L'énergie du désespoir (lundi, 16 novembre 2015)

Je m'éveille le matin dans la ouateuse lumière blanche de novembre et je décide de ne pas m'étendre sur les événements que j'ai à-demi vécus, que d'autres n'ont pas vécus du tout, que d'autres encore ont tellement vécu qu'ils en sont morts.

Le temps passe sans que je parvienne à l'attraper, à en tirer un peu de sel, un peu de miel.

Je bois un café à 13h58 à côté d'un cactus nommé Challwa et d'un érable bonzaï nommé Tolstoï, la fougère aussi se tient tranquille, dans sa verdure chatoyante, comme un rappel de la lointaine campagne. Par la baie vitrée, les tours alternativement se couvrent d'un duvet d'ombre ou d'éclats de lumière.

Le soleil n'est pas absent de ce jour où se mêlent, dans un cœur physiquement jeune et moralement instable, les douleurs collectives et le naufrage individuel.

Je décide de ne pas commenter cette folie qui consiste à bombarder d'autres villes, dans d'autres pays, au nom des droits de l'homme et de la paix, et à déplorer les meurtres et la peur sur notre ville au nom des droits de l'homme et de la paix. Les poids et les mesures sont à la démesure arbitraire de nos subjectivités moulées par les médias.

J'ai envie de pleurer avec la foule en souriant béatement, j'ai envie de me retirer dans mon austère stratégie de liberté individuelle.

Que pleures-tu, toi qui nous serre les mains avec émotion ? Ton compte bancaire saigné par ton incurie et la conjoncture économique, ou ces traces de sang sous les bouquets de fleurs ?

Les deux, mon colonel de l'armée désarmée. La confusion des peines soulage celui qui se taisait. Un désespoir a ses lueurs s'il contient ne serait-ce qu'une parcelle d'énergie de vivre.

 

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