Anne (lundi, 05 octobre 2009)
Anne qui se mélange au drap pale et délaisse
 Des cheveux endormis sur ses yeux mal ouverts
 Mire ses bras lointains tournés avec mollesse
 Sur la peau sans couleur du ventre découvert.
  
Elle vide, elle enfle d'ombre sa gorge lente,
 Et comme un souvenir pressant ses propres chairs,
 Une bouche brisée et pleine d'eau brûlante
 Roule le goût immense et le reflet des mers.
  
Enfin désemparée et libre d'être fraîche,
 La dormeuse déserte aux touffes de couleur
 Flotte sur son lit blême, et d'une lèvre sèche,
 Tête dans la ténebre un souffle amer de fleur.
  
Et sur le linge où l'aube insensible se plisse,
 Tombe, d'un bras de glace effleuré de carmin,
 Toute une main défaite et perdant le délice
 A travers ses doigts nus dénoués de l'humain.
  
Au hasard! A jamais, dans le sommeil sans hommes
 Pur des tristes éclairs de leurs embrassements,
 Elle laisse rouler les grappes et les pommes
 Puissantes, qui pendaient aux treilles d'ossements,
  
Qui riaient, dans leur ambre appelant les vendanges,
 Et dont le nombre d'or de riches mouvements
 Invoquait la vigueur et les gestes étranges
 Que pour tuer l'amour inventent les amants...
  
Paul Valery
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Commentaires
Ondine-Lilas, vous êtes magnifique. Depuis que je vous ai vue (d'abord en photo, puis en vrai), je ne peux pas m'empêcher d'être amoureux de vous. Et vous m'avez vous vu ? Je suis vieux, petit, j'ai des lunettes et je n'osais pas vous regarder.
Écrit par : Anonymus | mardi, 06 octobre 2009
Je ne comprends pas la dernière strophe.
Écrit par : Léo Fassi | mardi, 06 octobre 2009
Elle est belle, pourtant.
Écrit par : David et Edith | jeudi, 08 octobre 2009