Éden (dimanche, 23 juin 2013)

 à ceux qui paradent le jour et prennent la poudre d'escampette la nuit,

à ceux qui veulent s'enfuir avec leur amour là où nul dépit n'est possible, là où l'angoisse n'existe pas,

fraternellement.

la dernière auberge, esther mar, edith de cornulier

Tu marches sur le trottoir de la rue du Quotidien, quand soudain une femme t'interpelle. Différente de toutes et de tous, bien qu'elle ne cherche pas à attirer le regard. Belle, son regard pur et doux déploie son rayon d'intelligence sur le monde, son allure invite ton cœur au voyage, sa voix suscite chaque partie de ton corps invécue. Son mouvement quelquefois te donne un coup de fouet, quelquefois fait fondre tes hanches. Ses mains évoquent des passions anciennes que tu devines. Ses mots soulignent sa majesté suprême. Elle est une forteresse imprenable. Un secret l'habite et tu sais que ce mystère t'habitera toujours toi aussi désormais. 

Elle te hante.

Tu cherches sur Internet en ces temps virtuels du deuxième millénaire ; tu cherches et tu trouves la clef qui ouvre la porte du paradis.

Tu parcours les murs hauts d'un un merveilleux jardin, dont le charme et la luxuriance, la fraîcheur et la tiédeur t'enivrent ; couleurs, senteurs, t'éblouissent. Nulle part, la trace d'un serpent ; nulle part, la trace d'une entrave. 

De ce jardin dont tu n'avais pas la clef, tu te croyais exclu(e) à jamais ; tu serres désormais la clef contre ton coeur. Où est la porte ?

Tes pas t'amènent devant la porte dérobée à laquelle tu n'osais pas croire. Tu entres dans cet Eden.

Magie de ton souffle qui se transforme sous l'effet de la beauté ; magie de la beauté qui se métamorphose sous ton souffle. Tes premiers pas t'immergent au creux du paradis.

Alors la voix du Vide injecte ces paroles dans ton sang : «N'entre pas. C'est trop parfait, impie. Tu trahis tes deux cannes, l'Orgueil et le Sarcasme !» - et tu fais demi-tour.

Rue du Quotidien, seul le Vide ricane. Personne ne remarque rien de tes yeux horrifiés par ta propre démission.

Tu ne te regardes pas dans les vitres des magasins pour ne pas lire sur ton visage livide la cruelle question que te pose ton âme sans répit : «Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi ?»

la dernière auberge, esther mar, edith de cornulier

Photos de VillaBar, La dernière auberge

 

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