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Trois entrées en matière

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Trois ouvertures de romans qu'AlmaSoror voudrait partager avec ses lecteurs inconnus et chéris. L'amer Gorki (1868-1936) (car Gorki est un pseudonyme qui signifie amer...), l'acerbe Kadaré (né en 1936) et le sybillin Luxun (1881-1936) invitent à la danse littéraire dès les premières phrases de la Tempête sur la ville, du Palais des rêves et du Journal d'un fou.

Je me disais : AlmaSoror ! pourquoi ces trois hommes, quel soude les lie ? En rédigeant ce billet, apparut l'année 1936 : année de la mort de Gorki et de Luxun, et de la naissance de Kadaré.

 

Tempête sur la ville,de Maxime Gorki
traduit du russe par Z. Lvovsky pour Stock

Au milieu de la vallée, en tous sens sillonnée de routes grises, Okouroff, bourg bigarré, s'élève tel un jouet ingénieux posé sur la paume d'une main large et ridée.
C'est quelque part, bien loin dans la Forêt Noire, que la Poutanitza prend sa source, rivière paresseuse et lente qui, se faufilant entre des collines couvertes de labours, dévale vers la ville qu'elle divise en deux parties égales : Shikane, le quartier de l'élite, et Saretz, le fief de la pègre.
Ayant ainsi partagé la ville, la rivière coule, plus lente encore vers le sud-ouest où, son lit s'amincissant petit à petit, elle se perd enfin dans les marais de Lakhoff, couleur de rouille, et les îlots sauvages, plantés de pins grêles qui s'étendent en rangs serrés jusqu'à l'infini. A l'est, ça et là au sommet des collines, tordus et dépouillés par les intempéries, de vieux arbres longent la grand'route qui conduit au chef-lieu du département.
Grâce à l'abondance des eaux dans la région, l'air y est saturé en été d'une humidité tiède et odorante, le ciel presque toujours pâle et voilé, le soleil terne, le crépuscule étrangement pourpre. Et la lune, à son lever, montre une face énorme, rouge comme la chair vive.


Le palais des rêves, d'Ismaël Kadaré
traduit de l'albanais par Jusuf Vrioni pour Fayard

Les rideaux laissaient filtrer la clarté trouble du petit jour. Selon son habitude, il remonta la couverture pour somnoler encore un peu, mais il eut tôt fait de se rendre compte qu'il n'y parviendrait pas. La pensée que l'aube qui se levait annonçait une journée exceptionnelle suffit à lui ôter toute envie de dormir.
Un instant plus tard, cherchant ses pantoufles au pied du lit, il eut l'impression que son visage encore engourdi était effleuré d'un petit sourire ironique. Il s'extirpait du sommeil pour aller assumer ses fonctions au Tabir Sarrail, le fameux Bureau qui s'occupait précisément du sommeil et des songes, ce qui aurait suffi à susciter chez tout autre un rictus bien particulier. Mais lui se sentait par trop angoissé pour pouvoir franchement sourire.
Du rez-de-chaussée montait l'arôme agréable du thé et des rôties. Il savait que sa mère et sa vieille nourrice l'attendaient avec empressement et il s'efforça de les saluer avec le plus de chaleur possible.

- Bonjour, maman. Bonjour, Loke !

- Bonjour, Mark-Alem. Tu as bien dormi ?

Dans leurs yeux aussi se lisait cette légère excitation liée de quelque manière à sa nouvelle nomination. Peut-être, comme lui-même peu auparavant, s'étaient-elles dit que c'était la dernière nuit durant laquelle il avait pu goûter le sommeil ordinaire des simples mortels. Désormais, il ne faisait aucun doute que quelque chose dans sa vie allait changer.


Le Journal d'un fou, de Luxun (c'est un pseudonyme).

Très étonnamment le nom du traducteur n'apparait pas dans cette édition (Bibliothèque cosmopolite Stock). Que s'est-il passé ? Seul le préfacier est mis en avant, mais c'est un traducteur de l'anglais ! Je crois que la traductrice est Michelle Loi, je cherche à vérifier. Notons que Luxun a emprunté son titre à Gogol... Lui qui n'ignorais pas la littérature russe, puisqu'il a traduit Gorki en chinois.

La lune est éclatante, cette nuit.
Il y a plus de trente ans que je ne l'avais vue ; aussi, lorsque je l'ai aperçue aujourd'hui, me suis-je senti extraordinairement heureux. Je commence à saisir que j'ai passé ces trente dernières années dans le noir ; il faut que je me tienne sur mes gardes. Sinon, pourquoi le chien de la maison des Tchao m'aurait-il regardé par deux fois ?
J'ai mes raisons de craindre.

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lundi, 24 juin 2013 | Lien permanent

Saba

émile mâle, L'art religieux du XII° siècle au XVIII° siècle, austris, saint-sernin, dijon, reine pédauque, reine de saba, légende occidentale, pied d'oie, pied d'âne, saint-bénigne

J'écoute une douce musique américaine, d'un de ces nombreux princes versatiles de la ville de New York. Dehors, la nuit est déjà tombée : l'automne s'enfonce vers l'hiver. Quelques fenêtres forment des rectangles oranges ou jaunes, à cause des lumières intérieures qui les éclairent. Le reste de la cour, de la façade, est plongé dans les ténèbres. Je suis à moitié allongée sur mon lit. J'ai une vision métaphysique que je tente de faire passer en respirant profondément. A l'autre bout de la maison, ma mère déchire du papier dans son bureau en face de la cuisine. Quand je lève la tête, je m'amuse, moi à discerner les gravures mignonnes et grossières de ma petite armoire bretonne. Je lis un livre intitulé L'art religieux du XII° siècle au XVIII° siècle, publié en 1945 par l'historien de l'art Émile Mâle. En voici un fragment, qui raconte un peu la belle et mystérieuse reine de Saba.

"Au portail de l'église Saint-Bénigne de Dijon, qui ne nous est connu que par un dessin de Dom Plancher, on retrouvait le Christ apocalyptique et les grandes statues ; près des rois bibliques on voyait une reine.

Cette mystérieuse reine va, cette fois, nous livrer son secret. En étudiant le dessin de cette figure, on remarque un détail, qui semblerait incroyable, si des témoignages anciens ne le confirmaient : la reine du portail de Saint-Bénigne avait un pied d'oie. L'artiste de Dijon avait donc représenté cette fameuse reine Pédauque, qui n'était autre que la reine de Saba.

L'imagination juive et l'imagination arabe travaillèrent longtemps sur la reine de Saba. L'Orient lui créa une légende romanesque, où les djinns ont leur rôle. Sur l'ordre de Salomon, ils apportent à Jérusalem le trône d'or de la reine, qui le reconnaît avec surprise dans le palais du roi. Salomon la reçoit dans une salle au pavé de cristal : la belle reine, se croyant au bord de l'eau, relève sa robe et laisse voir ses pieds hideux. La légende orientale parle de pieds d'âne, la légende occidentale, de pieds d'oie. Dès le XII° siècle, un texte qui s'est conservé dans un manuscrit allemand nous représente la reine de Saba avec un pied d'oie. On ne trouve pas de texte aussi ancien en France, mais la statue de Dijon prouve qu'au XII° siècle la tradition y était parfaitement connue. Il se pourrait que cette reine au pied d'oie eût été représentée pour la première fois par les ateliers toulousains, car on voyait encore, du temps de Rabelais, une image de la reine Pédauque à Toulouse ; on y montrait son palais et ses bains, et on associa longtemps sa légende à celle de la jeune princesse Austris, baptisée par Saint Sernin.

La reine au pied d'oie du portail de Dijon était donc, on n'en saurait douter, la reine de Saba. Et il devient non moins certain que la statue de roi, qui lui faisait face, représentait Salomon ; c'est David, sans doute, qui l'accompagnait. Pourquoi la reine de Saba avait-elle été figurée dans la compagnie des héros de l'Ancienne Loi et des apôtres de la Loi Nouvelle ? C'est que, suivant la doctrine du moyen âge, elle symbolisait le monde païen venant au Christ, elle préfigurait ces Mages qui, comme elle, cherchaient le vrai Dieu. Or, le Voyage et l'Adoration des Mages étaient précisément représentés au linteau de Saint-Bénigne."

Extrait de L'art religieux du XII° siècle au XVIII° siècle, d’Émile Mâle.

D'Emile Mâle, sur AlmaSoror, on avait aussi les étoffes de pierre...

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lundi, 18 novembre 2013 | Lien permanent

Jean-Christophe, de Romain Rolland

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 Le mardi soir, entre novembre 2011 et septembre 2012, fut consacré au roman-fleuve de Romain Rolland, Jean-Christophe. Des êtres venus d'ici ou de là se rassemblèrent le mardi soir pour lire à haute voix ce long roman.

Voici l'électro-page qui nous permit de suivre la lecture même si l'on ne venait pas tous les mardis. Vous y trouverez les résumés des séances de lecture et les prénoms de ceux qui vinrent lire.

Le Salon littéraire d'Edith continue. Pour en savoir plus, il faut cliquer sur le mot Mystère...

Salon littéraire, Jean-Christophe, Romain Rolland, Beethoven, édith de cornulier lucinière


A quelques centaines de mètres de l'immeuble où Jean-Christophe a été écrit, nous lisons dans une petite pièce au fond d'une cour, entre 20h30 et 22h00.

De nombreuses personnes arrivent sur cette page en ayant tapé "résumé de Jean Christophe de Romain Rolland" dans les moteurs de recherche. Il y a donc d'autres êtres humains qui lisent en ce moment Jean-Christophe, ou bien qui doivent avoir l'air de l'avoir lu, peut-être obligés par leur professeur ! Dans ce dernier cas il doit s'agir de pays (ex-)socialistes car ce sont eux qui ont gardé la lampe rollandienne allumée tandis que nous, Français, nous l'oubliions.

 

Quelques liens avant de lire le résumé de nos séances :

Un article de Dorian Wybot

Un article de Chantal Serrière

Un article de 1922, paru dans le cinquième numéro de la Revue Anarchiste, sur Romain Rolland.

Un article du Figaro à propos de la réédition de 2007, due à Francis Esménard

Se procurer Jean-Christophe

 

Sara, Romain Rolland, Jean-Christophe, Arundel

Résumés des lectures

Mardi 8 novembre 2011

Officiants
Laure ; Alexandre ; Francis ; Vincent ; Dominique ; Jean-Pierre ; Stéphanie ; Emmanuel ; Édith

Romain Rolland a inventé l'expression « roman-fleuve » ; il a inventé l'expression « sentiment océanique », qu'on trouve dans sa correspondance avec Sigmund Freud. Il a milité pour l'Europe fraternelle ; il a été l'ami de Tolstoï et de son disciple Gandhi ; il a, comme eux, défendu les animaux. Il a été un pionnier de la musicologie.

Son roman Jean-Christophe, qui lui a fait obtenir le prix Nobel, a rendu ardents et fébriles d'enthousiasme des jeunes gens du monde entier pendant toute la première partie du XXème siècle. Dans le monde communiste il est demeuré un héros. Aujourd'hui, il est davantage lu et étudié à l'étranger que dans notre bonne vieille France.

Mais son Jean-Christophe a été conçu, et les premiers jets ont été écrits, au 162 boulevard du Montparnasse, dans l'obscurité.

C'est pourquoi, aujourd'hui, dans l'obscurité, un petit groupe de têtes fêlées se rassemble au 13 boulevard du Montparnasse le mardi soir, pour lire à voix haute le premier texte qu'on a appelé "roman-fleuve", l'histoire de Jean-Christophe Krafft.

Durant cette première lecture, nous avons appris des choses sur la naissance et l'enfance de notre héros.

"Aux âmes libres de toutes les nations qui souffrent, qui luttent et qui vaincront", telle est la dédicace de ce fleuve littéraire.
Suit la description de l'enfance : jeux, vitalité, amour, haine, peurs, chocs, craintes... Magnifique portrait d'enfant, sans aucune mièvrerie. Tout l'homme à venir est contenu dans le tout petit Christophe...

 "Les ombres fuient, le soleil monte. Christophe commence à retrouver son chemin dans le dédale de la journée.
Le matin... Ses parents dorment. Il est dans son petit lit, couché sur le dos. Il regarde les raies lumineuses qui dansent au plafond. C'est un amusement sans fin. A un moment, il rit tout haut, d'un de ces bons rires d'enfant qui dilatent le coeur de ceux qui les entendent. Sa mère se penche vers lui, et dit : "Qu'est-ce que tu as donc, petit fou ?" Alors il rit de plus belle, et peut-être même il se force à rire, parce qu'il a un public. Maman prend un air sévère, et met un doigt sur sa bouche, pour qu'il ne réveille pas le père ; mais ses yeux fatigués rient malgré elle. Ils chuchotent ensemble... Brusquement, un grognement furieux du père. Ils tressautent tous deux. Maman tourne précipitamment le dos, comme une petite fille coupable, elle fait semblant de dormir. Christophe s'enfonce dans son petit lit et retient son souffle..."

Mardi 15 novembre 2011

Officiants
Dominique, Jean-Pierre, Vincent, Agnès, Emmanuel, Francis, Laure, Edith

Nous avons lu les premières révoltes du petit Jean-Christophe, qui découvrait les différences sociales : sa mère Louisa est cuisinière chez des bourgeois, à qui elle parle avec déférence. Son beau costume est en fait un vieux costume du fils des bourgeois, ce que celui-ci fait remarquer en ricanant.
Jean-Christophe se révolte aussi contre l'école.
Il refuse d'être un enfant prodige du piano dont on exploite les dons.
Il découvre enfin que son père Melchior est alcoolique et en subit les effets.
Mais son grand-père Jean-Michel est une ressource vivifiante ; le monde imaginaire, la capacité d'invention, de contemplation, la vie mentale, sont également des ressources et des grandes forces de l'enfant. Le style de Romain Rolland est toujours aussi ample et beau.

 

Mardi 22 novembre 2011

Officiants :
Francis, Dominique, Vincent, Agnès, Anne, Emmanuel, Caroline, Édith

Petit musicien prodige, il ressent l'humiliation d'être utilisé, d'être montré comme un singe savant à la cour ducale : que fait-on de sa dignité ? Comment les membres de sa famille peuvent-ils se comporter volontiers en valets ?
Les exemples autour de lui sont contradictoires : les Krafft, musiciens de talent, ambitieux, volontiers valets envers les ducs mais aussi volontiers méprisants envers le peuple, s'opposent à sa famille maternelle, plus simple, sans haute culture, mais aussi plus libre. Où se situer, que choisir entre ces deux modèles ?
Jean Christophe en tout cas est décidé à devenir compositeur de musique. La vie est ambivalente : grands moments de douleur et de maltraitance, visions extatiques musicales et mystiques, magnifiques promenades nocturnes au son des grenouilles et des grillons, sous les étoiles.
Le style de Romain Rolland est toujours aussi somptueux, ample, à la fois structuré et poétique : comment se fait-il qu'on l'ait tant oublié ?

 

Mardi 29 novembre

Officiants
Vincent St, Dominique, Anthony, Jérémie, Alexandre, Caroline, Agnès, Laure, Edith

L'enfance est derrière nous, Jean-Christophe, après la mort de son cher grand-père Jean-Michel Krafft, est entré dans l'adolescence. 

Devenu soutien de famille, il travaille sans cesse.

Un jour, dans un bateau, il rencontre un garçon, Otto. Ils font connaissance et c'est la première fois que Jean-Christophe, d'ordinaire si solitaire, si loin des enfants de son âge, a un ami. 

Cette amitié entre Christophe et Otto est passionnelle, mais après quelques mois de passion suprême on sent poindre le dépit mutuel. 

 

Mardi 6 décembre

Officiants
Vincent Pt, Laure, Agnès, Émilie, Anthony, Vincent St, Emmanuel, Édith

L'adolescence continue et avec elle son cortège d'amères amours.
L'amitié qui liait Otto et Christophe a crevé comme un ballon, disparu aussi vite qu'elle est née. D'ailleurs, Otto est parti étudier loin, à l'université.
Mais une autre histoire, non moins passionnelle, débute entre Christophe et sa nouvelle voisine Minna de Kérich. Quand la charmante madame de Kérich réalise la flamme naissante entre sa fille et le jeune professeur de piano de celle-ci, sa sympathique bienveillance envers le garçon fond comme neige au soleil. Elle emmène Minna en vacances dans la belle et grande ville de Francfort et s'applique à lui faire oublier le jeune garçon, certes doué et amoureux, mais incapable de tenir une fourchette correctement ou de mâcher bouche fermée.

Christophe se rend brutalement compte qu'il est devenu persona non grata chez les Kérich, une humiliation de plus dans sa vie qui n'en a pas manqué, entre un père alcoolique et flambeur, une mère d'un milieu social inférieur aux célèbres musiciens Krafft, ses désirs d'être un artiste libre et sa posture de valet-musicien.

 

13 décembre 2011

Officiants
Mavra, Dominique, Vincent St, Edith

Après l'humiliation due à la rupture forcée d'avec Minna, Christophe se morfond dans les abîmes du désespoir.
Et puis une nuit, on frappe à la porte. Il entend sa mère aller ouvrir, pousser un cri effrayant ; il se précipite ; devant la porte de la maison, Melchior est là, étendu sur une civière. Il s'est noyé.

La mort de son père éveille Christophe, le sort de sa torpeur. Mais sa mère Louisa, elle, perd le sens de sa vie. Elle devient vieille. Elle n'a plus de mari à soutenir, d'enfants en bas à âge. Elle n'a plus goût à la vie.
Christophe s'occupe d'elle, lui promet de rester avec elle.

L'argent vient à manquer... On se décide à aller emménager dans un appartement, au-dessus de chez des vieux amis.
Adieu, belle maison, adieu souvenirs de la gloire passée des musiciens Krafft !
Dans la nouvelle maison, loin du fleuve, il y a du bruit, de l'inconfort. Christophe est assailli par une crise intérieure : il ne croit plus en Dieu !
Et puis tout son être est mangé par une étrange métamorphose. C'est l'adolescence, la vraie, fracassante, qui s'immisce en lui et lui fait risquer de perdre tout ce qu'il avait construit.
Alors se pose une nouvelle question, qui terrasse toutes les autres, qui met sa vie en jeu.
Qui est-il vraiment ?

 

13 janvier 2012

Officiants
Mavra, Vincent St, Dominique, Vincent P, Laure, Théo, Jérémie, Edith

Stupeur totale dès le début de la lecture. Notre éthéré Jean-Christophe, ébloui par la beauté des nuages, assailli par d'étranges flux intérieurs, se jette sur une paysanne dans un champ ! La jeune fille le griffe, le rue de coup, s'en débarrasse. Christophe abattu se terre plusieurs semaines chez lui. Mais, en face de chez lui, habite Sabine. Elle est belle et libre et mystérieuse, jeune veuve avec une fillette. Ils prennent contact tout doucement, quelque chose va avoir lieu... Et nous finissons la lecture par un profond abattement. Sabine est morte en l'absence de Christophe.
Dernier paragraphe : "Chacun remonte à son tour le calvaire des siècles. Chacun retrouve l'espoir désespéré des siècles. Chacun remet ses pas dans les pas de ceux qui furent, qui luttèrent avant lui contre la mort, nièrent la mort, - sont morts."

 

10 janvier

Officiants
Anthony, Laure, Dominique, Mavra, Aurélie, Vincent P, Emilie, Alexandre, Francis, Emmanuel, Edith

Jean-Christophe s'enferme en lui-même après le deuil de Sabine, jusqu'à ce qu'il rencontre dans un bois une jeune femme délurée en train de manger des prunes. Avec Otto, avec Minna, avec Sabine, tout avait été si platonique que nous avons été étonnés par nos jeunes amants dont la première nuit fut si torride. Au réveil, Christophe trouve Ada laide, mais quand elle s'éveille elle semble à nouveau belle et l'histoire d'amour se poursuit. La bourgeoisie de la ville est choquée, Christophe se fâche avec ses logeurs qui le critiquent devant sa mère. Il se fâche tellement fort que Christophe et sa mère Louisa doivent trouver une autre maison.
Au moment du déménagement, réapparait Ernst, un des jeunes frères de Christophe. Criblé de dettes, sans rien, malade, il est accueilli comme le fils prodige par Louisa et Christophe, qui ne savent pas qu'il est manipulateur. Christophe présente Ada à Ernst : perfides, ils sortent ensemble pour narguer Christophe. La séance s'est terminée sur la stupeur douloureuse de Christophe qui vient de le comprendre.

 

17 janvier 2012

Officiants
Mavra, Laure, Dominique, Sophie, Théo, Edith

Trompé par son amante Ada et par son frère Ernst, Christophe plonge dans une vie de débauche jusqu'à la visite de l'oncle Gottfried, le frère de sa mère, humble colporteur qui lui rappelle en quelques mots que Christophe vaut mieux que cela.
Christophe s'éveille alors à nouveau à lui-même et se remet à la création musicale. Il éprouve de grandes déceptions en réalisant que l'oeuvre des plus grands maîtres allemands ne sont pas exemptes de facilités, de fadaises. Il clame bien haut son mépris et décide, lui, d'être au-dessus de tout ce qui a pu être composé avant lui. Il énerve ses collègues par son arrogance et au moment où nous avons terminé la séance, Jean-Christophe achève la répétition générale avec ses musiciens, juste avant le premier concert où il s'exposera comme compositeur devant la ville entière, pour la première fois.

 

24 janvier

Officiants
Mavra, Vincent St, Dominique, Emilie, Vincent P, Aleixandre, Emmanuel, Edith

Le premier concert de Christophe dans sa ville est un échec. Christophe en profite pour développer son amertume, déjà bien présente. Il rencontre dans un café un jeune homme, Franz Mannheim, fils du banquier juif Lothar Mannheim, qui l'initie à un petit groupes de snobs composés de fils de famille juifs et nobles, qui voudraient se prendre pour des anarchistes, des originaux, des révoltés.
Christophe rencontre Judith, la soeur de Franz. Ils se séduisent intellectuellement mais ne s'aiment pas. Christophe devient critique dans la revue du petit groupe de snobs.
Il éreinte les compositeurs, les musiciens, les divas, le public, ce qui effraye la ville. Il ose enfreindre le "tabou" journalistique et prend la liberté d'éreinter un confrère, de s'attaquer non plus aux musiciens, mais aux critiques musicaux. Alors, l'ostracisme commence.

 

8 février

Officiants
Mavra, Jérémie, Vincent P, Dominique, Laure, Emmanuel, Théo, Francis, Edith

Jean Christophe se rapproche d'un groupe de wagnériens patentés, mais se lasse vite de leur admiration servile pour un maître qu'ils estiment indépassable. Plus que jamais lassé de l'esprit allemand, il va un soir au théâtre voir une pièce jouée par une troupe française, sans espoir, les Françai

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samedi, 27 octobre 2012 | Lien permanent

Une vie parfaite

 

Quelqu'un m'a demandé de décrire comment se déroulerait ma vie si elle était parfaite. Sans contrainte, j'ai décrit une journée idéale.

 

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Le printemps et l'été, à 6h45, éveillée par le chant des oiseaux, je laisse lentement mes yeux s'ouvrir, ma conscience se dévoiler au jour. L'hiver, cela a lieu plus tard, vers sept heures et demi.

Je m'assois sur mon lit et prends un temps de gratitude pour la vie qui m'entoure ; je confie ma journée à Dieu s'il existe, je la dédie à la célébration de la beauté du monde, à la contemplation de ses mystères.

Et je me lève. En passant par la salle de bains je mets l'eau de la baignoire à couler, ensuite je vais préparer un petit-déjeuner : jus de fruits savoureux, café, croissants, confiture.

Le temps du petit-déjeuner équivaut à celui de la baignoire qui s'emplit d'eau. Je fais rapidement la vaisselle et vais prendre un bon bain chaud.

Je m'habille en sortant du bain, et vais me reposer sur mon lit ou sur un fauteuil et je lis ou je paresse.

Puis il est temps de bloguer un peu : j'allume mon ordinateur, écris des billets pour mes blogs durant une heure ou deux.

Je vais faire une promenade, quelques courses s'il y a besoin.

Quand je rentre à la maison, il est onze heures du matin : l'heure de regarder mes mails et d'y répondre, ce que je fais.

Ensuite, je vaque à toutes les occupations que je veux avant de préparer un bon repas, à moins que j'aie rendez-vous avec quelqu'un pour déjeuner dans la ville.

Après le déjeuner, conversation avec une éventuelle personne présente, ou lecture de Sidoine Apollinaire ou d'un auteur grec ou romain, pour puiser aux sources vives de la pensée de mes pères.

L'après-midi, un long temps sera consacré aux arts : à écouter ou créer de la musique, à regarder ou créer un film, à écrire.

Vers la fin d'après-midi il est temps, si je suis dans ma villégiature lovée dans la nature, d'aller faire un tour de vol libre (planeur, parapente, deltaplane) ou d'entrer dans l'océan dans ma combinaison qui me permet de rester nager et jouer dans l'eau sans trop sentir le froid.

Je rentre ensuite regarder à nouveau mes mails, préparer un dîner ou m'habiller pour sortir dîner si j'ai un rendez-vous dans la ville.

Il faut ajouter à cette vie si douce et si monotone un massage de temps en temps, chez un masseur indépendant installé dans la ville, et, de temps en temps, une coupure de ce rythme pour me plonger quelques jours dans l'étude d'une langue ou l'apprentissage des mathématiques, sans aucune idée de compétition ou de diplôme, pour la simple fête de l'esprit, pour la communion avec l'intelligence humaine qui trône dans le temps et domine tant de disputes stériles.

Presque tous les soirs, je suis couchée à dix heures ou dix heures et demi. Là, je lis une demi-heure dans mon lit, puis j'offre une prière de gratitude à la journée écoulée, à la nuit qui m'enveloppe.

Peu à peu, au fil des jours, des semaines, des saisons, une œuvre se créée. Il faut ajouter des trajets en train régulier, pour m'emmener de ma villégiature urbaine, citadine, à ma villégiature campagnarde, noyée au milieu des espaces naturels.

Jean de dos.JPG

Edith de CL

 

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jeudi, 12 avril 2012 | Lien permanent | Commentaires (6)

Ce qu'il dirent d'AlmaSoror

écureuil par Aline.jpg

Axel Randers,   Hélène Lammermoor, Tieri Briet, Katharina Flunch-Barrows, Guéric Belanc, collectif 127-B "Étoile de mer"


"L'agence AlmaSoror a peur du noir mais elle entre pourtant dans les ténèbres car la lumière qui en émane illumine".

Axel Randers


"AlmaSoror, je te hais".

Hélène Lammermoor


"On pourrait dire d'Alma Soror que c'est le plus beau journal du monde, au sens où l'entendait Michel Butel quand il sortait L'autre journal, puis Encore pendant la première guerre du golfe, deux aventures journalistiques qui façonnèrent, au fil des années 80 et 90, une idée assez fulgurante de la beauté et de l'attente. Alma Soror est de la même veine : un journal tellement beau qu'on ose à peine y croire, mois après mois. On écarquille les yeux en lisant le sommaire, on se dit qu'elle est folle et puis on lit, on se passionne et on se dit qu'elle a raison d'être folle. Mais la beauté d'AlmaSoror a cet éclat supplémentaire d'être à peu près clandestine".

Tieri Briet

Lire l'article entier de Tieri Briet ici : AlmaSoror, l'âme soeur


"Le journal d'AlmaSoror fut une promesse, il fut longtemps une promesse, il nous a laissé croire qu'un autre monde était possible puisqu'un autre journal existait. Et puis, comme toutes les belles initiatives, celle-ci a vite été récupérée. Edith de CL s'est laissée entraînée par la blogosphère ou par je ne sais quel amas de groupies et s'est mesquinisée, sans s'en rendre compte, sans le vouloir. Elle nous aura au moins permis de croire, un temps, à la possibilité d'un fente".

Katharina Flunch-Barrows


"Ceux qui font AlmaSoror alternent entre des périodes d'exultation et des périodes de léthargie. Ce qui fait que je ne peux m'empêcher d'aller voir régulièrement sur "http://almasoror.hautetfort.com/", s'il y a des nouvelles ambiances qui montent. On s'y baigne et on oublie un peu tout ce qui tourne autour. C'est bien. C'est tout."

Guéric Belanc

 

"L'âme soeur et la soeur nourricière

AlmaSoror est née en 2006, grâce à une soeur humaine dont le prénom contient le mot "anges", en hommage à une soeur canine dont le prénom contient le mot "ange".

Maison de production  indépendante, label de musique indépendant et blog, AlmaSoror s'attache à se détacher du temps administratif, du temps politique, de l'Empire psychologique et social pour entrer dans la Nuit sociétale. Là, émerge une zone imaginaire, où se tissent nos oeuvres.

Une des particularités d'AlmaSoror est d'être imparfait(e) : tout ce qu'AlmaSoror fait est imparfait. Alors, plutôt que de lutter contre les échecs et les ratages, activité qui nous paraissait équivalente à celle de dresser un barrage contre le pacifique, nous nous sommes dit(s) : chevauchons cette imperfection, puisque elle s'ébroue sans cesse entre nos mains et notre esprit. Chevauchons-là sans bride ni selle et voyons où elle nous mène.

Je crois qu'elle nous mènera au pays de crin blanc. Mais ce n'est qu'une supposition. Pour l'instant, nous chevauchons, la peau tendue, les yeux brûlés, les cheveux au vent glacé de l'hiver qui approche".

Présentation d'AlmaSoror, rédigée à Insomniapolis un jour de décembre 2010, par le collectif 127-B "Étoile de mer"

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samedi, 24 juillet 2010 | Lien permanent

“Hommes sans mère” d’Hubert Mingarelli

 

 

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Photo Sara pour VillaBar

 

“Ils s’éloignèrent sous la pluie et la brume, leurs silhouettes flottèrent et tremblotèrent comme s’ils s’enfonçaient dans l’eau, et, finalement ils échappèrent à la vue.”

On pourrait penser que l’auteur décrit la frustration d’hommes sans femmes à la lecture du livre. Mais il a choisi comme titre “Hommes sans mère”. Dans son livre, il y a bien un orphelin : c’est le gardien muet qui a perdu sa maman, non pas qu’elle soit morte, mais il l’a perdue quand il était enfant. 

Les deux héros, des marins, sont pourtant bien des orphelins - même s’ils ont sûrement une mère là-bas - : ils ressemblent à deux frères perdus dans la grande vie, le plus grand protège le plus petit qui fait des bêtises.

La couverture du livre, collection Points, est dessinée par Pierre Mornet : trois jeunes femmes identiques à toutes les femmes qu’il dessine.HSM.jpg L’éventail et le sein dénudé sont les seuls détails qui permet de ne pas les prendre pour des petites bourgeoises faisant tapisserie au bal.

Le style évoque Faulkner, en moins violent et plus tendre. Dans “La beauté des loutres” et “Le voyage d’Eladio”, les deux seuls livres que j’ai lu jusque là d’Hubert Mingarelli, il décrit l’âme des hommes à travers leur silence frustre. Ce sont des livres sur les hommes. Mais contrairement à la plupart des livres sur ce thème, les siens sont tendres. Même les femmes sont tendres, irréelles, mais tendres. Irréelles car elles ne sont pas préoccupées de leur corps qu’elles vendent pour vivre. Corps qui malheureusement dans la vie réelle se rappellent durement au souvenir des femmes à travers leurs organes de procréation, mais que les hommes oublient ou ignorent quand ils écrivent sur les femmes. Elles sont là, finalement, pour le décor. 

Souvenir. Rue Quincampoix où Paul et moi avons habité un an en 1974 ou 1975, nous avions fait connaissance d’une jeune femme, parmi toutes celles qui “faisaient le trottoir”, avec qui nous prenions des cafés au bar d’en bas, tenu par un vieil homme, sale et glauque qui habitait dans notre immeuble. La femme parlait de son “père” qui l’emmenait faire des voyages dans les pays chauds. Nous n’en croyions rien et espérions apercevoir ce “père” un jour ou l’autre, main en vain. Un jour elle disparut, peut-être à cause de nous.

C’est là que j’ai vu une femme de milieu très pauvre, très populaire, se mettre sur les rangs, dans cette rue. De femme du peuple démunie de tout, elle s’est transformée jour après jour, en pimpante jeune femme. Cela a commencé par un manteau rouge. Ensuite, ça a été le coiffeur. Elle a mis du temps a dénudé ses cuisses même en plein hiver, comme faisaient les autres, même les plus vieilles, grasses, peinturlurées, vulgaires.

C’étaient les bourgeois qui venaient, de quarante à soixante ans. Ils avaient de l’argent pour les payer. Rue aux Ours, une nuée d’arabes bouchait la rue, se tenant debout sans bouger, agglutinés les uns aux autres, mornes, silencieux, les yeux en direction de la rue Quincampoix. Je ne suis même pas sûre qu’ils regardaient les femmes. Ils venaient après le boulot, vers cinq heures du soir et ne bougeaient plus. On était obligé de traverser leurs rangs serrés pour rentrer chez nous. Ils étaient collés les uns aux autres, lourds, immobiles, muets et faisaient contraste avec la vie vulgaire et colorée de la rue, ponctuée par l’arrivée des bourgeois qui négociait le tarif avec une “fille” et la suivaient la regardant sans vergogne de la tête aux pieds en franchissant le seuil de l’immeuble pour s’enfoncer dans un long couloir mal éclairé d’une ampoule au plafond qui menait je ne sais où. Certains hommes avaient leur habituée. 

Parfois les femmes s’enfuyaient dans les maisons comme une nuée d’oiseaux. C’était un sifflement bref et strident qui provoquait cette échappée. Puis une voiture de flics remontait lentement la rue Quincampoix jusqu’à la rue aux Ours. Tout le monde s’écartait au fur et à mesure pour les laisser passer.

À d’autres moments, une voiture de sport décapotable débouchait du fond de la rue, conduite par un jeune homme, la trentaine, roux. Il garait la voiture et venait prendre le fric. C’était le souteneur. Nous le regardions de là-haut, de notre fenêtre, avec respect et inquiétude. C’était un homme puissant.

 

À mes enfants, votre mère

 

 

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jeudi, 18 novembre 2010 | Lien permanent

L'art de boire les vins

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Extrait d'une brochure intitulée Nos grands vins de Bordeaux, publiée Féret & Fils, Editeurs à la fin des années (19)40.

 

"Savoir boire le vin n'est donné qu'à un gourmet exercé ; savoir le faire boire à ses convives n'appartient qu'à un maître de maison doué d'un tact exquis et d'un goût éclairé.

Un tableau de maître a besoin d'une lumière et d'un entourage favorables pour faire apprécier le talent du peintre ; aucune femme, malgré sa beauté souveraine, n'ignore et ne dédaigne l'art de rehausser ses charmes par un accord harmonieux ou par un contraste savant. Il est, de même, une science et un art de boire les grands vins. Il faut d'abord connaître les caractères qui distinguent chacun des vins que l'on veut servir à ses convives. Il est nécessaire de savoir les offrir avec les mets qui seront de nature à les faire apprécier et d'observer la famme, savamment graduée, qui permettra de faire ressotir tous leurs mérites. Ils gagnent à être servis dans de grands verres en cristal fin.

Après avoir étudié le menu, on décidera quels sont les vins qu'on doit offrir et dans quel ordre ils seront dégustés. Les bouteilles choisies seront prises dans le caveau, apportées avec précaution dans l'office, dans la position verticale, après les avoir relevées délicatement et fait une marque pour savoir où se trouve le dépôt de lie. De cette façon, on évite un va-et-vient qui ne saurait manquer de se produire et troublerait le vin. En le versant soigneusement et dans la même position qu'elle avait dans le caveau, la très vieille bouteille ne sera décantée qu'au moment où elle devra être bue, pour conserver l'arôme et le bouquet du vin. Un vin dans la plénitude de ses qualités doit être décanté quelques heures avant d'être bu.

Le vin rouge doit être chambré, c'est-à-dire porté à graduellement à la température de la salle à manger.

Le flacon qui doit recevoir le vin doit être, en hiver, attiédi légèrement, mais il ne faut pas chauffer le vin. Quand on n'aura pas eu le temps de laisser prendre au vin rouge la température de l'appartement, on pourra y remédier en plongeant dans l'eau chaude les carafes qui serviront à décanter le vin.

Aucun des instruments inventés pour décanter le vin ne vaut la précaution de ne pas déplacr le dépôt et la sûreté de la main.

Dans quel ordre les vins seront-ils servis ?

La règle à observer pour la concordance des vins avec les mets est celle-ci : avec les poissons, les vins blancs ; avec les viandes, les vins rouges généreux ; à la fin du repas, les vins rouges les plus vieux ; au dessert, les vins blancs liquoreux et mousseux.

Les vins blancs seront d'autant plus fortement frappés qu'ils seront plus liquoreux.

Pour la dégustation des vins blancs liquoreux, tels que ceux de Sauternes, il y a parmi les gourmets deux écoles : l'une qui les préfère au dessert, l'autre, au commencement du repas, avec le poisson.

La règle pour la graduation des vins rouges est de commencer par les plus jeunes et les moins célèbres.

Voyons comment ces règles sont observées par les gourmets.

Quelques cuillerées de potage ont, par leur douce chaleur, préparé le palais et l'estomac à remplir leurs utiles et agréables fonctions. Avec les huitres, que suivent le saumon ou le turbot, apparaissent les grands vins blancs de Bordeaux, secs, demi-secs ou liquoreux ; mais, à notre avis, les vins blancs trop liquoreux au début d'un repas empêchent de bien goûter les bons vins rouges qui suivent. Dès que le poisson est enlevé, le sommelier cesse de verser les vins blancs.

Quand le chef sert les viandes, on offre les grands ordinaires et les bourgeois du Médoc, pleins de moelleux et de corps, à la robe purpurine, au bouquet parfumé. C'est avec les grosses viandes, le boeuf roti, le sanglier, le chevreuil, qu'on servira les excellents vins corsés et capiteux, premiers crus de Saint-Emilion ou de Pomerol.

Quand, vers le milieu du repas, les convives sont arrivés peu à peu à cet état de satisfaction où l'estomac, docile encore, ne manifeste plus d'impétueuses exigences ; où le goût, préparé par une savante graduation de sensations, est susceptible des impressions les plus délicates, les grands vins rouges du Médoc font leur entrée triomphale et le sommelier annonce avec orgueil des noms et des dates illustres.

Après ces vins, on peut encore savourer les Sauternes liquoreux et vider quelques coupes écumantes de Champagne".

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dimanche, 06 mars 2011 | Lien permanent

extrait d'un manifeste contre le travail

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Nous (Axel) présentons un extrait du manifeste contre le travail publié par le site anarchiste Kropot.

 

"Autrefois, les hommes travaillaient pour gagner de l'argent. Aujourd'hui, l'État ne regarde pas à la dépense pour que des centaines de milliers d'hommes et de femmes simulent le travail disparu dans d'étranges "ateliers de formation" ou "entreprises d'insertion" afin de garder la forme pour des "emplois" qu'ils n'auront jamais. On invente toujours des "mesures" nouvelles et encore plus stupides simplement pour maintenir l'illusion que la machine sociale, qui tourne à vide, peut continuer à fonctionner indéfiniment. Plus la contrainte du travail devient absurde, plus on doit nous bourrer le crâne avec l'idée que la moindre demi-baguette se paie. À cet égard, le New Labour et ses imitateurs partout dans le monde montrent qu'ils sont tout à fait en phase avec le modèle néo-libéral de sélection
sociale. En simulant "l'emploi" et en faisant miroiter un futur positif de la société de travail, on crée la légitimation morale nécessaire pour sévir encore plus durement contre les chômeurs et ceux qui refusent de travailler. En même temps, la contrainte au travail imposée par l'État, les subventions salariales et la fameuse " économie solidaire " abaissent toujours plus le coût du travail. On encourage ainsi massivement le secteur foisonnant des bas salaires et du working poor.

La "politique active de l'emploi" prônée par le New Labour n'épargne personne, ni les malades chroniques ni les mères célibataires avec enfants en bas âge. Pour ceux qui perçoivent des aides publiques, l'étau des autorités ne se desserre qu'au moment où leur cadavre repose à la morgue. Tant d'insistance n'a qu'un sens : dissuader le maximum de gens de réclamer à l'État le moindre subside et montrer aux exclus des instruments de torture tellement répugnants qu'en comparaison le boulot le plus misérable doit leur paraître désirable.

Officiellement, l'État paternaliste ne brandit jamais son fouet que par amour et pour éduquer sévèrement ses enfants, traités de "feignants", au nom de leur développement personnel. En réalité, ces mesures "pédagogiques" ont un seul et unique but : chasser de la maison le quémandeur à coups de pied aux fesses. Quel autre sens pourrait avoir le fait de forcer les chômeurs à ramasser des asperges? Là, ils doivent chasser les saisonniers polonais qui n'acceptent ces salaires de misère que parce que le taux de change leur permet de les transformer en un revenu acceptable dans leur pays. Cette mesure n'aide pas le travailleur forcé, ni ne lui ouvre aucune "perspective d'emploi". Et pour les cultivateurs, les diplômés et les ouvriers qualifiés aigris qu'on a eu la bonté de leur envoyer ne sont qu'une source de tracas. Mais quand, après douze heures de travail sur le sol de la patrie, l'idée imbécile d'ouvrir, faute de mieux, une pizzéria ambulante paraît nimbée d'une lumière plus agréable, alors l'"aide à la flexibilisation" a atteint le résultat néo-britannique escompté.

" N'importe quel travail vaut mieux que pas de travail du tout. "
Bill Clinton, 1998

" Il n'y a pas de boulot plus dur que de ne pas en avoir du tout. "
Slogan d'une affiche d'exposition de l'Office du pacte de coordination des
initiatives de chômeurs en Allemagne, 1998

" L'engagement civique doit être récompensé et non pas rémunéré. [.] Celui
qui pratique l'engagement civique perd aussi la souillure d'être chômeur et
de toucher une aide sociale.
Ulrich Beck, l'Âme de la démocratie,1997"

 

Ce n'était qu'un infime extrait portant sur cette ignominie de forcer les chômeurs à "travailler", c'est à dire à prouver qu'ils acceptent inconditionnellement le projet que la société a pour eux.

(note d'Axel Randers)

Le texte intégral est sur Le site Kropot

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mardi, 15 mars 2011 | Lien permanent

L'échec social et la mort

 

Philippe Ariès, dans L’homme devant la mort (tome I : le temps des gisants) discute la naissance de la notion d'échec social. Ses idées nous ont paru intéressantes et étranges. Voici un extrait.

 

"Chaque vie de pauvre a toujours été un destin imposé sur lequel il n’avait pas de prise.

Au contraire, à partir du XIIè siècle, chez les riches, les lettrés, les puissants, nous voyons monter l’idée que chacun possède une biographie personnelle".

Carvos Loup, Grande Epicerie de Paris

Phot Carvos Loup


«  Pour bien comprendre le sens que la fin du Moyen Âge a donné à cette notion de désillusion et d’échec, il faut prendre du recul, laisser un moment de côté les documents du passé et la problématique des historiens et nous interroger nous-mêmes, hommes du XXè siècle.

Tous les hommes d’aujourd’hui ont éprouvé à un moment de leur vie le sentiment plus ou moins fort, plus ou moins avoué ou refoulé, d’échec : échec familial, échec professionnel.  La volonté de promotion impose à chacun de ne jamais s’arrêter à l’étape, de poursuivre au-delà des buts nouveaux et plus difficiles.  L’échec  est d’autant plus fréquent et ressenti que la réussite est souhaitée et jamais suffisante, toujours reportée plus loin. Un jour vient cependant où l’homme ne soutient plus le rythme de ses ambitions progressives, il va moins vite que son désir, de moins en moins vite, il s’aperçoit que son modèle devient inaccessible. Alors il sent qu’il a raté sa vie.

C’est une épreuve qui est réservée aux mâles : les femmes la connaissent peut-être moins, protégées qu’elles sont encore par l’absence d’ambition, et par leur statut inférieur.

L’épreuve arrive en général autour de la quarantaine et elle tend même, de plus en plus, à se confondre avec les difficultés de l’adolescent à accéder au monde des adultes, difficultés qui peuvent mener à l’alcoolisme, à la drogue, au suicide. Toutefois, dans nos sociétés industrielles, l’âge de l’épreuve est toujours antérieur aux grandes défaillances de la vieillesse et de la mort. L’homme se découvre un jour comme un raté : il ne se voit jamais comme un mort. Il n’associe pas son amertume à la mort. L’homme du Moyen Âge, oui.

Ce sentiment d’échec est-il un trait permanent de la condition humaine ? Peut-être sous la forme d’une insuffisance métaphysique étendue à toute la vie, mais non pas sous la forme de la perception ponctuelle et subite d’un choc brutal.

Ce choc, les temps froids et lents de la mort apprivoisée ne l’ont pas connu. Chacun était promis à un destin qu’il ne pouvait ni ne souhaitait changer. Il en fut ainsi longtemps là où la richesse était rare. Chaque vie de pauvre a toujours été un destin imposé sur lequel il n’avait pas de prise.

Au contraire, à partir du XIIè siècle, chez les riches, les lettrés, les puissants, nous voyons monter l’idée que chacun possède une biographie personnelle. Cette biographie a d’abord été faite seulement d’actes, bons ou mauvais, soumis à un jugement global : de l’être. Ensuite, elle a été faite aussi de choses, d’animaux, de personnes, passionnément aimés, et aussi d’une renommée : de l’avoir. A la fin du Moyen Âge la conscience de soi et de sa biographie s’est confondue avec l’amour de la vie. La mort n’a plus été seulement une conclusion de l’être, mais une séparation de l’avoir : il faut laisser maisons et vergers et jardins.

En pleine santé, en pleine jeunesse, la jouissance des choses s’est trouvée altérée par la vue de la mort. Alors la mort a cessé d’être balance, liquidation des comptes, jugement, ou encore sommeil, pour devenir charogne et pourriture, non plus fin de la vie et dernier souffle, mais mort physique, souffrance et décomposition ».

 

 

Philippe Ariès

L’homme devant la mort

(tome I : le temps des gisants)

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dimanche, 24 juillet 2011 | Lien permanent | Commentaires (4)

Jour de Soldes à Pau

 

 

 

Salut la familia!


eh oui nous sommes vivants! nous avons effectivement survécu à la tempête. Ayant le sommeil assez lourd, je prenais un bain de soleil sur une plage antillaise quand les conditions se déchainaient autour de moi! J'ai loupé tout le spectacle!
Enfin du coup, point de randonnée ni de descente à grande vitesse sur les pistes enneigées des Pyrénées, mais je dois vous avouer que, la météo aidant, E a réussi à me traîner dans les magasins, à la recherche de pantalons!!!
Tout avait bien commencé: premier magasin, premier essai: parfait! voila de l'efficacité!
Tant qu'on y est, me dis-je, prenons en d'autres, ainsi n'aurai je pas à y retourner de sitôt!!!
Je n'ai aucun mal à convaincre E en prononçant le mot magique: S O L D E S!
Deuxième essai moins glorieux: mes abdominaux volumineux m'empêchent de fermer le bouton! C'est alors Qu'E a une inspiration que je qualifierai de... désastreuse!!! A peine lui ai je communiqué mon petit problème intime, la voila qui s'enfuit vers le centre du magasin en appelant bruyamment et devant une foule ébahie un vendeur et professionnel du pantalon! 
En moins de temps qu'il ne faut pour le dire (pour preuve: je n'ai même pas eu le temps de me cacher dans la cabine d'essayage), un jeune homme, l'occiput rasé de près, le menton affichant un négligé de quelques jours, pantalon moulant et tea-shirt échancré sur torse épilé, accourt et ajuste ses lunettes fluo pour mieux regarder mon arrière train ... 
"très joli", s'écrit il!
Moi, foudroyant du regard l'organisatrice de cette mascarade et reine de la délation, je serre les fesses...
Rouge de honte et de fureur, je marmonne quelques mots qui le font s'éloigner quelques instants à la recherche de la taille supérieure!
N'osant apostropher l'indélicate en public, qui ne se rend compte de rien, elle suit le pro, enfin persuadée qu'il me faut effectivement la taille au dessus.
Quant à moi, la terre entière me regarde rentrer maladroitement dans la cabine pour retirer le maudit froc!!
Les deux complices reviennent après que j'eusse retrouvé mes esprits, avec un pantalon d'une autre couleur, n'ayant pu mettre la main sur la taille supérieure du précédent...
Une fois enfilé, la taille étant acceptable cette fois, je ne dis trop rien, donnant pour tout avis une moue maussade, échaudé par ma première expérience!
L'affaire est presque conclue, le type m'a suffisamment maté et je me réjouis intérieurement de pouvoir très bientôt quitter cet endroit malsain ou je n'ai que trop trainé!!!
Mais fatale erreur! il était dit qu'E ne lâcherais pas si facilement sa proie et me ferait boire le calice jusqu'à la lie!
Considérant ma moue, sachant pourtant pertinemment qu'elle n'était que la manifestation d'une lassitude certaine, l'impertinente se ravise soudainement et clame haut et fort que la couleur du futal n'est finalement pas si plaisante, un peu démodée, et même carrément moche, limite insupportable!!!
Le tout bien évidemment en arrivant à la caisse, sur le point de payer, pantalon emballé, alors qu'une file d'attente interminable s'est formée derrière nous, avec pour conséquence directe qu'une foule immense assiste à la scène!!! On va se faire lyncher!!!! Je regarde le sol, à la recherche d'un défaut, puis le plafond, superbe...
Devant l'esclandre, le bonhomme de la caisse lève les yeux au ciel, considérant une bonne paire de farfelus. Son acolyte, celui aux lunettes fluos se précipite à la rescousse pour argumenter sur le produit qu'il tente de nous refiler!
"Mais il est très bien ce pantalon, et cette couleur est magnifique!"
Tournant son regard globuleux sur mon torse avantageux, écartant (lui même!) les pans de ma veste, il s'exclama devant le public enthousiaste que la couleur m'irait à merveille, moyennant le port d'une chemise... rose, par exemple!!!!
sentant mon teint rosir à vue d'œil, je reste sans voix!
E aussi, retenant péniblement un fou rire, sachant évidemment ce que donne à penser une telle évocation...
Une chemise rose! non mais je rêve!!!
N'y tenant plus, je prends mes jambes à mon cou, abandonnant femme et pantalons, me promettant qu'on ne m'y prendrait plus, et retrouvant enfin à la maison mes vieux jeans si seyants!!
Voila mes aventures peu glorieuses d'un WE de tempête! Le Dimanche a été beaucoup moins riche en terme d'émotions, puisque j'étais à mon avantage pour initier E au bricolage...


Kenavo

Olivier du Chélas

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jeudi, 28 mai 2009 | Lien permanent | Commentaires (1)

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