extase de calme.

La solitude est une sorte de drogue. J'essaie de retrouver la sensation d'être seule en présence de moi-même, comme on cherche une sensation psychotrope.

Je suis accroc à cette solitude-là.

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(à lire sur AlmaSoror :

Souffle et drogues autogénérés : le psychédélisme au naturel

Âmes-soeurs et corps-frères

Dans la chambre à côté

Karamazov Archivage IV : Par des matins brisés)