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samedi, 21 août 2010

esclaves français à Alger

 

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Alger la blanche
Voici un extrait d'une lettre de l'abbé Héraut à la reine de France. L'abbé Héraut était membre de l'Ordre de la Trinité et Rédemption des captifs, dont la mission était de racheter les esclaves européens aux arabes.


Les larmes et clameurs des Chrestiens françois de nation, captifs en la ville d’Alger en Barbarie, adressées à la reine régente, par le Père Lucien Heraut, de l’Ordre de la Trinité et Rédemption des Captifs. An 1643


"Ce n’est pas, Madame, une simple exaggeration, mais une verité trop conneue, non seulement de ceux qui ont traversé les mers, et mouillé l’ancre avec quelque bonheur dans cette terre barbare de nos cruels ennemis, mais encore beaucoup mieux de ceux, qui par malheur sont tombés dans les griffes de ces Monstres Affricains, et qui ont ressenty, comme nous, leur infernalle cruauté, pendant le long sejour d’une dure captivité, les rigueurs de laquelle nous experimentons de jour en jour par des nouveaux tourments: la faim, le soif, le froid, le fer, et les gibets, ont esté autrefois les instruments des plus cruels et dénaturés bourreaux du monde contre les premiers Chretiens, mais il est certain que les Turcs et Barbares encherissent aujourd’hui par-dessus tout cela, inventans journellement de nouveaux tourments, contre ceux qui persistent courageusement en la confession de nostre saincte Religion, ou qu’ils veulent miserablement prostituer, notamment à l’endroit de la jeunesse, captive de l’un et l’autre sexe, afin de la corrompre à porter à des pechés si horribles et infames, qu’ils n’ont point de nom, et qui ne se commettent que parmys ces monstres et furies infernales et ceux qui resistent à leurs brutales passions, sont écorchez et dechirez à coup de bastons, les pendants tous nuds à un plancher par les pieds, leur arrachant les ongles des doigts, brullant la plante des pieds avec des flambeaux ardents, en sorte que bien souvent ils meurent en ce tourment. Aux autres plus agés ils font porter des chaisne de plus de cent livres de poids, lesquelles ils traisnent miserablement partout où ils sont contrains d’aller, et ce pesant fardeau est d’ordinaire pour les riches de qui ils esperent une bonne rançon, et apres tout cela si l’on vient à manquer au moindre coup de siflet ou au moindre signal qu’ils font, pour executer leurs commandements, nous sommes pour l’ordinaire bastonnez sur la plante des pieds, qui est une peine intollerable, et si grande, qu’il y en a bien souvent qui en meurent, et lors qu’ils ont condamné une personne à six cent coups de bastons, s’il vient à mourir auparavant que ce nombre soit achevé, ils ne laissent pas de continuer ce qui reste sur le corps mort.

Les empalements son ordinaires, et le crucifiment se pratique encore parmy ces maudits barbares, en cette sorte ils attachent le pauvre patient sur une manière d’echelle, et lui clouent les deux pieds, et les deux mains à icelle, puis après ils dressent ladite Eschelle contre une muraille en quelque place publique, où aux portes et entrées des villes pour la plus grande confusion du nom Chretien, et demeurent aussi quelque fois trois ou quatre jours à languir sans qu’il soit permis à aucun de leur donner soulagement.

D’autres sont écorchez tous vifs, et quantitez de bruslez à petit feu, specialement ceux qui blasphement ou mesprisent leur faux Prophete Mahomet, et à la moindre accusation et sans autre forme de procez, sont trainez à ce rigoureux supplice, et là attachez tout nuds avec une chaine à un poteau, et un feu lent tout autour rangé en rond, de vingt cinq pieds ou environ de diametre, afin de faire rostir à loisir, et cependant leur servir de passe temps, d’autres sont accrochez aux tours ou portes des villes, à des pointes de fer, où bien souvent ils languissent fort long temps.

Nous voions souvent de nos compatriots mourir de faim entre quatre murailles, et dans des trous qu’ils font en terre, où ils les mettent tout vif, et perissent ainsi miserablement. Depuis peu s’est pratiqué un genre de tourment nouveau à l’endroit d’un jeune homme de l’Archevesché de Rouen pour le contraindre a quitter Dieu et nostre saincte Religion, pour laquelle il fut enchaisné avec un cheval dans la campagne, l’espace de vingt-cinq jours, à la merci du froid et du chaud et quantitez d’autres incommoditez, lesquelles ne pouvant plus supporter fit banqueroute à notre saincte loy".

 

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