Je n'abats jamais - Les calcinés (samedi, 07 décembre 2013)

Les Calcinés sert dans un bar du sixième arrondissement et boit après le travail dans un bar du septième arrondissement.

En décembre 2013, il répond à l'appel d'AlmaSoror, qui propose d'écrire un texte contenant :

oh mon âme
le plus vieil été du monde
c'était si pur
ta mère absente
coco


Je n'abats jamais

 

Je n'abats jamais mon jeu, ni mon ennemi. Je n'abats que le travail de chaque jour, j'avance bardé, armuré, chamarré de plomb et d'argent vers des lignes d'épure où je planterai ma tente finale, à l'horizon des crépuscules. Peu importe la douleur tiède des éveils de défaite, des gueules de bois des lendemains de fête, j'avance lentement vers le plus vieil été du monde.

Au temps des jeunesses, nous avons partagé des espoirs hilarants, oh mon âme, c'était si pur de croire en un avenir soyeux. C'était si bête aussi, oh mon corps, empli de cicatrices et vieilli, aujourd'hui, tu pleures ta mère absente, son odeur Coco Chanel, son allure coquette, ses blagues cocorico, des larmes sans sel se souviennent des moments sucrés.

Car plus rien ne reste des hivers où nous espérions. La vie a rempli son rôle d'éducatrice : je sais désormais que, soldat voué à une mort vaine, j'avance sans plier ni blesser vers la porte fermée, vers l'impasse dernière, vers le plus vieil été du monde. Je n'abats jamais mon ennemi, je n'abats jamais mon jeu. Je ne bats que la carte du Tendre, enfuie d'un tarot taré.

 

Les Calcinés

 

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