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dimanche, 24 juin 2012

Ces bêtes qu’on abat : Un bouc pas comme les autres

 C'est une saga qu'aucun scénariste n'aurait le courage d'écrire. Les films les plus gores ne sont que des comédies Walt Disney en comparaison. Les plus courageux d'entre vous auront sans doute du mal à la suivre jusqu'au bout...

C'est la saga interdite aux profanes.

AlmaSoror est fière de proposer sur son site l'extraordinaire saga de la viande. Celle qu'on ne lit jamais, celle dont on entend jamais parler, celle qui a lieu dans des endroits où l’œil citoyen ne peut pénétrer.

Si vous ne vous sentez pas capable de la lire, sachez que l'enquêteur l'a écrite. Sachez que des milliards d'individus la vivent aux portes de nos villes. Si vous n'êtes pas capable de la lire et que vous êtes capable de consommer le résultat, alors vous êtes un merveilleux citoyen du Meilleur des Mondes.

Voici donc le journal de Jean-Luc Daub, enquêteur dans les abattoirs français.

 Ces bêtes qu'on abat peut s'acheter en version imprimée :

Ou bien se lire sur cette page qui lui est dédié.

 

Un bouc pas comme les autres

 

 Il m’est souvent arrivé, lors de mes déplacements, de faire des rencontres surprenantes. Celle que je vais décrire l’était particulièrement. En visite d’abattoirs dans le département de la Manche, où je les avais quasiment tous inspectés, je terminai la semaine par celui d’une grande ville. Lorsque je me suis présenté au directeur, il était assis derrière son bureau, les mains rassemblées à hauteur de la poitrine. À peine avais-je fini de parler qu’il m’annonça de façon très posée : « Je vous attendais » ! Il n’était pas censé m’attendre, puisque les visites s’effectuaient inopinément. Mais je ne fus pas surpris, il avait dû être averti, car j’avais écumé un grand nombre d’abattoirs du département. Un autre directeur, ou peut-être même les services vétérinaires avaient dû le prévenir de ma présence dans le secteur et d’une visite potentielle. Il ne m’en tenait pas rigueur et l’accueil fut plutôt chaleureux. Après m’avoir décrit son établissement d’abattage, nous avons visité les lieux ensemble. Rien à redire à propos des postes d’abattage, les tueries se déroulaient convenablement et les postes d’abattage étaient équipés correctement. Bien que les abattages soient une violence à l’encontre des animaux, un certain calme régnait, les employés travaillaient de façon posée sans brutaliser les animaux. Et ce n’est pas ma présence qui changeait quelque chose, car dans ce milieu, on ne peut pas tricher. Si les employés travaillent de façon critiquable, il est impossible de faire semblant et de travailler de façon acceptable en ma présence. Les habitudes ancrées ne peuvent pas se défaire si facilement.

 

La rencontre surprenante se fit ailleurs que dans les locaux d’abattage. Elle eut lieu dans la bouverie attenante aux postes d’abattage. Il s’agissait en fait d’une rencontre avec un bouc qui avait son box attitré. Le bouc n’était pas destiné à l’abattage. Il avait pour domicile l’abattoir, et il était bien le seul animal à ne pas être tué en abattoir. Encore que j’aie déjà vu des chats se promener dans une salle d’abattage dans le Nord de la France. Son box était garni de paille pour litière et de foin pour le fourrage. C’était un bouc qui était passé du côté des humains, des employés de l’abattoir, un traître en somme. Il était investi d’une mission qu’il accomplissait brillamment. Je n’allais plus tarder à en voir la démonstration. Le directeur demanda à un employé de me montrer comment ils procédaient pour conduire sans brutalité les ovins vers le lieu de tuerie.

 

Après avoir ouvert la porte d’une case où se trouvaient des moutons, l’employé ouvrit la porte du box du bouc. Ce dernier sorti tout seul, se dirigea vers la case des moutons, rentra à l’intérieur et après en avoir fait le tour, ressortit et prit la direction du local d’abattage. Étonnement, les moutons le suivaient sans se soucier de la direction vers laquelle il les menait. D’un pas fier, il entra dans le local d’abattage, et tous les moutons y entrèrent également en toute confiance. Le bouc fit le tour du local et reprit la direction de la sortie pour retourner dans son box douillettement paillé. L’employé referma la porte du local d’abattage, laissant les moutons pris au piège et relégués au sort qui leur était réservé.

 

Aucun stress, aucune manipulation humaine. Les moutons étaient conduits avec ménagement, car dans d’autres circonstances, les employés sont souvent obligés d’en tirer un par une patte pour que les autres suivent.


 

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  Camion qui a roulé toute la journée et qui attend derrière un abattoir le lever du jour, à la place de décharger et faire boire les bovins. La chauffeur dort dans sa cabine…

Phot Jean-Luc Daub

 

 

 

 

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