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vendredi, 24 mai 2013

Hommage à Miles, par sa soeur Joan

Miles Yufitran, Joan Yufitran, trompette, sommet de l'Etat, idéaux trahisPhot Sara

Extrait d'une lettre de Joan Yufitran publiée dans la gazette de Saint-Jean en Ville, le mois précédant la mort du grand trompettiste.
 
Je sais que vous n'aimez pas ce monde des combats interdits, auquel je succombe si facilement. Moi, je le préfère à votre douceur hypocrite. Vous êtes perché au sommet de l'Etat. Vous êtes donc tout aussi vendu que moi. Mais moi, j'en suis consciente.
Et puis j'ai une douleur bien plus grande que celle d'avoir trahi mes frêles idéaux de jeunesse.
J'ai perdu un frère. Oh, bien sûr, il est toujours vivant, et il erre, de ville en ville, de port en port, traînant sa trompette, ses yeux de poète insomniaque et ses souffrances vides. Mon frère était mon seul amour, depuis toujours et à jamais.
Miles, tu me hais. Pour combien de temps encore ?
 
Joan Yufitran
 
 
Suit ce témoignage, datant de l'an 2007, d'Alicia-Pilar « la matadora » Desdemone-Cajas sur Miles Yufitran, compagnon de route d'AlmaSoror, frère blessé, amant perdu, ami enfui :

J’erre à Santa Marina sans savoir à quels saints me vouer
Je me rappelle des deux filles avec qui j’ai travaillé pendant plus de quinze ans dans un bar de Saint-Jean en Ville, en Louisiane française : Anita F.C. Trosh et Oriane Siette.

Nous savions rire ! Nous savions pleurer ! Deux dons qui ne sont réservées qu’à des âmes d’élite. Le Rire et les Pleurs sont un Art que peu de gens pratiquent avec hauteur.

Quel ennui en ce bas monde si mal peuplé. Riches et pauvres se rejoignent dans cette médiocrité qui les atteint tous. Nous ne sommes que quelques uns à nous élever au-dessus de cette bassesse, par la grâce de Dieu. Il y en a quelques uns par ici, Dieu soit loué. J’ai rencontré une jeune femme amusante, qu’on appelle Yeux Noirs. Elle semble s’élever au dessus des pensées et des actions habituelles.
Il y a un jeune homme qui passe me voir pour pleurer et parler de musique. Quelle élégance, quelle soledad, quelle dolor étoilée dans ses yeux béants ! Quelle divine musique quand il prend sa trompette ! Un vrai poète, mi irlandais mi berbère, qui s'appelle Miles Yufitran.
 
 
Et enfin, un des derniers textes de Miles, écrit, sans doute, quelques jours avant sa mort :
 
Ma trompette fait la gueule. Alors je la laisse tomber et je bois. C’est dur d’être un musicien. On est des poètes du sable, à la moindre vague notre œuvre est détruite, effacée à jamais. On balance du vent dans les oreilles des gens et ils nous remercient en ne comprenant pas le fond de notre âme. On zone, on boit, on crève jusqu’à l’aube, et on se réveille avec une mélodie qui pince le cœur. Alors on attrape la trompette, on souffle nos douleurs dedans et ya un voisin qui crie : «Ta gueule ! »
Mais on continue quand même.
La rue est belle, les poubelles aussi sont belles, tout peut être beau quand on a les yeux remplis de ciel. Ma musique, mon amour, tu m’entraînes loin des hommes, alors parfois je te hais. Puis je me souviens que si tu m’entraînes si loin des hommes, c’est pour m’emmener plus près des étoiles.
 
Miles Yufitran

mathieu granier par karim pierre maalej.jpg

Photo KPM

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