lundi, 22 avril 2013
Dialogue entre celui qui peint et celui qui compose
- Comment fait-on des choses belles ?
- En se dégageant de soi et en exigeant de viser le plus haut.
- Oui, c'est vrai. Mais il doit y avoir autre chose...
- Oui, le rythme, la musique peut-être.
- Et la couleur.
- Oui.
- Mais il faut encore autre chose, pour atteindre une certaine puissance.
- Le côté tranchant comme un mouvement de sabre dans un combat, droit au but, avec souplesse : le bon geste.
- Ou bien la profondeur intangible du chatoiement, comme chez le peintre Turner.
Merci à Sara pour l'aide à la traduction.
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lundi, 15 juin 2009
Lettre à Giorgione
Hommage
Cet hommage à nos étoiles des temps proches et lointains veut saluer des êtres dont le souffle, la vision,
la parole nous aident à vivre et à penser.
Giorgione, mystérieux peintre…
par Sara
1477 : Naissance de Giorgio Barbarelli à Castelfranco, pas très loin de Venise.
1510 : Mort de Giogio Barbarelli, dit Giorgione, de la peste en qu'il avait contracté en embrassant une dernière fois sa maîtresse qui était en train d'en mourir.
Observer : la qualité de la lumière de ses peintures et les thèmes mystérieux qu'il a traité, renonçant aux sujets traditionnels, antiques ou religieux.
A savoir :
Il ne signait pas ses œuvres
Seules quelques toiles peuvent lui être attribué avec certitude.
Certaines qu'il n'a pu achevées avant de mourir ont certainement être reprises et terminées par ses élèves, le Titien et Sebastiano del Piombo
Cher Giorgio,
C'était à Venise, dans les tout premiers jours août de l'année 1991. J'avais laissé mes trois enfants, les mains remplies de framboises, sur les marches qui donnaient sur le Canal et j'étais rentrée seule dans la Galleria dell'Accademia. Je n'étais pas rassurée. Je vis dans une époque de contrôle social des uns sur les autres que tu n'as pas connu. Laisser des enfants jouer seuls au bord de l'eau peut conduire sinon en prison du moins à se voir priver du droit de vivre avec eux. Mais visiter un musée les ennuyait trop et je les comprenais. Nos musées sont des temples où vous, peintres de l'ancien temps, sont des divinités que nous venons pieusement adorer. Nous vivons de choses mortes. Mais l'enfance a besoin de vivre. Je les laissai là et entrai … Je traversais lentement les salles de la Galleria dell'Accademia les unes après les autres dans une religieuse extase. J'avais conscience d'être au cœur même de l'Italie de la Renaissance, j'en goûtais chaque parcelle. J'essayais d'économiser mes forces car traverser ces musées à pas lents est un chemin de croix. Des groupes de gens défilent. On s'arrête devant chaque tableau, on se penche en une sorte de génuflexion vers l'étiquette qui indique le titre du tableau et le nom de son auteur. Et l'on passe au suivant. C'est épuisant. Mais je sais que je ne verrai jamais aucune de ces peintures si je me ne soumets pas à cette procession. Moi, individu lambda, je n'ai pas droit à une disposition privée de la peinture de Titien, du Caravage, … J'ai payé mon billet d'entrée et je circule, ayant payé pour voir.
Et puis il y eut l'apparition.
Je me suis approchée le cœur battant vers ce tableau : l'extrême finesse, la tranquille solitude, l'atmosphère retenue, que se passait-il là-bas ? Ce n'est que plusieurs minutes plus tard que je découvrais ton nom "Giorgione". Je n'avais jamais entendu parler de toi.
Je regardais de tous côtés pour voir d'autres toiles de toi. J' aperçus le portrait d'une vieille femme. Même facture étonnante, même finesse, même intensité. Aucune autre peinture.
Ce n'est qu'après mon retour à Paris que j'ai découvert qui tu étais, ton existence si courte, tes amours, la peste.
Au Louvre, Je reconnu ta main dans le "dîner champêtre" du Titien. Peu m'importe que les "spécialistes" l'attribuent au Titien.
Quand je découvris qu'une exposition allait avoir lieu de six ou sept peintures de ta maigre production à Venise, je pleurais de déception car je ne pouvais faire un séjour là-bas. C'est ma fille qui m'a entraînée. Elle m'a offert le voyage : nous sommes parties en train de nuit ce mois de janvier 2003. Après une mauvaise nuit durant laquelle nous avons appris que des migrants sans papiers avaient été ramassés par les douaniers et renvoyés dans leur patrie, nous sommes allés boire un café sur les Zaterre en attendant l'ouverture du musée.
Quelques œuvres étaient là. Nous y sommes restées longtemps, méditatives, presque seules, conscientes de voir là rassemblées des œuvres étranges, silencieuses, intenses que nous ne reverrions peut-être jamais.
Le ciel gris d'hiver, une pluie fine accompagnèrent notre promenade dans la ville en attendant le train qui allait nous ramener de nuit à Paris.
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