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samedi, 28 février 2009

Briefe an einen jungen Dichter

La rubrique Fragments offre des morceaux de textes classiques, connus ou inconnus, qu'il est heureux de relire.

Lernzeit aber ist immer eine lange, abgeschlossene Zeit, und so ist Lieben für lange hinaus und weit ins Leben hinein -: Einsamkeit, gesteigertes und vertieftes Alleinsein für den, der liebt.

Rainer Maria Rilke,

Briefe an einen jungen Dichter

(Rom, am 14. Mai 1904)

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Lettres à un jeune poète

(lettre du 14 mai 1904)

un extrait suivi d'une traduction

Darin aber irren die jungen Menschen so oft und so schwer: daß sie (in deren Wesen es liegt, keine Geduld zu haben) sich einander hinwerfen, wenn die Liebe über sie kommt, sich ausstreuen, so wie sie sind in all ihrer Unaufgeräumtheit, Unordnung, Wirrnis...: Was aber soll dann sein? Was soll das Leben an diesem Haufen von Halbzerschlagenem tun, den sie ihre Gemeinsamkeit heißen und den sie gerne ihr Glück nennen möchten, ginge es an, und ihre Zukunft? Da verliert jeder sich um des anderen willen und verliert den anderen und viele andere, die noch kommen wollten. Und verliert die Weiten und Möglichkeiten, tauscht das Nahen und Fliehen leiser, ahnungsvoller Dinge gegen eine unfruchtbare Ratlosigkeit, aus der nichts mehr kommen kann; nichts als ein wenig Ekel, Enttäuschung und Armut und die Rettung in eine der vielen Konventionen, die wie allgemeine Schutzhütten an diesem gefährlichsten Wege in großer Zahl angebracht sind. Kein Gebiet menschlichen Erlebens ist so mit Konventionen versehen wie dieses: Rettungsgürtel der verschiedensten Erfindung, Boote und Schwimmblasen sind da; Zuflüchte in jeder Art hat die gesellschaftliche Auffassung zu schaffen gewußt, denn da sie geneigt war, das Liebesleben als ein Vergnügen zu nehmen, mußte sie es auch leicht ausgestalten, billig, gefahrlos und sicher, wie öffentliche Vergnügungen sind.

Mais le temps de l’apprentissage est toujours une longue période, une durée à part, c’est ainsi qu’aimer est, pour longtemps et loin dans la vie, solitude, isolement accru et approfondi pour celui qui aime.

 

 

Or c’est en cela que si souvent les jeunes gens commettent cette si lourde erreur : ils se précipitent l’un vers l’autre (eux dont c’est la nature que de n’avoir aucune patience) lorsque l’amour les atteint, ils se répandent tels qu’ils sont, avec tout leur désordre, leur incohérence, leur confusion… Mais qu’en sera-t-il ?

Qu’importe à la vie cet amoncellement de demi-échecs qu’ils appellent leur union, et qu’ils voudraient bien appeler leur bonheur, si c’était possible, et leur avenir ?

Chacun se perd alors soi-même pour l’amour de l’autre, perd l’autre et bien d’autres encore qui eussent voulu se présenter. Et chacun s’aliène les grands espaces et les virtualités, échange l’approche et la fuite des choses silencieuses et riches d’intuitions pour un stérile désarroi d’où plus rien ne procédera, rien, sinon un peu de dégoût, de déception, d’indigence, ainsi que le refuge cherché dans l’une des multiples conventions qui ont été installées en grand nombre, tels des abris publics, le long de ces voies très dangereuses. Aucun domaine de l’expérience humaine n’est tant pourvu de conventions : on y trouve des gilets de sauvetage de toutes sortes, des canots et des bouées ; la structure sociale a su créer des échappatoires de tout genre puisque, inclinant à prendre la vie amoureuse pour un plaisir, il fallait bien qu’elle lui donne une forme frivole, ordinaire, dépourvue de risque et sûre, comme c’est le cas des divertissements publics.

 

 

Rainer Maria Rilke