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vendredi, 11 février 2022

Trois assertions communes et fausses (matérialisme, patriarcat, individualisme)

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Ces affirmations constamment répétées et entendues partout sont si fausses que c'est presque merveilleux qu'elles rencontrent autant de succès.

 

« Nous sommes dans une société matérialiste. »

C'est faux. Une société matérialiste respecterait les matériaux, les objets, les métiers manuels. Nous sommes dans une société de consommation qui détruit le matériel. La société de consommation n'est pas matérialiste. Elle n'est pas non plus spirituelle. Elle est échangiste (la valeur d'échange a pris le pas sur les valeurs morales et sur les biens matériels eux-mêmes).

Nous avions copié un passage d'un livre de Philippe Ariès à ce sujet.

 

« Nous sommes dans une société patriarcale. »

C'est faux. La plupart des enfants vivent sous l'autorité de leur mère. Le père n'est plus celui que les noces démontrent. Il a au mieux la moitié de l'autorité parentale, mais les mères l'ont beaucoup plus universellement. 

Cela dit, une société matriarcale n'est pas moins machiste qu'une société patriarcale.

 

« Nous sommes dans une société individualiste. »

C'est faux. Nous sommes dans une société très collectiviste : les enfants naissent dans des institutions médicales, l'éducation obligatoire commence désormais à 3 ans (en France), la plupart des gens meurt dans des institutions collectives (hôpitaux, maisons de séniors) et nous passons nos vies dans des organisations qui ne laissent qu'une faible place à la responsabilité individuelle et encore moins à l'autonomie. Tout ce qui concerne l'éducation, la santé, le transport, est aménagé, décidé, dicté par l'Etat. L'individu aujourd'hui n'est rien, il a quelque pouvoir sur lui-même, mais très peu sur ses enfants et sur ses biens, il n'est donc pas un pilier de notre société. 

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En illustration, cette photo prise en janvier 2022 d'une personne patriarcale, individualiste et matérialiste, donc forcément frustrée dans notre société liquide, collective et antimatérialiste

mardi, 16 octobre 2012

La propriété foncière dans la civilisation noire

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Maurice Delafosse (1870-1926) est l'auteur d'une oeuvre africaniste de toute intelligence, écrite à l'orée du XX° siècle.

Il est également l'auteur de deux familles, une africaine et une française, qui ont gardé de chaleureuses relations intercontinentales.

Il s'opposa à Blaise Diagne, autre grand homme à cheval entre Afrique et France, sur la question de la levée de contingents africains lors de la guerre de 1914-18. Delafosse était contre ; Diagne y était favorable.

Dans son ouvrage intitulé Les Nègres, Delafosse s'efforce de nous donner une idée de la vision du monde nègre, et de la comprendre non pas d'après nos propres conceptions, mais en entrant à l'intérieur des conceptions africaines. Voici un passage sur la propriété foncière dans la civilisation nègre.

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"Chaque parcelle de terre est considérée comme une divinité. L'homme ne peut en devenir propriétaire, mais il en peut user, à condition d'en avoir obtenu l'autorisation de cette parcelle elle-même, moyennant un sacrifice et selon des rites déterminés. Toutefois, la terre ne se lie pas à un individu, ou du moins ne se lie à un individu qu'en tant que celui-ci représente une collectivité. En l'espèce, c'est l'ancêtre, fondateur de la famille, qui, ayant rencontré une parcelle vierge de toute occupation et de toute prise de possession, a conclu avec elle, en quelque manière, un contrat, en vertu duquel il en a obtenu la jouissance exclusive, à perpétuité, pour la collectivité issue de lui.

 

Sans doute, le patriarche, qualifié du titre de « maître du sol » ou « chef de terre », peut répartir l'usufruit de la parcelle familiale entre les diverses fractions de la famille, voire même entre des individus. Il procède à cet égard à des allotissements renouvelables chaque année, de manière que le partage soit équitable, que ce ne soient pas toujours les mêmes qui aient les mauvaises terres, que la rotation des cultures ou [44] le système des jachères puissent être effectués, que des lots soient mis en réserve pour des éventualités diverses ou constitués en domaine banal. Il peut même, avec l'agrément des anciens, autoriser des étrangers à s'installer sur une portion du sol familial et à la cultiver, soit pendant un temps déterminé, soit pour une durée indéfinie. Mais il n'a pas qualité pour céder, aliéner ni même diviser le droit et le privilège acquis sur la parcelle familiale par le fondateur de la famille.

Lui-même n'a sur cette parcelle que les droits qu'a tout membre de la collectivité, et aucun de ces membres, le chef comme les autres, alors même que l'usage local lui attribue un champ individuel, n'est propriétaire de ce champ.

L'inaliénabilité des droits fonciers est un principe tellement enraciné dans l'esprit des nègres, qu'à leurs yeux la conquête d'une région n'entraîne nullement l'acquisition de droits quelconques sur le sol de cette région. Et les conquérants les moins alourdis de scrupules ont généralement respecté cette loi.

En fait, la propriété absolue, comportant la faculté d'aliénation, n'est pas plus inconnue des nègres qu'elle ne l'est des Européens. Seulement, chez eux, la terre ne peut faire l'objet d'une telle propriété. Il en est de même de tout ce qu'elle porte ou produit spontanément (cours d'eau, mines, poisson ou gibier, forêts, plantes isolées), tant que l'intervention humaine n'a point dénaturé la destination primitive de ces choses.

Le travail, ou plus exactement, peut-être, l'action productrice de l'homme, est considéré comme la seule source de la propriété, mais il ne peut conférer le droit de propriété que sur l'objet qu'il a produit. Or, si le travail de l'homme peut remuer le sol et le faire produire, on ne peut dire que le sol lui-même soit le produit de ce travail, non plus qu'on ne peut le dire d'une rivière, d'un gisement de minerai de fer ou d'or, d'un éléphant ou d'une antilope, d'un arbre qui a poussé tout seul. Mais, si des hommes ont semé du grain sur leur terre familiale, la récolte obtenue est leur propriété absolue ; s'ils ont retiré du vin de palme d'un rônier poussé sur cette terre, cette liqueur est aussi leur propriété absolue. Il en sera de même mais avec certaines réserves, du gibier tué ou capturé à la chasse, des arbres abattus par la main de l'homme, etc. Il en sera de même, à plus forte raison, des animaux domestiques que l'on a élevés, des objets que l'on a fabriqués, des captifs que l'on a faits a la guerre et des sommes obtenues en échange de tout objet dont l'on était propriétaire ou du travail que l'on a fourni Le travail, source de toute propriété, peut avoir pour auteur une collectivité ou un individu. Dans le premier cas, la propriété acquise sera naturellement collective ; elle sera individuelle dans le second cas, mais, presque toujours, se trouvera grevée de quelque droit au profit de la collectivité. Ainsi l'individu qui s'engage comme ouvrier sur un chantier ne peut disposer, en droit indigène, de la totalité du salaire qui lui est attribué : il est admis en effet que, la collectivité familiale ayant été privée du concours de ses bras pendant la durée de son engagement, cet individu doit l'indemniser en conséquence.

Aussi la coutume exige-t-elle qu'il remette son salaire entre les mains du patriarche, qui opère au profit de la famille le prélèvement jugé équitable, et restitue le reste à l'ouvrier".

 

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