Discours de Dortmund (samedi, 25 avril 2009)

Fragment

La rubrique Fragment offre des morceaux de textes classiques, connus ou inconnus, qu'il est heureux de relire.
LE DISCOURS DE DORTMUND

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phot VillaBar

Les papiers
de Stresemann, vol. 1
La bataille de la Ruhr,
la conférence de Londres, 1923-1924,
Traduction de Henri BLOCH et Paul ROQUES, Paris, Plon, 1932


21 février 1923

« Si l’existence de l’Allemagne est nécessaire à l’Europe, si l’Europe est indispensable au monde, il faut qu’une autre atmosphère règne autour de nous »

Gustav Stresemann, 23 novembre 1923

Gustav Stresemann, député allemand, se rend à Dortmund, dans la Ruhr, le 21 février 1923 pour protester contre l’occupation par les Français de ponts dans la Ruhr et la publication d’une note franco-belge du 9 février interdisant la présence de ministres allemands dans le bassin de la Ruhr.
Gustav Stresemann voulait éviter à tout prix la montée en puissance des "communistes" et des "racistes" (nazis) en Allemagne.
Ce discours nous éclaire sur la façon dont les hommes du début du siècle vivaient les drames que nous connaissons de loin.


Pendant la guerre on lançait dans nos lignes des tracts, dans lesquels on expliquait à nos soldats qu’ils combattaient pour une cause injuste. Beaucoup l’ont cru. Ils ajoutèrent foi à ce mensonge, que nos ennemis ne combattaient pas contre le peuple allemand, mais pour la démocratie, qui nous délivrerait d’une tyrannie insupportable ; ils ajoutèrent foi à l’assurance que, lorsque nous aurions changé la forme de notre gouvernement, l’ennemi nous tendrait la main et que, comme disait Wilson, il n’y aurait plus ni vainqueur ni vaincu. Les ennemis nous promettaient le droit de disposer de nous-mêmes, et une décision équitable au sujet de nos colonies ; ils affirmaient que pour le monde entier le militarisme allemand était un cauchemar, qu’une ère nouvelle de la civilisation allait commencer. Ces paroles, des milliers d’Allemands les entendirent et les crurent. Au retour de nos troupes on a pu même lire dans une ville l’inscription suivante : « Soyez les bienvenus, vaillants soldats, Dieu et Wilson se chargeront du reste. »

Or, qu’est-il advenu ? Le monde est-il délivré du cauchemar du militarisme, maintenant qu’il n’y a plus d’armée allemande ? A-t-on désarmé, lorsque l’Allemagne eut livré ses armes ? Beaucoup de gens ont déclaré qu’il n’était pas moral de construire des sous-marins pour couler des vaisseaux ennemis. Mais les autres nations ne construisent-elles pas des sous-marins, après nous les avoir interdits ? Ne se vantent-elles pas d’augmenter leur flotte aérienne et de fabriquer des explosifs dont l’effet ne peut être surpassé ? Et tout cela ne se fabrique certes pas pour le progrès de l’humanité. Tout ce que nos adversaires nous ont reproché et qu’ils disaient dirigé contre l’humanité, ils s’en servent maintenant. Tout ce qu’ils nous ont conté n’était que mensonge ; nous avons été fous de ne pas nous boucher les oreilles avec de la cire, d’avoir écouté ce chant de sirènes et d’avoir déposé les armes avant conclusion de la paix. Celui qui n’en veut ni à notre droit, ni à notre liberté, n’a pas à craindre l’Allemagne ni maintenant, ni dans l’avenir. Les puissances signataires du traité de Versailles, qui nous ont poussés à déposer les armes, sont par conséquent moralement responsables de la situation actuelle de l’Allemagne. (…)


Gustav STRESEMANN

Suite à ce discours, Gustav Stresemann est contraint de FUIR la Ruhr avec un faux passeport...

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