lundi, 15 juillet 2013
15 juillet : billet anniversaire
AlmaSoror, que faisiez-vous le 15 juillet de l'an dernier ?
Je m'interrogeais avec Jean-Luc Daub sur ce qu'on appelle étonnamment "le bien-être des porcs".
Le 15 juillet 2010, Edith tentait une autobiographie, qu'elle a reniée depuis.
Le 15 juillet 2009, on trouve d'obscurs questionnement sur des cabanes et des forêts, que nous ne comprenons plus très bien.
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lundi, 03 décembre 2012
Gesril
Un souvenir d'enfance de Chateaubriand, qui parle de Gesril.
Gesril, meilleur ami de l'écrivain et compagnon des jeux et des bêtises de son enfance, sera fusillé à la Révolution. La France est la gouvernante des enfants Chateaubriand.
"J"allais avec Gesril à Saint-Servan, faubourg séparé de Saint-Malo par le port marchand. Pour y arriver à basse mer, on franchit des courants d'eau sur des ponts étroits de pierres plates, que recouvre la marée montante. Les domestiques qui nous accompagnaient, étaient restés assez loin derrière nous. Nous apercevons à l'extrémité d'un de ces ponts deux mousses qui venaient à notre rencontre ; Gesril me dit : "Laisserons-nous passer ces gueux-là ," et aussitôt il leur crie : A l'eau, canards !". Ceux-ci, en qualité de mousses, n'entendant pas raillerie, avancent ; Gesril recule ; nous nous plaçons au bout du pont, et saisissant des galets, nous les jetons à la tête des mousses. Ils fondent sur nous, nous obligent à lâcher pied, s'arment eux-mêmes de cailloux, et nous mènent battant jusqu'à notre corps de réserve, c'est-à-dire jusqu'à nos domestiques. Je ne fus pas comme Horatius frappé à l’œil : une pierre m'atteignit si durement que mon oreille gauche, à moitié détachée, tombait sur mon épaule.
Je ne pensai point à mon mal, mais à mon retour. Quand mon ami rapportait de ses courses un oeil poché, un habit déchiré, il était plaint, caressé, choyé, rhabillé : en pareil cas, j'étais mis en pénitence. Le coup que j'avais reçu était dangereux, mais jamais La France ne put me persuader de rentrer, tant j'étais effrayé. Je m'allais cacher au second étage de la maison, chez Gesril qui m'entortilla la tête d'une serviette. Cette serviette le mit en train : elle lui représenta une mitre ; il me transforma en évêque, et me fit chanter la grand'messe avec lui et ses sœurs jusqu'à l'heure du souper. Le pontife fut alors obligé de descendre : le cœur me battait. Surpris de ma figure débiffée et barbouillée de sang, mon père ne dit pas un mot ; ma mère poussa un cri ; La France conta mon cas piteux, en m'excusant ; je n'en fus pas moins rabroué. On pansa mon oreille, et monsieur et madame de Chateaubriand résolurent de me séparer de Gesril le plus tôt possible."
Mémoires d'Outre-tombe - François-René de Chateaubriand
(Photo : au large des Sables d'Olonne, par Mavra V-N)
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jeudi, 15 juillet 2010
autobiographie (tentative sérieuse)
Giordano Bruno
(un billet d'Edith)
Katharina F-B a écrit un jour mon hagiographie psychédélique et jamais je ne la remercierai assez.
Cependant, dans les mondes professionnel et social, on me demande parfois une biographie ancrée dans un réel plus abordable que celle de Katharina. J’ai donc composé mon autobiographie. Pour les années passées, cela vous donnera une idée. Toutefois, pour une autre interprétation du passé et une vision d’ensemble des années futures, je vous renvoie à la synthèse de KFB.
(NB du 14 juillet MMX : mon premier lecteur m'annonce que cette autobio accentue l'inclarté au lieu de la dissoudre. Tant pis).
Naissance et premières années
Je naquis à sept heures et quelques du soir. La clinique était calme, bercée du bruissement sempiternel des palmes. Diplômés, distants, méprisants, les médecins firent un bon travail médical mais ma sœur et mon frère naîtront dans une clinique tenue par de douces bonnes sœurs tant le métallique professionalisme de Saint-Vincent de Paul avait traumatisé mes parents. Mon père cauchemardait qu’il devait sauver ma mère de médecins-chirurgiens qui l’opéraient diaboliquement au fond des couloirs aseptisés des bâtiments publics. Pour la sauver, il fallait affronter un ours. Tout ça pour un bébé humain, alors qu’il aurait voulu un bébé renard.
Deux ans plus tard, naissance de "l'ange". Premières peurs mystiques de la séparation.
Et quelques souvenirs visuels et vocaux : les volets de Montparnasse, le perron du Pont-Hus, la voix "câlin Edith", protection de ma mère et premières pierres de la forteresse intérieure.
Les trois enfants
Nous fûmes trois et nous grandîmes sur le boulevard du Montparnasse. Rollers, manifs, chats perchés, lectures des livres des grands oncles et grandes tantes sauvés des eaux, pendant que la maman travaillait dans le monde des grands, un monde capitaliste, administratif, méchant, sans éthique et sans esthétique.
L.. (le monstre)
C’est l’entreprise où, jour après jour, soir après soir (très tard le soir), au milieu des sourires, ma mère souffrit du salariat.
1989
L’adieu à l’Erdre.
Je ne peux pas me plaindre. Des clochards qu’on voit dans la rue, certains se souviennent peut-être d’une maison, d’un jardin.
Il y avait depuis quelques siècles une demeure, là bas, et des terres au-dessus desquelles volaient des corbeaux. D’autres êtres le hantent désormais. Qui ne connait l’amertume des larmes ? Toute famille est un drame inéluctable et l’Erdre est la plus belle rivière du monde.
La B..
On m’y ouvrit un compte à 11 ans. J’ai appris dans la douleur à ne pas laisser passer plus de 15 jours à découvert. Je suis toujours à la B… Pourquoi changer ? Toutes les banques, qu’elles le veuillent ou non, sont des banques. Et j’ai même appris à deviner, derrière le regard bleu de certains Conseillers de clientèle, la mémoire de l’enfance partie, mêlée aux rêves de la nuit qui revient.
Ma carte bleue, Iphigénie, est toujours là. Son parrain est Lucrèce, en raison de la défense paternelle qu’il a prise envers Iphigénie, dans de belles pages de son œuvre de rerum natura. O mon Iphigénie, dors tranquille, loin de Calchas le découpeur d’entrailles. Vois, il est de plus en plus rare que la machine Big Brother te refuse des biffetons, aux guichets aguicheurs, laids et automatiques qui « ornent » les rues.
Le lycée Buffon
Balancements entre socialisation et conflits. 11ans-17 ans : on est au bord du vide, entre l’amour et la répulsion. Ceux qui m’ont soutenue, comprise, accompagnée, et surtout pardonnée, ont su me faire aimer un (petit) peu la République, son drapeau, ses « valeurs » et ses lycées. Sans le lycée Buffon j’aurais été bakouniniste.
Et puis, beaucoup des camarades sont toujours là, plus ou moins loin de moi. Comme des vagues qui viennent de loin, leurs voix mûries charrient un peu parfois des éclats et des expressions de l’adolescence.
Faiblesse, débilité et apprentissage du remord.
Gange
L’égérie, l’amie, la sœur, la mère, la fille, la chienne, l’autre, la semblable, l’amour, la joie, la peur, la consolation.
La frontière qui sépare ceux qui considèrent les animaux comme des personnes à part entière et ceux qui les considèrent comme des objets ou au mieux des sous-sujets, est-elle infranchissable ? Il me semble avoir toujours été du côté animal et chaque rencontre animale m’a toujours fait aller plus loin sur cette voie. Au point qu’il est inutile de discuter : se taire dans les salons et œuvrer en parallèle pour la reconnaissance et la protection de nos frères, les autres animaux.
Pontault Combault, la rue Daguerre et la rue Boissonade
S’il est impossible de raconter ce long épisode d’un an et demi, je veux du moins le mentionner. Comprenne qui participa.
Les Langues O et les années Hawaii Off Shore
C’est en feuilletant un livre sur le surf que j’ai lu un poème en langue hawaiienne. Je ne pouvais le comprendre, mais les lettres qui s’étalaient semblaient former des sonorités si belles. Quand je revins quelques jours plus tard avec de l’argent pour acheter le livre, il avait disparu. De multiples quêtes ne me le rendirent pas. Mais j’appris le hawaiien. Seule.
Entre-temps je m’étais inscrite aux Langues Ô et y apprenais le quechua et le tahitien, et puis un peu d’amharique.
Une longue histoire avec les langues, qui n’est jamais morte bien que les sables du présent recouvrent parfois les travaux d’antan. Quelque chose a ressuscité à la Maison de la Radio, en 2004, puis à Izmir, quand je fus invitée au Centre Culturel Français en 2009. A suivre…
Le voyage au Pérou
Une compréhension intérieure, indicible, ancrée depuis au fond de mon être.
La découverte d’un monde nouveau : la montagne, aussi fascinante que la mer et différemment mystérieuse. La respiration d’une autre esthétique, d’une autre atmosphère, où l’on sent qu’on pourrait se poser et rester pour toujours.
Enfin, un regret blanc comme les murs du couvent de Santa Catalina : Arequipa.
Faudrait mentionner aussi La Paz, la haute ville dans les montagnes, La Paz d’où on s’embarqua pour un retour tortueux. Qu’y avait-il dans la mallette que je serais contre moi, en entrant dans l’avion ? Nous sommes trois – peut-être cinq, en fait - à le savoir.
Le CEEA et la voie scénaristique
Inespéré : j’ai réussi un concours dans ma vie. C’était celui du CEEA. Le début d’un métier qui ressemble rarement à un rêve d’écrivain. Même s’ils partagent l’appel des bars.
C’est à la Coupole que ma coscénariste et moi allions trouver les idées des épisodes de la série du Nidouille, « cosy corner ».
Les rencontres avec Alexis T eurent lieu au bar Edith Piaf, sur la place du même nom, non loin de la prod Wendigo. Entre les écrivains et les scénaristes, maintenant que les cigarettes sont presque hors la loi, il reste le point commun des bars.
Autrement
Brigitte V et Anne R acceptèrent le projet d’un livre sur les langues et ainsi commença pour moi l’aventure Autrement, sous leur agréable égide. Quelques livres et beaucoup de conversations.
Les années VillaBar
Un frère embarqué dans une aventure, une amie au deuxième étage, un prof de piano, Jean-Pierre Bret, aux même initiales que son double John Peshran-Boor, l’amour de la littérature et de la photographie, un entourage chaleureux et enthousiasmé : ainsi naquit VillaBar, qui fit du bruit et dont il reste de belles œuvres et une nouvelle manière d’aborder la photolittérature. En laissant la photo exhaler ses sens, avant tout. Seulement ensuite, la littérature s’avance, majestueuse et imprévisible, renouvelée.
L’aventure AlmaSoror
Une sœur insistante devant l’ordinateur familial et un faible accord de ma part : voilà comment est né(e) AlmaSoror.
Un journal mensuel, intemporel, en ligne, draina de nombreux et étonnants lecteurs pendant deux ans. AlmaSoror se fit ensuite blog.
« Caminante, no hay camino, se hace el camino al andar ».
AlmaSoror a lié des alliances, toujours libres.
Aujourd’hui, toujours bavard en ligne, AlmaSoror a produit un film (Résurrection) et en produit un second (la Feuille). Des courts métrages qui fabriquent peu à peu une marque visuelle. Nous souhaitons aller loin, lentement, dans l’étroit sentier bordé de paille que nous avons commencer à tracer.
« Caminante, no hay camino sino estrellas en el mar ».
Naissance d’Hugues, mon fils imaginaire
Son père, Alexis Jaulerri, le reconnut expressément dans une lettre posthume. C’est bien pour Hugues. Mon fils dessine, m’écrit des lettres, de temps en temps il me gronde. Les autres mères sont débordées ; moi, transbordée.
Retour à l’étang de la Grostière
Les barques avaient changé. J’avais d’aussi grandes jambes que les grands de mon enfance et les choses interdites et mystérieuses s’ouvraient à moi avec tellement d’évidence que je compris que l’enfance est un miracle. Il y avait le saule pleureur et les allées, la chambre aux volets que j’arrivais à fermer sans difficulté. Retrouver chaque meuble, chaque pan de mur, se remémorer tant d’étés. Soudain, subir l’urgence de la vision quand, sans prévenir, le son des cloches de l’église fait remonter tant d’émotions. Au fond de l’étang dorment encore, sous des mètres cubes de vase, les épées des Brigands. Les mondes morts et les mondes vivants se côtoient : il est parfois difficile de choisir son camp.
Collectif 127-B « étoile de mer » (Insomniapolis)
Nous savions bien que nous ne parlions pas en l’air, et, de fait, le collectif est né. Les œuvres se créent peu à peu et l’argent rentre petit à petit. Il faudra sans doute revoir la charte, se réunir encore, boire du vin lacrima christi, réparer des erreurs.
Le collectif promeut l’art figuratif. Pour revivifier notre art, nous approfondissons la connaissance des trois sources allogènes : Rome, Athènes, Jérusalem, et du terreau celtique inextricable.
Musique : Challwa Taki. Sortilèges. Wolfcrag
Nous créâmes Challwa Taki (nous étions 3), qui se transforma en Sortilèges (nous passâmes de 3 à 8, puis nous finîmes à 2), qui est devenu Wolfcrag (nous sommes 9). Wolfcrag est une « formation musicale » dont l’aventure commence à peine. Le style musical que nous créons ensemble, la beith musique, nous torture à force d’être imparfait.
Mes compères dans cette aventure : Le dit Luke Ghost, Philibert, Marc, Jules, V, Emma, Aurore B, Alex.
Albums
Nous, les loups, le premier album. Les images d'Alain Gauthier sont comme une construction de symboles qui approfondissent le texte.
Deux autres sont en train de prendre forme sous deux autres mains que les miennes. Les illustrateurs interprètent les textes en les emmenant loin dans leur monde. Etrange expérience que d’être illustrée.
Compagnons de route
(il s’agit évidemment de la « route » professionnelle, ou assimilée).
Laure Tesson
Tieri Briet
Ondine Frager
Esther Mar
Anne-Pierre Lallande
Sara
Katharina F-B
Mon frère Sam
Influences
Ma petite sœur, qui m’a convertie à l’Europe
César I, le prof de quechua. En dépit d’une fin assez ratée.
Remo Mugnaioni, son art de vivre et sa culture raffinée
L’abbé B Lorber pour le chant grégorien
Clarisse Herrenschmidt et ses trois écritures
Brigitte B et ses cours de chant.
Egéries
Gange
Charles Baudelaire
Virginia Woolf
Hanno Buddenbrook
Comte Mölln
James Douglas Morrison
Le Christ
Sainte Catherine de Sienne
Baude Fastoul
Morgana Bantam Dos Santos
Nolimé Tangéré
Esther Mar, rencontrée au fond d’un bar après une manif très queer dont les sloglans m’avaient fait trop peur, Esther Mar la plus belle du monde, Esther Mar, la seule personne humaine, vivante actuellement et rencontrée « en vrai » parmi mes égéries. Esther Mar, auteur de La peur, la liberté et la morale, publié dans une revue de papier dissidente en 1983. J’avais cinq ans. Je possède un exemplaire jauni de cette revue, résultat d’une longue quête. Esther Mar, qui est en train de terminer son œuvre-fleuve Chants de poussière, et qui me fait l’honneur de m’en lire des passages de sa voix rauque et nostagique, au milieu des cendres du salon brûlé et des vieux meubles encore debout, dans son salon de sa maison au bord de la Marne.
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