Fragments d'un discours suicidaire (vendredi, 31 mai 2013)

In memoriam Erika

Elle s'endort chaque soir dans un espoir réchauffé au vin, au développement personnel et flouté par la fatigue.

Elle s'éveille tous les matins avec l'idée plus nette, plus calme que la veille, du suicide.

Elle sonde son incapacité à travailler, à gagner sa vie, à vivre d'une manière autonome et l'âge fatidique qui approche a des airs de guillotine.

L'irrésolution de son art, l'échec de la transmission sont deux griffes qui pincent son coeur de façon toujours plus aigüe.

Le souci de santé qui la hante, heure après heure, jour et nuit, l'entraîne dans des affres de peur, de malêtre et de honte qui rongent sa vitalité comme la rouille érode le métal.

La bancalité des rapports sensuels, les amitiés disloquées ou insatisfaisantes, la dépendance infantile vis-à-vis de ses proches baignent une vie qui ressemble de moins en moins au rêve de l'enfant.

L'horizon semble barré par le rétrécissement de l'espoir personnel, professionnel et social.

Extérieurement, elle fait la fête. Intérieurement, elle implose sous la pression de la défaite.

Le mensonge enrobe tout ce qu'elle touche. Elle ne se ment pas (trop) à elle même, elle ment aux autres, et quand elle ne ment pas, elle sombre. Là où il y a mensonge, il y a possibilité de faire semblant de vivre. Là où il y a vérité, monte le désespoir.

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("Déjà je ne puis plus offrir
Une seule parcelle des trésors de mon âme.
Qui en voudrait ?

Jurij Galanskov, IN Le manifeste humain" Trad par Jil Silberstein)

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