Ces bêtes qu’on abat : Un chien dans un fossé (dimanche, 09 décembre 2012)

 C'est une saga qu'aucun scénariste n'aurait le courage d'écrire. Les films les plus gores ne sont que des comédies Walt Disney en comparaison. Les plus courageux d'entre vous auront sans doute du mal à la suivre jusqu'au bout...

C'est la saga interdite aux profanes.

AlmaSoror est fière de proposer sur son site l'extraordinaire saga de la viande. Celle qu'on ne lit jamais, celle dont on entend jamais parler, celle qui a lieu dans des endroits où l’œil citoyen ne peut pénétrer.

Si vous ne vous sentez pas capable de la lire, sachez que l'enquêteur l'a écrite. Sachez que des milliards d'individus la vivent aux portes de nos villes. Si vous n'êtes pas capable de la lire et que vous êtes capable de consommer le résultat, alors vous êtes un merveilleux citoyen du Meilleur des Mondes.

Voici donc le journal de Jean-Luc Daub, enquêteur dans les abattoirs français.

 Ces bêtes qu'on abat peut s'acheter en version imprimée :

Ou bien se lire sur cette page qui lui est dédié.


Un chien dans un fossé

 

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Transport de canards pour l’abattoir.
Phot Jean-Luc Daub

 

Un jour, alors que j’étais en déplacement dans le Finistère, je fis une drôle de rencontre sur le bord de la route. Après avoir visité un abattoir, je cherchais mon chemin en voiture. Je fus amené à faire un demi-tour sur un petit croisement. Après une manœuvre bien exécutée, j’allais reprendre ma direction quant une forme aux taches blanches attira mon regard vers le fossé. C’était un chien, apparemment mort.

 

Quoi de plus banal qu’un chien mort au bord d’une route, qui aurait été renversé par une voiture ? Tellement banal que le conducteur de la voiture qui me précédait n’avait pas jugé utile de vérifier l’état du chien. Pour ma part, il fallait que je m’en rende compte. Il était étalé dans le fossé, maigre, et semblait bien mort. Mais quand je me suis penché sur lui, il m’a surpris en remuant sa queue en signe de contentement. Il semblait heureux de voir quelqu’un, mais il était dans l’incapacité de se lever. Ce chien avait dû marcher durant plusieurs jours sans s’alimenter et avait dû tomber d’épuisement dans ce fossé.

 

Lorsque je lui demandais ce qu’il faisait là, il remuait encore plus la queue. C’était émouvant. Je pris une couverture pour l’enrouler et je le mis dans ma voiture. Je partis en direction du centre-ville à la recherche de la mairie. Après avoir fait plusieurs fois le tour du centre, j’ai enfin trouvé l’établissement administratif. Je suis rentré avec le chien et j’ai demandé à la secrétaire d’accueil quelle était la démarche à suivre lorsque l’on trouve un chien. Elle me demanda tout simplement, sans y jeter un coup d’œil, de le déposer dans le bâtiment des services techniques. Là mon sang ne fit qu’un tour. Je lui ai demandé si elle plaisantait, car le chien était en mauvais état et avait besoin de soins. Elle m’indiqua alors l’adresse d’un vétérinaire.

Je partis à la recherche du vétérinaire. Je fus accueilli dans sa clinique. Je lui expliquai la situation et lui présentai le chien. Ronchonnant, pas très content d’être sollicité pour un chien perdu, il l’examina quand même. Il me confia qu’il allait le mettre sous perfusion. Je lui demandai ce qu’il comptait faire de l’animal une fois qu’il serait remis sur patte. Il me répondit qu’il le ferait prendre par un refuge qui le proposerait à l’adoption. J’ai caressé le chien, remercié le vétérinaire, et suis reparti sur la route vers d’autres aventures, cependant peu rassuré sur le devenir du chien. Si j’avais pu, je l’aurais adopté, mais j’avais déjà le mien dans la voiture. Aujourd’hui, je regrette de ne pas l’avoir pris avec moi, j’aurais été plus tranquille quant à son devenir.

 

 

 

 

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