mercredi, 02 juillet 2014
Chroniques d'une solitude
D'où vient la galvanisation de mon cœur ? Cette inondation du plaisir de vivre ?
Toute la poussière du monde s'est transformée en arcane.
Depuis trois jours, nous sommes bombardés. Jusqu'à hier matin, les trains partaient encore. Ils ne partent plus. Des gens attendent à la gare, de plus en plus nombreux, dormant à même le sol. Je me réjouis de continuer à vivre sans chercher à tout prix à subsister.
Je ne cherche qu'à éprouver, avec l'intensité que cette promesse de mort qui plane instille, des émotions qui rencontrent l'instant insaisissable.
Il se passe quelque chose d'exceptionnel : je n'ai jamais été aussi heureuse. La joie coule dans mes veines, me donne envie de crier de bonheur. La peur produite par le vacarme des destructions me pousse à courir à l'approche des hauts avions, et courir aussi vite procure à mon corps un bonheur inédit, si grand qu'il en paraît illégitime.
Des pensées me traversent : elles sont neuves, puissantes, pleines de verve et de forces. La paix se répand en moi et autour de moi, comme un fleuve parfait dans lequel je serais baignée incidemment. Tout m'épate, tout me réjouit.
Quand j'ai commencé à comprendre l'étendue de cette satisfaction, je me suis sentie coupable. Objectivement, alentour tout n'est que mort et destruction, fracas et désespérance. Mais que je meure demain ou dans trente ans, une chose est sûre : vivante, je le suis devenue dans ce chaos.
Vivante, je le suis devenue dans ce chaos. J'y ai éprouvé l'intensité du monde et l'immensité de l'existence.
Pardonnez ma joie, endeuillés. Elle ne naît pas de vos peines ni de vos pertes, mais de la vibration de chaque parcelle de mon être face à ce monde qui éclate, face à ce temps en suspension.
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Commentaires
J'aimerais vous lire encore toutefois.
Ce billet est néanmoins grisant... faute de pouvoir courir encore je vais m'en donner la sensation en faisant un peu de vélo.
Quitter le monde du consumérisme est grisant, car ici c'est une guerre sourde et sournoise à laquelle nous avons affaire, le pouvoir du fric qui écrabouille tout sur son passage. Là où vous êtes, elle se déclare franchement la guerre, elle éclate de partout... il y une vérité tandis qu'ici c'est le mensonge encore et encore, la duperie.
C'est pourquoi je vous comprends. Cordialement
Écrit par : Sauge | mercredi, 02 juillet 2014
Répondre à ce commentaireSauge, merci de votre passage, et de tous vos passages, et de ce petit mot que nous découvrons au son du Requiem de Preisner, en cette fin d'après-midi où le soleil danse avec le macadam.
Écrit par : AlmaSoror | mercredi, 02 juillet 2014
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